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La «taxe Nutella» fortement rabotée sous la pression des industriels

Lien publiée le 18 mars 2016

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Figaro) La taxe additionnelle sur l'huile de palme sera dix fois moins élevée que prévu. Alors qu'elle devait initialement atteindre 900 euros par tonne en 2020, elle a été abaissée à 90 euros par les députés.

Les amateurs de confiseries, biscuits, plats préparés et pâtes à tartiner (entre autres) peuvent respirer. Si la taxe additionnelle sur l'huile de palme ne disparaît pas, elle sera fortement revue à la baisse. Les députés ont décidé dans la nuit de jeudi à vendredi d'instaurer à partir de 2017 une taxe additionnelle progressive, censée atteindre 90 euros par tonne en 2020, à la taxe spéciale sur les huiles végétalespour les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l'alimentation humaine.

Le Sénat, à l'initiative des écologistes, avait en première lecture créé une contribution additionnelle très élevée: 300 euros la tonne en 2017, 500 euros en 2018, 700 en 2019 et 900 à partir de 2020. L'Assemblée a donc décidé d'en diviser le poids par 10, en deuxième lecture du projet de loi biodiversité. Son taux sera ainsi de 30 euros par tonne en 2017, 50 euros en 2018, 70 euros en 2019 et 90 euros en 2020.

«Cette taxation est plus réaliste»

Barbara Pompili, secrétaire d'État à la Biodiversité

C'est la troisième fois depuis 2012 que les parlementaires débattent de la fameuse «taxe Nutella», en référence à l'utilisation de l'huile de palme dans la célèbre pâte à tartiner de Ferrero. Cette surtaxation avait entraîné après son vote au Sénat les protestations des deux principaux producteurs mondiaux, l'Indonésie et la Malaisie, ainsi que de l'industrieagroalimentaire. Et la ministre de l'Environnement, Ségolène Royal, avait suscité l'indignation en juin 2015 en Italie en appelant à cesser de manger du Nutella, avant de présenter ses excuses quelques jours plus tard.

Tout en envoyant un «signal», «cette taxation est plus réaliste (...) Nous ne voulons ni d'un boycott de ces deux pays, ni même de l'huile de palme», a plaidé la secrétaire d'État à la Biodiversité, l'écologiste Barbara Pompili. Il s'agit «de ne pas déstabiliser brutalement les approvisionnements des entreprises installées en France, ainsi que les revenus des producteurs de ces huiles, qui se situent majoritairement dans des pays en développement», a renchéri le socialiste Jean-Louis Bricout. Si les palmeraies d'où est issue l'huile de palme utilisée dans les produits alimentairesse trouvent principalement en Indonésie et en Malaisie, producteurs de 80% des stocks, on en trouve également en Amérique latine et en Afrique de l'Ouest.

La France est un petit importateur d'huile de palme (150.000 tonnes sur une production mondiale de 62 millions de tonnes), mais les pays producteurs craignent une contagion à d'autres pays consommateurs. Les écologistes au Sénat avaient justifié cette surtaxation par les «effets dévastateurs de la culture industrielle du palmier à huile sur la biodiversité», pointant notammentles ravages sur les forêts réquisitionnées pour accroître les plantations d'huile de palme.

L'une des huiles les moins taxées

Autre argument: l'huile de palme fait aujourd'hui partie des huiles végétales les moins taxées en France. Selon un rapport de la commission du Développement durable de l'Assemblée, les tarifs de la taxe spéciale en 2016 sont de 189 euros par tonne pour l'huile d'olive, 170 euros par tonne pour l'huile d'arachide, 113 euros par tonne pour l'huile de coprah et de palmiste, 104 euros par tonne pour l'huile de palme et de 87 euros par tonne pour l'huile de colza et l'huile de pépins de raisin.

La portée de cette taxe additionnelle risque toutefois d'être limitée, les députés ayant décidé que les huiles issues d'une production «durable» en seraient exonérées. La célèbre pâte à tartiner Nutella pourrait y échapper. Comme d'autres industriels, Ferrero recourt en Indonésie à la certification de la RSPO (Table Ronde pour une Huile de Palme Durable). D'après la rapporteure Geneviève Gaillard (PS), toutefois, cette «labellisation n'est pas encore de top niveau». À l'opposé, plusieurs députés LR ont repris l'argumentation des industriels français, dont l'entreprise spécialisée dans les pâtes à tarte Céréalia, selon lesquels la taxation «mettrait en péril leurs efforts pour développer l'huile de palme durable».

Après une seconde lecture du projet de loi prévue en mai au Sénat, une nouvelle lecture aura lieu, avec un vote définitif en juin ou juillet à l'Assemblée, celle-ci ayant constitutionnellement le dernier mot.