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Trump renvoie racistes et antifascistes dos à dos
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
En évitant de dénoncer directement la mouvance suprémaciste, le Président s’est attiré les foudres d’opposants qui l’accusent de ménager sa base
Donald Trump a décidément le tweet et l’indignation sélectifs. Prompt ces derniers jours à promettre «le feu et la fureur» à la Corée du Nord ou à menacer le Venezuela d’une «possible intervention militaire», le bouillant président américain s’est montré bien plus frileux ce week-end, au moment de s’exprimer sur les violents affrontements à Charlottesville. «Nous devons tous nous unir et condamner tout ce qui représente la haine. Il n’y a pas de place en Amérique pour ce type de violences», a-t-il d’abord tweeté samedi. Avant d’ajouter, un peu plus tard, de son golf du New Jersey : «Nous condamnons dans les termes les plus forts possibles cette énorme démonstration de haine, de sectarisme et de violence venant de diverses parties.»
Soupçons d’Indulgence
Comme il le fait souvent en fin de phrase, pour insister sur l’idée qui lui semble importante, Trump a répété les mots «diverses parties» («many sides»). L’expression a suscité l’indignation de nombreux Américains, outrés de voir leur Président renvoyer dos à dos le camp des suprémacistes blancs, néonazis et autres nostalgiques de la ségrégation, et celui des contre-manifestants, constitué pour l’essentiel de militants antifascistes et membres du mouvement Black Lives Matter.
En évitant soigneusement, dans un premier temps, de mentionner - et donc de dénoncer - les groupuscules et milices d’extrême droite à l’origine du rassemblement, Trump a alimenté un peu plus les soupçons d’indulgence, voire de bienveillance, dont lui et une partie de son entourage feraient preuve à leur égard. A la Maison Blanche, au moins trois conseillers du Président - le sulfureux stratège Steve Bannon, le speechwriter Stephen Miller et le conseiller diplomatique Sebastian Gorka - sont réputés proches du mouvement suprémaciste de l’alt-right. Dont les membres, généralement hostiles à la classe politique, ont massivement soutenu Trump lors de la campagne présidentielle. En retour, ce dernier n’a eu de cesse de leur donner des gages, du mur au muslim ban, en passant par son obsession du terrorisme islamiste.
L’élection de Trump a donné des ailes et l’envie de se montrer à cette mouvance aux multiples facettes, dont les principales figures - comme le jeune Richard Spencer et le vétéran David Duke - avaient fait le déplacement en Virginie. Signe que l’aura de Trump ne faiblit pas au sein de l’alt-right, l’un des sites emblématiques de la mouvance, The Daily Stormer, a salué samedi soir ses propos : «Les commentaires de Trump ont été bons. Il ne nous a pas attaqués. Il a juste dit que la nation devait serassembler. Rien de spécifique contre nous […]. Que Dieu le bénisse.»
Trop peu, trop tard
L’ambiguïté présidentielle a suscité une vague d’indignation. Dans une allusion claire au ton de la campagne qui l’a opposée à Trump, Hillary Clinton a estimé que «l’incitation à la haine qui nous a amenés où nous en sommes est aussi réelle et condamnable que les suprémacistes blancs dans nos rues». Et d’ajouter : «Chaque minute où nous permettons à cela de se poursuivre, par un encouragement tacite ou par inaction, est une honte et un danger pour nos valeurs.» Quant à Barack Obama, dont les prises de parole publiques sont très rares depuis son départ de la Maison Blanche, il s’est contenté de citer Nelson Mandela sur Twitter : «Personne ne naît en haïssant une autre personne à cause de la couleur de sa peau, ou de ses origines, ou de sa religion.» Les critiques sont aussi venues du camp républicain, notamment des sénateurs Marco Rubio, Lindsay Graham ou Ted Cruz. «Il s’agissait de suprémacistes blancs et de terrorisme intérieur», a dénoncé un autre sénateur, Cory Gardner, exhortant Trump à «appeler le mal par son nom». Un pas que la fille du président, Ivanka Trump, a franchi dimanche matin, martelant sur Twitter qu’il n’y avait «pas de place dans notre société pour le racisme, la suprématie blanche et les néonazis».
Face à cette colère, la Maison Blanche a finalement tenté de rectifier le tir, par la voix d’un de ses porte-parole, qui a souligné que les propos tenus la veille par Trump, condamnant toute forme de «haine, sectarisme et violence», incluaient «bien entendu les suprémacistes blancs, le KKK, les néonazis et tous les groupes extrémistes». Trop peu, trop tard, dénoncent en chœur les opposants du milliardaire, accusé d’avoir soufflé, quand il était candidat, sur les braises de l’extrême droite américaine. Et de ne rien faire, désormais président, pour éteindre l’incendie.