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Braderie de l’Élysée: une chance au grattage, une chance au décollage
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Française des jeux, Aéroports de Paris, barrages hydrauliques… Le gouvernement lance une nouvelle vague de privatisations dont on connaît déjà les conséquences : abandon d’activités rentables et stratégiques pour l’État, rentabilité assurée pour les groupes privés.
Française des jeux, Aéroports de Paris, barrages hydrauliques : le gouvernement semble pris d’une frénésie de privatisations. Point commun entre tous ces acteurs, ils sont extrêmement rentables. Pour obtenir un peu de cash – et favoriser quelques amis ? –, le gouvernement priverait ainsi l’État de rentrées financières assurées dans la durée. Un choix de court terme.
FDJ, faites vos jeux !
Quatrième loterie mondiale, ayant réalisé plus de 15 milliards d’euros de vente totale soit une progression de 5,7% par rapport à 2016, la FdJ est en pleine forme et réalise des profits records. En 2016, dernière année connue, l’État français a ainsi engrangé près de 3,3 milliards d’euros au titre de la taxation des mises, 508 millions en impôts et taxes diverses et 72 % des dividendes versés aux actionnaires. On excusera du peu et on comprend que les patrons des casinos Tranchants et Barrière aient déclaré leur intérêt pour cette privatisation.
Mais ce n’est pas tout, l’opération pourrait s’avérer encore plus juteuse pour les investisseurs privés avec une possible modification du cadre réglementaire : fin de l’interdiction des casinos en ligne, diminution des compétences de l’autorité de régulation… Bref, le jackpot.
Aéroport de Paris, crash et cash
ADP, qui regroupe les aéroports d’Orly, de Roissy et du Bourget est une véritable machine à cash : l’excédent brut d’exploitation est ainsi de 1,6 milliard d’euros pour 3,6 milliards de chiffre d’affaires. Une rentabilité qui devrait encore augmenter avec la hausse prévue du trafic aérien. À cela, il faut ajouter une autre particularité : contrairement aux concessionnaires des aéroports régionaux, ADP est propriétaire de l’ensemble du foncier, soit 6.600 hectares déjà bâtis et 412 hectares en réserve. Au prix du foncier en région parisienne, on ne s’étonnera guère de l’intérêt affiché d’un groupe comme Vinci.
Outre le fait de brader des bijoux de famille extrêmement rentables au profit d’une rentrée immédiate d’argent frais, cette privatisation pose au fond deux problèmes. Le premier est d’ordre stratégique. Aux États-Unis, pays peu suspect d’avoir enclenché une bolchevisation de son économie, les 14.947 aéroports, sont tous – oui, tous – gérés par les gouvernements locaux pour des raisons de sécurité et de souveraineté nationale. « Administrer Roissy, Orly ou Le Bourget, ce n’est pas seulement gérer des commerces, des zones de duty-free ou le nettoyage des terminaux. C’est aussi – surtout – l’endroit où officient les douanes, la police, la gendarmerie », écrit ainsi Laurent Neumann pour lepoint.fr.
Le second problème se juge à l’aune du bilan de la privatisation des aéroports régionaux. L’ouverture du capital d’Aéroport Toulouse-Blagnac (ATB) voulue par un certain Macron Emmanuel devrait pourtant faire réfléchir. En décembre 2014, l’État français a cédé 49,99% de ses parts au consortium chinois Casil. Depuis, les déboires s’accumulent. En particulier, le versement de 15 millions de dividendes aux actionnaires pris sur les réserves d’ATB a fait quelque peu tousser.
La déprime des élus toulousains est bien réelle, d’autant qu’on leur avait fait miroiter des investissements en échange de l’arrivée de ces nouveaux investisseurs. Pour la ligne 3 du métro, il faudra pourtant attendre : pas un centime n’a été débloqué. Crash de l’État stratège, mais afflux de cash pour les groupes privés : tel sera bien le bilan d’une privatisation d’ADP.
Barrages hydrauliques, ruissellement en vue
Voulue par la Communauté européenne, l’ouverture à la concurrence des barrages hydrauliques a connu un coup d’accélérateur ces derniers jours. 150 des 433 barrages français pourraient être privatisés d’ici la fin du quinquennat. Là encore, une belle aubaine pour des groupes privés mais une aberration du point de vue des intérêts de l’État français. Comme le souligne un article du journal La Croix, « la production des barrages français, dont la construction a été largement amortie, est l’une des moins chères parmi les différents modes de production d’électricité ». C’est rentable, donc on s’en débarrasse.
Si l’énergie hydraulique ne pèse que 13% de la production d’électricité en France, elle représente 70% de l’électricité renouvelable. À l’heure où la transition énergétique impose un net accroissement des énergies renouvelables au détriment des hydrocarbures et du nucléaire, c’est donc affaiblir un peu plus l’opérateur historique qu’est EDF.
Mais à l’absence de perspectives de long terme s’ajoute un problème d’aménagement du territoire lié à la gestion de l’eau. Via les barrages, ce sont des missions de navigation, d’approvisionnement en eau potable, d’irrigation qui sont aujourd’hui gérées. Qu’en sera-t-il demain avec des opérateurs privés ?
Par dogmatisme libéral et par absence de stratégie industrielle le gouvernement Macron ne réfléchit qu’en termes financiers de court terme. Loin de la modernité affichée et survendue, c’est une politique sans vision, sans avenir, une politique qui brade l’outil industriel et empêche toute logique d’aménagement du territoire.