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Mettre fin à la guerre en Ukraine est la priorité absolue

Ukraine

Lien publiée le 26 mars 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Mettre fin à la guerre en Ukraine est la priorité absolue – CONTRETEMPS

L’invasion russe en Ukraine a plongé ce pays, voire l’ensemble de l’ordre mondial post-1989, dans le chaos. Alors que les chars et les canons russes continuent d’attaquer les villes ukrainiennes, et se heurtent à une résistance étonnamment forte, un sentiment renouvelé d’unité et de détermination est apparu parmi les Ukrainiens – et parmi les élites occidentales. De nombreux anciens partisans de Poutine au sein de l’Union européenne se sont retournés contre lui, tandis que des hommes politiques de tous bords s’unissent dans des gestes de solidarité avec l’Ukraine, tant sur le plan matériel que symbolique.

Dans le même temps, de nouvelles divisions apparaissent au sein de la gauche. Même si ceux qui, au sein de la gauche, soutiennent activement l’invasion russe restent une infime minorité, des voix d’Europe de l’Est et d’ailleurs reprochent à la gauche occidentale d’avoir sous-estimé les ambitions impériales de Poutine et d’avoir minimisé la menace qu’il représente pour l’Ukraine et ses autres voisins d’Europe de l’Est – une menace qui n’est devenue que trop réelle pour les habitants de Kharkiv, Marioupol et d’autres parties de l’Ukraine qui subissent l’assaut russe.

Que la guerre se termine par une occupation russe totale, une victoire de l’Ukraine ou une sorte de règlement négocié entre les deux, les répercussions de la guerre se feront sentir dans les deux pays – et dans le monde entier – pendant des années. Que signifiera-t-elle pour l’avenir de l’Ukraine ? Quel impact aura-t-elle sur la gauche en Europe orientale et occidentale ? Pour répondre à ces questions et à d’autres, Jerko Bakotin, de l’hebdomadaire croate Novosti, s’est entretenu avec Volodymyr Ishchenko, un intellectuel de premier plan de la gauche ukrainienne et l’un des cofondateurs de Commons : Journal of Social Criticism.

***

Jerko Bakotin : L’attaque de la Russie contre l’Ukraine a surpris les experts, qui étaient nombreux à penser qu’elle n’aurait pas lieu car elle nuirait considérablement aux intérêts de la Russie. Quel est votre point de vue sur la question ?

Volodymyr Ishchenko : Il y avait de nombreuses raisons d’être sceptique quant à l’éventualité d’une attaque, principalement en raison des énormes risques militaires, économiques, politiques et géopolitiques d’une telle action. Il est effectivement possible que Moscou ait sous-estimé l’armée ukrainienne et que des erreurs aient été commises dans la planification de l’opération militaire – certains soldats ont cru qu’ils allaient participer à des exercices militaires en Biélorussie et n’ont reçu des ordres qu’au dernier moment avant le début de l’attaque.

En outre, bien que la France et l’Allemagne aient mené une politique légèrement différente de celle des États-Unis avant l’invasion, l’Union européenne (UE) impose désormais des sanctions plus sévères que les États-Unis. L’invasion affectera grandement la position de la Russie dans le monde et la situation politique intérieure de ce pays. Vladimir Poutine a tout risqué, aussi une défaite en Ukraine lui coûterait-elle probablement sa place, ce qui se traduirait très probablement par un coup d’État au sein de l’élite existante et peut-être même par sa mort. Une révolution n’est pas non plus à exclure, bien que les chances qu’elle se produise soient plus faibles.

En raison de ces risques, de nombreux spécialistes des sciences sociales et analystes des relations internationales pensaient que Poutine voulait intimider l’Ukraine et l’OTAN, mais qu’il n’y aurait pas d’attaque.

JB : Il existe plusieurs théories sur la motivation de Poutine : des questions sur sa santé mentale, le messianisme impérialiste, la menace posée par l’OTAN, ou la théorie selon laquelle l’Ukraine démocratique menace l’autocratie en Russie même. Qu’en pensez-vous ?

VI : Je n’ai toujours pas vu d’interprétation convaincante. La thèse selon laquelle Poutine serait devenu fou ne tient pas, car, à mes yeux, il ne présente pas de symptômes de folie. Quant à l’explication selon laquelle il s’est transformé en fanatique idéologique avec une mission messianique de reconstruction de l’Empire russe, il faut dire que les dirigeants ayant des convictions idéologiques sincères sont très-très atypiques dans la politique post-soviétique. Tous les dirigeants post-soviétiques sont des pragmatiques cyniques qui ont construit des régimes kleptocratiques dépourvus de vision idéologique. Même s’il s’avère que Poutine est devenu un fanatique idéologique, la manière dont il en est arrivé là reste un mystère et des explications supplémentaires sont nécessaires.

JB : Mais Poutine a clairement exposé des raisons impérialistes et chauvines dans son article « Sur l’unité historique des Russes et des Ukrainiens » l’année dernière, et encore plus dans son discours annonçant la guerre, où il a parlé de « dénazification » de l’Ukraine. Il a nié le droit de l’Ukraine à un État indépendant et a évoqué la semaine dernière la possibilité de sa disparition. Les motivations idéologiques semblent être très claires, ne pensez-vous pas ?

VI : La question est de savoir s’il s’agit d’une simple rhétorique visant à légitimer des actions motivées par d’autres raisons. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui interprètent son article de la manière que vous avez mentionnée. Cependant, ce texte ne nie pas l’indépendance de l’Ukraine, mais plutôt une forme spécifique d’identité ukrainienne, qui n’est pas la seule possible. Poutine argumente contre une vision de l’Ukraine fondée sur une identité antirusse. Dans sa vision, l’Ukraine et la Russie pourraient être deux États pour « un seul et même peuple ».

Poutine revient ici à l’interprétation en vigueur sous l’Empire russe, lorsque les Russes, les Biélorusses et les Ukrainiens étaient considérés comme trois branches d’un même peuple. Ce concept a été supprimé pendant l’époque soviétique, lorsque la position officielle était qu’il s’agissait de trois peuples et langues différents, même s’il s’agissait de peuples fraternels d’origine commune.

De nombreux Ukrainiens considèrent ces interprétations comme une négation de leur existence, car ils ont construit leur identité en opposition à la Russie, qui est pour eux un « Grand Autre ». Pour beaucoup d’autres, notamment ceux qui ont été socialisés en URSS, les Ukrainiens ne se définissent pas nécessairement par opposition aux Russes. Même après l’Euromaïdan et le déclenchement de la guerre dans la région du Donbass, la plupart des Ukrainiens pensaient qu’ils étaient des peuples fraternels, et pour 15 à 20 % de la population, il était normal de se sentir à la fois Ukrainien et Russe. Cela dit, la guerre actuelle pourrait effacer ces identités ambiguës.

JB : Dans un article publié dans LeftEast, vous avez soutenu que l’idée selon laquelle les Ukrainiens résisteraient farouchement à l’invasion russe était exagérée. Mais n’est-ce pas précisément ce qui se passe actuellement ?

VI : Je parlais d’une situation dans laquelle la Russie aurait détruit l’armée ukrainienne et occupé une grande partie du territoire, ce qui ne s’est pas encore produit. La résistance est peut-être plus forte que ce à quoi la Russie s’attendait, mais il en serait probablement autrement si Kiev avait été occupée en 96 heures, comme le Pentagone l’avait prédit. De nombreux Ukrainiens rejoignent la défense territoriale et l’armée, mais environ 2 millions de personnes ont déjà fui, et, selon certaines estimations, il pourrait y avoir jusqu’à 10 millions de réfugiés.

Dans le même temps, dans les villes occupées telles que Kherson ou Melitopol, le scénario que j’ai décrit se produit – il y a d’importantes manifestations pro-ukrainiennes, mais il n’y a pas de forte résistance armée. Si la Russie occupe une grande partie du territoire ukrainien, la majorité de la population sera probablement passive dans un premier temps. La résistance armée ne sera pas assez forte pour mettre fin à l’occupation, mais elle sera significative si Moscou tente d’établir un régime très répressif dans les territoires occupés. Le résultat serait une résistance non armée plus forte, qui serait une source d’instabilité permanente non seulement en Ukraine mais également en Russie.

 

JB : L’Occident a réagi de manière déterminée avec une stratégie basée sur des sanctions sévères contre Moscou et la livraison d’armes à Kiev. La destruction de l’économie russe et le renforcement de la résistance ukrainienne ont le même objectif : forcer Moscou à cesser l’attaque. Comment voyez-vous cette réponse et que pensez-vous des appels à l’OTAN pour qu’il établisse une zone d’exclusion aérienne ?

VI : Je crains que si les sanctions et les livraisons d’armes restent la réponse dominante, cela signifie que l’Occident est intéressé par cette guerre. Poutine ne peut pas se permettre de perdre, il fera donc la guerre aussi longtemps que possible. Cela signifiera un nombre énorme de morts et la destruction complète des villes ukrainiennes. Tout comme elle a détruit Grozny en Tchétchénie, l’armée russe pourrait détruire Kiev et Kharkiv. S’il ne reste pas d’autres options, Poutine pourrait menacer de recourir à des armes nucléaires.

Je pense que les élites de l’OTAN comprennent que la zone d’exclusion aérienne au-dessus de l’Ukraine signifierait une guerre entre l’OTAN et la Russie. Je ne pense pas que nous puissions nous permettre de prendre des risques qui équivalent à une apocalypse nucléaire.

Arrêter la guerre est la priorité absolue. Cela pourrait être possible en donnant immédiatement à l’Ukraine une perspective claire d’adhésion à l’UE, ou, au moins, un plan d’adhésion concret. Dans le même temps, un accord sur la neutralité militaire pourrait être conclu. C’est plus facile maintenant, car le président Volodymyr Zelensky et le reste de l’élite politique [ukrainienne] sont déçus que l’OTAN n’aide pas l’Ukraine ou n’établisse pas de zone d’exclusion aérienne.

Zelensky sera contraint d’accepter des compromis douloureux sur la Crimée et le Donbass. Mais grâce à l’adhésion à l’UE, Zelensky pourrait présenter l’accord avec la Russie comme une victoire et prétendre que les Ukrainiens ont gagné ce pour quoi ils se sont battus depuis la révolution de la place Maïdan. Dans le même temps, Poutine pourrait également affirmer qu’il n’a pas été vaincu, mais que l’invasion a atteint ses objectifs. L’UE et les États-Unis devraient négocier quelque chose comme cela s’ils veulent éviter la perte de vies ukrainiennes et la destruction de l’économie.

JB : Que voulez-vous dire par « l’Occident est intéressé par cette guerre » ?

VI : Certains commentateurs affirment avec enthousiasme que la résistance de longue durée en Ukraine épuisera la Russie de la même manière que la guerre en Afghanistan a contribué à l’effondrement de l’Union soviétique. Cependant, si cette guerre a fait beaucoup de dégâts à l’URSS, elle a été un désastre pour le peuple afghan. L’Afghanistan a été dévasté pendant des décennies, il est devenu un État failli, où un mouvement extrémiste a fini par prendre le dessus.

Si l’Occident est satisfait d’un tel avenir pour l’Ukraine, cela signifie qu’il avait besoin de cette guerre. L’attitude actuelle de l’Occident ne sera justifiée que si la Russie est vraiment si fragile qu’elle s’effondre dans un avenir très proche. Toutefois, si l’invasion se poursuit pendant des mois, voire des années, l’Occident sera complice de la prolongation de la guerre.

JB : L’Ukraine est donc non seulement une victime de la Russie, mais aussi des jeux géopolitiques occidentaux ?

VI : Les services de renseignement américains et britanniques annonçaient l’invasion depuis des mois. Si Londres et Washington étaient si sûrs de l’invasion, pourquoi ne l’ont-ils pas empêchée, pourquoi n’ont-ils pas négocié plus activement avec Poutine ? Il est certain que Poutine est le principal responsable de la guerre. Mais l’Occident était au courant de l’invasion et n’a pas fait assez pour l’empêcher.

 

JB : L’Occident a nourri les espoirs de l’Ukraine de devenir membre de l’OTAN, même s’il était clair qu’il ne défendrait pas l’Ukraine. En ce sens, les Ukrainiens ont-ils été trompés ?

VI : L’Ukraine n’a jamais reçu de plan pour l’adhésion, mais seulement la possibilité théorique d’adhérer un jour ou l’autre. Malgré les promesses concernant l’adhésion, l’OTAN n’a jamais eu le désir de se battre pour l’Ukraine. Aujourd’hui, des Ukrainiens meurent. À tout le moins, ces promesses étaient extrêmement irresponsables envers l’Ukraine.

 

JB : Sous la présidence de Petro Porochenko, l’adhésion à l’OTAN a été incluse comme objectif dans la constitution de 2019. Comment l’OTAN est-elle devenue une question aussi importante dans la politique ukrainienne ?

VI : Les politiciens ne se sont jamais intéressés à ce que les Ukrainiens pensent réellement de l’OTAN. La demande d’adhésion a été présentée par le président Viktor Iouchtchenko après la « révolution orange » de 2004. Elle a été soutenue par George W. Bush, et, en 2008, il a été décidé au sommet de Bucarest que la Géorgie et l’Ukraine rejoindraient l’alliance.

À l’époque, environ 20 % des Ukrainiens étaient favorables à l’adhésion à l’OTAN. Après l’Euromaïdan, la Russie a annexé la Crimée et la guerre a éclaté dans le Donbass, ce qui a conduit une partie de la population à considérer l’OTAN comme une protection contre la Russie. Dans le même temps, les sondages n’étaient plus réalisés en Crimée et dans le Donbass, les régions les plus pro-russes du pays. L’année dernière, du fait de la crainte suscitée par les troupes russes qui se massaient le long de la frontière, le soutien à l’adhésion à l’OTAN a dépassé les 50 %. L’invasion actuelle a changé les attitudes, même dans les régions pro-russes du sud et de l’est du pays. Cependant, la déception à l’égard de l’OTAN s’accroît en même temps.

JB : Parmi les issues possibles de la guerre, citons la partition du pays, c’est-à-dire l’imposition d’un régime répressif pro-russe à l’Est tandis que l’Ouest devient une base extérieure nationaliste de l’OTAN, l’occupation de toute l’Ukraine par la Russie ou la défaite complète de la Russie. Une Ukraine multinationale et multiethnique pourrait-elle survivre ?

VI : Vous avez décrit un scénario probable en cas de division du pays, mais tout dépend du déroulement de la guerre. La défaite de Poutine signifierait probablement la déstabilisation et l’effondrement du régime russe au pouvoir, dont l’Ukraine pourrait tirer parti et reconquérir même le Donbass et la Crimée.

À la suite de l’attaque et de la destruction qu’elle cause, il y a une grande haine envers les Russes. Je crains que la langue russe soit encore plus réprimée dans la sphère publique que ce n’était le cas après les lois adoptées par Porochenko. Le pays multiculturel dans lequel je suis né est probablement perdu à jamais.

Il est possible qu’un jour la réconciliation ait lieu. Après tout, la Pologne et la France collaborent étroitement avec l’Allemagne au sein de l’UE, même si l’Allemagne a causé d’énormes souffrances à l’ensemble de l’Europe pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais cela nécessiterait des changements politiques très sérieux en Russie même.

JB : Avant même l’invasion, vous avez écrit qu’elle pourrait déstabiliser la Russie elle-même. Quelles seront les conséquences de la guerre et des sanctions pour le régime de Poutine ?

VI : Si le régime veut s’adapter aux défis militaires, économiques et politiques, des changements radicaux dans l’ordre social et politique seront nécessaires. L’État russe fonctionne actuellement selon le principe du capitalisme clientéliste et kleptocratique, grâce auquel une petite élite s’enrichit. Toutefois, il ne sera pas possible de maintenir le régime pro-russe dans certaines parties de l’Ukraine uniquement par la répression, et la résistance des Ukrainiens pourrait encourager l’opposition en Biélorussie et en Russie – surtout si les soldats russes continuent de mourir – et même au Kazakhstan et dans toute la sphère d’intérêt russe.

Étant donné que l’instabilité ne sera pas atténuée par des politiques néolibérales orthodoxes, l’historien Adam Tooze a émis l’hypothèse que le régime tentera de mener une sorte de politique néo-keynésienne pour améliorer la vie des citoyens et ainsi acheter leur soutien. Après les deux guerres mondiales, nous avons assisté à une expansion significative des droits des travailleurs afin d’éviter les soulèvements des masses qui avaient fait de grands sacrifices pendant la guerre.

La réorientation de la Russie vers les pays non-occidentaux sera également un problème. Moscou est moins isolé qu’il n’y paraît à l’Ouest, mais à part dépendre d’une Chine plus développée, une telle réorientation ne sera pas facile à concilier avec les identités européennes des Russes, des Biélorusses et des Ukrainiens. La Russie aura également besoin d’un projet idéologique beaucoup plus cohérent qui expliquerait à la population le but de toutes ces souffrances. Le fait qu’une grande partie de la société russe ne comprenne pas l’invasion de Poutine est un symptôme de l’absence d’un tel projet, un projet qu’aucune des élites post-soviétiques n’a eu.

JB : L’invasion a également semé la confusion dans la gauche intellectuelle, habituée à blâmer l’Occident pour presque tous les problèmes du monde. Des ukrainiens de gauche comme Taras Bilous et Volodymyr Artyukh ont critiqué ce qu’ils appellent « l’anti-impérialisme des imbéciles » de la gauche occidentale dans des lettres ouvertes. Selon vous, quelle serait la bonne perspective de la gauche ?

VI : J’ai personnellement écrit contre les interprétations simplistes de l’Euromaïdan, qu’une partie de la gauche occidentale a considéré à tort comme un coup d’État soutenu par l’Occident, tout comme les républiques séparatistes du Donbass ont été considérées comme des États proto-socialistes, alors qu’en réalité elles sont les marionnettes d’un régime russe très peu socialiste. Mais discuter en ce moment de la culpabilité de la gauche occidentale en tant qu’elle serait l’idiot utile de Poutine est très dommageable pour la gauche. Le débat sur la sous-estimation de l’impérialisme russe est important, mais il ne doit pas être mené dans des moments de fortes émotions et en utilisant le chantage moral.

L’invasion va faciliter une forte vague de droite, qui réduira considérablement l’espace de la gauche en Europe de l’Est et de l’Ouest. Nous ne devons pas nous désarmer nous-mêmes et prêter le flanc aux attaques de la droite. La grande majorité de la gauche européenne condamne l’impérialisme russe et comprend que l’invasion mène au désastre, tout comme l’invasion américaine de l’Irak.

La gauche a besoin d’arguments offensifs. Nous ne devons pas accepter d’interdire les discussions sur la complicité de l’OTAN et du régime post-Maidan en Ukraine, sur les raisons de la non-application de l’accord de Minsk, ou sur les relations OTAN-Russie. Cela signifierait une capitulation – surtout en Europe de l’Est, où, dans l’ère du néo-maccarthysme qui s’annonce, il pourrait devenir impossible de soutenir des arguments de gauche, même élémentaires, sans être accusé d’être un espion russe.

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Cet entretien a été traduit par Stathis Kouvélakis à partir de la version anglaise fournie par la Fondation Rosa Luxemburg, reprise dans Jacobin (Etats-Unis).