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A Rennes, Mélenchon conclut sa «bonne semaine»
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Mediapart) Nouveau slogan – « La Force du peuple » –, nouvelle affiche et un meeting qui fait le plein à Rennes : le candidat de la France insoumise a réuni dimanche 10 000 personnes, selon son équipe, dans la capitale bretonne. Depuis la marche pour la VIe République, samedi 18 mars, à Paris, et dans la foulée de sa prestation sur TF1, Jean-Luc Mélenchon se sent pousser des ailes.
Rennes, de notre envoyé spécial.- La mairie socialiste de Rennes avait interdit la mise en place d’un écran géant sur le parvis de la place Charles de Gaulle, devant la salle du Liberté où Jean-Luc Mélenchon tenait meeting, ce dimanche 26 mars. Le candidat de la France insoumise ne s’est pas soumis au diktat. Dès 13 h 30, une heure et demie avant le début de la réunion, une queue s’étirait sur l’esplanade, puis sur la rue attenante. Une fois la salle remplie – 5 000 personnes –, une fois la deuxième salle pleine à son tour, il a bien fallu contenter ceux qui étaient restés à la porte – 5 000 autres personnes, selon l’organisation. Mélenchon a fait le plein dimanche, à Rennes.
Ce meeting vient clore une bonne semaine pour Mélenchon. Il y a d’abord eu le succès, samedi 18 mars, de sa marche pour la VIe République. L’événement a réuni plus de 100 000 personnes – 130 000 selon les organisateurs – entre la place de la Bastille et celle de la République. Jean-Luc Mélenchon nous avait expliqué à Rome qu’il misait beaucoup sur cette semaine pour affirmer une dynamique, à un mois du premier tour de la présidentielle.
La nouvelle affiche de campagne dévoilée dimanche 26 mars
Ensuite, lundi 20 mars, le candidat de la France insoumise a indéniablement réussi sa prestation lors du premier débat présidentiel sur TF1. D’abord face à Marine Le Pen, candidate du FN, qu’il n’a pas hésité à reprendre ou à mettre en cause à plusieurs reprises, ensuite face à Emmanuel Macron, candidat d’En Marche !, et enfin face à François Fillon, candidat Les Républicains. Un extrait vidéo de ses interventions, concernant les « tricheurs du fisc », diffusé par son équipe de la France insoumise, a déjà atteint sur Facebook 4,1 millions de vues dimanche.
Sur Youtube, la vidéo de l’émission en intégralité compte, elle, plus de 150 000 vues. À ces chiffres s’ajoute l’effet des deux événements sur l’implication dans sa campagne. Le nombre de personnes inscrites sur son site pour y participer a bondi en quelques jours, franchissant le cap des 320 000 « Insoumis », atteignant même 328 000 ce dimanche. Sa chaîne Youtube compte à présent plus de 245 000 inscrits et son compte Twitter est suivi par plus d’un million de personnes.
Mercredi, Jean-Luc Mélenchon s’est rendu à l’Essec. Devant un parterre d’étudiants de l’école de commerce, à Cergy-Pontoise dans le Val d’Oise, il a conquis son public, pourtant qualifié au début de son intervention de « suppôts du capitalisme ». Devant les étudiants, il a présenté son dernier livre, De la vertu, sorti le jour même (et qui a créé des remous à L'Obs). Alors que la campagne est marquée, semaine après semaine, voire jour après jour, par les nouvelles révélations sur les errements de François Fillon ou ceux de Marine Le Pen, l’ouvrage tombe à point nommé.
La semaine se poursuit vendredi avec la diffusion d’un numéro d’« Esprit de campagne », son émission hebdomadaire diffusée en direct sur Internet, entièrement consacré aux luttes sociales. En écho, il se trouvait samedi au MacDonald’s de la gare de l’Est, dont les salariés en grève réclament une augmentation de leurs salaires. L’occasion pour lui de dénoncer l’évasion fiscale d’un groupe qui « ne paie quasiment aucun impôt en France » tout en réalisant « chaque année 4 milliards de chiffre d’affaires ».
Jean-Luc Mélenchon et son équipe ont un autre motif de satisfaction : la stratégie de son concurrent du PS, Benoît Hamon, dont les proches estimaient au soir du second tour de la primaire qu’il leur fallait poursuivre la dynamique pour creuser l’écart avec la France insoumise, est, jusqu’ici tout du moins, un échec. Hamon ne parvient pas à se sortir de l’ornière où plusieurs hiérarques du PS cherchent à le maintenir. La litanie des nouveaux soutiens, quasi quotidienne, d’Emmanuel Macron issus des rangs du PS affaiblit le candidat socialiste. Mélenchon, qui se vante d’être un candidat « stable » à gauche depuis plusieurs mois, ramasse la mise. « L’avenir de la gauche, c’est très confus. Si j’ai gagné, le problème est tranché », a-t-il lancé à l’Essec mercredi.
À l’entrée de la salle du Liberté, à Rennes, le directeur de campagne du candidat, Manuel Bompard, a le sourire. Alors que la queue s’étend sur des centaines de mètres, Bompard estime que cette semaine « est importante pour la France insoumise ». La marche du samedi 18 mars a annoncé« le début d’une nouvelle phase de la campagne », et le débat de lundi soir, le « début d’une nouvelle dynamique ». Un nouveau slogan est dévoilé : « La Force du peuple », un mélange de « La Force tranquille » (Mitterrand en 1981) et de « Place au peuple » (Mélenchon en 2012).
Les sondages restent un gros mot officiellement dans l’équipe du candidat – « du bullshit, même quand ça nous arrange ». Il n’empêche, le fait que plusieurs enquêtes semblent affirmer que Mélenchon est passé devant Hamon, et se trouverait donc en quatrième position derrière Marine Le Pen, Emmanuel Macron et François Fillon, ne laisse pas les Insoumis indifférents, en ce sens qu’elles valideraient ce qu’ils perçoivent sur le terrain.
Un tour de France du camion podium
Dans la salle du Liberté, la foule est chauffée à blanc en attendant l’arrivée du candidat. Des extraits de précédents meetings, une intervention au Parlement européen sur la fraude fiscale, un reportage sur les conditions de travail chez MacDonald’s et, pour finir, un court passage du débat de lundi. Les spectateurs tantôt sifflent, tantôt applaudissent. Puis Mélenchon arrive : la sono hurle, les spectateurs se lèvent et crient : « Résistance ! Résistance ! » Jean-Luc Mélenchon sourit : « Bravo, les gens, vous êtes en train de faire la belle démonstration de force et devant vous, la carcasse dans laquelle je suis retrouve de l'énergie. »
Jean-Luc Mélenchon à son arrivée dans la salle du Liberté à Rennes © CG
Durant environ deux heures, le candidat a déroulé une partie de son programme en suivant un fil rouge : sa visite, la veille, dans un MacDonald’s de la gare de l’Est, en grève et en lutte pour une augmentation des salaires. Ce qui ne l’a pas empêché de parler aussi de la crise en cours en Guyane – il a d’ailleurs lu une lettre adressée par le collectif Sauvons la Guyane à la présidence de la République.
Alors que les salariés de l’enseigne de fast-food réclament le passage du salaire horaire de 9,76 euros (le Smic) à 13 euros, Mélenchon a rappelé qu’un tel mouvement avait existé aux États-Unis et que ses initiateurs avaient fini par soutenir Bernie Sanders lors de la primaire démocrate. Ce mouvement lui a également permis de répondre à ceux qui estiment qu’il n’est pas possible d’augmenter le Smic en France, car cela pèserait sur l’activité. « Est-ce qu’avec vos 1 326 euros nets [sa proposition – ndlr], vous allez acheter des Mercedes et ruiner le commerce extérieur de la France ? », a-t-il fait mine de s’interroger.
De digressions en précisions, Jean-Luc Mélenchon a pu parler de son programme écologique, de l’importance qu’il donne à l’enseignement professionnel – « Il faut former, former, former », a-t-il martelé en parlant des 300 000 emplois à créer dans l’économie de la mer ou des 400 000 emplois dans l’agriculture écologique et paysanne –, des 35 heures, de la fraude fiscale…
À propos des 35 heures, Jean-Luc Mélenchon s’en est particulièrement pris à François Fillon, le candidat Les Républicains. Mais Marine Le Pen, candidate FN, a également été pointée du doigt, en particulier en raison de sa visite en Russie. Une « double erreur », selon le candidat de la France insoumise. Sa rencontre avec Vladimir Poutine est un signe de faiblesse, d’après lui, et ce alors que « les dirigeants russes ne sont pas plus sentimentaux que moi en relations internationales ». L’autre erreur de la candidate d’extrême droite est sa rencontre avec Vitali Molonov, « cet antisémite homophobe qui a déposé en Russie des lois contre les homosexuels ». « Ce n’est pas ça, la France. Nous ne sommes pas cette femme ! », s’est écrié Mélenchon.
Outre le fond, le discours de Mélenchon était également un discours sur la méthode. « Ce que nous entreprenons est compliqué et déterminant. Il nécessite qu’un certain nombre de gens soient déterminés et convaincus », a expliqué le candidat. Plus tard, il lance : « J’ai lu un papier où l’on me dit : “Quel est votre objectif ?” Pardon ? Ben je suis candidat à une élection. Mon objectif, c’est de la gagner. » Le candidat a de nouveau expliqué la nécessité pour lui, et pour les Insoumis, de convaincre cette moitié du corps électoral qui n’a pas encore fait son choix. « Ce n’est pas le moment de croire ceux qui vous annoncent l’élection d’avance », a-t-il prévenu.
« Si les Français sont capables de faire une révolution citoyenne et de reprendre le contrôle sur leurs vies, alors le monde entier le peut ! », a-t-il conclu, avant de chanter la Marseillaise.
Outre les meetings du candidat et la campagne sur la Toile, le terrain devrait également connaître un nouvel investissement d’ici le premier tour. « Il ne faut surtout pas oublier la campagne traditionnelle profonde », avait prévenu Sophia Chikirou, directrice de communication du candidat, il y a quelques jours. C’est chose faite avec notamment deux initiatives. La première, appelée « Au tour du peuple », consiste en un camion podium qui va sillonner les routes de France avec à son bord les orateurs nationaux de la campagne. Le périple est calé sur les déplacements de Jean-Luc Mélenchon, environ deux par semaines. « Il s’agit de nous rendre visible dans l’ensemble du territoire », indique Manuel Bompard. Le camion stoppera lundi à Évreux, mardi à Dieppe, mercredi au Havre – où Jean-Luc Mélenchon tiendra meeting –, jeudi à Vierzon, vendredi à Guéret et samedi à Limoges.
Le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, Manuel Bompard, présente le camion des Insoumis © CG
L’autre initiative consiste à relancer la Caravane des Insoumis, cette campagne d’éducation populaire dont le premier volet avait eu lieu l’été dernier. Il s’agissait alors de pousser les habitants des quartiers populaires à s’inscrire sur les listes électorales, tout en les informant de leurs droits en termes de prestations sociales. Il s’agit aujourd’hui de pousser les indécis, ou les « résignés », comme les a appelés Manuel Bompard, à se rendre aux urnes et à convaincre leurs proches de faire de même.
Parce que la force du peuple ne vaut que s’il s’exprime.