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Un nouveau manifeste réformiste malheureusement approuvé par des dirigeant·es de la IVe Internationale et du NPA

Par Gaston Lefranc ( 4 avril 2019)
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Deux ans après le texte « Les défis pour la gauche dans la zone euro » (https://urlz.fr/9kP1), un « Manifeste pour un nouvel internationalisme des peuples en Europe » a été rendu public le 20 mars 2019 (https://urlz.fr/9kOZ). Ce texte se situe dans le prolongement du précédent, mais son ambition est bien plus grande. Il fait une centaine de pages et se présente comme « un programme qu'un gouvernement de gauche populaire devrait mettre en œuvre lors de la première année de son mandat ».

Ce manifeste est signé par des personnalités de la gauche réformiste (France insoumise, PCF, Attac, Fondation Copernic, etc.), mais aussi par des militant·es du NPA ou de la IVème Internationale qui se réclament de l'anticapitalisme et du trotskysme.

Si ce programme rassemble des « anticapitalistes révolutionnaires » et des réformistes, sa logique politique est bien celle des réformistes : programme keynésien minimal à court terme, en avançant ensuite pas à pas vers le socialisme. Il est assez consternant que des « anticapitalistes révolutionnaires » puissent défendre une telle orientation qui a systématiquement échoué partout où elle a été mise en œuvre. Dans un capitalisme en crise, il n'y a pas de marge de manœuvre pour une politique réformiste. Cette orientation est une impasse totale, et les anticapitalistes révolutionnaires devraient plutôt expliquer que la seule alternative à l'austérité capitaliste est une rupture avec l'ordre capitaliste, au lieu d'alimenter les illusions réformistes.

Un programme minimum keynésien qui est impossible à mettre en œuvre

Le manifeste distingue explicitement des mesures immédiates à mettre en œuvre dans le cadre du système, et des mesures de « moyen terme » qui remettent en cause ce cadre. C'est une impasse totale car c'est précisément ce cadre qu'il faut remettre en cause pour pouvoir mener une politique alternative.

Les mesures immédiates consistent à augmenter les salaires et à augmenter les dépenses publiques pour stimuler la demande intérieure, sans remettre en cause la propriété capitaliste. Même le secteur bancaire ne sera pas immédiatement nationalisé, mais un pôle public bancaire sera constitué à côté du système bancaire privé qui sera « régulé » (quelle audace!). Les résultats d'une telle politique sont connues : elles feront baisser le taux de profit et aggraveront la crise. Ce n'est pas le « contrôle temporaire (!) du mouvement des capitaux » qui permettra de faire réussir cette relance par la demande. Sur la base d'une analyse keynésienne de la crise, le manifeste propose une politique keynésienne qui est condamnée à l'échec.

Pour concilier les contraires, le manifeste propose deux scénarios pour les banques à moyen terme : soit en rester à une cohabitation privé / public (ne changeant donc rien à la logique actuelle !), soit socialiser l'ensemble du secteur. Cela change tout, mais visiblement il s'agit de laisser toutes les options ouvertes. Mais même le scénario le plus ambitieux n'articule pas la socialisation du secteur bancaire avec la socialisation des grands moyens de production ! Une véritable rupture avec le système consiste pourtant à exproprier les grands groupes capitalistes pour que les travailleurs/ses puissent prendre réellement le contrôle de l'économie. Sinon, le secteur bancaire socialisée fonctionnera au service des capitalistes industriels.... comme en 1981 en France quand l'ensemble du secteur bancaire a été nationalisé.

Désobéir à l'Union européenne tout en restant à l'intérieur ? Une illusion

A court terme, la manifeste propose de « interrompre le respect du Pacte européen de stabilité et de croissance », tout en restant dans l'UE et l'euro. C'est seulement à « moyen terme » (l'expérience aura déjà eu le temps d'échouer...) que deux scénarios sont proposés : une sortie de l'euro ou la mise en place d'une monnaie alternative en restant dans l'euro (!).

La manifeste insiste sur l'illusion qui consiste à vouloir réformer l'UE. Bravo ! Mais au lieu d'afficher clairement la nécessité de rompre immédiatement avec ce cadre qui empêche toute politique alternative, le manifeste propose à court terme la « désobéissance » toute en restant dans l'UE et l'euro... puis avance prudemment ses deux scénarios de moyen terme.

Défendre la « souveraineté monétaire » et rester dans l'euro est-il compatible ? Oui, les auteurs du manifeste pensent avoir réconcilié les contraires avec leur scénario de création d'une « monnaie complémentaire » qui cohabiterait avec l'euro. Mais un réformiste aussi modérée que l'économiste Sterdyniak s'est moqué de ce « projet farfelu » (https://blogs.mediapart.fr/henri-sterdyniak/blog/230718/un-projet-farfelu-la-monnaie-fiscale-complementaire). Il n'est pas étonnant que des réformistes cherchent des bricolages institutionnels dans le cadre des institutions (car la monnaie est une institution) bourgeoises. Mais il est déplorable que des anticapitalistes cautionnent ce type de « solution ». Faire croire qu'une monnaie complémentaire pourrait cohabiter avec l'euro, c'est faire croire que les logiques socialistes (si on prend au sérieux l'ambition socialiste du manifeste) et capitalistes ne sont pas antagoniques. Si un gouvernement voulait réellement désobéir, la BCE l’asphyxierait immédiatement et il serait alors contraint soit de sortir de l'euro, soit de se soumettre. Il n'y a pas de troisième voie : si un gouvernement lançait réellement une nouvelle monnaie, ce ne serait pas une monnaie « complémentaire », mais une monnaie qui se substituerait à l'euro, une monnaie qui serait inconvertible sur les marchés financiers pour éviter toute spéculation et attaque. La seule désobéissance crédible, c'est la sortie de l'UE et de l'euro. Refuser de le dire clairement, c'est se préparer à capituler.

Le manifeste croît pouvoir réussir sa transition avec le « contrôle des capitaux ». Mais ce contrôle existait en 1981, et il n'a pas empêché l'échec de la relance. Les révolutionnaires ne défendent pas le « contrôle des capitaux », mais une monnaie inconvertible et le monopole du commerce extérieur. Si on veut vraiment s'engager dans une rupture avec l'ordre existant, il ne faut pas mettre en concurrence la production nationale avec la production capitaliste extérieure. Ce n'est pas simplement avec un contrôle des capitaux (le manifeste ne parle en outre même pas de droits de douanes...) qu'on pourra rompre avec la loi de la valeur internationale.

Ainsi, un gouvernement des travailleurs/ses devrait immédiatement sortir de l'UE et de l'euro, mettre en place une monnaie inconvertible (sur les marchés financiers) et un contrôle strict des échanges de marchandises. Renoncer à ces mesures immédiates, c'est se condamner à l'échec, c'est renoncer à tirer les leçons de toutes les expériences passées. Sinon, les contradictions s'accumulent très vite et conduisent à l'échec (déficit commercial abyssal, spéculation sur la monnaie, etc.). C'est la condition indispensable pour rendre viable une économie de transition dans un environnement capitaliste.

Il faut élaborer un nouveau manifeste communiste !

Au lieu de se rallier à des manifestes réformistes, les anticapitalistes et les communistes devraient plutôt travailler à l'écriture d'un manifeste communiste.

Le communisme est une finalité et c'est aussi un mouvement qui nécessite une rupture nette avec la logique capitaliste dès la prise du pouvoir politique par les travailleurs/ses, sous peine de se condamner à l'échec. L'idée qu'une phase antilibérale est nécessaire avant le passage au socialisme est une idée qu'il faut définitivement mettre à la poubelle. Dès la prise du pouvoir, les travailleurs/ses devraient exercer leur souveraineté sur les leviers essentiels : les grands moyens de production et la monnaie. Ils devraient immédiatement prendre des mesures de protection vis-à-vis des marchandises et capitaux extérieurs. Sur ces bases là, un nouveau mode de production pourrait être construit, basé sur la démocratie à tous les niveaux : gestion démocratique des nouvelles caisses d'investissement et du salaire socialisé, autogestion des entreprises dans le cadre d'une planification démocratique de l'économie, etc. Ce sont ces pistes là (évidemment totalement hors sujet pour le manifeste examiné ici) qui devraient être travaillées sérieusement par les anticapitalistes,

La signature par des dirigeants du NPA d'un tel manifeste est un symptôme de plus d'une crise existentielle du NPA. Il n'y a aucun sens à maintenir un petit appareil « anticapitaliste » si celui-ci se met à la remorque programmatique et stratégique des réformistes. Il faut aujourd'hui refonder un courant anticapitaliste révolutionnaire capable de faire vivre un marxisme vivant et de porter une espérance communiste.

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