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A propos des "formes classiques de la lutte des classes"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://aplutsoc.org/2018/12/09/a-propos-des-formes-classiques-de-la-lutte-des-classes/
Il n’y a pas de lutte des classes labellisée classique et de lutte de classe pas propre sur elle, il y a la lutte des classes !
Après avoir tout entendu sur les Gilets jaunes, d’aucuns (en l’occurrence l’organe du POID, La Tribune des Travailleurs (1), mais ce point de vue est répandu bien au delà parmi les cadres syndicaux et mérite pour le moins discussion), nous expliquent maintenant qu’il serait temps d’en arriver aux « méthodes classiques de la lutte des classes« , celles des Gilets jaunes étant, sinon pas « de classe », en tout cas pas « classiques » comme il convient.
On pense aux comitards bolcheviks, combattus par Lénine, opposés aux soviets lorsqu’ils sont apparus en 1905 : attitude répandue !
Laquelle donne de fait raison aux divagations de J.L. Mélenchon : lui prétend que se produit la « révolution citoyenne », grâce à la large diffusion de « l’Avenir en commun », eux nous expliquent que ce ne sont pas les méthodes classiques, conformes, de la lutte des classes !
En fait, autant la plus grande méfiance s’impose-t-elle envers tout leader petit-bourgeois autoproclamé, comme envers les larges infiltrations et provocations d’organisations au service du capital (parmi lesquelles ce que l’on appelle « l’extrême-droite »), autant il faut dire, redire et expliquer que les méthodes des Gilets jaunes sont des méthodes de lutte de classe prolétarienne !
Dans les TPE et PME, les gars ne peuvent faire grève que dans un mouvement général, s’ils font grève boite par boite, ils font juste fermer leur boite, donc ils ne le font pas. Mais là, ils ont trouvé le moyen de se rassembler. Parfois avec le petit patron lui-même, cet exploiteur-exploité qui leur fait suer une plus-value qui ne reste pas dans ses mains, et qui en sue lui-même parfois plus vu qu’il ne compte pas ses heures et que eux ont quand même un temps légal maxi ! Donc des petits patrons sont présents, parfois avec leurs salariés, et entraînés – les organisations patronales par contre, censées les représenter, notamment l’U2P et la CPME, hurlent qu’il faut que tout cela s’arrête !
Vu l’abandon de ces secteurs par les appareils syndicaux (à ne pas confondre avec un petit nombre de militants qui, au contraire, s’y sont consacrés), vu l’absence totale, depuis des décennies, de luttes coordonnées à l’échelle d’une branche, d’une industrie ou d’un site d’activités, et vu la répression patronale, les couches du prolétariat des TPE et PME ont inventé leur propre méthode. C’est une méthode prolétarienne.
Et comme ils ne sont pas encadrés, ils réinventent par la force des choses la démocratie ouvrière comme à Commercy : ce processus a commencé.
Et la grève générale, via la jeunesse, en sera, si elle s’impose, la prolongation, et certainement pas la rectification ou le coup d’arrêt comme le racontent ceux qui voudraient rétablir les « méthodes classiques de la lutte des classes« . Si on conçoit la mobilisation « classique » comme un antidote aux Gilets jaunes, on ravale la mobilisation « classique » à l’unité des appareils, c’est-à-dire in fine à l’unité des appareils derrière Macron (d’où, d’ailleurs, la frilosité à dire Dehors Macron de la part des mêmes camarades, au moment précis où tout le monde, parmi ceux d’en bas, le dit et l’exige ! ).
Peut-être le mouvement vers la grève générale épousera-t-il la journée du 14 initialement lancée pour l’enrayer, mais peut-être pas. Mais en tout cas, il ne respectera pas les « formes classiques de la lutte des classes » voulues par les apparatchiks de tousacabits. Le mouvement vers la grève générale a commencé sur les ronds-points, et c’est le projet des ronds-points de tout bloquer lundi 10 décembre en mettant de facto tout le monde en grève qui a déclenché les reculs gouvernementaux en désordre, malgré la protection que Macron a demandée, et obtenue (!), des directions syndicales nationales.
Ce qui ne veut nullement dire que le mouvement propre de la classe contourne les syndicats : il cherche à les entraîner, à leur faire jouer leur rôle, mais il ne correspond pas à la mobilisation syndicale « classique » !
Un exemple : une grosse section CGT dans une entreprise provinciale de production chimique. C’est une section qui a sa vie propre, qui est forte, pas en bonnes relations avec UD et UL. Elle a appelé, de sa propre initiative, à la grève pour que les dizaines d’ouvriers de l’usine puissent monter à Paris aller chercher Macron. La plupart ont d’ailleurs été scandaleusement empêchés de monter ou descendus du train par les flics bien avant Paris. Non seulement ils veulent virer Macron, mais il serait juste que Macron leur rembourse leurs billets !
Là, on voit clairement le syndicat se mettre à jouer son rôle. Mais pas dans la lutte de classe « classique » façon appareils unis jouant leur supposé rôle, mais dans la lutte des classes réelle telle qu’elle est. Les révolutionnaires doivent apprendre de la lutte des classes, toujours.
Le 09-12-2018.
Note :
1 : voir notamment les suppléments spéciaux de la TT datés des 6 et 7 décembre 2018.