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Retour sur la grève des contrôleurs de la SNCF
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(article du 24 décembre)
Ce vendredi, les contrôleurs entamaient la première journée de grève du week-end de Noël. De leur côté, les directions syndicales ont signé un accord avec la direction de la SNCF avec le soutien de la direction du Collectif National des ASCT, et levé leurs préavis de grève sans consulter les grévistes. Une « sortie » de conflit qui va à l’encontre même des principes de démocratie élémentaire qui ont régi l’activité de cette grève depuis plusieurs mois.
En pleine grève des contrôleurs durant le week-end de Noël, les organisations syndicales ont signé vendredi matin un accord moyennant le retrait de leur préavis de grève pour le week-end du nouvel an. Considérant dans un communiqué que « de nombreuses revendications ont été satisfaites », Sud-Rail, la CFDT Cheminots, l’UNSA Ferroviaire et la CGT Cheminots ont ainsi annoncé « la suspension du mouvement de grève pour le week-end du jour de l’an ».
Le contenu de l’accord que Révolution Permanente a pu consulter, tient principalement à une « indemnité spécifique métier Bord » d’un montant de 720 euros brut annuels (60 euros brut mensuels), la création de 160 emplois supplémentaires en 2023 et de 40 emplois de plus pour les « trains sensibles », ainsi que la mise en place d’un poste de « directeur métier du Bord ». Il contient également des clauses concernant le déroulé de carrière des agents.
La réalité des faits est que mise à part une augmentation de 120€ brut annuel sur les propositions de départ, ramenant l’enveloppe de 600€ à 720€, ainsi que quelques promesses d’embauches que la SNCF n’arrive déjà pas à satisfaire sur les recrutements de base, les négociations qui se sont déroulées en pleine soirée dans l’urgence à l’image de la grève des raffineurs, n’ont pas répondu aux revendications de départ des grévistes.
Si certains agents sont plus enclin à considérer ces quelques mesures comme « toujours bonnes à prendre », beaucoup de contrôleurs dénoncent la signature brutale sans consultation. On peut lire sur le groupe Facebook le commentaire d’un gréviste qui demande « comment se fait-il qu’il n’y ait pas eu de consultation ? ». Habitué jusqu’à présent à consulter les plus de 3000 membres que compte le groupe Facebook du CNA (Collectif National des Agents), l’attitude des responsables de la page a commencé à changer depuis le refus d’une grande majorité d’annuler la grève pour les fêtes de fin d’année et ce dès la mi-décembre.
Un contrôleur de la région bordelaise qui nous a accordé une interview sous couvert d’anonymat nous explique : « Les membres du CNA ont consulté les agents après les négociations de la mi-décembre, mais le maintien de la grève l’a emporté. Après cela on a senti le malaise avec un post Facebook signé au nom du CNA et favorable à l’arrêt du mouvement, et derrière on nous a annoncé que le vote était faussé, car soi-disant infiltré par 200 extérieurs. Depuis nous avons vu que les consultations ont disparu et que la détermination du départ des animateurs de la page a laissé place à beaucoup de non-dits, jusqu’au communiqué d’aujourd’hui que nous avons découvert dans les médias. »
Du côté des directions syndicales, si seuls SUD-Rail et la CFDT avaient fait le lien avec le collectif au démarrage, la tonalité a changé après que la volonté de la base de maintenir la grève pour les fêtes se soit exprimée. SUD-Rail s’est contenté d’un simple « nous laissons l’outil syndical à disposition » faisant ainsi le minimum, sans chercher à peser de tout son poids ou encore à essayer d’élargir le mouvement en appelant l’ensemble des cheminots à se mettre en grève. Quant à la CFDT Cheminot, par la voix de son secrétaire confédérale Laurent Berger, elle a carrément dénoncé la grève et les grévistes. Un positionnement qui n’est pas sans rappeler l’attitude de Laurent Berger lors des réquisitions des raffineurs de Total et Exxon Mobil en octobre dernier. La CGT et l’UNSA eux, ont pris leur distance avec la mobilisation très tôt par peur de soutenir un mouvement qui part de la base. Didier Mathis, le secrétaire de l’UNSA ferroviaire, s’est dit opposé à cette grève à Noël et du côté de la CGT, sans jamais reconnaitre la légitimité du collectif, on a pris le soin de ne pas appuyer la grève.
C’est donc sans véritable soutien des directions syndicales et même une forme d’opposition pour d’autres, que les grévistes ont voulu répondre par « le nombre de D2I » à savoir le nombre de déclaration de grève qui allait faire office de « consultation de la base » comme disaient certains grévistes. L’attitude des organisations syndicales, pour le moins ambiguë pour certaines et farouchement hostile au mouvement pour d’autres, a laissé une brèche ouverte au gouvernement et au patronat pour une offensive visant à dénoncer des grévistes « radicalisés ». Eric Ciotti le nouveau président des Républicains, allant même jusqu’à traiter les grévistes de « terroristes ».
Malgré cela, ce sont l’ensemble des directions syndicales qui ont accepté de négocier en pleine soirée les conditions de fin de conflit d’une grève dont ils ne sont pas à l’origine. Un comportement qui semble incompréhensible étant donné que les trois premières organisations syndicales avaient pourtant refusé de signer quelques jours auparavant les propositions des négociations annuelles de la SNCF du 7 décembre dernier. Ainsi, de nombreux syndiqués sur Facebook et Twitter se sont interrogé sur les conditions démocratiques qui ont conduit à la signature d’un accord à l’aube, sans consultation des premiers concernés, à savoir les grévistes. L’ensemble des organisation syndicales représentées ont décidé unilatéralement de lever le préavis de grève du week-end du nouvel an. Le droit de grève des cheminots à la SNCF étant restreint par l’obligation de se déclarer 48 heures à l’avance sur un préavis déposé par une des organisations syndicales représentatives, elles ont ainsi privé de cadre légal les ASCT qui auraient voulu continuer le mouvement de grève pour obtenir de véritables augmentations de salaire à hauteur de l’inflation.
Le Collectif National des ASCT (CNA) qui s’est constitué sur les réseaux sociaux au début du mouvement, a de son côté soutenu la signature de l’accord en déclarant dans un communiqué commun avec Sud Rail et la CFDT Cheminots qu’« une très grande majorité de [ses] revendications [...] ont été satisfaites ». Alors qu’une alarme sociale avait été déposée en octobre dernier, la direction a choisi de faire la sourde-oreille jusqu’au mois de décembre et au premier week-end de grève. Cet accord de fin de conflit témoigne donc d’un recul de la direction sous pression de l’impact de la grève pendant la période des fêtes. Et pour cause, le week-end du 3 et 4 décembre le taux de grévistes chez les ASCT avoisinait les 90%, tandis que ce week-end et celui du nouvel an s’annonçaient également massivement suivis. La SNCF a annoncé plus de 200 000 billets annulés, dans une période charnière pour l’entreprise qui a du annoncer le remboursement à 200% du prix.
Ainsi, l’impact de la grève des contrôleurs, montre la puissance des travailleurs lorsque leur détermination part de la base, lorsqu’ils décident de s’organiser et lutter offensivement. De plus, pour mesurer réellement l’impact de cette grève, il faut mettre ses chiffres en perspective vis-à-vis de l’offensive des derniers jours, entre la trahison affichée de la CFDT et l’UNSA dans les médias, le cheminot-bashing, ou encore les menaces de réquisition évoqués par Christian Estrosi. Dans ce contexte, la base des ASCT a montré une détermination contre vents et marrées C’est dire ce qu’aurait pu être ce mouvement si en plus de tout un secteur de la SNCF, les organisations syndicales avaient appelé l’ensemble des cheminots à se mobiliser pour obtenir des augmentations de salaires générales qui aurait pu convenir aux contrôleurs mais aussi bien au-delà, bien plus que les 720€ brut annuel obtenus en guise d’augmentation de salaire.
Les points concédés par la direction de la SNCF restent loin des revendications initiales qui avaient fédéré les ASCT et mené à un mouvement aussi suivi au sein du métier. En effet, pour préparer la grève du week-end du 2 décembre, le Collectif National des ASCT, Sud-Rail et la CFDT Cheminots affichaient en première revendication « que le code prime 24 [également appelé « prime travail »] soit porté à un minimum de 700€ mensuels ». Or cette prime de travail des ASCT embauchés au statut de cheminot dépend de l’ancienneté et des missions de l’agent, et ne dépassait jamais 400 euros pour la grande majorité des contrôleurs. Une revendication qui ne concernait pas les autres corps de métiers, mais qui cherchait tout de même à obtenir une augmentation conséquente d’au moins 300 euros par mois, loin des 720 euros annuels de l’accord de fin de conflit qui ne représentent au demeurant pas grand chose par comparaison avec les 928 millions d’euros de bénéfices enregistrés par la SNCF en 2022.
Quant au Collectif National des ASCT, s’il s’est construit pour représenter les grévistes syndiqués et non syndiqués, force est de constater qu’en se contentant d’animer une page Facebook sans chercher à impulser des cadres d’auto-organisations tels que les Assemblées Générales et des coordinations, sa direction n’a pas été à même de garantir la démocratie du mouvement afin a minima de consulter les ASCT au sujet de la signature de cet accord. Cela démontre la nécessité pour les grévistes de s’organiser à la base en Assemblées Générales pour que la grève appartienne réellement aux grévistes. C’est le seul moyen pour qu’ils puissent décider eux-mêmes le plus démocratiquement possible des suites du mouvement et de leurs revendications, sans laisser les mains libres aux directions syndicales.
Pour l’heure il est encore difficile de prédire si les contrôleurs mobilisés ce week-end maintiendront la grève pour le week-end de la Saint Sylvestre sur un autre préavis. Néanmoins, l’impact de la grève ce week-end, ainsi que la radicalité à la base qui s’est exprimée jusqu’à présent, montre probablement des signes avant-coureurs de ce qui s’annoncera peut-être avec le projet de réforme des retraites. La « mère des batailles » va sans doute voir émerger des collectifs ou des cadres d’auto-organisation à l’image de la coordination RATP-SNCF qui s’était constituée au moment de la trahison des directions syndicales lors des vacances de Noël 2019. En réalité ce n’est pas seulement la grève des contrôleurs qui se joue actuellement, mais bien les conditions dans lesquelles va être présentée la réforme des retraites le 10 janvier prochain et il est clair que ce n’est pas la même chose avec ou sans une grève qui impacte le patronat au même moment, qui plus est avec une certaine forme de radicalité qui par certains aspect fait toujours planer le spectre des Gilets jaunes.