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Sanofric et les promesses en carton du gouvernement
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https://lanticapitaliste.org/actualite/sante/sanofric-et-les-promesses-en-carton-du-gouvernement
« Déléguer notre capacité à soigner à d’autres est une folie », déclarait Macron au moment du covid. Mais la leçon des grandes manœuvres de Sanofi, des pénuries qui explosent, des prix stratosphériques des nouveaux médicaments, ou de la Bourse qui condamne la production européenne de médicaments en vrac, nous fait surtout dire que c’est déléguer au capital notre capacité à soigner qui est une folie !
Sanofi a décidé de vendre Opella, sa division grand public, au fonds d’investissement américain CD&R. Opella produit le Doliprane, le médicament le plus vendu en France, et une centaine de médicaments sans ordonnance. Opella, c’est 5,2 milliards de chiffre d’affaires, 1,4 milliard de bénéfices, treize usines dans le monde dont deux en France, et plus de 10 000 salariéEs. « Une rentabilité entre 27 % et 29 %. Énorme, mais ce n’est pas suffisant pour Sanofi », dénonce Fabien Mallet, coordinateur CGT Sanofi qui craint des pertes d’emplois si CD&R estime « plus rentable, dans quelques années, d’arrêter certains médicaments ou de les produire à moindre coût ailleurs ».
L’État croit-il vraiment pouvoir contraindre les fonds de pension ?
Devant le tollé, le gouvernement a décidé de prendre une participation de 2 % au capital d’Opella et annonce 40 millions d’euros d’amende en cas d’arrêt de la production en France. Quand on débourse 16 milliards pour Opella, que pèseront 40 millions, 2 % des bénéfices, s’il paraît plus rentable de délocaliser. « Aucune illusion à se faire sur les promesses en carton », souligne Fabien Mallet. « On exige qu’Opella reste dans Sanofi et que Sanofi soit un peu plus contraint par les autorités, qu’elles soient européennes ou françaises » précisant que la nationalité du fonds d’investissement n’est pas en cause. « Tous les fonds d’investissement, qu’ils soient français, américains, allemands, qataris, ont la même méthodologie : faire de l’argent » !
Malgré l’argent public — 1,5 milliard de crédit impôt recherche en dix ans pour Sanofi — les pénuries ont explosé. 406 en 2016, plus de 5 000 l’an dernier ! Production à flux tendu et délocalisée, bénéfice des actionnaires avant investissements de production, vente prioritaire aux marchés où les médicaments sont les plus chers ont eu raison des promesses gouvernementales de souveraineté sur les médicaments essentiels. Pire, une dizaine de laboratoires ont été condamnés à verser 8 millions d’euros pour n’avoir pas respecté, en 2023, les quatre mois de stock de sécurité exigés pour les médicaments à intérêt thérapeutique majeur.
Un seul objectif : la rentabilité
Protégés par les brevets, les capitalistes de l’industrie pharmaceutique ponctionnent notre Sécurité sociale et privent les peuples du Sud de traitements. On pense aux anti-cancéreux dont les prix ont été multipliés par 12 en une dizaine d’années. On pense au prix extravagant exigé par le laboratoire Novartis pour le Zolgensma qui guérit une maladie génétique rare, l’amyotrophie spinale : 2,3 millions d’euros l’injection. Alors que cette thérapie génique a été mise au point par la recherche publique — l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) en France — et a été financée par nos dons à l’association Téléthon.
La relocalisation de la production en France est une de nos priorités, déclarait Emmanuel Macron. Mais faire revenir sur le sol européen les productions, en confiant au marché les conditions de cette production ne suffira pas ! Le krach boursier de EuroAPI, filiale de Sanofi spécialisée dans la production sur le territoire européen des principes actifs, le démontre. Elle a perdu 60 % de sa valeur en une journée à l’annonce de ses résultats. À l’image de Sanofi, la Bourse préfère investir sur le segment des préparations pharmaceutiques aux brevets les plus rentables.
Transparence totale, baisse massive des prix, licences d’office, fin des brevets et des accords sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce, Et si nous osions la production publique de médicaments biens communs, dans le cadre d’une Europe non pas des banques, mais des besoins sociaux, en coopération avec ceux pour qui la pénurie est la norme, les pays et les peuples du Sud. Car c’est folie de confier nos médicaments au marché !
Frank Prouhet