[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Agenda militant

    Newsletter

    Ailleurs sur le Web [RSS]

    Lire plus...

    Twitter

    La grande farce médiatique d’Alep

    Syrie

    Lien publiée le 16 décembre 2016

    Tweeter Facebook

    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    https://blogs.mediapart.fr/raphael-lebrujah/blog/151216/la-grande-farce-mediatique-dalep

    Des députés de droite et de gauche partent pour sauver Alep. De nombreux médias mainstream s'agitent sur les réseaux sociaux sur ce drame. Le soutien d'une certaine frange médiatique est bien intéressé, en opposition totale aux intérêts des alépins.

    Les rebelles « modérés » mieux que le régime ?

    Il est important de souligner que les crimes commis par le régime à Alep Est sont abominables. Il y a des massacres de civils sous les bombardement brutaux de l'aviation russe sans oublier que cela fait depuis 2013 que les quartier rebelles sont soumis à des bombardements de bombes barils du régime syrien. Il est juste de dénoncer ces massacres et les nombreuses et probables exécutions sommaires qui ont dû avoir lieu à Alep. C'est le résultat de l'implication de puissances étrangères et régionales aux appétits voraces, mais cela n’efface pas l'alerte de l'ONU sur les rebelles « modérés » d'Alep : en effet, ces derniers utilisent ces mêmes civiles massacrés par le régime comme boucliers humains et les mitraillent quand ils tentent de fuir.

    Les rebelles en question sont coupables de nombreux crimes de guerre tout comme le régime. Ils ont bombardé sans merci les populations d'Alep Ouest et le quartier kurde de Sheikh Maqsoud, ont infligé un flot ininterrompu de cercueils à des civiles innocents en particulier kurdes. Par racisme et jalousie. Quand on demandait pourquoi les rebelles bombardaient ces quartiers, ils répondaient froidement « parce que le tien n'est pas détruit, il a été épargné par le régime ». Pourtant, les kurdes eux ne détruisaient aucun quartier. Ils ne s'attaquaient pas aux civils. Ils se défendaient et préservaient juste leur sécurité. Pourquoi faire la guerre au régime quand il faut déjà gérer celle avec les rebelles « modérés » soutenus par l'Occident, l'Arabie Saoudite, le Qatar et la Turquie ? Quand le dernier médecin de Sheikh Maqsoud est mort en septembre dernier, aucun de ces agitateurs pro-rebelles n'a pleuré une seule larme. Le quartier de Sheikh Maqsoud a reçu qu'une seule fois de l'aide humanitaire en 5 ans de guerre et aucun des agitateurs d'aujourd'hui n'a alerté une seule fois l'opinion sur la situation catastrophique de ce quartier kurde, équivalente en horreur à ce qui peut être vécu aujourd'hui dans les quartiers rebelles.

    La majorité des groupes rebelles d'Alep sont d'obédience islamiste, c'est à dire pour la charia et l'instauration d'un état islamique. Cela signifie tout simplement une autre dictature, des pratiques barbares comme la lapidation ou encore la décapitation des kouffar (mécréants), chose déjà pratiquée dans les quartier d'Alep Est où, au mois juillet, un gamin de 12-13 ans, présenté comme un enfant soldat (ce que les pro-régimes ont nié), a été décapité par les rebelles de Nour Al-Zinki. Ce groupe est présenté comme modéré par les médias occidentaux alors qu'il s'agit d'une milice qui se bat pour l'instauration de la charia en Syrie : ils n'ont pas hésité à massacrer des garnisons entières de soldat désarmés comme à l’hôpital et c'est sur ces malfrats, qui répandent la terreur depuis 4 ans dans les quartiers Est d'Alep, qu'on devrait s'apitoyer ? Sur ces hommes au projet politique aussi mortifère ? De qui se moque-t-on ?

    On nous demande de regretter les tenants d'une bien triste cause islamiste bien loin des républicains de Guernica auxquels ils ont été comparés par certains journaux, agités par un idéal d’égalité. On dénombre pour l'instant plusieurs dizaines de morts civils à Alep, probablement plus, d'après l'OSDH, rien que pour le 13 Décembre. Il semble que cela prend fin à travers un accord entre le régime, la Turquie et la Russie pour l'évacuation des derniers quartiers rebelles d'Alep Est. Bien que les morts et leurs familles d'Alep aient le droit légitime à une justice, les deux événements sont incomparables en proportion et encore moins en termes de projet politique. C'est un état autoritaire panarabe qui écrase des groupes dissidents autoritaires panislamistes, en massacrant de nombreux civils de manière abominable au passage, comme l'auraient fait les islamistes, si ces derniers avaient gagnés. On utilise les émotions suscitées par les crimes du régime pour justifier une politique de soutien à ces groupes djihadistes.

    Comment en est-on arrivé là ?

    Pourquoi les rebelles ont failli ? Manque de soutiens occidentaux ? Pourtant ils sont armés de nombreux missiles anti-chars, de blindés comme jamais n'ont vu les kurdes des YPG/YPJ, qui eux tiennent tête à Daech depuis des années. Ce n'est que très récemment que les YPG/YPJ ont reçu des livraisons d’armes, principalement légères. Pourquoi ? Parce que les YPG/YPJ ont refusé dès le début du conflit de se mettre sous la coupe d'une puissance étrangère pour mener leur combat. Ils n'ont pas accepté de faire des vidéos où l'on était payé pour crier « Allah Akbar ». Les YPG/YPJ n'ont pas accepté le moindre compromis sur leur projet politique. Ces groupes rebelles tant admirés par les nouveaux chiens de garde du système ont accepté des armes en échange d'un projet politique qui correspond aux aspirations de leurs soutiens. Les puissances régionales comme l’Arabie Saoudite, le Qatar et la Turquie ayant eu le dernier mot, c'est un projet politique défendu par ses trois entités islamistes radicales qui a gagné. Trois dictatures religieuses pour mener le mouvement rebelle et en faire ce qu'ils voulaient. Le résultat est celui que l'on connaît : la Turquie, pour empêcher la réunification des cantons d'Afrin et de Kobané, a déporté 2500 rebelles pour les mobiliser contre les kurdes. Logique qu'Alep tombe quand on la vide de ses forces. Ils ont accepté de devenir les chiens de puissances étrangères et ils le payent au prix fort aujourd'hui. Ces rebelles sont complètement dépendants de ces puissances aux appétits voraces. Les YPG/YPJ n'ont que très peu d'armes mais eux sont libres de prendre les décisions qui correspondent à leur désir de démocratie, de liberté et de justice.

    Les oubliés

    Peut-être que le plus scandaleux réside en cela. Tous ces gens, ces politiques, ces journalistes et autres faiseurs d'opinion sélectionnent leurs indignations. Quand il s'agit des massacres sur Cheikh Maqsoud : rien ! Presque pas un mot pour dénoncer les horreurs des bombardements (et pas seulement ceux des rebelles...). Quand 200 civils se font brûler vivants dans les caves de Cîzre où la population et leurs représentants élus se sont organisés pour la démocratie et pour lutter contre la tyrannie d'Erdogan, pas un mot. Quand des femmes combattantes pour leur droit à l'auto-détermination comme Ekin Van, sont traînées à même les rues des villes kurdes, enchaînées aux 4X4 turcs, dénudées et exposées comme des trophés dans la ville : pas un mot. Quand les chars turcs encerclent et assiègent des mois durant Nusaybin pour l'affamer et exterminer toute résistance, pas un mot. Quand Mr Erdogan provoque l'Occident et le menace, comme par magie on commence à critiquer sa dictature. Mais pourtant, c'est par ce silence malsain que certains l'ont laissé s'imposer.

    La vérité, c'est qu'il était déjà tard, et que par cette sélection bien choisie des crimes à dénoncer qu'on créait des monstres. Par des accords de silence sur les crimes contre l'humanité, la destruction de plusieurs villes kurdes de Turquie est un exemple criant, un crime qui ne mérite pas celui d'Alep pour les donneurs de leçons médiatiques. Les exemples sont légion ; on ne parle même pas de la médiatisation de la destruction du patrimoine de l'humanité de Palmyre... mais quand il s'agit du quartier de Sûr à Dyarbakir, classé lui aussi, encore une fois pas un mot. Il en est ainsi depuis longtemps : quand Saddam Hussein a lancé l'opération dans l'objectif de massacrer les kurdes d'Irak, qui protestait ? Toujours ce même refrain silencieux et malsain. Il n'y en a que pour ceux qui se conforment à cette vision post-coloniale. Les médias et leurs chiens de garde commentent l'actualité tels des seigneurs de l'information, choisissant les victimes à commémorer, celles qui offrent de véritables opportunités spectaculaires et marchandes, et celles à oublier.. Cette petite élite essentiellement blanche donne des bon points aux « arabes sunnites » et qui efface de leurs discours ceux qui se sont fait oppresser par ces derniers depuis de nombreuses décennies : encore une fois les kurdes. C'est un racisme mal déguisé qui se cache aussi derrière : ce sont toujours des crimes d'arabes ou de turcs qu'on oublie. Par contre quand des kurdes se font péter sur la police à Istanbul : Scandale ! On aurait aimé les mêmes réactions quand les villes kurdes de Sinark, Nusaybin et Cîzre ont été rasées. On aurait aimé voir se révolter certaines organisations féministes françaises quand les femmes kurdes étaient traînées nues à même le sol, on aurait aimé voir se révolter certains journalistes quand les kurdes subissaient la torture de masse. Toujours ce silence infâme, ce choix des crimes bien orientés et intéressés au profit d'une minorité pour manipuler une majorité.

    L'autre voie

    La voie de la justice pour les peuples du Moyen-Orient ne passent pas par nos médias. Cette voie passe d'abord et avant tout par un projet social et émancipateur. Elle passe par la mise en place d'une véritable égalité et solidarité entre les peuples. Elle passe par la destruction des états-nations qui ont toujours façonné des identités dominantes contre d'autres. Elle passe par le soutien aux véritableséléments progressistes de la révolution en Syrie et au Moyen-Orient. La seule alternative crédible est le confédéralisme démocratique, dont les valeurs centrales sont le féminisme, l'écologie et la démocratie. Incarnées aujourd'hui par les FDS, dont les principales composantes sont les YPG/YPJ, organisation dans laquelle se retrouvent des kurdes, des arabes, des syriaques, des turkmènes, des arméniens, des chrétiens, des tchétchènes, des palestiniens et j'en oublie encore ! Seule force multi-confessionnelle, multi-ethnique et démocratique de la Syrie. Laissons cette farce d'humanité et victimaire aux chiens de garde de l'Occident et tournons-nous vers la solution.