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Afrique du Sud: Le départ d’un corrompu n’est pas la fin de la corruption
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
783 : c’est le nombre d’inculpations visant Jacob Zuma qui, quelques heures avant sa démission forcée de la présidence de la République d’Afrique du Sud, lors d’une interview à la SABC (South African Broadcasting Corporation), la télévision nationale, affirmait qu’il ne comprenait pas ce qu’on lui reprochait et laissait entendre qu’il était victime d’un vaste complot.
La corruption de Zuma se caractérise par un nombre important d’affaires et par la diversité des entreprises impliquées, y compris françaises, comme Thalès accusée de lui avoir offert des pots de vin lorsqu’il était vice-président. Le poids économique de cette corruption est inquiétant. En effet, l’alliance nouée par Zuma avec les frères Gupta, des hommes d’affaires milliardaires, leur ont permis de mettre la main sur des pans entiers de l’économie sud-africaine : un pouvoir qui leur a permis d’interférer dans la vie politique du pays.
Dégénérescence de l’ANC
Le départ de Zuma s’est posé dès qu’il a perdu la majorité de l’ANC en 2017. Deux candidats étaient en lice, dont son ex-épouse Nkosazana Dlamini-Zuma, qui a développé un discours plutôt de gauche, le même que celui que Zuma avait tenu pour s’emparer de l’ANC en 2007 contre Thabo Mbeki. Mais cette fois-ci la recette n’a pas marché et c’est finalement Cyril Ramaphosa, dont les positions sont des plus conciliantes avec la finance, qui a remporté la majorité de l’ANC.
La corruption de Zuma est certainement la plus criante, mais elle ne doit pas cacher que c’est l’ensemble de l’appareil de l’ANC qui est profondément corrompu. Son fonctionnement n’est plus qu’un vaste réseau de clientélisme qui gangrène la société.
D’ailleurs le nouveau président de la République Cyril Ramaphosa est lui aussi exemplaire de ce que sont devenus la plupart des dirigeants de l’ANC qui se sont battus dans leur jeunesse avec courage et abnégation contre l’apartheid. Le syndicaliste Cyril Ramaphosa est devenu homme d’affaires et figure désormais parmi les hommes les plus riches du continent, au prix du reniement de ses idéaux. Ainsi comme membre du conseil d’administration de la mine de platine de Marikana, il a approuvé l’intervention des forces de police pour mettre fin à la grève de 2012, qui a débouché sur la mort de 34 mineurs.
Le social en berne
Le curriculum vitae du nouveau président n’apporte donc aucun espoir pour les populations. Il ne fera qu’accentuer la politique libérale du pays, renforçant inégalités et misère.
Le tableau économique et social en Afrique du Sud reste catastrophique. Le chômage avoisine les 30 %, les inégalités s’aggravent et les discriminations positives censées lutter contre les conséquences de l’apartheid ont surtout bénéficié à la nomenklatura de l’ANC plutôt qu’à la population. Les derniers chiffres disponibles montrent qu’une famille noire gagne en moyenne six fois moins qu’une famille blanche. Cette situation engendre rancœur et violence xénophobe à l’endroit des immigréEs qui viennent pour la plupart des pays limitrophes.
Pour autant, l’Afrique du Sud c’est aussi le printemps étudiant de 2015 qui a fait plier le gouvernement sur sa tentative d’augmenter des frais d’inscription à l’université, l’émergence de structures syndicales ouvrières combatives et l’apparition d’organisations politiques comme le parti Economic Freedom Fighters qui, au-delà de leurs limites évidentes, témoignent d’une volonté de la population ne pas se laisser faire.
Paul Martial