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Soutien à Boris Kagarlitsky, opposant marxiste à Poutine condamné à 5 ans d’emprisonnement
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Boris Kagarlitsky est parmi les sociologues russes les plus connus dans le monde académique international. L’intellectuel a été condamné en appel à cinq ans en colonie pénitentiaire pour s’être opposé à la guerre en Ukraine.
À un mois du plébiscite que constituent les élections présidentielles en Russie, le régime de Poutine est en train de serrer la vis. C’est l’un des principaux opposants de gauche du pays qui se trouve condamné en appel à 5 ans d’emprisonnement. « Apologie du terrorisme », « extrémiste », « agent étranger » : voilà les accusations de l’Etat contre le sociologue de 65 ans qui milite pour ses idées.
La persécution d’un dissident politique
Le 25 juillet 2023, le Service fédéral de sécurité russe (FSB) a arrêté Boris Kagarlitsky, politologue et sociologue de renom, rédacteur en chef du média militant Rabkor qui a plus de 120 000 abonnés sur YouTube. Il était alors accusé d’apologie du terrorisme pour avoir publié sur Rabkor (un journal indépendant de gauche fondé en 2008 en soutien aux travailleurs et mouvements sociaux) une vidéo du bombardement du pont de Crimée. Après avoir passé six mois en garde à vue, en décembre Kagarlitsky a reçu la première condamnation qui a consisté en une amende de 609 000 roubles (environ 6200 euros) qu’il a réussi à payer grâce à la campagne en son soutien. En février 2024 face aux demandes du procureur de condamner le militant à 5 ans et demi d’emprisonnement avec une interdiction de diriger des sites web, la peine a été durcie en appel. Boris Kagarlitsky est donc de nouveau incarcéré : à l’âge de 65 ans il a devant lui 5 ans en colonie pénitentiaire.
Boris Kagarlitsky est dans le viseur de l’Etat russe depuis un moment : en mai 2022 il a déjà été déclaré « agent étranger », ce statut qui est attribué systématiquement en Russie à tous les journalistes, militants et politiques dissidents et qu’ils sont obligés de mentionner au début de chaque message qu’ils publient sur les réseaux sociaux sous peine de poursuites.
Intellectuel de gauche, politologue et sociologue de renommée mondiale, c’est aussi un marxiste qui a acquis ses connaissances dans la lutte des classes. Kagarlitsky fait partie du mouvement socialiste mondial et a formé plus d’une génération de marxistes. Il a été un dissident de la gauche soviétique, il a critiqué la guerre en Ukraine et avec cette condamnation il devient un prisonnier politique dans la Russie de Poutine.
Depuis sa libération en décembre, Boris Kagarlitsky a pu s’exprimer dans plusieurs médias nationaux d’opposition en réaffirmant à chaque fois sa détermination de continuer à lutter en Russie. Dans son dernier interview avant l’incarcération au journal russe Novaya Gazeta Kagarlitsky a expliqué avec beaucoup d’humour sa décision de ne pas quitter le pays face aux poursuites dont il fait l’objet : « J’ai déjà vu d’autres pays, pourquoi je partirais ? Ici c’est ma maison, j’ai une famille, j’ai un chat. Quand on fait de la politique en Russie, faire face à la répression, ce sont des risques professionnels ».
L’ampleur inédite des répressions politiques en Russie
Depuis son arrestation en juillet 2023, des organisations ont fait campagne pour la libération immédiate de Boris Kagarlitsky, soulignant que sa détention est due à des critiques récentes du gouvernement de Poutine et fait partie de l’escalade de la persécution et de la répression des activistes et des opposants, dont des coupables du « crime » de qualifier la guerre avec l’Ukraine de « guerre ».
En effet, le saut répressif que l’on a vu durant le dernier terme de Vladimir Poutine est inédit dans l’histoire de la Russie contemporaine. Selon les estimations du média d’enquête Proekt, ce sont plus de 110 mille personnes qui ont été touchées par la répression durant les six dernières années. Les articles dans le code pénal consacrés à « l’extrêmisme », à « l’apologie du terrorisme », à la « discréditation de l’armée », aux « appels aux sanctions » et aux « fake news » permettent au régime d’ouvrir des poursuites administratives et pénales contre la majorité de ses opposants ou à quiconque déciderait de dénoncer l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Proekt estime que l’ampleur des répressions dépasse celle que subissaient les dissidents soviétiques sous Khrouchtchev et Brejnev. Une politique autoritaire du régime de Poutine centrée sur la persécution et la prohibition de toute forme d’opposition en Russie.
Natalia Zviagina, directrice d’Amnesty International en Russie, déclarait récemment « Cette condamnation constitue un abus flagrant de la vague législation antiterroriste, qui est utilisée comme une arme pour réprimer la dissidence et punir une personne critique à l’égard du gouvernement. En persécutant Boris Kagarlitsky – un sociologue de renom dont la position critique envers la politique gouvernementale est bien connue – les autorités russes montrent une fois de plus leur combativité contre toute forme de dissidence. »
Empêtré dans la guerre en Ukraine et faisant face à de plus en plus d’instabilité politique, subissant même un putsch militaire l’année dernière, le régime de Poutine cherche désespérément à mater toute opposition, en enfermant les dissidents dans ses prisons brutales ou en les poussant à l’exil. Ainsi, en 2023, le nombre des poursuites pénales s’est multiplié par quatre alors que le volume des poursuites administratives était en baisse, montrant une volonté plus offensive du régime.
A l’âge de 65 ans, Boris Kagarlitsky est donc pris en otage par l’Etat russe pour intimider ses camarades et ses soutiens. Mais ce cas d’emprisonnement, arrivé quelques jours avant la mort de Navalny en colonie pénitentiaire en cercle polaire arctique, illustre toute une vague des répressions de grande échelle menées par le régime de Poutine, s’apprêtant à se faire réélire pour six ans de plus le 17 mars.
Révolution Permanente exprime son soutien à Boris Kagarlitsky et réclame sa libération ainsi que celle de tous les prisonniers politiques russes. Retrouvez les informations essentielles sur la campagne de soutien à Boris Kagarlitsky sur le lien suivant