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Hollande et Merkel donnent de l’air à Tsipras
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Le Monde) Angela Merkel et François Hollande veulent encore y croire. Mercredi 10 juin, dans la soirée, la chancelière allemande et le président français ont conduit une nouvelle réunion au sommet – la troisième en dix jours, après celle de Berlin et celle du G7, en Bavière – pour relancer des négociations sur l’avenir de la Grèce, enrayées depuis plusieurs jours. Cette fois-ci, le chef du gouvernement grec, Alexis Tsipras était présent. Pas sûr, pour autant, qu’il ne faudra pas encore un ou deux rendez-vous pour qu’enfin, après plus de quatre mois de bras de fer, Athènes et ses créanciers (Union européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international) s’entendent sur un accord « réformes contre prêts supplémentaires ».
La réunion entre les trois dirigeants a duré deux bonnes heures, dans une « bonne » ambiance, constructive, a fait savoir la chancellerie, dans la nuit. Il y fut question des points de blocage persistants. Sur la marge de manœuvre budgétaire de l’Etat grec (le surplus primaire, avant le paiement des dettes), les positions sont proches, l’écart entre Athènes et ses créanciers ne porte plus que sur quelques centaines de millions d’euros.
Etat de crise permanente
Concernant les retraites, Paris et Berlin maintiennent le cap : les Grecs doivent couper dans les dépenses. Mais ils n’imposent pas de mesures précises. Si M. Tsipras ne veut pas entamer les petites retraites, à lui de trouver d’autres moyens pour équilibrer le système des pensions. Le même raisonnement s’applique pour les rentrées fiscales : si Athènes refuse une TVA à 23 % sur l’électricité, qu’elle trouve d’autres sources de financement.
Le chef du gouvernement a réclamé une extension de neuf mois du deuxième plan d’aide à la Grèce (qui s’achève le 30 juin), pour se donner le temps de mettre en place les réformes et, surtout, pour négocier un aménagement de la dette grecque. Sa demande aurait été plutôt bien accueillie : Paris et Berlin souhaitent aussi en finir avec cet état de crise permanente qui a conduit à une paralysie de l’économie grecque et met en péril la stabilité financière de la zone euro.
Un troisième plan d’aide aux Grecs avait bien été évoqué, il y a quelques mois, tout le monde ayant conscience que le pays ne peut, dans l’immédiat, se passer d’une aide financière. Mais cette option est politiquement invendable. A la fois pour Mme Merkel – une partie de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) refuse que davantage de prêts soient accordés aux Grecs – et pour M. Tsipras, qui a fait toute sa campagne contre l’austérité et les « diktats » de Bruxelles.
Jeudi 11 juin, M. Tsipras devait rencontrer le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, pour parler du volet financier de l’accord. Une enveloppe de 7,2 milliards d’euros reste à débourser pour Athènes dans le deuxième plan d’aide. Près de 11 autres milliards, destinés à la recapitalisation des banques grecques, pourraient être réaffectés afin de régler des échéances de remboursement à la BCE, cet été – en tout, près de 8 milliards d’euros. Bruxelles travaille aussi à une « enveloppe » de fonds structurels, sur le budget de l’Union, destinée au financement de projets d’infrastructure.
La teneur des discussions prouve que l’accord est à portée de main. Tout le monde y a intérêt : les finances publiques grecques sont à sec. Et ni Angela Merkel ni Alexis Tsipras ne souhaitent porter la responsabilité d’un échec aux conséquences incalculables pour la zone euro, qui conduirait à un défaut de paiement grec, voire à un « Grexit », une sortie d’Athènes de la zone euro.
Du temps pour « atterrir »
Pour autant, des sources du côté des créanciers craignent que la négociation se prolonge encore jusqu’à fin juin, la véritable date butoir étant le 30 juin, date de la fin du deuxième plan d’aide et d’une échéance conséquente due au Fonds monétaire international de 1,6 milliard d’euros. Il n’est pas impossible que les choses se dénouent lors de l’Eurogroupe, la réunion des ministres des finances de la zone euro, le 18 juin, à Luxembourg, voire au Conseil européen des 25 et 26 juin, à Bruxelles.
De fait, il faut aussi du temps à M. Tsipras pour « atterrir » politiquement à Athènes : le jeune dirigeant devra faire accepter aux Grecs des efforts difficiles. D’où sa stratégie de négociation en dents de scie – deux pas en avant, un pas en arrière –, qui a pu irriter ses créanciers ces derniers jours.
D’où aussi, sa volonté de multiplier les rendez-vous au sommet. Le premier ministre grec a toujours dit qu’il voulait un accord politique, et pas se faire dicter les réformes par des « techniciens » de l’ex-troïka des créanciers. Le choix des mots a son importance pour M. Tsipras, soucieux de prouver qu’il s’est battu jusqu’au bout pour un accord équilibré. Mercredi soir, il a ainsi mis l’accent sur une solution permettant de relancer la « croissance » ou de régler la question de la « viabilité de la dette grecque ».
Obtenir l’ouverture d’une renégociation de la dette pourrait l’aider à contenir l’opposition interne à son parti, Syriza, dont l’aile gauche continue d’exiger le respect des promesses de sa campagne législative, comme le rétablissement du salaire minimum à 751 euros. Alexis Tsipras a déjà dû en repousser cette réévaluation, en deux temps, à octobre 2015 et mars 2016.
Le gouvernement avance cependant, ces jours-ci, sur des lois hautement symboliques pour la gauche concernant des questions de société, une façon de donner des gages à sa majorité. Une loi sur la naturalisation des enfants d’immigrés de deuxième génération – nés et scolarisés sur le sol grec – est en cours de discussion au Parlement. Un partenariat à la manière du pacs français, donnant des droits en matière fiscale ou patrimoniale aux couples homosexuels, devrait être prochainement soumis à consultation publique.