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Salvador Sanchez Ceren, de la guérilla à la présidence du Salvador
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Le Monde) Elu sur le fil du rasoir, l'ancien commandant guérillero Salvador Sanchez Ceren a été confirmé comme futur président du Salvador, jeudi 13 mars. Il n'aura pas la tâche facile. Son adversaire de droite Norman Quijano n'a pas reconnu sa victoire et réclame un nouveau décompte des voix « bulletin par bulletin ».
Cette demande a été rejetée par le tribunal électoral, qui, après avoir vérifié tous les procès-verbaux du scrutin du dimanche 9 mars, a confirmé la victoire de M. Sanchez Ceren avec 50,11 % des voix, contre 49,89 % à son rival. M. Quijano a appelé ses partisans à « maintenir la pression », mais n'a pas présenté de preuves à l'appui de ses accusations de fraude.
Accusé par la droite d'être un adepte du « socialisme du XXIe siècle » inventé par l'ancien président vénézuélien Hugo Chavez, M. Sanchez Ceren répond que son modèle est « salvadorien » et se dit inspiré par l'exemple de José « Pepe » Mujica, le président de l'Uruguay, comme lui ancien guérillero.
NEUVIÈME DE DOUZE ENFANTS
Salvador Sanchez Ceren est né le 18 juin 1944 à Quezaltepeque, à 20 km au nord-est de la capitale, San Salvador, dans une famille modeste. Neuvième des douze enfants d'un menuisier et d'une vendeuse au marché de la ville, il se destine à l'enseignement, qui restera sa vocation tout au long de sa vie. Instituteur à 19 ans, il s'engage dans le syndicalisme et rejoint en 1972 les Forces populaires de libération (FPL), une organisation issue d'une scission du Parti communiste qui lutte contre les gouvernements putschistes se succédant dans la petite République centraméricaine. En 1980, il participe à la formation du Front Farabundo Marti de libération nationale (FMLN), regroupant cinq organisations rebelles, qui lancent une offensive armée contre le gouvernement.
Sous le nom de guerre de « commandant Leonel Gonzalez », il rejoint les maquis de Chalatenango, dans le nord du pays, où de violents combats opposent l'armée et la guérilla. Dans un de ses ouvrages, La guerra que no quisimos (« La guerre que nous n'avons pas voulue », non traduit), il expose les causes du conflit, qui a fait plus de 75 000 morts et 12 000 disparus en douze ans.
Elu secrétaire général des FPL en 1983, il est l'un des commandants du FMLN désignés pour négocier les accords de paix qui mettent fin à la guerre civile, en janvier 1992. La destruction des armes de la guérilla, qu'il supervise, permet la légalisation du FMLN, qui se transforme en parti politique en décembre 1992.
MÉDIOCRE ORATEUR
Elu député en 2000, il conserve son siège jusqu'au 1er juin 2009. Il devient alors vice-président de la République grâce à la victoire d'un journaliste populaire, Mauricio Funes, que le FMLN a choisi comme candidat à la présidence. Chargé du ministère de l'éducation, il lance un programme de distribution d'uniformes, de chaussures et de matériel aux écoliers. Ce programme lui vaut une grande popularité dans les familles modestes, pour qui la rentrée est un casse-tête financier.
Médiocre orateur, M. Sanchez Ceren manque de charisme. Sa formation marxiste ne l'a pas empêché de rester un catholique fervent. « A la différence de Pepe Mujica, il est resté conventionnel », note une militante du FMLN. « Il a la maturité politique, l'amabilité, la décence et l'honnêteté qui ont fait défaut à l'actuel président Mauricio Funes », affirme Salvador Samayoa, ancien responsable de la guérilla qui a participé à ses côtés à la négociation des accords de paix.
SANTÉ FRAGILE
Agé de 69 ans et de santé fragile, M. Sanchez Ceren a choisi Oscar Ortiz pour leseconder à la vice-présidence. Maire populaire de Santa Tecla, une municipalité proche de la capitale, M. Ortiz, 52 ans, est un ancien guérillero des FPL, populaire auprès des médias et des jeunes. Pragmatique, il a lancé « un message de confiance et d'optimisme » aux chefs d'entreprise qui ont soutenu le candidat de droite.
« Le Salvador est divisé en deux, constatait le site El Faro le soir du scrutin. Le message populaire est clair : la seule voie est un accord entre les deux extrêmes permettant un projet négocié. » Surpris par leur très faible avantage (0,22 point d'écart, alors que les sondages en prévoyaient plus de 10), MM. Sanchez Ceren et Ortiz ont multiplié les appels au dialogue avec l'opposition de droite et le secteur privé.
Sans reprise de l'investissement et sans création d'emplois, le gouvernement du FMLN ne pourra faire reculer la pauvreté, qui touche 40 % de la population, ni la violence des maras, les gangs qui servent de refuge aux jeunes désemparés. Sa tâche s'annonce difficile alors qu'une partie de la droite est tentée par la contestation dans les rues et que le patron des patrons, Jorge Daboub, reprenait à son compte les accusations de fraude peu après l'annonce des résultats.