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Les mutineries de 1917, un refus de la guerre "massif et multiforme"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://www.humanite.fr/les-mutineries-de-1917-un-refus-de-la-guerre-massif-et-multiforme-636324
Les actes de désobéissance et de mutinerie ont touché les deux tiers des grandes unités militaires durant le printemps et l’été 1917. C’est la révolte la plus résolue enregistrée lors de la Première Guerre mondiale : elle est réprimée par Pétain.
Dans l’histoire de la Première Guerre mondiale, trois thèmes ont été tardivement étudiés : les fraternisations avec l’ennemi, les exécutions pour l’exemple et les mutineries. Se posait le problème des sources. Les uns refusaient de reconnaître l’existence de mutineries, pour d’autres, il était dangereux de dire qu’on y avait participé. Les dossiers de la justice militaire sont maintenant ouverts aux chercheurs, des témoignages de plus en plus nombreux sont découverts, on peut effectuer un croisement des sources.
En 1967, le livre de Guy Pedroncini (éditions PUF) montrait qu’on avait sous-estimé l’importance des mutineries : elles avaient touché les deux tiers des grandes unités militaires. Il remettait en question la thèse des généraux selon laquelle elles avaient été provoquées par des agents ennemis. Mais son approche révélait des faiblesses. Il valorisait le rôle de Pétain. Il estimait que les mutins ne refusaient pas la guerre mais seulement une manière coûteuse et stérile de la faire.
La mise au point la plus récente et la plus complète est celle d’André Loez, 14-18. Les refus de la guerre. Une histoire des mutins (Folio « Histoire », 2010). Le mécontentement des poilus existait déjà en automne 1914 et ne cessa de croître depuis, comme on le constate en lisant leurs carnets de route. On note des refus de sortir des tranchées pour attaquer dès 1915. Certains attendent une révolte des femmes ou souhaitent qu’elles cessent de cultiver la terre afin de hâter la fin. Le caporal Maurice Pensuet annonce en décembre 1916 : « Vous verrez que les troupes finiront par se révolter. » Le brancardier Lucien Durosoir note en février 1917 : « Ce qui est étonnant, c’est que les poilus subissent tout cela sans se révolter. »
Si la révolte a lieu au printemps 1917, c’est que, pour la première fois depuis 1914, plusieurs faits rendent envisageable la fin de la guerre. La révolution russe balaie un des principaux responsables du conflit. Le caporal Hobey note que les soldats veulent imiter les Russes. À l’arrière, le nombre de grèves, tombé à 98 dans l’année 1915, remonte à 697 en 1917 : c’est une rupture avec les comportements d’obéissance. Une réunion internationale socialiste prévue à Stockholm fait naître un espoir de paix. L’échec de l’offensive du 16 avril entraîne une crise au sommet de l’armée. Le général en chef est limogé, ce qui fragilise la hiérarchie. La chronologie des mutineries montre que la plupart ont eu lieu après la nomination de Pétain en remplacement de Nivelle.
Pourtant, se mutiner est un acte difficile. Il faut improviser la désobéissance. Les mutins n’ont nulle part où aller, où se réunir, ils ne disposent pas de matériel pour distribuer de l’écrit. Franchir le pas est risqué, surtout agir en meneur. Les conseils de guerre ont déjà fait fusiller plus de cinq cents camarades.
Des régiments rédigent des pétitions pour réclamer des permissions
Les formes de mutinerie sont variables. Des tracts manuscrits, des cris, des chansons comme l’Internationale, dont le refrain est connu de tous. Des officiers sont insultés, bousculés. Des régiments rédigent des pétitions pour réclamer des permissions. Dans une dizaine d’unités, on envisage une marche sur Paris pour faire entendre aux députés qu’il faut mettre fin à la guerre. À ces actes directs plus ou moins graves, s’ajoutent les nombreux départs non autorisés vers l’arrière et les incidents dans les trains de permissionnaires. Des troubles ont lieu dans des villes loin du front, dans les ports d’embarquement pour l’armée d’Orient et même dans la marine, préfiguration des mutineries de la mer Noire en 1919.
André Loez a montré que les mutineries du printemps et de l’été 1917 ont représenté un refus de la guerre « massif et multiforme », l’irruption de revendications citoyennes, de pratiques et de paroles civiles au sein de l’institution militaire. Mais, à la différence de la Russie, elles n’ont pas pu déboucher sur une révolution politique. L’institution reprend le dessus, d’une part en accordant largement des permissions et en améliorant les conditions matérielles des soldats, d’autre part en utilisant la répression. Les conseils de guerre, transformant les actes collectifs en agissements individuels, prononcent près de 600 condamnations à mort, la plupart commuées par le pouvoir civil en travaux forcés et envoi dans les colonies. André Loez compte 26 soldats fusillés pour mutinerie. Un s’est suicidé avant l’exécution, Vincent Moulia a réussi à s’évader. Ces chiffres sont très inférieurs à ceux de la première année de guerre lorsque la panique à tous les niveaux avait conduit à une justice expéditive. Pétain fait cependant exécuter sept soldats sans en référer au président de la République. Le même Pétain a tenu à rappeler en 1941, lors de son « discours du vent mauvais » contre la Résistance : « En 1917, j’ai mis fin aux mutineries. »
Rémy Cazals Historien
UN TÉMOIN DES MUTINERIES
Un récit intéressant est celui du caporal Louis Barthas (1). Il a compris les causes du mouvement : l’exemple russe, la perspective d’une guerre interminable après l’échec du 16 avril, le retard pour les permissions. Il a montré l’effervescence contre les officiers, la préparation d’une pétition, l’Internationale éclatant en tempête, les cris de « Paix ou révolution ! À bas la guerre ! ». « Un soir, un caporal chanta des paroles de révolte contre la triste vie de la tranchée, de plainte, d’adieu pour les êtres chers qu’on ne reverrait peut-être plus, de colère contre les auteurs responsables de cette guerre infâme, et les riches embusqués qui laissaient battre ceux qui n’avaient rien à défendre. » On reconnaît là le contenu de la Chanson de Craonne.
(1) Les Carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, 1914-1918, éditions la Découverte, 2013.