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Le président des riches et les oppositions de Sa Majesté
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Révolution : Tendance marxiste internationale
L’économie mondiale est entrée dans une phase de « stagflation », c’est-à-dire de faible croissance et d’inflation élevée. Les Banques Centrales ont beau relever leurs taux d’intérêt, les prix continuent d’augmenter bien au-delà des 2 % visés. Par contre, le resserrement du crédit pèse sur l’investissement et la production. Pour les travailleurs et les classes moyennes, c’est la double peine : hausse du chômage et baisse du pouvoir d’achat.
La France n’est pas épargnée par cette conjoncture globale. Depuis l’automne 2022, la croissance de son PIB oscille entre 0 et 0,5 %. L’immobilier s’enfonce dans une crise sévère : le nombre de ventes de logements a déjà chuté de 12 % en un an ; les mises en chantier ont reculé de 15 % depuis janvier 2023. Dans le même temps, le coût de la vie s’envole. En deux ans, les prix de l’alimentation ont flambé de 20 %. Dans le domaine des énergies, l’inflation est exacerbée par la levée des boucliers tarifaires et autres subventions. « Il faut sortir du “quoi qu’il en coûte” », martèle Bruno Le Maire, ministre de l’Economie – quitte à plonger des millions de familles dans la pauvreté.
Le « niet ! » du grand capital
Le gouvernement se montre beaucoup moins ferme face aux grandes multinationales qui se gavent de profits. Il leur a demandé de baisser un peu leurs marges ; elles lui ont répondu d’aller se faire cuire un œuf ; Macron et ses ministres se sont exécutés : fin du « conflit » entre le gouvernement et le grand patronat. Il est vrai que c’est le gouvernement du grand patronat.
A droite, cet épisode n’en a pas moins traumatisé quelques âmes sensibles. Dans Le Figaro Economie du 25 septembre, son rédacteur en chef, Yvan Letessier, s’alarmait du soi-disant « virage interventionniste » d’Emmanuel Macron, qui aurait « délivré une série de coups de boutoir destinés à faire plier les géants de la grande distribution, de l’industrie agroalimentaire et du raffinage. » Ont-ils « pliés », les géants en question ? Pas le moins du monde. Les « coups de boutoir » consistaient en « menaces » purement verbales que Macron proférait en digérant son omelette.
Il est vrai que Bruno Le Maire a tenté de donner un contenu concret à ces « menaces » : il a déclaré que « plusieurs centaines d’agents » de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), cette armada notoirement bolchevique, seraient mobilisés pour s’assurer que les « marges » des bonzes du CAC 40 sont « raisonnables ». Hélas, le seul résultat probable d’une telle démarche sera une flambée du prix des œufs de poule.
La journée du 13 octobre
On ne peut rien attendre de ce gouvernement, sinon de nouvelles contre-réformes et coupes budgétaires. Le « président des riches » mènera la politique des riches, qui face à la crise demandent au peuple de consentir sans cesse de nouveaux sacrifices.
Que la classe dirigeante cherche à nous faire payer la crise de son système, c’est dans l’ordre des choses. Ce qui est bien plus problématique, de notre point de vue, c’est la modération et la confusion extrêmes qui règnent au sommet des grandes organisations syndicales et politiques du mouvement ouvrier.
Une « journée d’action » est organisée, le 13 octobre, par la CGT et l’ensemble du mouvement syndical. Révolution y participera et souhaite évidemment qu’elle soit massive. Mais rappelons que les 14 journées d’action contre la réforme des retraites, depuis le mois de janvier, n’ont pas fait reculer le gouvernement d’un millimètre. Dès lors, les jeunes et les travailleurs sont en droit de se demander par quel miracle la journée d’action du 13 octobre pourrait contraindre le gouvernement à satisfaire une seule des revendications officielles de cette mobilisation, parmi lesquelles figurent une nette « augmentation des salaires et du point d’indice des fonctionnaires », la « revalorisation des retraites, des minimas sociaux et des bourses d’études », « l’égalité entre les femmes et les hommes », d’importants « investissements dans les services publics », « une assurance chômage plus protectrice » et « une transition écologique socialement juste ».
De fait, la politique passée, actuelle et à venir du gouvernement Macron est aux antipodes de toutes ces revendications progressistes. Pour qu’elles soient mises en œuvre, il est bien évident que des journées d’action ne suffiront pas. Il faudrait un mouvement de grèves illimitées d’une puissance et d’une ampleur telles qu’il renverse ce gouvernement – et, dans la foulée, lui substitue un gouvernement de gauche déterminé à briser la résistance du grand patronat. Toute autre perspective est illusoire. Malheureusement, ni les dirigeants confédéraux de la CGT, ni ceux des autres syndicats n’avancent cette perspective. Ils ne tirent aucune leçon de la défaite du mouvement qui s’est développé de janvier à juin derniers. D’ailleurs, pour éviter d’en tirer la moindre leçon, ils refusent de reconnaître qu’il s’agit d’une défaite.
La crise de la NUPES
La situation n’est pas meilleure dans la gauche politique. La NUPES est fracturée par des divergences permanentes dont se gargarisent les grands médias bourgeois. Depuis qu’elle a pris l’initiative de constituer cette drôle d’« Union Populaire », en mai dernier, la direction de la France insoumise (FI) passe une bonne partie de son temps à répondre aux critiques droitières dont l’accablent les autres composantes. Le tout fait une impression déplorable à la masse des exploités – et profite, fatalement, aux démagogues réactionnaires du Rassemblement National.
De manière générale, aucun dirigeant de la gauche officielle n’avance un programme de rupture avec le système capitaliste. Il est vrai que nul n’en demande autant aux dirigeants du PS et des Verts. Quant à Fabien Roussel (PCF), il se spécialise dans les clins d’œil en direction de l’électorat le plus conservateur. Mais même les dirigeants de la FI, la composante la plus à gauche de la NUPES, ne sont pas à la hauteur de la situation économique et sociale. En un mot, ils proposent de réformer le système capitaliste, alors qu’il faut d’urgence l’envoyer dans les poubelles de l’histoire – du moins si l’on veut éviter à l’humanité de sombrer dans une barbarie généralisée.
Dans les pages de ce journal, nous avons régulièrement critiqué, dans le détail, le programme réformiste de la FI. Nous en avons même fait une longue brochure qui connaît un certain succès. [1] Ici, on se contentera de signaler que cette modération – sur fond de très grave crise du capitalisme – trouve une expression assez cocasse dans le domaine du vocabulaire politique. Pendant que Jean-Luc Mélenchon se qualifie de « réformiste radical », François Ruffin se considère plutôt comme un « réformiste révolutionnaire ». [2] A quand le « réformisme insurrectionnel » et le « bolchevisme archi-modéré » ?
N’allez pas imaginer, d’ailleurs, que le réformisme « révolutionnaire » de Ruffin est plus à gauche que le réformisme « radical » de Mélenchon, car le premier trouve le second trop… « radical » ! Difficile de s’y retrouver – à moins de comprendre que le réformisme, dans ces formules, joue le même rôle que le chiffre 0 dans une multiplication : peu importe ce qu’il multiplie, le résultat est le même.
Il n’y a pas plus de réformisme « radical » que « révolutionnaire ». La lutte pour des réformes est évidemment indispensable. Mais le réformisme, c’est autre chose, comme l’expliquait Lénine : c’est une « duperie bourgeoise [qui] limite aux réformes les aspirations et les activités de la classe ouvrière », alors que les travailleurs « resteront toujours des esclaves salariés, malgré des améliorations isolées, aussi longtemps que durera la domination du capital ». [3]
C’est cette domination du capital qu’il faut renverser une fois pour toutes. Tel est l’objectif des révolutionnaires communistes qui construisent la Tendance Marxiste Internationale. Pour nous y aider, rejoignez-nous !
[1] Critique marxiste du programme de la FI.
[2] Respectivement sur France inter, le 28 septembre, et dans une interview au Un hebdo, le 13 septembre.
[3] Lénine, Marxisme et réformisme. Tome 19 des œuvres complètes, p.399.