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Catalogne. Cartes sur table

Catalogne

Lien publiée le 30 avril 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://npaherault.blogspot.fr/2018/04/catalogne-cartes-sur-tables-pour.html

La chaîne Arte a consacré aujourd'hui son excellente émission Le Dessous des cartes à la Catalogne.

 Impeccablement pédagogique sur un format court (moins de 15 minutes) et appuyée, comme son titre l'indique, sur un jeu de cartes mais aussi de tableaux toujours parlants, cette émission a réussi à présenter la situation qui a mené la Catalogne et l'Etat espagnol (appelé ici l'Espagne !) à la crise actuelle, alias l'imbroglio... On retrouvera la vidéo (désormais disponible sur le site de la chaîne), avec des commentaires en espagnol, dans l'article que El Nacional.cat lui consacre : lire ici

Nous nous permettrons cependant de faire deux réserves. La première sur la question de Tabarnie, cette "blague" par laquelle des internautes unionistes de Catalogne ont découpé la frange la plus urbanisée de celle-ci, autour des métropoles barcelonaise et tarragonaise, où les partis non-indépendantistes sont électoralement majoritaires. 

A partir de ce découpage, il est envisagé qu'en cas d'indépendance de la Catalogne, cette "région" proclame son indépendance vis-à-vis de l'entité indépendante et demande son rattachement à "l'Espagne". Soutenue à l'origine par le parti centriste extrêmedroitisé/espagnoliste, Ciudadanos, arrivé en tête aux dernières législatives autonomiques, cette initiative a perdu cet appui probablement par crainte qu'elle ajoute de la balkanisation à la supposée menace de balkanisation du pays. Jamais les Tabarniens n'ont par ailleurs réussi à concurrencer dans la rue, malgré quelques efforts sur Barcelone, la capacité de mobilisation, encore récemment démontrée, des indépendantistes (plus de 300 000, il y a 15 jours, lire ici en allant à la date du 15 avril) pour les prisonniers politiques. Ces deux facteurs, le lâchage de Ciudadanos et la relativement faible capacité à mobiliser, auxquels il faudrait ajouter, l'éloignement provisoire du risque que la Catalogne soit indépendante, ont fait perdre à Tabarnia de sa superbe politique; plus personne n'en parle aujourd'hui outre-Pyrénées. Notre réserve vis-à-vis de l'émission d'Arte est là : elle accorde de l'importance politique (la Tabarnie commencerait à prendre aujourd'hui une tournure politique, nous dit-on en commentaire) à ce qui n'est plus, en l'état, qu'une pochade partie en capilotade...

Plus lourd d'implication est un tableau censé donner les résultats de la législative catalane du 21 décembre dernier et qui ne fait que reprendre, pardon pour la sévérité du propos, ce qui n'est que propagande diffusée par les partis unionistes/espagnolistes :


 Pour l'indépendance/contre l'indépendance, c'est exactement le découpage qui brouille l'essentiel en tendant à délégitimer la victoire incontestable qu'ont remportée les indépendantistes dans la pire des circonstances : la répression policière et judiciaire qui a emprisonné ou fait s'exiler la représentation politique démocratiquement élue, mais aussi l'instauration du "putsch du 155" qui a cassé le Govern, destitué le parlement catalan et imposé la férule de Madrid sur la Catalogne. Pour bien comprendre les choses, pensons que l'Etat espagnol, pensait couronner ce coup d'Etat par une victoire éclatante lors de cette élection qui, selon le bon mot de la vice-présidente du gouvernement espagnol, en charge de la tutelle posée sur la Catalogne, devait permettre de "tuer" l'indépendantisme. Ce projet a en fait été mis en déroute : le parti gouvernemental, le Parti Populaire (PP) s'est littéralement effondré pour devenir le dernier parti de cette élection avec 4 député-es. 

Alors, oui, avant d'en venir à ce tableau, disons-le, Ciudadanos est bien le premier parti électoral de Catalogne (en grande partie en fixant les voix perdues du PP), personne ne peut s'en réjouir, mais il faut garder le sens politique de la situation et savoir reconnaître qu'il s'agit d'une victoire à la Pyrrhus ne laissant aucune possibilité à ce parti "majoritaire" d'accéder au gouvernement de la Catalogne car il n'a aucune marge d'alliance pour ce faire. Exactement le contraire de ce qui fait que la victoire électorale est indiscutablement du côté des indépendantistes, certes pour peu qu'ils s'entendent, comme ils l'ont fait par le passé et comme ils n'y sont pas encore parvenus dans un contexte d'obstruction politique menée par Madrid et qui donne la mesure de ce que vaut la démocratie dont le pouvoir se revendique contre les catalanistes. Ayant perdu les élections, il bloque, depuis les instances putschistes, toutes les propositions parlementaires catalanes permettant d'investir un President de la Généralité et de désigner un Govern raccord avec le résultat électoral !

Mais ce n'est pas seulement du côté de l'écran de fumée de la victoire électorale de Ciudadanos qu'il faut poser ses yeux et organiser sa réflexion, c'est aussi sur ce tableau présenté aux téléspectateurs prétendant que les partis "contre l'indépendance" seraient majoritaires. 

Voici (extrait) ce qui a été mis au point, sur l'élection du 21 décembre, dans cet articleLa Catalogne au croisement des vérités et des contrevérités... :
 


 Avec ce commentaire : 

La lecture biaisée des résultats de cette élection du 21 décembre consiste à laisser croire que quiconque n’a pas voté pour l’indépendance est contre l’indépendance. Or la réalité politique c’est qu’il y a un jeu à trois et pas à deux : il y a certes les "pour", les "anti" mais aussi les "nini", terme qu’ils se sont choisis eux-mêmes pour ces élections : ni pour ni contre ! Il s’agit de ceux et celles qu’on appelle les Communs et exactement Cataluña en Comú Podem (et non le seul Podemos comme il est indiqué par Arte). Et ils ont obtenu 7,4% des exprimé-es qui ne sont assignables ni à un camp ni à l’autre (au demeurant l'on n'arrive même pas aux 52% pour les anti indiqués sur ce tableau !).

Cette lecture à trois pôles fait donc apparaître que, dans la réalité réelle du débat politique catalan, les indépendantistes sont bien majoritaires en voix, majorité relative certes mais majorité tout de même, et pas majoritaire seulement en sièges. La seule différence est que cette majorité en sièges est absolue mais ce n’est pas pareil de laisser croire que cette majorité absolue repose sur une minorité en voix, alors que, certes relative, il y a clairement majorité en voix aussi.

Je précise, par ailleurs 1/ que s’il y a eu référendum d’autodétermination le 1er octobre, c’était sur la base du refus de Madrid de négocier un référendum d’autodétermination dans les règles. Comme le droit international (2), quoique l’on en pense par ailleurs, mais il est la référence du PP, du PSOE et de Ciudadanos, qui ne le respectent pas, en fait une obligation aux Etats ; et 2/ que les Communs réclament un référendum négocié. Ce qui les éloigne totalement des anti-indépendantistes, les rapproche, pas plus, mais indéniablement, des indépendantistes et permet encore moins de les assimiler aux anti !

Pour conclure : il convient de rappeler que les indépendantistes, en organisant le référendum du 1er octobre que refusait de prendre en charge le gouvernement central (et de quelle façon !), ne demandaient qu'une chose : que la libre expression électorale permette de déterminer si leur option d'indépendance était validée ...ou invalidée. L'Ecosse a montré que c'est loin d'être gagné d'avance pour peu qu'on laisse jouer la démocratie. Et le refus de la démocratie, en Catalogne, aura bien été du côté des partisans du régime ! Evidence toujours utile à rappeler ! 

Tiré de ce documentaire

Représentation au Parlament de Catalogne



Selon un même sondage, les partisan-es de l'indépendance sur le temps long



Certes un raccourci mais qui a son grain de vérité...