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La dette bancaire espagnole aggrave la crise de la zone euro
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
La crise financière européenne s'est à nouveau aggravée alors que les doutes augmentent sur la solvabilité du système bancaire espagnol et que la possibilité d’un retrait de la Grèce de la zone euro devient de plus en plus probable.
Vendredi dernier, le gouvernement espagnol a demandé aux banques de prévoir 30 milliards d’euros (39 milliards de dollars) pour couvrir les pertes massives en actifs immobiliers, c’est sa quatrième tentative en trois ans pour assainir le système bancaire du pays. Mais, pour les marchés financiers, la mesure est généralement considérée comme trop insignifiante et trop tardive. Les valeurs bancaires ont chuté et le taux d’intérêt des obligations espagnoles a grimpé à plus de 6 pour cent, un niveau jugé insoutenable, face aux craintes que l’Espagne aurait à solliciter un plan de sauvetage de l’Union européenne. La chute des valeurs bancaires inclut Banco Santander, la plus importante banque en termes de valeurs de la zone euro.
L’appel du gouvernement espagnol à provisionner des fonds supplémentaires a fait suite à sa décision en début de semaine de convertir en actions ses 4,5 milliards d’euros de participation dans le conglomérat Bankia, ce qui revient dans les faits à une nationalisation du prêteur.
Cette prise de contrôle signifie l’effondrement d’un plan de sauvetage précédent soutenu par le gouvernement et met au grand jour les prétentions frauduleuses à la fois du gouvernement et des autorités de régulation selon lesquels le marché de l’immobilier s’était stabilisé et que les banques espagnoles étaient sur la voie de la reprise.
Bankia, qui détient 10 pour cent de l’ensemble des dépôts nationaux des banques, fut créé en 2010 de la fusion de banques régionales qui avaient littéralement été rendues insolvables du fait de l’éclatement de la bulle immobilière espagnole après le début de la crise financière mondiale de 2008. Les sept banques impliquées dans la fusion avaient accumulé 55 milliards d’euros en actifs toxiques, liés aux prêts immobiliers et qui s’élevaient à près de 30 pour cent de leurs bilans combinés.
Depuis leur lancement sur le marché d’action en juillet dernier, les actions de Bankia ont dégringolé de plus de 45 pour cent étant donné que ses plus gros investisseurs internationaux retiraient leur argent. Nombre de ceux qui avaient initialement acquis des actions étaient de petits investisseurs qui avaient réagi à la campagne gouvernementale invitant à soutenir une reprise nationale.
L’économiste en chef pour l’Europe méridionale chez Barclays, Antonio Pascual, a dit qu’il y avait eu d’énormes sorties de fonds de l’Espagne ces six derniers mois. Il a averti qu’un soutien financier externe serait nécessaire si les investisseurs étrangers continuaient à réduire leur exposition à un « taux économiquement perturbateur ».
Par ailleurs, l’on estime que les banques détiennent environ 308 milliards d’euros en actifs immobiliers dont 184 milliards sont considérés être des « actifs toxiques ». Ces prêts douteux sont la conséquence du krach immobilier qui a laissé vides et sans acquéreurs les parcs de biens immobiliers saisis. De plus, l’on craint l’exposition des banques aux prêts immobiliers qui totalisent 656 milliards d’euros. Ces actifs figurent encore à leur valeur originale dans les livres des banques malgré le fait que les prix des maisons ont chuté d’environ 25 pour cent depuis 2008. Jeudi dernier, des données officielles ont montré que les ventes des maisons avaient baissé pour le 13ème mois consécutif.
Loin de soulager la crise, les dernières mesures du gouvernement pourraient l’intensifier. L’Espagne est déjà en prise avec un programme d’austérité qui a réduit les dépenses gouvernementales de 27 milliards d’euros et qui a fait bondir le taux de chômage à 25 pour cent. Par conséquent, un nombre de banques plus faibles auront des difficultés à lever les fonds supplémentaires requis, ce qui nécessitera une intervention de l’Etat. Comme l’indiquait le Financial Times, ceci a mis en branle un cercle vicieux : « Au fur et à mesure que la dette gouvernementale augmente, davantage de mesures d’austérité seront nécessaires, accélérant la croissance économique et rendant les banques probablement encore moins enclines (ou incapables) à prêter. »
Un processus similaire est en oeuvre en raison de l’opération de refinancement à long terme (LTRO) de la Banque centrale européenne en vertu de laquelle 1 milliard d’euros a été mis à la disposition des banques européennes faibles pendant trois ans au taux d’intérêt ultra bas de 1 pour cent.
Les banques espagnoles ont reçu de l’argent pour racheter la dette gouvernementale ce qui a enclenché un nouveau cercle vicieux potentiel. Alors que la position des banques s’affaiblit et qu’elles empilent plus d’argent sous forme d’obligations, elles deviennent de plus en plus exposées aux risques de la dette souveraine.
La crise est aussi exacerbée par la perspective d’une poursuite de la baisse de la croissance espagnole. Selon les dernières prévisions de l’Union européenne, l’Espagne peut s’attendre à un marasme pendant les deux prochaines années au moins. Ceci signifie que les recettes du gouvernement continueront de baisser en occasionnant de nouvelles demandes de mesures de rigueur alors que son ratio endettement/PIB augmente et qu’il ne réussit pas à atteindre ses objectifs en matière de déficit. De nouvelles réductions gouvernementales résulteront à leur tour en davantage de contraction économique. La Commission européenne a prédit un déficit budgétaire de 6,4 pour du PIB en 2012 en manquant l’objectif de l’UE de 5,3 pour cent.
Alors que l’on a beaucoup parlé de ce que l’UE pourrait permettre une certaine souplesse à l’Espagne pour ses objectifs de déficits, le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaire, Olli Rehn, a mis en garde que la situation de la dette « exige un traitement très ferme pour réfréner les dépenses excessives des gouvernements régionaux. »
Le récent tournant dans la crise de la dette espagnole s'est accompagné de craintes qu’une situation politique instable en Grèce, où des pourparlers concernant la formation d’un nouveau gouvernement ont pratiquement tous échoué, pourrait résulter pour la Grèce en une sortie de la zone euro.
Le mois prochain, il est prévu que la Grèce élabore un programme de 11,5 milliards d’euros de coupes budgétaires en vertu du programme de rigueur imposé par l’UE, au milieu des avertissements que si elle manque d’obtempérer, l’octroi des fonds sera coupé. Les réductions impliqueront probablement de nouvelles réductions des salaires et des retraites – les mesures mêmes que le peuple grec a massivement rejetées lors des élections du 6 mai.
Les responsables de la BCE ont accru la pression lors du week-end pour l’application du programme d’austérité. Patrick Honohan, membre du conseil des gouverneurs de la BCE, a dit qu’alors que le retrait grec compromettait la confiance dans l’union monétaire, il pourrait être traité « techniquement. »
Menaçant le peuple grec d’une nouvelle catastrophe économique, Jens Weidman, président de la banque centrale allemande, Bundesbank, a averti que : « Pour la Grèce, les conséquences [d’un retrait de la zone euro] seraient plus sérieuses que pour le reste de la zone euro. »
Alors que la BCE et d’autres responsables insistent pour dire que la zone euro sera en mesure de survivre à la tempête d’un retrait grec, il existe des doutes considérables là-dessus. La crainte est que le Portugal soit immédiatement ciblé – avec les banques et les institutions financières retirant leur argent pour le placer dans les banques allemandes – suivi de l’Espagne et de l’Italie.
Le ministre britannique du Commerce, Vince Cable, a dit que le Royaume Uni « doit espérer » que les mesures mises en place pour éviter une contagion se soient révélées suffisamment fortes pour empêcher que la crise ne se propage à l’Espagne et à l’Italie, sinon il y aurait un « impact massif » sur le commerce britannique. La contagion ne s’arrêterait pas là mais déclencherait une crise mondiale dépassant de loin celle qui avait été provoquée par l’effondrement de Lehman Brothers en septembre 2008.