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Barbara Figueroa, le nouveau visage du syndicalisme chilien

Chili

Lien publiée le 14 novembre 2013

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Le Monde) Au Chili, la politique rajeunit et se féminise. La socialiste Carolina Toha, 48 ans, est depuis un an maire de Santiago. Camila Vallejo, 25 ans, est l'emblématique pasionaria du mouvement étudiant. Quant à l'ancienne présidente socialiste Michelle Bachelet (2006-2010), à 62 ans, elle est la grande favorite de l'élection présidentielle du 17 novembre. Son rival le plus sérieux ? Une autre femme, Evelyn Matthei, ancienne ministre du travail du président de droite, Sebastian Piñera.

Pour la première fois dans l'histoire du syndicalisme chilien – et latino-américain –, c'est une femme de 34 ans, Barbara Figueroa, qui occupe depuis août 2012 un autre bastion de la domination masculine, en présidant la puissante Centrale unitaire des travailleurs (CUT). Elue à la tête d'une organisation syndicale aux 650 000 affiliés, cette professeure de philosophie, membre du bureau politique du Parti communiste chilien (PCCh), se définit comme « la génération de transition, entre la sève de la vieille garde et la vitalité des plus jeunes ».

Alors que le mandat du président Piñera touche à sa fin, un vent nouveau souffle à Santiago. Barbara Figueroa en est l'une des incarnations. Elle se propose de sortirla CUT de « l'immobilisme dans lequel se trouve le syndicat depuis ces dernières années ». Elle veut des réponses concrètes du gouvernement – « quel qu'il soit », précise-t-elle – aux aspirations des travailleurs. Des revendications anciennes, bafouées par le modèle économique hérité de la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990), et qui n'ont toujours pas été satisfaites, malgré vingt ans de gouvernements successifs de la Concertation démocratique, coalition de centregauche (1990-2010). Les premières félicitations lors de son élection à la tête de la CUT, à l'été 2012, ne sont pas venues du Chili mais de New York, où Michelle Bachelet était, à l'époque, chargée pour l'ONU de l'égalité et l'autonomisation des femmes.

Barbara Figueroa affirme cependant que son soutien à Michelle Bachelet ne sera pas automatique. Si elle est élue, « les syndicats ne lui signeront pas un chèque en blanc », insiste-t-elle. La candidate de la coalition de centre gauche, qui a élargi son alliance au Parti communiste, a promis une nouvelle Constitution – pourremplacer celle de 1980, datant de Pinochet –, ainsi qu'une réforme de l'éducation et du système fiscal. « Nous attendons de voir quelles seront les mesures en faveur des travailleurs », avance de son côté la dirigeante syndicale.

Les collaborateurs de Mme Figueroa font l'éloge de ses talents pour la négociation, soulignant « qu'elle préfère le dialogue à la confrontation »« Nous allons dialoguer, bien sûr, mais sur un pied d'égalité avec le gouvernement et les patrons, précise la présidente de la CUT. Non seulement avec la force des arguments, mais aussi avec la pression des mobilisations. Car si cela dépendait des arguments, il y a des décennies que l'oppression dont sont victimes les travailleurs aurait été résolue ! »

Pour renforcer le poids de la CUT, la responsable syndicale souhaite « parvenir à un million d'affiliés », un chiffre qu'elle juge « parfaitement atteignable à court terme ».

Elle a l'habitude de se battre. Son père, José Figueroa, est un dirigeant syndical et un militant communiste historique. En 2000, il a été le premier communiste à êtreélu maire de San Fernando, une ville du centre du pays, dont il avait été conseillermunicipal, de 1971 jusqu'au 11 septembre 1973, jour du coup d'Etat militaire contre Salvador Allende. Il fut contraint de passer à la clandestinité.

Barbara Figueroa a commencé à militer au sein du mouvement de la jeunesse communiste dès l'âge de 15 ans tout en poursuivant ses études. Elle a obtenu son diplôme de professeure de philosophie en 1998 et a enseigné dans plusieurs collèges de quartiers défavorisés.

Son ascension s'est faite sur un chemin semé d'embûches, de l'univers machiste du collège des professeurs à celui des représentants syndicaux, et c'est après un véritable parcours du combattant qu'elle a fini par l'emporter – de deux voix – sur le socialiste Arturo Martinez qui dirigeait la CUT depuis douze ans.

Ce succès a été une victoire marquante pour le Parti communiste chilien, qui, en 2009, sous la houlette du député Guillermo Teillier, a conquis, pour la première fois depuis la fin de la dictature militaire, trois sièges au Parlement. En cas de victoire de Michelle Bachelet, le parti pourrait siéger de nouveau au gouvernement, ce qui n'est plus arrivé depuis la chute de Salvador Allende.

Barbara Figueroa a marché aux côtés de la combative militante communiste Camila Vallejo, qui a mobilisé des milliers d'étudiants en 2011 pour exiger une éducation publique gratuite et de qualité, et entretient avec elle « une relation de complicité et de soutien ». Se félicitant de la place qu'ont conquise les femmes au sommet du pouvoir chilien, la dirigeante syndicale estime toutefois « que penserque nous allons mieux nous comprendre simplement parce que nous sommes des femmes serait une discrimination positive ».

La condition féminine lui tient à coeur. Pendant plusieurs années, une pancarte dans son bureau proclamait : « Attention ! le machisme tue. » Elle est favorable à la libéralisation de l'avortement et au mariage entre personnes du même sexe.

Son égérie est Gladys Marin, symbole de la lutte contre la dictature de Pinochet et figure charismatique du PCCh, dont elle fut la secrétaire générale de 1994 jusqu'à sa mort en 2005. « Gladys conciliait une force, des convictions et un élan considérés généralement comme masculins, avec une douceur, une chaleur et une séduction attribuées aux femmes. » Un modèle que Barbara Figueroa a parfaitement assimilé.