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Dernières passes d’armes entre la Grèce et ses créanciers
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Le Monde) Alors que les négociateurs européens tempèrent l'optimisme grec, la fin de semaine sera décisive
Le compte à rebours a commencé. La négociation entre Athènes et ses créanciers pour obtenir quelques milliards d'euros de prêts (7,2 milliards en tout) en échange d'un programme de réformes supplémentaires est entrée dans sa dernière phase. Tout le monde en est maintenant conscient, à Athènes, à Paris, à Berlin ou à Washington : ces laborieuses discussions doivent se conclure très vite pour que le pire – un défaut de l'Etat grec, à court de liquidités – soit évité. Les " jours utiles " comme on dit à Bruxelles sont désormais comptés : une dizaine, tout au plus, estiment plusieurs sources proches des négociations.
Mercredi 27 mai, alors que les travaux du " groupe de Bruxelles " (les équipes de techniciens représentants des Grecs et des créanciers) reprenaient après quelques jours d'interruption, Athènes a soudain annoncé une accélération du processus. Un communiqué des services du premier ministre grec, Alexis Tsipras, affirmait que " la rédaction de l'accord - au niveau des équipes techniques - " était en cours. Le compromis tant espéré avec les créanciers sera trouvé dans les tout prochains jours et " certainement avalisé par un Eurogroupe dès la semaine prochaine ", affirmait une source proche des négociations, à Athènes.
Côté créanciers, le ton était bien moins optimiste, mercredi. Parmi les plus exigeants, le ministre des finances allemand Wolfgang Schäuble a estimé " que les négociations n'ont pas beaucoup progressé ", et s'est étonné du fait " que les Grecs annoncent un accord rapide " et va même jusqu'à évoquer des " mesures de contrôle des capitaux " dans un entretien publié mercredi dans Die Zeit. Le président de l'Eurogroupe, Jerœn Dijsselblœm, a déclaré que " la Grèce devait faire encore mieux " pour arriver à un accord. " Cet enthousiasme grec n'a aucun sens, il n'y a aucun accord en vue dans l'immédiat ", assénait, mercredi soir, une source proche des créanciers.
Différends conséquents
Il reste des différends conséquents. La réforme des retraites est toujours sur la table : le FMI exigerait la retraite à 67 ans, la Commission européenne, la plus conciliante des créanciers, plaide plutôt pour 65 ans, et les Grecs pour 62 ans. Il y a aussi un désaccord sur la question du surplus primaire, c'est-à-dire le surplus budgétaire grec avant le paiement des dettes. Consciente de la situation économique délicate du pays, la Commission propose seulement 1 % du PIB du pays en 2015, 2 % en 2016 et 3 % en 2017. Le FMI est, là encore, plus exigeant. " Pour qu'un accord soit trouvé, il faut qu'Athènes fasse encore des efforts, mais aussi que le FMI cède du terrain ", jugeait une source proche des négociations, mercredi.
Pour éviter le pire – un défaut de l'Etat grec aux conséquences difficiles à anticiper (panique des épargnants, contrôle des capitaux, etc.) –, il faudrait idéalement qu'un Eurogroupe, seule instance où un accord entre Athènes et ses créanciers peut-être scellé, soit convoqué au plus tard avant le 5 juin, date à laquelle la Grèce doit en effet rembourser 300 millions d'euros au FMI. Athènes affirme avoir l'argent pour honorer cette échéance mais craint que si elle envoie ce chèque, sans l'assurance d'un accord avec Bruxelles dans la foulée, elle ne puisse pas assurer les remboursements suivants au Fonds (336 millions d'euros le 12 juin, 560 le 16 et 336 le 19 juin).
L'Eurogroupe, en entérinant un accord, permettrait à la BCE de remettre en place le mode de financement de l'Etat grec qu'elle avait stoppé en février – elle ne garantissait plus les emprunts grecs –, ce qui soulagerait instantanément Athènes. Quelque 1,9 milliard d'euros correspondant aux profits réalisés depuis 2010 par la BCE suite aux rachats de dette publique grecque pourraient aussi être débloqués rapidement.
Pour que cet Eurogroupe soit convoqué, il faut que les derniers différends aient été aplanis avant au sein du groupe de Bruxelles, jeudi 28 mai dans la journée. Puis lors d'un Euroworking groupe, réunion préparatoire aux Eurogroupes, qui est prévue dans la foulée, jeudi dans l'après-midi.
Deux autres rendez-vous importants, ceux-là au niveau politique, pourraient être l'occasion de lever les dernières réserves, notamment côté FMI. Il y a le G7 Finance qui a commencé mercredi à Dresde (Allemagne), et qui réunit une bonne partie des protagonistes du dossier grec : Christine Lagarde pour le FMI, Mario Draghi pour la BCE, Wolfgang Schäuble… " On est tous dans un hôtel, on a plein d'occasions de se croiser et de discuter dans les couloirs, c'est un endroit parfait pour négocier ", témoignait mercredi, une source arrivée sur place. Par ailleurs, lundi 1er juin, le président François Hollande retrouve la chancelière Angela Merkel et le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à Berlin. Au menu : une rencontre avec des entrepreneurs européens des domaines de l'énergie, du numérique… Mais aussi, évidemment, la Grèce.
M. Tsipras compte bien sur un coup de pouce du ministre américain de l'économie, Jacob Lew, avec lequel il a multiplié les contacts. Ils se sont encore parlé au téléphone mercredi matin. Les Américains sont inquiets que la situation grecque dérape et ne compromette la fragile reprise en zone euro. " Personne ne doit avoir l'illusion ou la certitude de connaître et maîtriser les conséquences d'une crise grecque ", avait prévenu M. Lew mercredi lors d'un discours à la London School of Economics.
Adéa Guillot, et Cécile Ducourtieux