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La "marée populaire" du 25 mai en Argentine
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://blogs.mediapart.fr/carlos-schmerkin/blog/260518/la-maree-populaire-du-25-mai-en-argentine
Alors que dans la Cathédrale de Buenos Aires, Mauricio Macri écoutait l’homélie assez critique de l’archevêque Mario Poli sur "l'indifférence et l'égoïsme des riches face aux pauvres", de centaines de milliers d’Argentins on rempli, quelques heures plus tard, l’avenue 9 de julio, la plus large du monde, contre le FMI et la politique gouvernementale. Mauvaise journée pour le président argentin...
Plusieurs partis politiques, syndicats et organisations sociales ont appelé à commémorer la 208 ème année de la «Révolution de mai de 1810», - date du commencement de la guerre d’indépendance de l’Argentine contre le royaume espagnol - en scandant le mot d’ordre : «La patrie est en danger. Non au FMI!». Entre «locro», danse et musique, des centaines de milliers de personnes (un million et demi selon les organisateurs) se sont rassemblées pour célébrer l'anniversaire de la Révolution de Mai et rejeter la politique d'austérité du gouvernement, l'augmentation de la violence institutionnelle et défendre les politiques de mémoire, de vérité et de justice. Fait significatif, beaucoup de gens non organisés ont constitué la majorité des participants côtoyant les colonnes syndicales et surtout celles des organisations sociales venues en nombre.
Avec la catastrophe provoquée par ses mesures économiques, le parti au pouvoir a perdu une partie de son soutien et a rendu légitime les arguments de l'opposition. L'histoire grotesque que le macrisme a construit avec les médias hégémoniques commence à se fissurer, comme le dit la chanson qui clôt la présentation du groupe de rock Bersuit: "Et ils ont submergé le pays entier / pour voler plus d'argent / Et ta tête est pleine de rats, / tu as acheté les actions de cette farce / et le temps ne s'arrête pas / je vois l'avenir répéter le passé". Ecrite en 1990 elle est d'une incroyable actualité.
Depuis le podium monté près de l’obélisque plusieurs personnalités ont pris place pour suivre les discours et les groupes de musique qui se sont succédés dans une ambiance combative et festive. Avant de finaliser le rassemblement avec l'hymne national, les acteurs Osmar Núñez y Paola Barrientos ont lu la Proclamation Populaire signée par l’ensemble des organisateurs.
Voici quelques extraits :
« PROCLAMATION POPULAIRE DU 25 MAI 2018
LE PAYS EST EN DANGER »
Le 25 mai 1810, les femmes et les hommes qui habitaient cette terre étaient les protagonistes de l'exploit révolutionnaire qui marquerait à feu la destinée de notre histoire. Il s'agissait de défendre et d'organiser un Peuple soucieux de se construire un destin commun. Mais, 208 ans plus tard, encore une fois, la patrie est en danger. Et nous, femmes et hommes de la patrie, savons de quoi il s'agit.
Pour cela :
- Nous rejetons les accords de Mauricio Macri avec le Fonds Monétaire International, son modèle de dépendance politique et économique avec les grandes puissances étrangères qui réémergent sur notre continent: c'est un plan systématique qui n'offre à la majorité populaire qu'une destinée de misère planifiée...
- Nous rejetons l'augmentation sauvage de prix des services publics essentiels, qui condamne la production nationale et oblige notre peuple à décider entre payer une facture ou mettre une assiette de nourriture sur la table.
-Nous rejetons la baisse du salaire réel par une dévaluation spéculative et la limitation des accords paritaires. Nous rejetons le processus de flexibilisation du travail initié par l'augmentation du chômage…
- Nous rejetons la réforme des retraites qui a liquéfié les revenus des retraités, ce qui déclenche une privatisation déguisée du système de retraites argentin. Nous rejetons les mesures prises par ce gouvernement pour mettre la main sur le Fonds de garantie Anses et spéculer avec l'argent des travailleurs.
- Nous rejetons l'ajustement brutal sur les programmes d'emploi, l'élimination des programmes de logement, la destruction du modèle coopératif comme outil de l'organisation économique du travail, la réduction des revenus populaires garantis par l’Allocation Universelle pour l'Enfant.
- Nous rejetons le sous-financement éducatif, la baisse du salaire des enseignants, l'attaque contre leurs organisations syndicales et la persécution de l'organisation étudiante.
- Nous rejetons le discours négationniste du gouvernement et sa tentative de réintroduire la théorie des deux démons.
- Nous rejetons la radicalisation de la violence exercée par les forces de sécurité et l'application de la "doctrine Chocobar" dit de la "gâchette facile"
- Nous rejetons l'attaque contre les communautés de nos peuples autochtones et l'assujettissement de leurs droits sur les terres et leur culture ancestrale …
- Nous défendons la capacité créative de notre peuple qui invente et génère son propre travail, sa capacité d'organisation collective dans les coopératives de l'économie populaire. Nous défendons l'organisation communautaire, sociale et de quartier et sa participation profonde à la vie politique.
- Nous réaffirmons la nécessité de défendre la production et le développement industriel de notre Nation, en protégeant le développement des économies régionales qui donnent vitalité économique à un fédéralisme menacé par les programmes de pillage de nos richesses dans le sol et le sous-sol de la Nation.
- Nous défendons notre cri "Ni Una Menos", parce qu'il confronte et secoue les entrailles de la culture patriarcale dominante. Aller vers la parité entre les sexes en termes politiques, économiques, sociaux et culturels est une prémisse incontournable pour consolider une patrie juste.
- Nous défendons les politiques publiques de la mémoire et ce qui a été accompli durant 40 ans de lutte. Nous défendons les procès des responsables du terrorisme d'Etat et de leurs complices civils, nous réaffirmons que les génocidaires doivent rester dans les prisons de droit commun. Nous continuons d'exiger justice pour Santiago Maldonado et Rafael Nahuel.
- Nous défendons la démocratie, comme outil de décision de notre avenir et nous rejetons la persécution politique des militants populaires. Nous continuerons à exiger la liberté immédiate de tous les prisonniers politiques de l'Argentine.
- Nous défendons la politique en tant qu'outil de transformation de la réalité. Nous embrassons la vérité, afin que plus jamais, par le biais du mensonge, aucun gouvernement puisse imposer un projet économique de misère, et exercer le pouvoir avec cynisme, hypocrisie et répression.
Nous sommes une peuple digne, avec beaucoup de mémoire et nous savons de quoi il s'agit: le colonialisme néolibéral ne peut que nous offrir un destin misérable pour les majorités populaires. C'est pourquoi nous nous affrontons au gouvernement de Mauricio Macri, sur la route de la démocratie, dans les rues et nous le ferons aussi dans les urnes. De cette manière, et avec nos revendications et nos principes , nous sommes prêts à forger l'unité nécessaire pour construire finalement la Patrie dont nous rêvons.