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L’intersyndicale et le moment présent
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Début juillet, les directions de la CGT, de la CGT-FO, de la FSU et de Solidaires avaient convenu de partir en vacances en prévoyant une intersyndicale pour la rentrée, à laquelle la CGT avait proposé d’appeler à une journée d’action interprofessionnelle le 5 octobre. Il faut bien comprendre ceci : c’est en toute connaissance de ce calendrierqu’Emmanuel Macron le 12 juillet au soir a dégainé son calendrier à lui, avec 1°) passe sanitaire différenciant les droits d’accès à l’espace public, aux commerces, aux transports, à la culture, 2°) passe licenciement conduisant les personnels sans passe « sanitaire », à partir du 30 août dans les restaurants et les commerces où il a cours et du 15 septembre dans la santé, à la suspension de leur contrat de travail sans salaire, sans garantie de reprise car on ne sait pas comment va évoluer la « loi », sans défense syndicale et sans avis de la Médecine du travail, 3°) application de la contre-réforme visant l’Assurance chômage, telle que le Conseil d’État l’avait recalée, au 1° octobre, et 4°) remise en marche de la contre-réforme visant le droit à la retraite.
Ce calendrier social macronien a une fonction politique : s’il s’applique avec un succès suffisant du point du vue du capital, Macron se représentera à la présidentielle avec l’espoir de la gagner. Toute cette offensive vise donc à conjurer le spectre de l’abstention majoritaire à la présidentielle couplée à un recul de LREM comme du RN, qui s’est illustrée aux Régionales et qui, à la présidentielle, menacerait les fondements du régime de la V° République. Laisser opérer ce calendrier n’est pas de l’indépendance syndicale, c’est au contraire une protection apportée à Macron, au régime et aux attaques patronales.
Les directions de nos syndicats étaient donc « en vacances » pour ne pas appeler à réagir contre la charge macronienne du 12 juillet, ce qui, au vu de l’ampleur des manifestations spontanées qui se sont produites, aurait sans aucun doute produit un grand mouvement, susceptible de battre Macron. C’est dans ces conditions que se sont développés des aspects « douteux » dans certaines manifestations (présence de complotistes et autres, de groupes d’extrême-droite malgré le soutien fondamental de Marine Le Pen à la politique « sanitaire » de Macron, formules codées antisémites, opération de promotion de Philippot). Ceux qui utilisent ces aspects minoritaires mais réels pour récuser tout soutien et toute participation à ce mouvement sont en réalité les responsables premiers de cette situation, qu’ils ont créée : en faisant le jeu de Macron ils font aussi le jeu de l’extrême-droite. CQFD (par contre, des militants syndicalistes et politiques sont présents dans plusieurs manifs et ont parfois combattu victorieusement l’extrême-droite comme à Besançon, à Montpellier ou à Montceau-les-Mines : honneur à eux !).
La première position prise, en fait, par l’intersyndicale réunie le 30 août (CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, ainsi que FIDL, MNL et UNL, et la CFE-CGC qui ne s’est pas associée à la journée du 5 octobre, la CFTC s’étant excusée), est de se rendre aux rendez-vous du premier ministre Castex, comme la CFDT et comme le MEDEF pour un « tour de table » en présence des ministres de l’Économie, du Travail et du secrétaire d’État aux retraites. Autrement dit, il s’agit de créer les conditions de l’attaque contre le droit à la retraite voulue par Macron, prévue pour après l’opération de division contre les non vaccinés et la réforme de l’Assurance chômage. Il est normal que des syndicats négocient et discutent, mais là il ne s’agit pas de cela. Faisant comme si de rien n’était alors que l’opération du « passe licenciement » en arrive aux travaux pratiques, ils vont discuter « avenir des retraites » avec le premier ministre de Macron. Là n’est pas la place du syndicalisme.
La seconde position annoncée à grand fracas, en parfaite cohérence avec la première, est la journée d’action du 5 octobre maintenue telle quelle, donnant donc à l’exécutif un blanc-seing pour frapper par le passe licenciement dès maintenant et contre l’Assurance chômage le 1° octobre. Dans l’Éducation nationale, l’appel à la grève (FSU, FO, CGT, SUD) le 23 septembre entre dans le même cadre, et le fait que les revendications sur les moyens, les postes, etc., soient justifiées et partagées, ne change pas le contenu politique de l’opération : un calendrier de protection de Macron.
Pendant ce temps, la directrice du Centre hospitalier de Montluçon dans l’Allier déclare à la presse que les suspensions de contrats sans salaires qu’elle s’apprête à mettre en œuvre feront que certains services seront « obligés de fermer ». Qui peut oser prétendre que ceci est une politique de santé publique ?
Le moment venu, les salariés se saisiront, ou pas, des grèves des 23 septembre et 5 octobre. Mais soyons clairs : ce n’est pas la protection de Macron, laquelle fait le jeu de l’extrême-droite, pour éviter à toute force la crise de régime qui vient, qui peut en faire l’éventuel succès. En fait, les directions syndicales font tout pour en faire des journées d’enterrement – au point de programmer la grande journée d’action contre la réforme de l’Assurance chômage … cinq jours après sa promulgation ! Ce qui importe, ce sont les affrontements immédiats, malgré et contre la politique de ces directions, avec les Macron, les Véran et les Blanquer. L’essentiel se joue maintenant.
La défense syndicale concrète, mais pas seulement au cas par cas mais bel et bien publique et exigeant l’abrogation de la loi scélérate, de tous les salariés menacés par le passe licenciement, est la nécessité immédiate la plus urgente pour tout syndicaliste indépendant qui ne veut pas faire le jeu de Macron, des patrons et de l’extrême-droite.
Nombreuses sont les initiatives locales qui réalisent ce type d’unité, l’unité pour les revendications et la défense des salariés. Les grèves effectives comme celle des bibliothécaires de Grenoble sont un point d’appui important et doivent être connues et soutenues.
Les manifestations du samedi, qui ont plafonné et non pas régressé comme le disent les médias, et dans lesquelles ou par rapport auxquelles la bataille contre les manipulations politiques « antivax » et/ou d’extrême-droite doivent se poursuivre, sur la base du combat contre le passe, peuvent rebondir à travers notamment l’appel convergent de nombreux groupes de Gilets jaunes à une montée sur Paris le samedi 11 septembre.
A Aplutsoc, nous ne nous imaginons nullement avoir le pouvoir à nous seuls de faire que la pression monte maintenant pour déjouer le piège organisé contre tous les travailleurs, mais nous entendons jouer tout notre rôle de centre politique répercutant les grèves, les combats et les débats pour aller de l’avant. Et nous disons à nos lecteurs, amis et camarades : à l’attaque ! C’est le moment de chercher le conflit, dans les boites, dans les services publics, et dans nos syndicats pour leur faire jouer leur rôle !
Le 01-09-2021.