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Le socialiste Lenin Moreno remporte la présidentielle en Equateur
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le candidat de l’opposition, Guillermo Lasso, n’a pas reconnu sa défaite face au dauphin de l’actuel chef de l’Etat, Rafael Correa, et exigera un recomptage des voix.
La continuité de la « révolution citoyenne » du président équatorien, Rafael Correa, est assurée. Dimanche 2 avril, Lenin Moreno, 64 ans, le candidat du parti au pouvoir (Alianza Pais), a remporté le second tour de l’élection présidentielle avec 51,11 % des votes exprimés (et 95,64 % des bulletins dépouillés). « Nous saurons écouter les critiques », a promis le socialiste, appelant ses compatriotes « à travailler ensemble pour le pays ». Il entrera en fonction le 24 mai, dans un pays profondément divisé. Mais son adversaire, le banquier très libéral Guillermo Lasso, 61 ans, n’a pas reconnu sa victoire.
Dénonçant un risque de fraude, M. Lasso avait, avant même le début le scrutin, appelé les opposants à « défendre leur vote dans la rue ». Il a annoncé dimanche soir que la coalition d’opposition demanderait un recomptage des voix dans toutes les provinces du pays. M. Lasso fonde ses accusations de fraude sur la différence entre les résultats d’une enquête à la sortie des urnes – qui le donnait gagnant avec huit points d’avance – et le résultat du Conseil national électoral (CNE).
« Un style de gouvernement différent »
Le ton affable et le caractère conciliant de M. Moreno, gestionnaire de formation, le distinguent de son mentor. Au pouvoir depuis dix ans, Rafael Correa s’est forgé à longueur de discours une image d’homme autoritaire, intraitable avec ses adversaires, intolérant avec la presse et arrogant avec tout le monde. Tout en s’engageant à maintenir la ligne politique de son prédécesseur, M. Moreno, marié, père de trois filles et paraplégique à la suite d’une attaque à main armée, a promis « un style de gouvernement différent ».
Les deux hommes sont très proches. Lenin Moreno a été vice-président de Rafael Correa entre 2007 et 2013. Il s’est choisi pour vice-président Jorge Glas, à ce poste actuellement, et homme de confiance de l’actuel président. L’opposition est convaincue que ce choix lui a été imposé par le chef de l’Etat et que celui-ci va continuer à tirer les fils du pouvoir. M. Correa a annoncé qu’il avait l’intention de vivre un temps en Belgique, dont son épouse est originaire.
Dès la fermeture des bureaux de vote, à 17 heures, Guillermo Lasso se disait gagnant et prononçait un étonnant discours de vainqueur, sur la base du seul sondage à la sortie des urnes de l’institut Cedatos-Gallup. Une semaine plus tôt, il donnait Lenin Moreno gagnant. A la différence du premier tour, le 19 février, quand il avait fallu attendre les résultats pendant quatre jours, ceux-ci sont cette fois tombés en moins de quatre heures.
Se basant sur un sondage effectué à la sortie des urnes, Guillermo Lasso a prononcé un étonnant discours de victoire dès 17 heures dimanche. C’est en réalité son opposant qui remportera le scrutin selon les résultats officiels. Jose Sanchez / AP
Un pays bastion de la gauche
Un important dispositif policier a été déployé dimanche devant le CNE, où des milliers d’opposants sont venus manifester leur mécontentement. Certains se sont dits « prêts à tout pour ne pas se laisser piquer l’élection », l’un parlant même de guerre civile. Mais l’ambiance est restée paisible et, à la télévision, les dirigeants des deux bords ont multiplié les appels au calme. A quelques centaines de mètres de là, devant le siège d’Alianza Pais, sur l’avenue de Los Shyris, les militants, le cœur en fête, ont entamé dans la nuit fraîche la chanson Hasta siempre, comandante, du Cubain Carlos Puebla, le vieil hymne de la gauche latino-américaine.
A travers toute l’Amérique latine, les partisans du socialisme du XXIe siècle ont célébré la victoire de Lenin Moreno. Après l’élection de l’ultralibéral Mauricio Macri en Argentine et l’éviction de Dilma Rousseff au Brésil, le petit Equateur fait figure de bastion de la gauche. Mais sur place, cette image exaspère les militants et les intellectuels de la gauche anti-Correa, les écologistes et le mouvement indigène. « Correa n’a rien de socialiste ni de démocrate. Il a mis en place un régime autoritaire, qui réprime les mouvements sociaux et vend le pays aux transnationales du pétrole et des mines », résume l’économiste alternatif Alberto Acosta.
Le futur président n’a ni le charisme ni le leadership de son prédécesseur, et sa majorité parlementaire est réduite. La manne pétrolière qui, pendant près de dix ans, a financé politique sociale et infrastructures, se tarit, la réévaluation du dollar pénalise l’économie, et le chômage est en hausse. La continuité de la révolution citoyenne est assurée ; ses difficultés aussi.