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Les idées de Paulo Freire sont aussi puissantes aujourd’hui qu’hier

éducation

Lien publiée le 18 novembre 2021

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https://www.contretemps.eu/pedagogie-opprimes-education-ecole-emancipation-freire/

L’éducateur socialiste Paulo Freire est né il y a cent ans, le 19 septembre 1921, dans la ville brésilienne de Recife. Camarade de longue date de Freire, Peter McLaren, éminent pédagogue marxiste, explique comment la vie et l’œuvre de l’auteur d’une Pédagogie des opprimés restent profondément pertinentes aujourd’hui. 

***

Nous célébrons le centenaire de la naissance du philosophe brésilien Paulo Freire. Connu surtout pour sa magistrale Pédagogie des opprimés, Paulo Freire continue d’être un modèle pour les enseignant·es qui travaillent dans les communautés pauvres du monde entier et pour ceux et celles qui luttent pour la justice dans un monde injuste.

Tout éducateur et tout éducatrice à l’esprit critique a, à un moment ou à un autre, utilisé Freire dans sa pratique, soit pour comprendre le monde des opprimé·es, soit pour s’en inspirer et considérer l’enseignement comme un moyen de renverser les rapports de pouvoir et les privilèges sociaux. Les programmes d’alphabétisation de Freire sont aujourd’hui utilisés dans des pays du monde entier et Pédagogie des opprimés est actuellement le troisième ouvrage le plus cité dans le domaine des sciences sociales et le premier dans celui de l’éducation.

La célébrité de Freire a fait de lui à la fois une cible et un prophète dans son pays d’origine, le Brésil. Il est actuellement dénoncé par des groupes d’extrême droite comme Movimento Brasil Livre et Revoltados Online et le président Jair Bolsonaro affirme que Paulo Freire est à l’origine d’une conspiration marxiste visant l’endoctrinement des enfants dans le système scolaire brésilien.

Les tentatives de Bolsonaro d’effacer la mémoire de Freire rappellent les attaques des Républicain·es étatsunien·nes contre les théoriciens critiques de la race et les enseignant·es marxistes. Bolsonaro et le mouvement de droite Escola sem Partidoencouragent les élèves à filmer les enseignant·es pendant les cours, surtout s’ils les soupçonnent de défendre des idées de gauche ou, pire encore, de développer des opinions politiques ou sociales d’inspiration freirienne. Un député fédéral du parti de Bolsonaro a même présenté un projet de loi visant à retirer à Freire son titre de « patron de l’éducation brésilienne ».

Les conservateurs états-uniens ont également pris le train en marche pour dénigrer Freire. Le récent numéro de The Economist, intitulé « The threat from the illiberal left« , (« La menace de la gauche illibérale ») comprend un article consacré à la « woke culture » qui décrit de manière fallacieuse la pédagogie de Freire comme étant écrite dans l’esprit de la révolution culturelle de Mao. Peu importe que l’article puise ses preuves dans une seule note de bas de page de Pédagogie des opprimés ou, plus important encore, que le travail de Freire soit fondé sur la solidarité avec les masses et s’oppose au type de violence qui a fait partie de la Révolution culturelle.

Pourquoi Bolsonaro et The Economist s’en prennent-ils à Freire ? Qu’y a-t-il dans ses idées qui les effraient autant ?

La vie d’un éducateur révolutionnaire

Paulo Freire a grandi dans le nord-est du Brésil, dans l’État de Recife, pendant la Grande Dépression mondiale des années 1930. Il a appris à lire en fabriquant des lettres à partir des branches du manguier à l’ombre duquel il s’asseyait dans sa jeunesse. L’expérience de la faim et de la pauvreté vécue par Freire à un jeune âge a fini par lui faire prendre quatre classes de retard sur ses camarades de classe et la mort de son père en 1933 n’a fait qu’empirer les choses.

Malgré cela, Freire a pu terminer sa scolarité, obtenir un diplôme universitaire, un doctorat de l’université de Recife en 1959 et être admis au barreau (bien qu’il n’ait jamais exercé le droit par la suite). Il a commencé sa vie professionnelle à l’âge de vingt-six ans, en travaillant comme professeur de portugais au Collège Oswaldo Cruz de Recife.

En 1946, il est nommé directeur du Département de l’Éducation et de la Culture des Services Sociaux, une institution patronale créée pour fournir aux travailleur·ses et à leurs familles de l’État de Pernambouc des services de santé, de logement, d’éducation et de loisirs. En 1961, il devient directeur du Département de Développement Culturel de l’Université de Recife et participe à un projet éducatif historique visant à lutter contre l’analphabétisme de masse en 1962.

Le projet d’alphabétisation de Freire à Recife en 1962 lui vaut une reconnaissance internationale, notamment pour son utilisation des traditions populaires et l’importance qu’il accorde à la construction collective du savoir. C’est là que Freire a commencé à créer ce qu’il appelait des « cercles culturels », un terme qu’il préférait à celui de « classes d’alphabétisation », puisque « alphabétisation » et « analphabétisme » supposaient que la lecture et l’écriture faisaient déjà partie intégrante du monde social des travailleurs.

Dans l’un de ces cercles culturels, trois cents récoltant·es de canne à sucre ont appris à lire et à écrire en quarante-cinq jours, un temps incroyable. Encouragé par le succès de Freire, le gouvernement brésilien dirigé par le président João Goulart a élaboré des plans pour créer deux mille cercles culturels freiriens qui, dans l’idéal, toucheraient cinq millions d’apprenant·es adultes et leur apprendraient à lire en l’espace de deux ans. Ce devait être un grand accomplissement dans un pays où seule la moitié de la population adulte savait lire et écrire.

Cela ne s’est pas produit. Au contraire. En 1964, un coup d’État militaire de droite renversa le gouvernement démocratiquement élu de Goulart. Freire fut accusé de prêcher le communisme, interrogé et arrêté. Il resta emprisonné par le gouvernement militaire pendant soixante-dix jours et s’exila de peur que sa position dominante dans la campagne nationale d’alphabétisation ne conduise à son assassinat. Les militaires brésiliens considéraient en effet Freire comme « un subversif international » et « un traître au Christ et au peuple brésilien », accusé de vouloir transformer le Brésil en « pays bolchevique ».

Les seize années d’exil de Freire furent à la fois tumultueuses et productives : après un bref séjour en Bolivie, il passa cinq ans au Chili, où il s’impliqua dans le mouvement de réforme agraire chrétien-démocrate et travailla comme consultant de l’UNESCO auprès de l’Institut de Recherche et de Formation pour la Réforme Agraire (l’ICIRA). En 1969, il fut nommé professeur visiteur au Centre d’Études sur le Développement et le Changement Social de l’université d’Harvard, avant de déménager l’année suivante à Genève.

Durant son séjour en Suisse il fut consultant auprès du Bureau de l’Éducation du Conseil œcuménique des Églises où il élabora des programmes d’alphabétisation pour la Tanzanie et la Guinée-Bissau, axés sur la réafricanisation de ces pays. Il participa également à l’élaboration de programmes d’alphabétisation dans d’anciennes colonies portugaises postrévolutionnaires, telles que la Guinée-Bissau et le Mozambique, et aida les gouvernements du Pérou et du Nicaragua dans leurs propres campagnes d’alphabétisation.

Freire retourna finalement au Brésil en 1980 pour enseigner à la Pontificia Universidade Catolica de São Paulo et à l’Universidade de Campinas. De 1980 à 1986, il fut le responsable du projet d’alphabétisation des adultes pour le Parti des Travailleurs de São Paulo. Freire travailla brièvement comme Secrétaire à l’Education de São Paulo, de 1989 à 1992, poursuivant son programme radical de réforme de l’alphabétisation pour les habitant·es de cette ville.

 

Campagnes mondiales d’alphabétisation

Pendant toute la durée de son exil, Freire a écrit ce qui allait bientôt devenir des classiques : Pédagogie des opprimésAction culturelle pour la liberté et Lettres à la Guinée-Bissau sur l’alphabétisation : une expérience en cours de réalisation.

L’œuvre de Freire sera reprise plus tard par des éducateurs et des éducatrices, des philosophes et des militant(e)s politiques en Amérique du Nord et en Europe, mais elle fut fondamentalement élaborée dans le Sud : dans les communautés de base, les bairros urbains, les bidonvilles et les favelas où elle a influencé – et fut influencée par – d’innombrables mouvements sociaux, des mobilisations anti-apartheid d’Afrique du Sud au Mouvement des Travailleurs sans Terre (MST) du Brésil.

Freire encouragea toujours les éducateurs et les éducatrices à réinventer son œuvre plutôt qu’à la « transplanter » au-delà des frontières nationales parce qu’il considérait que ses enseignements émergeaient d’un contexte spécifiquement brésilien. Il s’en était rendu compte très tôt, ayant lui-même pris des leçons auprès d’éducateurs et d’éducatrices partageant les mêmes idées, dont il devait adapter au Brésil l’expérience acquise dans d’autres pays lors de campagnes d’alphabétisation de masse.

Freire rencontra l’architecte de la campagne d’alphabétisation cubaine, Raúl Ferrer, en 1965 lors de la Conférence Mondiale contre l’Analphabétisme à Téhéran. Ferrer et Freire se rencontrèrent de nouveau en 1979 pour discuter du rôle de l’alphabétisation dans la révolution sandiniste au Nicaragua.

Freire considérait la campagne cubaine d’alphabétisation, qui permit d’alphabétiser plus de neuf cent mille personnes en moins d’un an, comme l’une des grandes réussites éducatives du 20e siècle. Il tint des propos similaires à propos de la campagne d’alphabétisation des sandinistes au Nicaragua.

Freire reconnaissait ouvertement le leader indépendantiste cubain José Martí comme l’un des plus importants penseurs révolutionnaires du XXe siècle et il était un fervent admirateur de Fidel Castro et d’Ernesto Che Guevara. Le président Hugo Chavez était à son tour un grand admirateur de Freire et me fit part de son désir d’introduire l’œuvre de Freire dans la révolution bolivarienne, une mission dans laquelle j’ai pu jouer un rôle bref et modeste.

La semaine suivant la mort inattendue de Freire, celui-ci devait assister à une cérémonie à Cuba où Fidel Castro devait lui remettre un prix important pour sa contribution à l’éducation. Selon ses amis, il s’agissait du prix le plus important de sa vie.

Un marxiste résolu

Pour Freire, la remise en cause du capitalisme était une nécessité urgente et pressante. Il n’a pas souvent fourni de descriptions exactes de ce à quoi pouvait ressembler sa vision d’une alternative socialiste, mais l’adhésion de Freire à une épistémologie matérialiste était ferme et profonde et il a maintenu toute sa vie une foi moderniste dans l’action humaine et dans la socialité inébranlable du langage.

Freire était résolument marxiste, mais son langage n’a jamais analysé le paysage politique avec la langue de bois marxiste-léniniste. Il ne prêchait pas, par exemple, que toute valeur trouve son origine dans la sphère de la production, pas plus qu’il ne croyait que le rôle principal des écoles était de servir les agents du capital et ses maîtres.

Il considérait cependant que l’éducation capitaliste reproduisait les rapports sociaux d’un ordre social dominateur et exploiteur, et que la rhétorique typique consistant à « améliorer son sort » par l’éducation était souvent un voile idéologique canalisant la solidarité humaine dans de faux récits de travail acharné, de récompense et de progrès individuels.

Freire était un formidable philosophe, mais au lieu de rêveries isolées, il mettait la philosophie au service de sa pédagogie émancipatrice. La vision de Freire de la libération des formes autoritaires d’éducation s’inspirait de la dialectique hégélienne du maître et de l’esclave ; sa description de l’auto-transformation des opprimés s’inspire de l’existentialisme de Martin Buber et de Jean-Paul Sartre ; sa conception de l’historicité des rapports sociaux était influencée par le matérialisme historique de Karl Marx.

L’accent mis par Freire sur l’amour comme condition préalable nécessaire à une éducation authentique s’inscrit dans le cadre d’une affinité constante avec la théologie chrétienne radicale de la libération. Dom Hélder Câmara, archevêque catholique brésilien d’Olinda et de Recife, qui a eu une profonde influence sur Freire, a résumé l’esprit de la théologie de la libération en quelques phrases : « Quand je donne de la nourriture aux pauvres, on m’appelle un saint. Quand je demande pourquoi les pauvres n’ont pas de nourriture, on me traite de communiste ».

Freire, lui-même catholique, n’était pas trop préoccupé par la « religiosité » mais plutôt par la perspective d’une église libérée, dans une région où une grande partie du système éducatif était encore sous le contrôle des autorités religieuses. Freire rêvait plutôt de ce qu’il appelait « l’église prophétique » : une église qui serait solidaire des victimes de la société capitaliste. C’est cette vision qui a conduit Gustavo Gutierrez, qui a codifié le principe central de la théologie de la libération, à savoir « l’option pour les pauvres« , à inviter Freire à élaborer certains des éléments clés de la nouvelle doctrine chrétienne radicale.

Pédagogie des opprimés

Malgré tous les liens de Freire avec la théologie de la libération, la description qui rend le mieux compte de la vocation de Freire est celle de « philosophe de la praxis ». La philosophie de Freire était conçue, en termes simples, pour aider les êtres humains à devenir activement plus pleinement humains et ce projet politique et éthique impliquait de comprendre et aussi de transformer le monde. Cette tâche est parfaitement illustrée par l’expression popularisée par Freire : « lire le mot et le monde ».

Freire était sans égal dans son obsession pour le pouvoir de la parole et de l’écrit, pour ce que ce pouvoir révèle du monde tel qu’il nous apparaît et de ce que le monde pourrait être. Pour Freire, la sphère de l’alphabétisation permet aux êtres humains de vivre au subjonctif, dans un état « comme si », qui ouvre des voies vers de nouveaux mondes.

Une autre catégorie de Freire, la « faisabilité non testée », est une philosophie élaborée de l’espoir qui appelle les groupes privés de leurs droits à dépasser leurs « situations limites« , c’est-à-dire les contraintes imposées à leur humanité par le sous-développement et à transformer ces conditions défavorables en un espace d’expérimentation créative. Tel était, pour Freire, l’enjeu de l’alphabétisation : une pratique qui pouvait être utilisée pour priver les gens de leurs droits et les exclure tout aussi facilement que pour les émanciper.

La pédagogie de Freire s’appuyait sur une vision matérialiste complexe mais solide du monde et de sa transformation. Pour Freire, toute action entreprise sur le monde transforme nécessairement le monde tel que nous le connaissons. De plus, la transformation du monde affecte la manière dont les individus agissent ensuite sur lui. C’est en entrant dans ce processus que les individus apprennent à devenir des sujets qui agissent sur un monde dynamique et ouvert plutôt que de rester des objets passifs sur lesquels on agit simplement dans un système fermé et immuable. Telle était la vision de Freire sur la manière dont les opprimé·es peuvent surmonter l’asservissement.

Le « dialogue » et la « dialectique » sont des mots clés du vocabulaire freirien. La « rencontre » dialogique, comme l’appelle Freire, est en fait le contraire de l’endoctrinement (une ironie perdue pour les critiques réactionnaires brésiliens et étatsunien·nes qui attaquent la théorie critique de la race ou « l’endoctrinement » freirien). Freire s’est ainsi opposé à ce qu’il appelait « l’éducation bancaire« , qui consistait à déposer des connaissances acquises dans le cerveau douloureux d’étudiants malchanceux, parce qu’elle était à la fois socialement oppressive et supposait un monde si figé que les mêmes leçons pouvaient être répétées ad nauseam.

Comme le dit Freire dans Pédagogie des opprimés :

Puisque le dialogue est la rencontre dans laquelle la réflexion et l’action indissolubles de ceux et celles qui dialoguent sont orientées vers le monde à transformer et à humaniser, ce dialogue ne peut se réduire au fait, pour une personne de « déposer » des idées dans une autre, ni devenir un simple échange d’idées que ceux et celles qui discutent « consommeraient ». Parce que le dialogue est une rencontre entre [humains] qui nomment le monde, il ne doit pas être une situation où certains [humains] le nomment au nom des autres.

En tant que sujets, nous sommes encouragé·es par Freire à sortir de la prison de la connaissance préfabriquée et de ses rapports de domination en changeant les conditions matérielles qui nous façonnent. Pour Freire, se tenir aux côtés des opprimé·es n’était pas seulement un impératif éthique, comme c’était le cas pour la théologie de la libération, mais aussi un impératif épistémologique : c’était, insistait-il, le seul moyen de rompre avec l’idée qu’il existe un royaume d’idées pures qui doivent être arrachées et transmises par des autorités désignées.

Pour Freire, la vérité est toujours dialogique, elle concerne toujours le soi et l’autre, liés dans une contradiction dialectique de la vie quotidienne.

 

Freire aujourd’hui

Freire a toujours refusé d’être identifié aux nombreux mouvements et tendances de l’éducation auxquels certains ont prétendu qu’il était affilié, qu’il s’agisse d’éducation populaire, d’éducation des adultes, de changement éducatif, d’éducation non formelle, d’éducation progressive ou de pédagogie marxiste. Alors que certains de ces courants ont fini par tomber entre les mains des responsables de la politique éducative, le projet de Freire est resté fermement une pédagogie des opprimé·es.

Freire a combattu toute sa vie contre l’avènement du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui : une société où l’apprentissage par la résolution de problèmes perd du terrain au profit d’interminables guerres culturelles ; où les enseignant·es sont critiqué·es pour leur raisonnement fondé sur des données probantes ; où les gens sont punis pour avoir remis en question l’histoire des enchevêtrements coloniaux des États-Unis et leur brutale histoire d’esclavage. Le type de pensée courageuse que Freire appelait de ses vœux rend d’autant plus accablante la lâcheté morale de la plupart des dirigeant·es politiques et des personnalités publiques d’aujourd’hui.

Ce dont nos systèmes scolaires ont besoin aujourd’hui, c’est d’une pédagogie qui permette aux élèves de comprendre leurs expériences vécues dans des contextes sociopolitiques plus larges et plus complexes. Les guerres culturelles aux États-Unis et au Brésil sont, au moins en partie, liées à la peur de ce que cela signifierait : à tort ou à raison, inviter les élèves à considérer les mérites de la théorie féministe, de la théorie critique de la race, de la théorie décoloniale et d’autres outils d’analyse signifie également réfléchir aux expériences historiques qui rendent ces perspectives possibles en premier lieu.

À la base, que ce soit au Brésil ou aux États-Unis, la droite alimente la peur d’une vaste conspiration d’endoctrinement parce qu’elle a elle-même peur. En imaginant nos écoles comme un lieu de lutte darwinienne pour imposer des visions du monde différentes, les conservateurs et les conservatrices essaient de nous faire oublier ce que Freire nous a aidés à comprendre : l’éducation n’est pas seulement une question de visions du monde statiques, mais aussi, potentiellement, de changement du monde. Ou comme l’a dit Freire : « la lecture du monde doit précéder la lecture du mot ».

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Peter McLaren est codirecteur du Paulo Freire Democratic Project et ambassadeur international pour Global Ethics and Social Justice. Il est l’un des principaux spécialistes mondiaux de la pédagogie critique et est l’auteur de plus de quarante ouvrages, dont le plus récent, Pedagogy of Insurrection.

Cet article a été publié par Jacobin et traduit par Christian Dubucq pour Contretemps.

Illustration : monument en hommage à Paulo Freire à Brasilia.