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L’histoire du 1er Mai
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

La signification politique de cette journée du 1er Mai a beaucoup évolué depuis sa création. Au départ conçue pour imposer la journée de 8 heures de travail par la grève et les manifestations, elle menace la bourgeoisie et le patronat qui combattent violemment toute dynamique de grève générale. Cette journée prend une autre signification à partir des années 1930, plus politique, en réponse aux questions cruciales du moment, tout en exprimant la solidarité internationale. Par Patrick Le Moal.
Pour imposer les « 8 heures » !
Au 19e siècle, alors que beaucoup d’ouvrierEs travaillent plus de 14 heures par jour, le mouvement ouvrier international s’unifie autour de la revendication des 8 heures de travail.
Discutée dès 1864 au sein de l’AIT 1, les grèves imposent la journée de 8 heures en 1866 aux États-Unis dans « les établissements de la République ». En 1884, une convention des syndicats américains décide d’imposer qu’à partir du 1er mai 1886, nul ouvrier ne travaillera plus de 8 heures par jour. À cette date, soit les patrons les accordent, soit c’est la grève. Pendant la préparation, se déroulent d’immenses manifestations.
Chicago, 1886
Le 1er mai 1886, 5 000 grèves éclatent avec 340 000 grévistes. Maurice Dommanget dans son livre Histoire du 1er Mai estime que 125 000 ouvrierEs obtiennent les 8 heures dès ce jour, 200 000 de plus dans le mois qui suit, et que la durée journalière de travail diminue pour des millions d’autres. Le mouvement est sévèrement réprimé. À Milwaukee, la police tue 9 grévistes. À Chicago, lors d’affrontements à l’usine McCormick entre ouvriers lockoutés et jaunes, la fusillade des détectives armés de Pinkerton et des policiers fait 6 morts et une cinquantaine de blessés. Le lendemain, lors du meeting de protestation, place du marché au foin (Haymarket), la foule est dispersée violemment par les policiers, dans les rangs desquels une bombe est lancée, en tuant 8, et en blessant des dizaines. La fusillade policière est plus terrible, Chicago est mis en état de siège, et trois mois après les accusés sont condamnés à mort. Leur pendaison en 1887 a un retentissement international 2.
Des journées internationales de mobilisation à partir de 1890
Un an après, en 1888, en France, le congrès syndical de Bordeaux décide une manifestation pour les 8 heures le 24 février 1889, jour anniversaire de la révolution de 1848. Elle a un énorme succès et un grand retentissement. C’est alors qu’est avancée l’idée d’organiser une grande manifestation internationale à date fixe, pour mettre en demeure les gouvernements de réduire à 8 heures la journée de travail. Le Congrès international ouvrier de Paris de 1889 adopte cette date en référence au 1er Mai américain.
À partir de 1890, la préparation de la manifestation internationale mobilise tout le mouvement ouvrier. En 1890, il y eut 138 manifestations en France, parfois sévèrement réprimées, et des manifestations impressionnantes dans les pays européens industrialisés. En 1891, à Fourmies l’armée tire sur les ouvrierEs. Dix d’entre eux sont tuéEs, 80 sont blessés. Le retentissement de ce massacre est considérable. Durant les années suivantes, la mobilisation n’est plus du même niveau en France.
La manifestation de 1906 est marquée par la montée des grèves qui suit la catastrophe de Courrières, qui a fait près de 1 100 morts. Lors des obsèques, la foule scande «Vive la révolution ! Vive la grève !» Le lendemain, les mineurs du Nord enclenchent une grève de six semaines, avec la revendication : « huit francs, huit heures ». Clemenceau, alors président du Conseil, envoie des dizaines de milliers de soldats. Cela contribue à donner une nouvelle ampleur aux grèves qui éclatent un peu partout à l’approche du 1er Mai. L’inquiétude monte chez les bourgeois, à tel point qu’est votée la loi sur le repos hebdomadaire. Mais la répression limite les 1er Mai suivants, et l’entrée en guerre, avec l’adhésion à l’union sacrée des directions socialistes et de la CGT, les transforment en meetings.
À la fin de la guerre, le pouvoir français, face à la montée du mouvement ouvrier radicalisé par la révolution russe, adopte en avril 1919 la loi de la journée de 8 heures, et le traité de Versailles 3 prévoit explicitement la journée de 8 heures et la semaine de 48 heures.
- 1. Association internationale des travailleurs, autrement appelée la Première Internationale.
- 2. Ils seront réhabilités en 1893.
- 3. Traité de paix entre l’Allemagne et les alliés.
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Pour la solidarité internationale !
Après une immense mobilisation en 1920, les 1er Mai suivants, alors que la revendication des 8 heures n’est plus en jeu, sont marqués par la division syndicale1, puis par la crise économique et la montée fasciste.
Dès sa prise du pouvoir en 1933, Hitler se débarrasse du caractère de lutte de classe de cette journée en faisant du 1er Mai une fête légale : la Journée nationale du travail, avec une parade fasciste.
Des « trois huit » au muguet, les symboles changent, le 1er Mai aussi
En France, face au coup de force fasciste du 6 février 1934 se réalise l’unité de toutes les organisations ouvrières qui s’exprime massivement alors, tant dans des manifestations du 14 Juillet, notamment celle de 1935, que le 1er Mai.
Les insignes portés à cette occasion symbolisent l’évolution du rôle politique du 1er Mai. En 1890, les manifestantEs portent à la boutonnière un petit triangle rouge, symbole de la division harmonieuse de la journée en « trois huit » : travail, sommeil, loisir. L’églantine rouge le supplante vite, et dans les années 1930, le muguet, la fleur traditionnelle du printemps et de l’amour, apparaît et la remplace, même si des manifestantEs arborent en 1936 du muguet tressé de rouge. Face à l’approche de la guerre, les 1er Mai suivants sont enfouis « dans les plis du drapeau tricolore »2.
De 1954 à 1968, la chape de plomb coloniale
Dans la France occupée, Pétain dissout la CGT et pour capter la journée des travailleurs, crée un jour férié le 1er Mai3 comme « Fête du travail et de la concorde sociale ».
Il faut attendre le 1er Mai 1945 pour retrouver la tradition ouvrière, qui alors devient un enjeu politique. La CGT appelle celui de 1946 « 1er Mai de la renaissance française » avec un cortège de chars, une sorte de carnaval.
Les manifestations du 1er Mai et du 14 Juillet continuent jusqu’en 1953, année où le défilé parisien du 14 Juillet, organisé par le PCF et la CGT pour célébrer « les valeurs de la République » inclut plus de 6 000 manifestantEs menéEs par le parti nationaliste algérien MTLD4. À l’arrivée place de la Nation, la police tire sur ce cortège, faisant 7 morts et des dizaines de blesséEs. À la suite de ce massacre, la France coloniale, puis celle du coup d’État de De Gaulle de 1958, interdit les manifestations du 1er Mai et du 14 Juillet... jusqu’au défilé du 1er Mai 1968.