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Stiglitz propose de mettre fin “en douceur” à l’Euro
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Selon le Nobel d'Economie, l'Euro est un échec qui condamne l'Europe à la stagnation. Et il ne peut être réformé car l'Allemagne ne le voudra jamais.
Avec la baisse des taux d’intérêt et l’apaisement apparent de la spéculation sur les dettes souveraines des pays européens, on pouvait croire le débat sur la monnaie unique refermé pour un moment. Erreur ! Une nouvelle charge contre l’euro est lancée, et son instigateur n’est pas n’importe qui: c’est le Nobel (1) Joseph Stiglitz, ex-économiste en chef de la Banque mondiale et penseur adulé par la gauche.
Stiglitz vient de publier un livre «The Euro: How a Common Currency Threatens the Future of Europe» («l’Euro: comment une monnaie commune menace l’avenir de l’Europe») pour appeler à mettre fin «en douceur» à la monnaie unique, dont le fonctionnement est, selon lui, vicié à la base. Selon Joseph Stiglitz, l’euro n’a pas été pensé au tout début des années 1990, selon des règles économiques sérieuses: il résulte d’un acte de foi aveugle, lié aux circonstances de l’époque (la chute du mur, la globalisation…) et à l’offensive idéologique néolibérale. Il résume son diagnostic en deux phrases dans un article qu’il a publié mercredi dans le «Financial Times»:
Il était presque inévitable que la suppression de deux mécanismes-clefs, la fixation des taux d’intérêt et les taux de changes, sans les remplacer par quoi que ce soit, rendrait les ajustements macro-économiques difficiles. Ajoutez à cela le fait que la banque centrale ait eu pour mandat de se concentrer sur l’inflation et le fait que les pays membres soient encore plus contraints dans leur déficits budgétaires, le résultat a été un taux de chômage excessivement élevé et un PIB constamment en dessous de son potentiel»
L'approche allemande trop différente
Réformer l’euro passerait, explique Stiglitz, par quelques mesures assez simples, du moins sur le papier :
- Bâtir une union bancaire commune et un système d’assurance des dépôts commun (ce que l’UE a commencé à faire) ;
- Fixer des règles pour brider les surplus commerciaux de certains pays membres (suivez mon regard) ;
- Créer des obligations européennes ou tout autre mécanisme de mutualisation de la dette ;
- Orienter la politique monétaire sur l’emploi, la croissance et la stabilité (et pas seulement l’inflation) ;
- Suivre une politique industrielle qui permette aux pays «en retard» de rattraper les pays leaders ;
- Abandonner les politiques d’austérité pour adopter des politiques budgétaires expansives.
Pourtant, l’économiste ne se fait pas d’illusion: de telles réformes, dans le contexte politique actuel, sont impossibles compte tenu des positions allemandes. Berlin considère en effet que l’Europe n’est pas une «union de transferts». Or seuls des transferts (budgétaires notamment) permettraient de pallier la suppression des mécanismes classiques d’ajustement monétaires des pays, taux d’intérêt ou taux de change. Stiglitz avance dans son livre la thèse selon laquelle il est de toute façon très difficile de faire monnaie commune avec l’Allemagne, car son approche économique, marquée par un attachement très fort à l’austérité, est différente de tous les autres pays du monde.
Un euro dur et un euro mou ?
Joseph Stiglitz propose donc de mettre fin à l’Euro, ce qui ne mettrait pas fin, selon l'Américain, à l’Europe : cela permettrait au contraire de sauver celle-ci, argue-t-il. La monnaie unique pourrait éventuellement selon lui être remplacée par deux zones monétaires, l’une au nord, l’autre au sud, avec des possibilités de dévaluations du second par rapport au premier qui permettraient des ajustements moins douloureux que ceux qui sont actuellement infligés aux pays du sud.
Pascal Riché
(1) «Nobel» étant un abus de langage, le Nobel d’économie n’existant pas, mais c'est une autre histoire.