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Au Mexique, la contestation enfle contre les réformes du gouvernement
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Le Monde) "A bas les traitres de la patrie !", a lancé, dimanche 8 septembre, Andrés Manuel Lopez Obrador, chef de file d'une partie de la gauche mexicaine, lors d'un grand rassemblement à Mexico contre les projets énergétiques et fiscaux du gouvernement. Le même jour, des milliers d'enseignants ont manifesté contre la réforme de l'éducation, approuvée par le Congrès. Un double front de contestation qui fragilise le programme réformateur du président Enrique Peña Nieto.
Plus de 30 000 Mexicains ont répondu à l'appel "pour la défense du pétrole", lancé par M. Lopez Obrador, à la tête du Mouvement de régénération nationale (Morena, gauche). "C'est inacceptable de dépouiller la nation de son secteur énergétique", a fustigé celui qu'on surnomme par ses initiales, AMLO. Candidat malheureux du Parti de la révolution démocratique (PRD, gauche) à l'élection présidentielle de juillet 2012, ALMO a depuis ses distances avec le PRD et a dénoncé le projet de réforme qui vise à ouvrir le monopole d'Etat sur le pétrole aux investisseurs privés.
Il a aussi contesté avec anticipation la proposition de réforme fiscale, présentée plus tard dans la journée par M. Peña Nieto. Devant une affiche arborant le slogan "Non au plus grand vol de tous les temps", M. Lopez Obrador a annoncé un plan d'actions pacifiques de contestation. Le 15 septembre, jour de la fête nationale du Mexique, des assemblées se tiendront dans les municipalités du pays, avant une manifestation, le 22 septembre, dans la capitale.
Dimanche, son rassemblement, initialement prévu sur la place principale de Mexico, a du être déplacé à cause des milliers de professeurs qui campent au cœur de la capitale. Depuis le 19 août, les manifestations de la Coordination nationale des travailleurs de l'éducation, fraction dissidente du syndicat national, paralysent Mexico pour protester contre la réforme éducative.
"PROMOTION DE L'EMPLOI LÉGAL"
Votée le 4 septembre par le Sénat, cette réforme prévoit une évaluation inédite des enseignants dont dépendra leur carrière. Les contestataires, dont certains se rallient à AMLO, annoncent des actions de "désobéissance civile" dans 22 Etats du pays (qui en compte 31, en plus du district de Mexico). M. Peña Nieto, issu du Parti révolutionnaire institutionnel, justifie cette réforme au nom de l'amélioration d'un système éducatif qui affiche un des niveaux les plus bas des pays de l'Organisation de coopération et développement économiques.
Même détermination pour réformer l'entreprise pétrolière publique, Pemex, dont la production décline faute d'investissements suffisants. Quant à son projet de réforme fiscale, M. Peña Nieto s'est montré plus consensuel, en renonçant à l'instauration d'une TVA sur les aliments et les médicaments, vivement critiquée par la gauche.
Son initiative prévoit une hausse des impôts sur les revenus les plus élevés et sur les bénéfices boursiers, pour compenser l'allégement des prélèvements du gouvernement sur Pemex (63% de ses bénéfices) et doper les faibles recettes fiscales de l'Etat (13,7% du PIB). Selon M. Peña Nieto, "cette réforme est sociale en visant la création d'un système de sécurité sociale universelle et la promotion de l'emploi légal", dans un pays où six actifs sur dix travaillent dans l'économie informelle. Autre objectif : stimuler la croissance, revue à la baisse de 3,1% à 1,8% pour 2013.
"Tout le monde est d'accord sur la nécessité de réformer le pays mais les choix du gouvernement provoquent une levée de boucliers, souligne José Luis de la Cruz, économiste à l'Institut technologique de Monterrey. Le principal blocage porte sur l'ouverture du monopole d'Etat sur le pétrole, emblème de la souveraineté nationale depuis l'expropriation en 1938 des entreprises étrangères". Selon une récente enquête du Centre de recherche et d'enseignement économiques (CIDE), 65% des Mexicains rejettent la participation privée dans le secteur énergétique.
A l'instar de M. Lopez Obrador, le PRD s'oppose à la "privatisation du pétrole". Cette position pourrait menacer l'avenir du Pacte pour le Mexique, accord législatif entre les trois principaux partis politiques – PRD, Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) et Parti d'action nationale (PAN, droite) – pour voter les réformes.
"Le président peut compter sur le soutien des parlementaires du PRI et du PAN, majoritaires au Congrès, mais l'ampleur des prochaines mobilisations pourrait lecontraindre à négocier davantage le contenu de ses réformes", prévoit José Merino, politologue à l'Institut technologique autonome de Mexico. Le bras de fer entre M. Peña Nieto et AMLO ne fait que commencer.