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La SNCF réprime la dernière grève pour empêcher la suivante
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
L’Humanité, 18 août 2014 :
La SNCF accuse dix-neuf cheminots grévistes de Midi-Pyrénées d’avoir dégradé du matériel. Trois d’entre eux ont été mis hors de cause et l’accusation semble bien fragile. Pour la CGT et SUD rail, la direction veut les dissuader d’une nouvelle grève.
La grève contre la réforme ferroviaire était terminée depuis plus d’un mois. Aussi dix-neuf cheminots de Midi-Pyrénées ont été abasourdis d’apprendre, fin juillet, qu’ils faisaient l’objet d’une procédure disciplinaire de la part de la direction régionale de la SNCF. Une procédure doublée d’une plainte au pénal. Ces dix-neuf cheminots grévistes risquent des sanctions pouvant aller de la mise à pied avec sursis jusqu’à la révocation pure et simple. La direction de la SNCF n’a pas admis cette grève de deux semaines, plutôt bien suivie en Midi-Pyrénées, et en particulier la journée du 18 juin où le conflit social tendait à se durcir. Les dix-neuf agents se retrouvent accusés de « dégradation de matériel », « entrave à la circulation des trains », « entrave à la liberté du travail ».
« Des agents ciblés ! C’est de la répression pure et dure »
Les cheminots dans le collimateur de la direction n’ont pas été choisis au hasard. La plupart sont des militants actifs de SUD rail et de la CGT, les deux syndicats qui conduisaient la grève de juin. « Il s’agit d’élus ou anciens élus du personnel », complète Christophe Marre, secrétaire CGT du comité d’établissement. « Des agents ciblés ! C’est de la répression pure et dure », s’insurge Youssef El Akermi (SUD rail).
Mardi 12 août, quatre de ces cheminots sont convoqués pour un entretien préalable à des sanctions disciplinaires. Le lendemain, deux autres connaissent le même sort. Jeudi 14 août, c’est au tour de Christophe, un conducteur de train non syndiqué, d’être convoqué.
Ce matin-là SUD rail et la CGT organisent un rassemblement de soutien aux « dix-neuf ». Le syndicat Unsa cheminots, qui ne participait pas à la grève de juin, a rejoint les deux autres organisations par solidarité. Environ quatre-vingts cheminots sont regroupés devant les fenêtres du bâtiment où doit avoir lieu l’entretien, sur le site de la gare Raynal, la gare de marchandises de Toulouse.
Les dix-neuf cheminots contestent formellement les faits qui leur sont reprochés. Dégradation de matériel ? « Les cheminots préservent leur outil de travail », rappelle Laurent Brun (CGT). Les grévistes admettent avoir mis le feu à « quatre palettes et deux pneus », rien de plus. Entrave à la liberté du travail ? Pressions sur les non-grévistes ? « Nous n’avons jamais empêché personne d’aller travailler », se défend Youssef El Akermi. Sur le site de Toulouse, ce 18 juin, « l’accès piétons (aux postes de travail – NDLR) était libre », précise Christophe Marre. Les « dix-neuf » ont été désignés, semble-t-il, sur la base de témoignages de cadres. Des témoignages peut-être pas très fiables : « Deux d’entre nous n’étaient pas présents sur le site ce jour-là et l’ont prouvé », argumente Youssef El Akermi. Ce qui fragilise l’accusation. Quant à la plainte au pénal, elle n’est pour le moment pas instruite : aucun cheminot n’a été à ce jour entendu par la police.
Au cours de ce rassemblement arrive Dominique Damid, chargé de communication de la direction régionale de la SNCF. Il se tient un peu en retrait. « Nous avions dit au moment de la grève que les actions illicites ne seraient pas acceptées, assure-t-il. Les faits ne sont pas anodins. » Mais le chargé de communication se montre assez imprécis dans sa description des événements. Combien de trains ont-ils été bloqués en gare ? « Je n’ai pas le chiffre exact. »
Au bout de quarante minutes, Christophe sort du bâtiment. L’entretien préalable a été de courte durée. Et pour cause : « Ils n’ont rien contre moi. Eux-mêmes ne comprennent pas que je sois convoqué alors qu’ils n’ont rien à me reprocher : je n’étais pas là. » D’autres grévistes sont convoqués cette semaine. Pourquoi la direction régionale de Midi-Pyrénées a-t-elle lancé cette charge contre dix-neuf cheminots ? « La direction veut faire des exemples avant les négociations collectives de septembre, analyse Youssef El Akermi. Elle ne veut pas d’un mouvement social à la rentrée. » Il s’agirait ainsi d’une manœuvre dissuasive. Le syndicaliste CGT Christophe Marre est persuadé que la direction régionale a reçu des consignes de la direction nationale : « Le but est de casser les mouvements syndicaux. Mais ça ne marche pas ! »