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Lycée Bergson : "La violence policière était totalement déroutante"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Les camarades du jeune lycéen frappé jeudi par des policiers, lors du blocus de cet établissement parisien, ont témoigné vendredi de l’incroyable brutalité de cette intervention. Une enquête confiée à l’lGPN a été ouverte par le parquet de Paris.
Dès huit heures du matin, vendredi, environ deux cents élèves du lycée Henri-Bergson, situé dans le XIXe arrondissement de Paris, se sont rassemblés pour protester contre les violences policières dont certains de leurs camarades ont été l’objet, hier matin, lors du blocus de leur établissement contre la Loi El Khomri.
La brutalité de cette intervention a été révélée par une brève vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. Un lycéen de 15 ans, Adan, surnommé Danon, élève de seconde, y apparaît d'abord maintenu au sol par trois CRS puis relevé et frappé violemment au visage par l'un des agents. Le jeune homme, le visage ensanglanté, a été conduit au commissariat puis relâché après avoir été entendu par la police.
«La scène a duré bien plus longtemps. C'était d'une violence déroutante », raconte Iliès. Il ose à peine répéter les insultes et menaces «contre nos familles ou homophobes » proférées en même temps que les coups. « Certes, nous avons lancé des œufs et de la farine mais qu'est-ce que pèse un œuf contre une matraque ? », interroge le lycéen pour qui la réaction des policiers « était totalement disproportionnée ». Une disproportion et, plus généralement, des violences dénoncées par la Fidl et l’Unef qui, aux côtés d'une vingtaine d'organisations de jeunes, ont appelé la journée d'action de jeudi.
Diane s'est interposée entre son petit ami et le policier cagoulé qui commençait à le frapper, lui tirant les cheveux et lui donnant des coups de pieds pour lui écarter les jambes en l'injuriant vertement. Le couple venait d'arriver sur les lieux. Le garçon s'apprêtait à filmer la scène : « Les grenades lacrymogènes. L'encerclement des lycéens par les CRS, la fuite de certains vers la rue Sécrétant stoppés net par des croches pieds et rudement matraqués... » Assia est désabusée par ce qu'elle a vu : « Je suis sûre que le fait que nous soyons dans le 19e arrondissement a compté. La police n'interviendrait pas comme cela ailleurs. Depuis le début de notre mobilisation, les CRS ne sont jamais loin du lycée ».
Plusieurs témoins évoquent le cas d'un deuxième lycéen, Stiven, violemment pris à parti par les forces de l'ordre. L'élève de première aurait été vu, au sol, tiré par les pieds, peut-être inanimé, et emmené au commissariat. Trois à cinq jeunes ont suivi le même chemin. Tous en sont ressortis dès jeudi soir, à priori sans que des poursuites n'aient été engagées.
Les violences ont, en tout cas, été reconnues. Vendredi, en milieu de matinée, une délégation de lycéens a été reçue par le préfet de police de Paris, le recteur de l'Académie de Paris, en présence du proviseur du lycée et d'enseignants. Le préfet de police aurait évoqué trois policiers impliqués dans les violences dont un de la brigade anti-criminalité. L'auteur du coup contre Adan aurait été suspendu. Une enquête a été ouverte par le parquet de Paris confiée à l'IGPN, la « police des polices ». Les lycéens ont indiqué au préfet qu'ils disposaient de plusieurs vidéos témoignant de violences sur d'autres jeunes qu'ils fourniront aux enquêteurs. De son côté, l’adolescent, qui se plaint de douleurs dans le haut du corps, envisage de déposer plainte.
Dans un communiqué publié vendredi, la fédération des parents d'élèves FCPE du lycée Bergson s’étonne également du déploiement policier de jeudi. « Ailleurs, à Paris, ce type de blocus, caractéristique de la mobilisation lycéenne, ne provoque pas d'intervention policière. » La FCPE dénonce également la brutalité des agents : « Plusieurs élèves ont reçu des coups de matraque, subi des jets de lacrymogène et ont été frappés. Certains de ceux qui fuyaient ou observaient de loin ont été rattrapés et ont de même subi des violences. » Les parents d’élèves s’inquiètent pour l’avenir. « La violence policière n'est pas la meilleure façon d'éduquer à la citoyenneté et nous avons les plus grandes craintes sur ce que nos enfants pourront retenir des épisodes de la journée. »
En fin de matinée, vendredi, une centaine de lycéens de plusieurs établissements parisiens avaient rejoint ceux de Bergson. Un cortège improvisé s'est rendu au commissariat central du Xe arrondissement, à la mairie puis au commissariat du XIXe avec l'intention de protester contre ces violences. Des jets de pierre et diverses dégradations commises par un groupe de manifestants ont mis fin à cette manifestation. « Des casseurs sont venus et ont motivé un peu des jeunes qui n'ont plus d'espoir et c'est parti en vrille », regrette Belhassen, un élève.