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Un mouvement profond et puissant qui se cherche

Lien publiée le 22 octobre 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Un mouvement profond et puissant qui se cherche. Editorial du 19/10/2022. – Arguments pour la lutte sociale (aplutsoc.org)

Un mouvement profond et puissant qui se cherche. Editorial du 19/10/2022.

Ni gonflette, ni sinistrose : faisons de la politique. La poussée de grèves et de luttes sociales qui a imposé en France la journée du mardi 18 octobre n’est pas un déferlement réalisant immédiatement la grève générale, mais elle est bien un mouvement extrêmement profond, et par conséquent très puissant. Ce n’est pas la déferlante que veulent voir certains camarades, parce que les obstacles et les problèmes qu’elle affronte sont politiques, non seulement parce que le mouvement cherche à dégager – ce n’est pas nouveau – son propre débouché politique, mais parce que la question centrale des salaires est une question centrale politique. Elle est très profonde et très puissante, au fond pour les mêmes raisons.

La journée du 18 octobre n’était pas une « journée d’action » convenue comme il y en a tant. Appelée dans l’urgence parce que le début des réquisitions contre le droit de grève des ouvriers opérateurs des raffineries a ébranlé la CGT, elle a combiné plusieurs traits qui lui donnent toute son importance :

  • La reconstitution de l’unité syndicale CGT/FO/FSU/Solidaires/UNEF, juste auparavant dissoute dans un grand communiqué encore plus « unitaire » mais aligné sur les positions de la CFDT et la participation aux « concertations » sur les retraites, appelant à ne rien faire.
  • La solidarité massive et profonde avec la grève des raffineries avec le combat à tous les niveaux contre les mensonges sur les « 5000 euros » et les tentatives d’isolement et autres affirmations selon lesquelles cette grève serait impopulaire, ce qui est faux.
  • La grève dans les raffineries n’est elle-même en rien le résultat de la journée d’action du 29 septembre, mais celui d’une décision prise par les ouvriers à la base depuis le 27 septembre et d’abord tenue sous le boisseau par tout le monde – y compris leurs propres organisations- pendant deux semaines, avant que la pénurie ne soit impossible à cacher.
  • Une grève de même nature s’est amorcée chez EDF et dans les centrales nucléaires et elle a commencé, là aussi tardivement, à être visible au grand jour précisément dans la journée du 18 octobre.
  • Très important, la combinaison entre l’appel aux actions de solidarité avec les raffineries et la grève unitaire pour le retrait du projet Macron de destruction du lycée professionnel et agricole public, loin de faire passer celle-ci au second plan, lui a permis bien souvent de s’affirmer et de se porter en tête des manifestations, cela dans des dizaines de villes. Quand le SNUEP-FSU déclare fièrement que les élèves invisibles et les profs invisibles du « pro » se sont affirmés au centre de la journée, cela est vrai.
  • Les manifestations ont été puissantes – les 50 000 à 70 000 à Paris ne sont pas non plus de la « gonflette », eux.
  • Des lycéens et notamment des lycéens des LP sont entrés en mouvement et, là aussi, se sont parfois portés en tête des manifestations.

L’ensemble de ces processus montre une recherche extrêmement puissante de l’affrontement central avec Macron, pour imposer à la fois la hausse généralisée des salaires et une issue politique à un régime qui dérive à vue dans l’autoritarisme et les convulsions de sa propre crise. Ce n’était pas la grève générale, mais c’était l’unité des grèves dans « LA » grève pour les salaires et contre Macron.

Réquisitions et 49-3 sont donc les deux mots-clefs du pouvoir – avec le « dialogue social » ! Hé oui, les réquisitions sont l’expression achevée du « dialogue social » qui vise à cadenasser la simple exigence de rattrapage de l’inflation par les salaires, alors que la nourriture, les carburants et les loyers étouffent et réduisent à la misère les foyers par millions.

Et le recours annoncé – peut-être dans une heure ou deux quand sont écrites ces lignes, on verra- au 49-3 signifie ce que l’on savait déjà : l’impuissance structurelle de toute opposition parlementaire dans le cadre de ce régime.

Le seul enjeu en cas de motion de censure en effet, le risque réel pour Macron qu’elle peut comporter, ne vient pas de l’action de la Nupes et bien entendu ne vient en rien du RN ou de LR, mais de la manière dont les cercles des classes dominantes jaugent l’affaiblissement de Macron et pourraient être tentés de répondre à la question : doit-il aller, ou non, au terme de son second quinquennat ? En pratique cela se traduira par le degré de « fidélité » de ses propres troupes parlementaires, à travers notamment les factions de F. Bayrou et d’E. Philippe. Et ce degré de « fidélité » est fonction de la lutte des classes. Que la grève des raffineries résiste et se combine à celle des centrales nucléaires, que la jeunesse des lycées professionnels entre en mouvement, que les indices boursiers et les écarts de taux d’intérêts avec l’Allemagne réagissent fortement à tout cela, voilà les paramètres.

Ces paramètres dépendent du mouvement réel engagé dans le pays pour les salaires. Gagner sur les salaires pour les ouvriers des raffineries, c’est-à-dire rattraper l’inflation et un petit peu plus – la revendication est de 10% -, c’est ouvrir la voie à des victoires partielles sur les salaires dans tous les secteurs qui, additionnés, signifient que nous pouvons commencer à bloquer deux des « réformes » phares de Macron : celle du droit à la retraite à 65 ans qui vise à développer l’ « emploi des seniors », en réalité à créer un vivier de main-d’œuvre misérable, et celle des Lycées professionnels qui vise à envoyer les jeunes en stages gratis, l’une et l’autre, contre les seniors et contre les juniors, visant donc à faire baisser la valeur de la force de travail.

De quoi a besoin le mouvement qui est engagé ?

Il n’a pas besoin qu’on l’aiguillonne en lui disant « fait des AG et reconduit partout ou le plus possible », car cela, il le fera s’il a une perspective lui permettant d’aller de l’avant, ni en lui disant « vivement une nouvelle journée d’action ».

Il n’a pas besoin non plus qu’on lui serve un « front populaire » pour succéder à Macron, soit dans 5 ans, soit quand Macron voudra bien dissoudre ou lorsque Bayrou et Philippe l’y contraindront. Ce ne sont pas là des perspectives et d’ailleurs, la vérité seule étant révolutionnaire, force est de dire que les « 140 000 manifestants » de ce dimanche à Paris sont un cas prononcé de gonflette contre-productive – les quelques dizaines de milliers présents formaient en réalité une manifestation tout à fait respectable, à la recherche d’un débouché politique.

Le mouvement engagé a besoin de l’unité clairement affirmée de ses organisations sur ses revendications et d’objectifs clairs.

Ses revendications : hausse généralisée des salaires et échelle mobile des salaires, retrait des contre-réformes visant les retraites, l’enseignement professionnel public, l’assurance chômage. La satisfaction de ces revendications signifie que Macron, essoré, ne pourra rester.

Des objectifs clairs : pas de participation des syndicats aux « concertations » sur les retraites et à toute mise en œuvre de la casse des Lycées professionnels, centralisation des grèves et luttes contre : Macron et l’Elysée, les ministères du Travail et de l’Education nationale, Total et Exxon.

L’enjeu : toute victoire salariale est une victoire politique, imposer dans les faits l’échelle mobile c’est battre et défaire Macron. Le mouvement qui monte actuellement renouera avec la poussée démocratique et constituante des Gilets jaunes en allant non pas vers un « front populaire », mais vers l’affrontement avec le régime de la V° République.

Conclusion : le rapprochement et le regroupement des militants et courants de diverses provenances voulant aider à cet affrontement pour un changement de régime, n’est-il pas nécessaire ? Cela, dans la discussion et la diversité sur la Nupes, etc. Tel sera le premier point de nos discussions ce dimanche 23 octobre à partir de 9h 30 au Maltais rouge, 40 rue de Malte, Paris 11°, métro République, ou en visio (lien à suivre).

Le 19-10-2022, rédigé avant le vote du 49-3.