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JP Mercier: "S’il y a un endroit où les travailleurs doivent commander c’est dans leur syndicat"

LO syndicalisme

Lien publiée le 6 octobre 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

« S’il y a un endroit où les travailleurs doivent commander c’est dans leur syndicat » | L’Anticapitaliste (lanticapitaliste.org)

Entretien. Lors de la fête de l’Humanité, le 10 septembre dernier, Philippe Poutou a interviewé Jean-Pierre Mercier, de passage devant le stand du NPA, pour lui permettre ainsi qu’à ses camarades de la CGT PSA Poissy d’expliquer la tentative d’exclusion d’une équipe syndicale par la fédération.

Philippe Poutou : Comment veux-tu raconter cette histoire-là aujourd’hui et faire le plus de bruit possible ?

Jean-Pierre Mercier : Merci au NPA d’avoir accepté de parler de notre affaire parce que c’est une affaire extrêmement grave dans le milieu militant et syndical. C’est l’histoire d’une fédération, celle de la métallurgie, qui veut exclure tout un syndicat, celui de la CGT PSA Poissy, un syndicat historique avec 60 ans de bagarres contre le patron, de bagarres syndicales contre la dictature du patron qui a essayé d’avoir sa peau de décennie en décennie.

Là, les coups viennent de notre propre CGT, de notre propre fédération qui a créé de toutes pièces, de manière complètement illégale et anti-statutaire, une deuxième CGT à l’usine de PSA Poissy et qui s’apprête à demander à un juge, le juge de Bobigny, le 20 octobre, de nous exclure purement et simplement de la CGT après nous avoir envoyé des huissiers de justice. Cela veut dire que nos cotisations servent à payer des huissiers de justice au domicile des militants pour se faire assigner au tribunal.

Notre combat est nécessaire, il est vital, c’est le combat de la démocratie syndicale, la démocratie ouvrière. Nous défendons deux principes : il faut des syndicats de combat qui combattent le patronat, le gouvernement, leur politique, et il faut la démocratie ouvrière, la démocratie syndicale. Cela veut dire que c’est la base qui doit décider. Cette fameuse phrase qui fait bien dans les congrès,« Le syndiqué acteur décideur », ne doit pas rester une phrase de congrès. C’est une bataille quotidienne pour l’imposer à des structures qui veulent en fait reprendre en main des syndicats, reprendre en main des groupes entiers de syndicats. Ce n’est pas seulement le syndicat PSA Poissy CGT qui est visé, ce sont aussi les responsables du groupe CGT PSA. J’ai été démandaté. Cédric Brun, le délégué syndical central (DSC) adjoint, qui est le secrétaire de la CGT PSA Valenciennes, va aussi être démandaté, parce qu’il n’est pas dans la ligne de la fédération. Il s’agit d’une reprise en main, d’une tentative de reprise en main des structures fédérales sur des syndicats qui ne leur paraissent pas assez obéissants et trop indépendants. Cette bagarre concerne le milieu militant mais aussi les travailleurs qu’ils soient syndiqués ou non parce qu’il en va de l’avenir.

Philippe Poutou : Est-ce que tu veux dire que ce qui vous arrive est une illustration particulière et grave d’un gros problème qu’on a dans le syndicat depuis très longtemps qui est un problème d’orientation, un problème de combativité ou de manque de combativité du côté de la direction de la confédération ? Cette confrontation-là traduirait peut-être (on est bien obligé d’interpréter ce qui se passe) une volonté de reprendre tout ça en main, de contrôler, d’éviter qu’il y ait trop de discussions par en bas, d’éviter qu’on puisse arriver à critiquer réellement l’orientation du syndicat et à se poser les problèmes de la société et de la guerre sociale menée par le patronat et comment on y répond : le dialogue social, la routine dans laquelle on est tous plus ou moins englués d’un côté, ou alors le combat dans les usines, large, la convergence des luttes, de l’autre ? Ce n’est pas juste un problème disciplinaire, ce sont aussi des questions de fond…

Jean-Pierre Mercier : Tout à fait. Ce sont des questions politiques de fond qui doivent être tranchées par la base. Ce sont les syndiqués, ce sont les syndicats dans les entreprises, dans les usines, dans les groupes : quelle orientation syndicale on prend ? Quelles revendications on défend ? Est-ce qu’on signe ou pas les accords avec le patron ? Ce ne sont pas les oukases, les diktats de la fédération qui doivent gérer la vie des syndicats, la vie des groupes et la vie des syndiqués. Le travailleurs sont commandés par les chefs. Ils se font commander par les patrons, par les flics, par l’État. S’il y a un endroit où eux ils doivent commander, c’est dans leur syndicat. Ce sont eux qui sont dans la tranchée, ce sont eux qui sont dans les ateliers, dans les bureaux ; ils doivent commander, ils doivent pouvoir dire : « Nous voulons ça, nous ne voulons pas ça ; nous voulons tel représentant ou l’autre ». C’est à eux de décider ! Les méthodes de la fédération de la métallurgie en ce moment, le cours qu’elle prend, la politique de fond ce n’est pas seulement à propos de PSA qui va être attaquée. Après, il y aura Renault, Airbus, etc. Ils vont vouloir faire le ménage partout dans la métallurgie, et peut-être au-delà. Donc, c’est vraiment un combat essentiel : celui de la démocratie syndicale. Il est essentiel pour l’avenir. Les travailleurs doivent faire l’apprentissage de la démocratie syndicale pour pouvoir imposer la démocratie dans leurs luttes plus tard.

Philippe Poutou : La question qui est posée c’est celle de prendre ses affaires en main, de s’auto-organiser, de décider de son équipe syndicale, de sa propre organisation. C’est particulier de faire face à cette attaque de la bureaucratie alors qu’en fait on a envie de discuter, de trouver des réponses à tous nos problèmes. À PSA, c’est toujours les problèmes de licenciements, de menace sur l’avenir des usines, le problème des salaires, des conditions de travail, la souffrance au travail, les retraites. Enfin, tout ce qui se passe autour, quoi ! C’est complètement dingue de la part de la bureaucratie de prendre le risque de contribuer à détruire encore plus une organisation syndicale déjà bien affaiblie. Quel est le moral des militants là-dedans ? Comment ça se passe ?

Jean-Pierre Mercier : Cela fait 18 mois qu’on est dedans, et au début pour un certain nombre de camarades cela a été déstabilisant. On est habitués à se bagarrer contre le patron, à se bagarrer contre le gouvernement. On va dire que c’est dans l’ordre des choses. Se bagarrer contre sa propre organisation syndicale, cela devient plus compliqué. Il a fallu apprendre à le faire. Il y a eu une prise de conscience, pas simplement à l’usine de PSA Poissy mais à l’échelle du groupe. Quand tous les syndicats du groupe ont voté pour me renouveler dans mon mandat de DSC avec 88 % de voix, la fédération a désigné celui qui a recueilli 85 % des voix contre lui. Ça a été une leçon de choses, une leçon de choses qui vaut de l’or pour l’avenir ! À Montreuil, ces bureaucrates, cette fédération sera dans les luttes… contre nous. Elle ne tiendra pas compte de l’avis des travailleurs, etc.

Quand ơn entend les discours de Macron qui sont des discours de guerre, de guerre sociale, avec ces expressions comme « du sang et des larmes », « c’est fini le temps de l’abondance », comme si on était repu depuis un certain temps, oui, on a besoin de se retrouver pour discuter comment on fait pour résister et prendre l’offensive sur les salaires, contre l’inflation. Et on passe notre temps, enfin non, car dans l’atelier justement on continue à militer, mais quand même on est obligé de consacrer beaucoup d’énergie à se défendre parce que à la fois, la direction de PSA et la direction de la fédération veut crever, veut la mort du syndicat historique de la CGT de PSA. Les vrais juges dans cette faire ne seront ni le juge de Bobigny, ni celui de Versailles, ni la direction, ni la fédération, ce seront les travailleurs. Lors des élections en avril prochain, ce sont eux qui décideront qui ils veulent comme représentants et comme délégués. Je vous assure, on va mener la bagarre, ça c’est certain. On est très déterminés. On a des temps forts qui vont arriver. Il y a bien sûr le 20 octobre, on va essayer d’organiser un rassemblement avec des prises de parole pour nous soutenir, pour défendre cette démocratie syndicale qui doit vivre !

Philippe Poutou : Le 20 octobre, c’est le jour…

Jean-Pierre Mercier : C’est le jour de notre procès. On s’est fait assigner. C’est à Bobigny le 20 octobre vers midi. On a mis en ligne une pétition sur change.org, vous la trouverez facilement dans le milieu militant. Il faut la faire signer, la partager, la faire tourner le plus largement possible parce qu’il ne faut pas que cette saloperie se fasse dans le silence. Voilà, il faut faire le plus de bruit possible.

Pétition en ligne : https://www.change.org/p/contre-l-exclusion-de-la-cgt-du-syndicat-cgt-psa-poissy-et-de-jean-pierre-mercier

Vidéo sur l'Anticapitaliste : https://youtu.be/m2Pki4jGatc