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Le concept de "genre" ne doit pas nous conduire à nous défaire de "sexe"

Lien publiée le 14 mars 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2018/03/13/le-concept-de-genre-ne-doit-pas-nous-conduire-a-nous-defaire-de-sexe/

Je n’ai pas les compétences pour traiter de certains articles. J’indique néanmoins que j’ai été très intéressé par les textes de Juliet Mitchell « Débattre de la différence des sexes, de la politique et de l’inconscient » (texte suivi des observations de Jacqueline Rose), de Michel Kail « Juliet Mitchell répond à Judith Butler. Nietzschéisme, anti-naturalisme, matérialisme » et de Richard Wolin « Heideger : la question juive ». J’indique aussi de forts désaccords avec le traitement du genre et des sexes de Howard Chaing « Egalité des relations intimes et Soi(s) transparent(s) : reconnaissance juridique du mariage transgenre à Hong Kong ».

Je m’attarde sur deux textes. « Fragmenter le corps, fragmenter les droits » d’Assumpta Sabuco I Canto et « Geneviève Fraisse à contre-courant » d’Isabel Morant.

« Plutôt que d’accepter nos caractéristiques corporelles et physiques, il s’agit de lutter pour atteindre un idéal social, d’avoir foi en une stratégie magique par laquelle le contrôle du corps assure la réalisation des fins socialement valorisées ». Assumpta Sabuco I Canto souligne « la très grande fragmentation qui transforme le corps des femmes en marchandise ». Son article sur les représentations, les pratiques et les idéaux repose sur : « d’une part, le regard sur la dislocation des identités magiques construites à travers l’esthétique et le culte du corps ; d’autre part, l’introduction de technologies imaginaires dans les luttes sur les droits du corps dans une perspective féministe ».

L’autrice aborde, entre autres, le « mythe de la beauté » construit en remplacement de la « mystique féminine », (en complément possible,Mona Chollet : Beauté fatale. Les nouveaux visages d’une aliénation fémininelomnipresence-de-modeles-inatteignables-enferme-nombre-de-femmes-dans-la-haine-delles-memes/), le façonnage des corps, l’« obligation » de bonne apparence, la santé assimilée à l’aspect physique, la médicalisation croissante de la naissance (en complément possible, Marie-Hélène Lahaye :Accouchement, les femmes méritent mieuxreplacer-les-femmes-au-coeur-des-dispositifs-decisionnels/), la tension entre « la technicisation de la maternité et l’exaltation de cette dernière comme désir », la construction sociale du corps féminin et le droit à l’avortement, les produits d’entretien des corps féminins…

Il y a donc substitution « progressive des corps réels par les corps imaginés », propositions industrielles d’extensions diverses jusqu’aux transformations permanentes par interventions médicales. Les corps des hommes (« L’obéissance de plus en plus grande des hommes aux diktats de la mode correspond à l’expansion du marché des industries d’embellissement ») et les femmes ne sont ni envisagées ni traitées de la même manière, « Les chances d’acquérir un corps parfait sont sexuées ». L’autrice souligne le mécanisme d’oppression engendré par la fragmentation esthétique, les sacrifices, les dépendances, les dépenses financières, sans oublier l’anorexie. Mais aussi l’équation fantasmatique de la beauté comme signe de santé, les éléments d’esthétiques qui limitent le mouvement des femmes, l’illusion de la jeunesse permanente, les nouvelles hiérarchies de corps, le système de techno-beauté…

Assumpta Sabuco I Canto analyse l’idéologie et les politiques natalistes dans l’Etat espagnol, les discours sur la supériorité de l’Occident, la charge naturaliste (« la réinvention magique de la nature ») de la féminité, la grossesse comme maladie et aussi les résistances, les changements sociaux profonds.

Elle insiste aussi sur le « désir » des hommes d’être père se transformant en « droit » à l’enfant et au droit à louer légalement un ventre de femme (« mère porteuse transformée en réceptacle sans droits »), la volonté de protéger les non-nés au mépris des droits des femmes, les menaces « les plus irrépressibles de la mondialisation »…

Le texte d’Isabel Morant est la traduction de la préface de l’édition espagnole du livre de Geneviève Fraisse « Les excès du genre. Concept, image, nudité »1.

L’autrice retrace le parcours de Geneviève Fraisse. Elle aborde, entre autres, les problématiques de méthode et d’épistémologie, « Qui pense et comment penser sont les points d’ancrage de mon engagement dans cette recherche » (GF), les champs possibles d’investigation, la subversion et l’envers du pouvoir, l’histoire et l’historicité, la démocratie exclusive, la peur de la confusion des sexes, l’assignation des femmes à l’espace domestique, « les femmes assignées à l’espace domestique resteront en dehors des lois de la politique, soumises à l’empire de la nature toute-puissante, invariable et immobile », la disjonction des espaces public et privé, la différence des sexes et la domination masculine…

« Les excès du genre. Concept, image, nudité, publié en 2014, offre une perspective originale sur la querelle sexe/genre,ainsi que sur la critique des stéréotypes et l’usage de la nudité en politique ».

Neutre et dualité, « Comme concept, le genre est donc à la fois une proposition philosophique (penser le sexe et les sexes), et l’outil, le moyen de mettre en œuvre cette proposition (rendre visible, donner à voir » (GF). Isabel Morant parle de l’excès dans le genre, de la sexuation du monde2, du singulier devenu pluriel, « né au singulier – le genre – il est devenu aujourd’hui pluriel – les genres », de la dualité réintroduite, de la science capable de rendre compte de la sexuation du monde « ne peut être ni être en dehors du temps ni se situer à la marge des sujets qui font l’histoire », de la notion de « prisme », de la pensée de l’émancipation et des éléments sociaux et politiques qui participent à sa construction…

Sexe et genre, « garder le mot sexe à coté du mot genre » (GF), critique de la critique des stéréotypes, « il semble ne pas avoir d’histoire », production des femmes, contextualisation, « Les images n’existent que par les sujets qui les portent, qui les créent et qui les reçoivent », le modèle comme opposition au cliché ou au stéréotype…

« Le livre propose donc une analyse du corps nu comme langage de l’émancipation. La question posée est celle-ci : le corps et son image peuvent-ils être les supports d’un langage politique ? »3. Attirer l’attention, faire comprendre, « L’image en mouvement, raconte un événement irruptif … dans un espace public » (GF), dévoilement de vérité, « lien entre la vérité associée à la nudité du corps féminin et la vérité sociale et politique cachée, masquée par le bavardage des opinions »…

Isabel Morant souligne aussi cet « opérateur égalité » qui éclaire et balaye toutes les choses et « permet de concevoir et d’inventer de nouveaux rapports entre sexes », les possibles inscrits dans notre histoire…

Je signale enfin le « Corps et mémoire » de Marie Baudry consacré àMémoire de fille d’Annie Ernaux. Réflexions sur la mémoire, la remémoration, la réminiscence, les mots, le sang, le corps, l’écriture, « par l’écriture, l’individu a rendu intelligible ce qui ne l’était pas d’abord pour lui et par là même a permis de sortir de la position apparente d’objet passif pour atteindre celui de sujet analysant et comprenant »

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Coordonné par Pierre Bras : Corps sexué, corps genré : une géopolitique

L’Homme et la Société -2017/1-2

Editions L’Harmattan, Paris 2017, 300 pages, 39 euros

Didier Epsztajn


1 Voir la lecture de Joelle Palmieri : Interroger les excès du genre ou comment rafraîchir la pensée féministe,

https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2014/10/20/interroger-les-exces-du-genre-ou-comment-rafraichir-la-pensee-feministe/

ou ma note de lecture, L’opérateur égalité permet de concevoir et d’inventer les nouveaux rapports entre sexes,

https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2014/09/12/loperateur-egalite-permet-de-concevoir-et-dinventer-les-nouveaux-rapports-entre-sexes/

2 Genevieve Fraisse : La sexuation du monde. Réflexions sur l’émancipation.

Voir note de lecture : Il n’y a pas de « toust temps »…

https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2016/02/25/il-ny-a-pas-de-toust-temps/

3 En complément possible : La nudité politique des femmes n’est pas érotique

https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2014/12/23/la-nudite-politique-des-femmes-nest-pas-erotique/