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Chili : Triomphe du Non au référendum constitutionnel, bilan de la défaite et comment nous pensons que la lutte doit continuer

Par MST-UIT (Chili) (18 septembre 2022)
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Le MST (Mouvement socialiste des travailleurs), section chilienne de l’Union internationale des travailleurs-Quatrième Internationale (UIT-QI), nous a fait parvenir ce texte (traduit en français par ses soins) après la défaite du Oui au projet de Consittution lors du référendum du 4 septembre. Ce groupe avait appelé à voter oui, position que nous avions également soutenue (https://tendanceclaire.org/article.php?id=1829). Nous publions bien volontiers, comme tribune libre, le texte de ce groupe que nous ne connaissions pas avant cette prise de contact et sommes ravi-e-s de pouvoir contribuer à faire connaître ses positions à nos lecteurs et lectrices.

Chili : Triomphe du Non au référendum constitutionnel, bilan de la défaite et comment nous pensons que la lutte doit continuer

La majorité du pays (62 %) a décidé de rejeter la proposition de nouvelle Constitution, contre seulement 37 % qui ont voté pour l’approuver. Un résultat qui a frappé un large secteur de camarades qui ont été les meilleurs de la lutte de la rébellion populaire de 2019 jusqu’aujourd’hui. La confusion règne, car il ne fait aucun doute qu’hier les grands hommes d’affaires, la droite et le pinochétisme le plus récalcitrant ont gagné. Nous comprenons et partageons la déception de ces centaines de milliers de personnes […].

Les vraies raisons de la défaite électorale

Il semble absolument contradictoire que les mêmes personnes qui ont mené l’une des plus importantes rébellions populaires de ces derniers temps, qui ont voté à 80 % pour changer la constitution, qui ont obtenu une majorité de candidats indépendants pour la Convention [qui avait élaboré le projet de constitution], utilisent maintenant cette majorité pour refuser de changer la constitution. Mais ce n’est pas le cas.

Cette défaite a commencé à prendre forme le 15 novembre 2019, lorsque la droite, l’ancienne Concertación et le Frente Amplio ont signé l’Accord de paix pour sauver le gouvernement Piñera, et détourner la force de la mobilisation vers la voie institutionnelle d’un processus constituant absolument conditionné par les affaires, de sorte qu’il ne serait ni libre ni souverain. Non seulement cela, mais cet accord permettait de frapper les membres les plus militants de la mobilisation, les transformant en prisonniers politiques, ou de les réprimer brutalement, garantissant l’impunité aux Carabiniers [policiers] pour cela. Et, il en a été ainsi jusqu’aujourd’hui.

Avec 80 % d’approbation au premier plébiscite et une majorité de votes pour les indépendants, la classe ouvrière et le peuple croyaient qu’ils construisaient une institution qui s’opposerait aux corrompus, mais cela ne s’est pas produit. C’est pourquoi des millions de personnes ont été déçues et ont rompu avec le processus constitutionnel. La Convention constitutionnelle a permis à Piñera de gouverner tranquillement, elle n’a rien fait contre la perte d’emplois et l’augmentation de la pauvreté, elle n’a rien fait pour les prisonniers politiques ou contre les miliciens et la police qui les répriment. C’était juste un autre Parlement. (…)

Lors de cette même convention constitutionnelle, dans les coulisses, la majorité des « indépendants » ont cédé le contrôle aux partis, qui ont laissé de côté dans le nouveau texte constitutionnel des demandes aussi importantes que la nationalisation des ressources naturelles. Au milieu des luttes et des manœuvres, une nouvelle constitution est née qui, bien que comportant des avancées démocratiques, a laissé intact le modèle économique à l’origine des profondes inégalités du pays. (…)

Entretemps, une autre déception a préparé le terrain [de l’échec au référendum]. L’arrivée du nouveau gouvernement, avec le parti communiste et le Frente Amplio à sa tête, a été une grande déception pour des millions de personnes. Face à la profonde crise économique que subissent des millions de familles de travailleurs, M. Boric et son gouvernement refusent de prendre les mesures les plus élémentaires pour éviter le désastre. Il ne fait rien contre l’inflation, ne fait rien contre les salaires de misère, refuse toute aide publique directe et ne touche pas aux bénéfices des grandes entreprises. Ce qu’il a été fait, main dans la main, c’est la répression contre les Mapuches et le peuple chilien, et des promesses vides sans fin. C’est pourquoi des millions de personnes ont utilisé le vote du plébiscite pour punir ce gouvernement.

Sa campagne était encore plus criminelle. Alors que des milliers de personnes tentaient d’affronter, avec de maigres ressources, le pinochétisme du rejet, Boric et ses partis ont signé avec une hâte fébrile un accord visant à réformer la nouvelle constitution au profit des entreprises. Il a négocié publiquement et sans vergogne la nouvelle constitution avec les partisans du rejet, en disant qu’il était nécessaire de faire une « constitution pour tous ». 

Sans compter que les directions des principales organisations syndicales, étudiantes et populaires du pays, dirigées par ces mêmes partis (...) ont joué un rôle désastreux dans la montée de la désillusion. (...)

La campagne de la droite et pour le rejet, le poison du mensonge et de la peur, ont tranquillement emprunté les brèches de désillusion ouvertes par ceux qui dirigent aujourd’hui le gouvernement, qui ont mené la campagne pour le oui, qui ont négocié avec la droite au congrès, et qui pendant la rébellion populaire, ont sauvé Piñera. C’est leur défaite. Des millions de travailleurs, d’étudiants, de femmes, de dissidents et de sœurs et frères des peuples autochtones ont voté pour exprimer cette confusion, ou pour sanctionner directement les demi-mesures et les tromperies de ce gouvernement qui promettait de changer les choses.

Toutefois, il convient d’ajouter un autre point, non moins important. Apruebo Dignidad et les vieux partis ont réussi à diriger tout le processus politique jusqu’aujourd’hui. En effet, nous n’avons pas réussi à construire une alternative politique pour les millions d’entre nous qui ont combattu pendant la rébellion populaire. Une alternative qui lutte contre l’inflation et les salaires de misère, pour les revendications les plus sincères de la classe ouvrière et du peuple, ou qui nous aurait permis (à l’époque) de faire face aux manœuvres et aux tromperies du congrès, et de conduire à un vote contre la constitution de Pinochet. Sans ce leadership, comme cela est devenu évident, tous les efforts sont vains. 

Ils utiliseront cette défaite pour continuer d’attaquer le peuple et la classe ouvrière.

Aujourd’hui, le triomphe du rejet permet de repousser à droite le gouvernement qui a déjà tissé tous les ponts avec les patrons du pinochétisme. Ne pas toucher à Piñera ni aux officiers qui ont imposé la terreur à la rébellion populaire, en militarisant Wallmapu et en réprimant les mobilisations, et surtout s’engager dans un accord national pour construire la « constitution de tous » : c’était, c’est et ce sera cela, le gouvernement de Boric, du PC et de la FA.

(...) « Un nouveau processus constituant ! » a promis Boric ; « nous devons apporter des changements à la constitution des années 80 ! », répond la droite. Les deux parties savent qu’elles doivent continuer à nourrir l’espoir que les changements « responsables » ne peuvent être réalisés que par elles-mêmes, enfermées dans le congrès. Et, pour cela, ils proposent de mettre en place un scénario de réformes qui rassurerait des millions de familles de travailleurs qui voient leur niveau de vie baisser quotidiennement, suite à la crise économique. Le terreau du mécontentement social s’élargit, et le triomphe temporaire du rejet ne leur fait pas oublier cette situation.

Ce qu’ils veulent, c’est un nouvel accord national, quel que soit le nom qu’il prenne, pour éliminer tout vestige de la rébellion populaire de 2019 (...).

Nous devons les affronter tous !

Alors pourquoi était-il important d’approuver la proposition constitutionnelle ? Parce que le triomphe du rejet ne pouvait que renforcer, et a renforcé, les secteurs les plus réactionnaires du pays. C’est ce qu’ont compris des milliers d’entre nous qui ont participé aux principaux événements ou qui ont mena la campagne avec leurs propres forces. Ceux d’entre nous qui ne se sont pas contentés de voter ont dénoncé les manœuvres du gouvernement de Boric, ont promu les appels à lutter contre l’inflation et les salaires de misère, et à être en solidarité active avec toutes les luttes.

C’est pourquoi il est essentiel de renforcer l’unité qui a été réalisée entre ceux d’entre nous qui ont lutté dans les rues contre le pinochétisme et le camp du Non. (…)

Nous devons nous regrouper, unifier les luttes, ouvrir des dialogues fraternels, agir ensemble et de concert contre tous ceux qui veulent utiliser le triomphe du Non pour continuer à frapper la classe ouvrière et le peuple. Il y aura des moments pour se lamenter sur la défaite qui vient d’avoir lieu aujourd’hui, mais c’est le moment de reprendre le chemin ouvert par la rébellion populaire de 2019.

Pour un plan national de lutte contre l’inflation et les salaires de misère

Contre la militarisation de Wallmapu, la répression, et pour la liberté de nos prisonniers 

Contre les négociations entre le camp du Non et le gouvernement Boric pour imposer un faux processus constituant, mené par les corrompus habituels

S’unir dans la lutte, redescendre dans la rue, construire ensemble une alternative politique pour ceux d’entre nous qui luttent

Pour que les travailleurs et les peuples du Chili et du monde puissent gouverner

5/09/2022

Extraits de la déclaration du comité exécutif du MST,

section chilienne de l’UIT-QI

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