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Les torturées de Ksar Sountate

Maroc

Lien publiée le 5 août 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Les torturées de Ksar Sountate - En toutes lettres - En toutes lettres (etlettres.com)

À l’occasion de la Journée mondiale des droits des femmes, En toutes lettres vous invite à relire ce chapitre de « Dos de femme, dos de mulet, les oubliées du Maroc profond » de Hicham Houdaïfa.

Ksar Sountate. Un village niché dans le Haut Atlas, à moins de quinze kilomètres d’Imilchil. Un peu plus de 130 personnes y vivent. Le seul moyen d’y accéder est de prendre, sur 120 kilomètres, la route qui relie Er-Rich à Imilchil. Ksar Sountate n’est desservie que par cette route. En ce mois d’octobre 2014, il ne pleut pas encore, mais celle-ci est déjà en mauvais état. Elle n’est que partiellement goudronnée et parfois accidentée. Deux véhicules ne peuvent se croiser sans que l’un sorte de la route pour laisser passer l’autre, tant elle est étroite. Et quand il pleut, en période de crues, la route peut être bloquée toute une journée. Pour faire leurs provisions, voir un médecin ou pour n’importe quelle affaire, les habitants doivent se rendre à Er-Rich. Le trajet coûte 30 dirhams et ne se fait, depuis 2003, que par le naql mouzdawij : ces anciennes Mercedes fourgon 307 et 308, initialement destinées au transport de marchandises, servent aussi, dans cette région enclavée du Maroc, à transporter personnes et animaux. Quatorze sièges métalliques fixés à l’intérieur, des tabourets en plastique pour les extras. Ces véhicules, qui font office de bus et s’arrêtent dans tous les villages, transportent plus de quarante personnes par voyage. Il faut parfois attendre une heure pour y trouver une place et le trajet ne dure pas moins de quatre heures. Mais c’est déjà une amélioration par rapport à l’époque où ne passaient que des camions et où le trajet pouvait prendre plus de douze heures.

À Ksar Sountate, les plantations de pommiers s’étendent à perte de vue et les maisons sont en terre. Les meubles y sont rares et les pièces dépouillées de tout ornement. Les couvertures qui servent à couvrir adultes et enfants sont entassées dans un coin.

Dans les maisons, les femmes nous servent le thé et s’assoient. Elles écoutent les hommes parler et raconter les terribles journées qui ont suivi le débarquement des troupes mixtes (armée et forces auxiliaires) dans leur village, en mars 1973. Les blindés, les coups de feu, la torture… ils racontent les exactions commises par ces hommes en uniforme qui sont restés dans le village pendant 45 jours.

C’est que Ksar Sountate est au cœur d’une région révolutionnaire, sur la ligne montagneuse qui relie le Moyen et le Haut Atlas, de Goulmima à Khénifra, en passant par Amellagou, Tinghir et Aghbala. Du temps de la colonisation, cette région a été une des plus frondeuses du pays. De plus, « Mehdi Ben Barka été incarcéré pendant un certain temps au pénitencier d’Imilchil, du temps de la colonisation. Les résistants de la région d’Imilchil avaient un immense respect pour lui. C’est donc tout naturellement qu’ils sont devenus en majorité des sympathisants de l’UNFP », explique Lahcen Aït Lafqih, historien spécialiste de la région.

Par la suite, Imilchil et les villages alentour, sur le territoire des Aït Hdiddou – Agdal, Tamerrist, Bouzmou, Taghighacht, Iboukhanen – ont connu un des épisodes les plus douloureux de la répression des années de plomb. Début mars 1973, des opposants au régime de Hassan II élisent domicile dans l’Atlas afin de préparer la révolution suivant le modèle de Che Guevara. Ces guérilleros tentent d’installer un foyer révolutionnaire. Mais le projet tourne au fiasco : les meneurs sont exécutés. Du 3 au 8 mars 1973, l’armée investit les douars et soumet la population à tous types d’exactions : violences, torture, viols, assassinats et emprisonnements arbitraires. Mohamed Bennouna, alias Mahmoud, l’un des chefs de cette organisation clandestine Tanzim, tombe les armes à la main. D’autres, enfants de la région, subissent les affres de la détention secrète. Ceux qui sont arrêtés sont jugés à Kénitra dans l’année. Saïd Oukhouya et Mouha Ouharfou, originaires de Ksar Sountate, sont exécutés. « Saïd Oukhouya était un leader dans cette région, explique Lahcen Aït Lafqih. Il avait une expérience militaire et était le coordinateur du groupe d’Amellagou, là où Mohamed Bennouna préparait son mouvement de rébellion. » Quant à Mouha Ouharfou, c’était une figure de la résistance à l’occupation française : il avait coordonné la révolte contre le colonisateur. « Lors des événements de mars 1973, raconte Lahcen Aït Lafqih, les autorités ont eu du mal à l’arrêter. Il s’était réfugié pendant trois mois dans une grotte, là même où il se cachait du temps de la colonisation. Aujourd’hui, cette grotte porte son nom. » Arrêté au bout d’une longue traque, Mouha Ouharfou a été torturé et passé par les armes en 1974. Il avait 74 ans. Toute sa famille en a subi les conséquences. Son fils Zayed, alors âgé de 18 ans, se souvient : « Ils nous ont emmenés, mon petit frère, ma mère et moi, Merrou Ouhammi, la femme de Zayed Oubassou, et Rabha Zayed Takhiyit, la femme de Saïd Oukhouya. On nous a bandé les yeux pendant huit jours à Bouzmou. Puis on nous a séparés des femmes, mon frère et moi. Direction : Goulmima. On nous a fait subir tous types de torture : insultes, coup de poing, électricité dans les parties sensibles du corps… » Sa sœur Fadma, elle, en est morte. Elle avait été arrêtée pour avoir approvisionné Saïd Oukhouya et ses camarades, cachés dans les montagnes.« Elle a été torturée pendant huit jours dans un café qui porte le nom de Baro, à Bouzmou, raconte Lahcen Aït Lafqih. Elle a ensuite été transférée à Corbis et Derb Moulay Cherif avant d’être placée au centre d’Agdz. C’est là-bas qu’elle a trouvé la mort, le 20 décembre 1976. » Elle avait 52 ans. « Dans les années 1990, nous n’avions aucune preuve de la mort de Fadma, raconte Zayed. Une rumeur a circulé à son propos à la fin des années 1990. On nous a dit qu’on avait aperçu ma sœur errant dans les avenues de Rabat, qu’elle vivait de mendicité. Je l’ai cherchée partout : à la gare routière d’Al Qamra, dans le quartier de Yacoub Mansour, dans les hôpitaux et même dans la ville de Salé. En vain… » Ce n’est que plus tard qu’il a appris qu’elle était enterrée au cimetière d’Agdz. Les survivants ont raconté les conditions de détention à Agdz, la grande chaleur et le froid extrême selon les saisons, l’alimentation à base de lentilles, les scorpions, les serpents, etc., qui ont contribué à la mort d’un grand nombre de détenus. L’un d’eux, lui aussi victime d’un enlèvement forcé, Chari El Hou, se souvenait de Fadma Ouharfou, de cette femme forte et courageuse, seule parce que femme, et qui ne parlait que berbère.

La répression de l’État s’est abattue, pendant des années et des décennies, sur les familles. Et c’est la région tout entière qui s’est trouvée punie jusqu’aux années 1990, jusqu’au début du processus de liquidation du dossier des années de plomb.

Aujourd’hui, les hommes de Ksar Sountate évoquent la réparation et les indemnisations. Mais les rares femmes qui ont survécu à cette répression vivent encore un cauchemar. Elles n’ont pas oublié…

(c) Aïcha El Beloui

Ytto Khouya Saïd est la fille de Saïd Oukhouya. Elle était adolescente lors des événements de mars 1973. Elle est aujourd’hui âgée d’une soixantaine d’années. « Mon père était un homme droit, se rappelle-t-elle. Il défendait la dignité des gens de Ksar Sountate. C’était un résistant et il n’acceptait pas l’injustice. Je suis l’aînée de ses filles. » Quand militaires et forces auxiliaires ont débarqué au Ksar, Saïd Oukhouya était, avec Mouha Ouharfou, en tête de la liste des personnes recherchées. « Ils sont venus le chercher à la maison. Je leur ai répondu qu’il était en voyage. Ils m’ont insultée, battue. Je me suis terrée avec mes sœurs à la maison. Nous étions toutes seules puisque ma mère était détenue à Bouzmou. On n’avait rien à manger et on ne pouvait pas sortir de la maison. »

Saïd Oukhouya est revenu au village, notamment pour voir ses filles. « Ils ont su qu’il était là. Ils m’ont appelée et m’ont sommée de lui dire de se rendre. Ils m’ont dit de lui répéter que s’il ne se rendait pas, ils allaient mettre le village à feu et à sang. Ils n’osaient pas aller le chercher, parce qu’ils savaient de quoi il était capable. Lui, il se cachait dans la maison de Fadma Ouharfou. Quand je lui ai répété ce qu’ils m’avaient ordonné de dire, il est sorti, l’arme en air, pour bien montrer qu’il se rendait. Dès qu’il a été pris, ils l’ont roué de coups avant de le mettre dans un hélicoptère. Depuis, nous ne l’avons pas revu. » Il a été exécuté en 1974 avec Mouha Ouharfou. « Nous n’avons jamais eu la preuve de la mort de mon père. Mon oncle a récupéré à Kénitra une attestation de son décès. Mais nous n’avons jamais su où il avait été enterré. À ce jour, nous n’avons toujours pas pu faire son deuil. »

Ytto a du mal à retenir ses larmes. « Dire qu’ils m’ont obligée à envoyer mon propre père à la mort. » La douleur revient, intacte.

Ses souffrances ne faisaient que commencer. Juste après l’arrestation de Saïd Oukhouya, elle est emmenée à Bouzmou où on lui inflige les pires tortures afin de la pousser à parler, sur les relations de son père avec les autres rebelles, sur les caches d’armes… « J’ai subi quatre opérations à cause de ce qu’ils m’ont fait. Ils me frappaient au visage, m’insultaient. Et puis il y a des choses que je préfère ne pas évoquer. C’étaient de vrais salopards. »

À près de 90 ans, Merrou Ouhammi a presque perdu la vue mais n’a pas oublié un détail de ce qui s’est passé cette année-là. Elle nous reçoit dans sa maison, qui été durant les années d’occupation un lieu de rassemblement pour les résistants. Elle ne sort plus de sa chambre. Enveloppée dans deux couvertures, elle porte les séquelles de cette période et souffre de plusieurs maladies chroniques dont son fils Mouha peine à assumer financièrement les soins. Mouha avait sept ans à l’époque et se rappelle de tout. Elle, évoque les insultes, les coups de pied et bien pire. Mais pas son viol. C’est son fils qui nous en parlera.

D’une voix chevrotante, Merrou Ouhammi raconte : « Ils sont venus au village, ont planté des tentes, réquisitionné des maisons. Ils nous ont dit qu’ils allaient saccager le village parce qu’on était les ennemis du roi, qu’on voulait renverser le régime. Il y avait des hélicoptères, des tanks. Nous n’avions jamais vu cela, même du temps du colonisateur. Ils ont saccagé nos récoltes, volé nos biens, notre argent, l’or des femmes. » Emmenée avec d’autres femmes et même des enfants, elle a été torturée à Ksar Sountate pendant trois jours pour la forcer à dire qui était impliqué dans la révolte, où ils se trouvaient et où les armes étaient cachées. Ensuite, elle a été emmenée à Bouzmou. « On m’a cassé les doigts. On m’a mis un chiffon dans la bouche pendant des heures entières. Un des tortionnaires m’a frappée et d’un coup de poing, il m’a cassé la mâchoire. Ce qui me faisait le plus mal, c’étaient les cris des enfants. Je reconnaissais la voix de Zayed Ouharfou et de son petit frère. » Après Bouzmou, Merrou Ouhammi a été transférée à Aït Hani. « On m’a mise dans une chambre étroite. Il y faisait très froid. Il neigeait et je n’avais que ma peau pour me couvrir. » Destination finale : Goulmima où elle se trouve avec six autres femmes. Merrou Ouhammi a passé huit mois à la prison de Goulmima. « Je ne savais pas quoi faire. Mes cinq enfants étaient tout seuls. Il n’y avait personne pour s’occuper d’eux. Je n’ai jamais compris pourquoi on m’avait fait subir tout cela. » Pendant les mois qui ont suivi sa libération, Merrou Ouhammi a eu l’obligation de se rendre à Meknès, à l’administration pénitentiaire de Sidi Saïd, aujourd’hui fermée, pour y faire une déposition de « bonne conduite »…

Aïcha Ousidi, la femme de Zayed Ouhadou Aït Benzendi, le fils de Mouha Ouhadou, une des personnes également recherchées par les forces de l’ordre, a elle aussi été torturée à l’époque. « Ils cherchaient mon beau-père, raconte-t-elle. Ils étaient fous de rage. On m’a cachée dans un grand coffre pour qu’ils ne m’agressent pas. J’y suis restée pendant plusieurs jours. C’est que les membres des forces auxiliaires faisaient des choses horribles aux gens, surtout aux femmes. » En présence de ses deux fils, aujourd’hui trentenaires, elle ne trouve pas les mots pour décrire les conséquences de cette répression aveugle.

Msakhite sidna

Pendant les années qui ont suivi les événements de 1973, Ksar Sountate a été soumis à un siège permanent. Les habitants du village et des douars alentours ont vécu la peur au ventre. Marginalisés par la géographie et l’absence de routes, d’écoles et de dispensaires, ils ont vécu reclus, et ont connu l’angoisse incessante d’une répression possible. Jusqu’à la fin des années 1990, les Ouharfou, Oukhouya et les autres familles de cette région ont été appelés « les gens de 1973 » ou les msakhite sidna. Plus qu’une insulte, une damnation.

Ces familles touchées par la répression ont en effet été mises au ban par leur entourage direct. Après l’arrestation de son père, Ytto Khouya Saïd a dû travailler très dur pour nourrir ses petites sœurs. « On a parfois dû manger les restes des autres. Mon père avait des biens, des terres et du bétail, et tout nous a été pris. Les gens avaient peur de nous saluer. Même l’épicier refusait de nous vendre quoi que ce soit, de peur qu’on dise qu’il sympathisait avec nous. Nous n’avions pas non plus accès à nos documents administratifs. Nous avons tout simplement vécu dans la honte même si nous n’avions rien fait. »

Parce que son père, Zayed Oubassou, avait été condamné à trois ans et quatre mois de prison et que sa mère Merrou avait été incarcérée pendant sept mois et demi à Goulmima, Mouha n’est jamais allé à l’école. Comme la grande majorité des enfants de cette époque. « Nous, les gens de la montagne, on nous a bien fait souffrir », soupire-t-il. « Je ne pouvais pas aller à l’école parce que j’étais le fils du “traîtreˮ ». Tout au long de l’entretien, il répète : « Ils m’ont bousillé la vie ».

Même chose pour les petits enfants de Mouha Ouhadou : « Nous ne pouvions pas aller chercher nos documents administratifs, se rappelle Aïcha Ousidi. Mes sept enfants n’avaient donc pas d’extraits d’acte de naissance et n’ont pas pu aller à l’école. Ils ont détruit l’avenir de mes enfants. » Pendant des décennies, la famille a connu une précarité qui lui permettait à peine de survivre. « Nous avions perdu nos biens, nos bêtes. Mes fils ont travaillé comme bergers chez les autres. »

La répression et l’enclavement ont maintenu la région à l’écart de tout, y compris du monde moderne. Les infrastructures de base y sont quasi inexistantes, les routes constamment coupées, surtout durant l’hiver, où la mortalité atteint des pics, à cause de la rareté du bois de chauffe.

Cet isolement a eu également pour conséquence la perpétuation du mariage ‘orfi dans cette région connue pour le moussem des fiançailles d’Imilchil. Mais au-delà de la carte postale, la réalité est bien dure. À Anfgou, Tamaloute, etc., des filles de onze, douze ou treize ans sont encore mariées « à la fatiha », sans aucun acte écrit. Et ce, en violation des lois en vigueur au Maroc. La persistance de cette pratique est étroitement liée à l’histoire récente. « Cette région a été marginalisée par le pouvoir parce que bon nombre d’opposants en sont originaires », souligne Najat Ikhich, présidente de la Fondation Ytto, une des plus grandes associations luttant contre le mariage coutumier et le mariage des mineurs, qui multiplie les campagnes de sensibilisation dans la région d’Imilchil. « Les femmes des tribus des Aït Atta et des Aït Hdiddou ne pouvaient pas rendre visite à leurs maris emprisonnés à Kénitra. On avait donné consigne aux transporteurs de ne pas les embarquer. » Assignés à résidence, les habitants ont développé une peur bleue des autorités. Aujourd’hui, les enfants de ces tribus, jadis fières et rebelles, en subissent encore les conséquences.

Maigres réparations

Ce n’est que bien plus tard, à la fin des années 1990, avec le processus de traitement des années de plomb et donc d’indemnisations, que les choses ont commencé à changer pour les familles de Ksar Sountate.

Dans le cadre du programme de réparation communautaire initié par l’Instance équité et réconciliation (IER), quelques actions ont été menées. Le ministère de l’Éducation nationale a donné le nom de Fadma Ouharfou à l’école du village et à une autre école située dans la commune de Bouzmou. On a également donné son nom à un tapis, puisqu’elle était elle-même tisserande. Enfin, une caravane de réconciliation a été organisée en mars 2005, vers Agdz, le lieu où elle repose…

Aujourd’hui, les victimes ont pu obtenir certaines réparations matérielles. « D’un jour à l’autre, nous sommes devenus des exemples à suivre », remarque Zayed Oukhouya, qui relève cependant certains abus. « Des familles qui n’ont jamais été victimes de répression ont elles aussi rempli des dossiers afin de demander de l’argent, des agréments… »Mais pour beaucoup des femmes victimes de ces évènements, ces réparations matérielles sont insuffisantes. « Même si on me remplissait cette maison d’argent, cela n’enlèverait rien à l’horreur et aux blessures », déclare Ytto Khouya Saïd. À Ksar Sountate, les familles n’ont en effet pas encore pu faire leur deuil. « L’État n’a pas pris en compte les sentiments des veuves et de leurs enfants », regrette Zayed Ouhadou Aït Benzendi. Dans la grande pièce de sa maison, trône le portrait de son père disparu, Mouha Ouhadou. « Le Conseil consultatif des droits de l’Homme (CCDH) nous a dit qu’il était mort à Imilchil, mais des détenus de l’époque nous ont affirmé qu’il avait été emprisonné à Casablanca, au centre de Corbis. Ma mère est morte sans pouvoir faire le deuil de mon père. Et ils osent encore nous parler de réconciliation ! Nous ne parlerons de réconciliation que lorsque nous saurons où se trouve la tombe de mon père. » Quant au fils de Merrou Ouhammi, il s’étrangle de colère en voyant ce qui a été proposé à sa mère, qui a confié avoir été violée aux deux enquêtrices de l’IER : « Ils lui ont pris sa vie, sa dignité, l’avenir de ses enfants. Et ils lui ont donné 100 000 DH pour l’indemniser ! » Sa mère, elle, conclut : « Pour moi, il n’y a pas de pardon entre nous. C’est Dieu qui nous rendra justice. »

Hicham Houdaïfa

1 mars 2022