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Les sombres origines de Fine Gael

Irlande

Lien publiée le 25 septembre 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://www.anti-k.org/2018/09/24/les-sombres-origines-de-fine-gael/

http://www.rebelnews.ie, 2018-09-23 18:47:50

Les nouveaux dirigeants de Fine Gael se sont beaucoup travaillé pour se fabriquer une image libérale.

Le calcul de Leo Varadkar et de son équipe de spin-doctors bien rémunérés, est de montrer que Fine Gael maintenant se présente comme un parti moderne et compatissant, afin de s’adapter à l’évolution des opinions dans la société irlandaise, en particulier chez les jeunes. Cette évolution a été très évidente lors du référendum sur l’avortement et  Varadkar a proposé d’apporter de nouvelles modifications à la constitution. Fine Gael court après les manifestations de masse découvrant soudain le libéralisme,  lui qui a fait obstruction pendant des années aux droits des femmes.

En un sens, cela devrait être considéré comme une victoire pour la gauche et les mouvements sociaux. Le fait que nous ayons forcé le parti historique du conservatisme irlandais à adopter ces positions témoigne sans aucun doute du potentiel de l’action populaire dans la transforma-tion de ce pays. Mais il faut aussi être attentif à un autre danger; en se repositionnant, Fine Gael tente de jeter les bases d’un établishment irlandais qui garantit que les architectes de l’inégalité et du capitalisme gangster en auront encore pour quelques décennies au pouvoir.

Le parti de Varadkar n’a pas abandonné sa politique de base.

Ce que nous avons, c’est du vieux vin dans de nouvelles bouteilles: un libéralisme profond. Derrière ce nouveau look se cache une histoire profondément troublante, un Fine Gael qu’on préférerait que vous oubliiez. Récemment, par exemple, ils ont produit une vidéo époustou-flante «célébrant» les 85 ans d’histoire de leur parti, et l’ont diffusée sur les réseaux sociaux. La vidéo réussit à éviter les origines louches de Fine Gael: lié à des organisations d’extrême droite, inspiré des mouvements fascistes européens  et n’a pas montré leur président saluant comme les nazis, Eoin O’Duffy. Fine Gael souhaite blanchir leur horrible histoire. pour analyser leur trajectoire actuelle, il convient donc de revenir sur les ancêtres de Leo Varadkar.

Contre-révolutionnaire

Les racines de Fine Gael commencent dans l’Irlande post-révolutionnaire des années 1930. De 1918 à 1922, a eu lieu une énorme vague de mobilisations populaires impliquant des grèves, des occupations d’usines et des saisies de terres, ainsi qu’une lutte armée entre les forces britanniques et l’IRA. Des centaines de milliers de personnes ont été directement impliquées dans les divers éléments de la révolution. la bataille pour la libération nationale et les aspirations sociales ont finalement été vaincues.

Après la défaite, une contre-révolution suivit dans la société irlandaise, cristallisée dans le traité anglo-irlandais et la guerre civile qui a suivi. La contre-révolution a été menée par des groupes qui tentaient de casser les revendications sociales de la révolution. C’est de ces forces contre-révolutionnaires qu’émergera finalement le Fine Gael.

Le traité anglo-irlandais, signé en décembre 1921, divise le mouvement indépendantiste en deux camps. Les contre-révolutionnaires favorables aux traités ont formé Cumann na nGaedheal et utilisé les armes fournies par les Britanniques pour écraser l’opposition républi-caine anti-traité. Cette guerre civile qui a duré un an. En décembre 1922, l’État libre d’Irlande est créé et avec lui la partition et un nouveau statu quo. Cumann na nGaedheal représente une classe dirigeante catholique en plein essor, liée au pouvoir de l’Église.

Les personnalités clés à la tête de l’État étaient W.T. Cosgrave et Kevin O’Higgins. O’Higgins, comme beaucoup de la classe dirigeante catholique émergente, a fait ses études au Clongowes Wood College, une école privée d’élite. En 1926, les anciens de Clongowes étaient plus nombreux que les anciens combattants de 1916 au gouvernement.

Au cours de la révolution, cette élite a remarqué que les grèves rurales et les occupations de terres envahissaient les campagnes et que les travailleurs des villes occupaient les lieux de travail et établissaient des «soviets». Pour briser ce militantisme, le gouvernement contre-révolutionnaire a utilisé la nouvelle Armée de l’Etat libre pour briser les grèves et exécuter soixante-dix-sept républicains lors de la répression violente. Les éléments conservateurs de la société irlandaise avaient gagné et la contre-révolution a été approfondie de 1922 à 1932, quand Cumann na nGaedheal a régné sans opposition.

Réaction

La Grande Dépression de 1929 et les années de famine qui suivront auront un impact profond sur la politique irlandaise. À l’instar d’autres pays européens, cela entraînera l’émergence d’un radicalisme et d’une réaction des deux côtés du spectre politique, y compris l’émergence d’organisations ouvertement d’extrême droite. En 1932, cette instabilité politique conduira à un nouveau parti de gouvernement, le Fianna Fáil d’Eamon de Valera qui remporta une majorité.

Fianna Fáil a été créée en 1927 après avoir abandonné la politique d’abstentionnisme ( des républicains proche de l’Ira vaincue note du blog) dans l’espoir d’attirer des soutiens. Cumann na nGaedheal craignait que cela ne déstabilise leur État conservateur. Quelques années auparavant seulment, Cumann na nGaedheal exécutait et emprisonnait des membres de l’IRA, dont certains éléments étaient désormais au pouvoir. Leurs craintes n’ont fait que s’aggraver lorsque Fianna Fáil, au deuxième mois de son mandat, a levé l’interdiction de l’IRA et libéré les prisonniers.

Pour une partie de Cumann na nGaedheal, la menace était trop grave pour rester inactifs.

Des personnalités de haut rang ont formé une organisation appelée l’Association des camara-des de l’armée, initialement composée d’anciens combattants de l’armée de l’Etat Libre qui se sont engagés à protéger Cumann naGaedheal contre la violence de l’Etat et de l’IRA. L’ACA a atteint son apogée sous la direction d’Eoin O’Duffy; un ancien chef de la guérilla de l’IRA pendant la guerre d’indépendance, puis général de la guerre civile du côté des pro-traités. Il devint plus tard commissaire de police en 1922.

Il fut relâché par de Valera après qu’il eut exhorté Cosgrave d’organiser un coup d’État après les élections de 1932. Il est rapidement devenu le symbole de la résistance à la « révolution » de Fianna Fáil. Sous son commandement, le groupe fut renommé « garde nationale », adopta la chemise bleue pour se reconnaître lors des émeutes, le salut nazi et une politique corporatiste. Les adhésions atteignirent des dizaines de milliers, d’immenses rassemblements eurent lieu et le groupe fut mieux mieux connu sous le nom de «The Blueshirts».

Chemises de blues

Les Blueshirts étaient les fondamentalistes de la contre-révolution, ils attiraient ceux qui avaient le plus à perdre d’un réveil des aspirations sociales de la révolution. Ned Cronin, un fondateur des Blueshirts et plus tard membre de Fine Gael, a promis que «si une dictature est nécessaire pour le peuple irlandais, nous en aurons une. Ce sera mieux que le soi-disant gouvernement démocratique que nous avons, dirigé par des étrangers et des juifs ».

Les Blueshirts ont dénoncé « un complot de Valera », un «agent juif étranger». De Valera a même ressenti le besoin de confirmer dans le Dáil qu ‘«il n’y a pas une goutte de sang juif dans mes veines, je suis un descendant de catholiques des deux côtés… je ne veux pas parler d’une attaque contre les Juifs, mais seulement énoncer les faits. «

O’Duffy a limité l’adhésion aux Blueshirt à « des irlandais ou à ceux de foi chrétienne», car il affirmait que «les juifs sont les instigateurs du communisme». Les dirigeants de Cumann na nGaedheal, notamment Ernest Blythe, ont lutté contre un gouvernement Fianna Fáil et  l’influence grandissante de l’IRA « communiste ». Le souvenir de la révolution irlandaise, la réalité de l’Union soviétique en pleine croissance et le discours de Fianna Fáil sur la distribution des terres et l’extension du bien-être ont conduit les élites politiques, les gros agriculteurs et la classe moyenne vers les Blueshirts.

Thomas F. O’Higgins – un autre fondateur des Blueshirts et plus tard le leader parlementaire du Fine Gael – a décrit Fianna Fáil comme «l’avant-garde de la politique communiste» en Irlande et de Valera comme un «agent communiste». O’Duffy a mené une violente résistance contre la politique du gouvernement visant à saisir les bovins invendus et à distribuer la viande aux pauvres. De graves affrontements et des affrontements entre les Blueshirts et les militants républicains et socialistes eurent lieu dans tout le pays, entraînant des morts des deux côtés.

En 1933, les Blueshirts ont frôlé la confrontation avec l’État Fianna Fáil. Un défilé de masse était prévu à Dublin pour commémorer Arthur Griffith, Michael Collins et Kevin O’Higgins, les héros de la contre-révolution. Le défilé planifié rappelait la marche de Mussolini sur Rome et l’IRA, et les socialistes envisageaient d’y faire face.

Craignant un coup d’État, de Valera a interdit la marche, admettant plus tard qu’il n’était pas certain que l’armée obéirait. Le test ne s’est pas concrétisé car O’Duffy a reculé et a organisé des parades provinciales plus petites. Ce fut un moment majeur pour les Blueshirts; il est apparu clairement que les dirigeants n’avaient pas confiance en leurs forces extraparle-mentaires. Les conservateurs les plus modérés des Blueshirts étaient partis, rebutés par les longues batailles de rue avec l’opposition de gauche.

Au lieu de tenter de renverser l’État, les Blueshirts se sont tournés vers une stratégie électo-rale en collaboration avec leurs partenaires conservateurs. Les politiciens démoralisés de Cumann na nGaedheal étaient impressionnés par la capacité d’O’Duffy à mobiliser un nombre important de personnes et à oublier sa politique fasciste. Ainsi, en 1933, les Blueshirts ont fusionné avec Cumann na nGaedheal pour former le Fine Gael.

Une droite unie

Fine Gael a unifié l’opposition avec Eoin O’Duffy comme premier président et W. T. Cosgrave comme vice-président. Le premier test est venu aux élections locales de 1934. Fianna Fáil a été le grand gagnant avec une performance très décevante pour de Fine Gael.

La base des Blueshirts a commencé à décliner alors qu’ils faisaient face à une résistance sur le terrain. Il est également apparu rapidement que de Valera n’était pas un radical de gauche, comme le craignaient les agriculteurs et les chefs d’entreprise.

Alors que le flirt de Fine Gael avec le fascisme prenait fin, ils ont essayé de freiner la politique d’O’Duffy et il a démissionné. Le premier président du Fine Gael a ensuite créé le parti national fasciste, mais après avoir échoué à organiser quoi que ce soit de significatif, il a envoyé une brigade irlandaise se battre pour Franco dans la guerre civile espagnole.

Fine Gael s’est développé à partir des éléments les plus réactionnaires de la contre-révolution irlandaise.

L’élite irlandaise méprisait les revendications de la classe ouvrière du début des années 1920 et craignait que la vague révolutionnaire ne traverse l’Europe. Pour eux, la fin de l’impérialisme britannique était un moyen d’installer une nouvelle classe dirigeante locale et non la fin du système d’exploitation. Comme l’a écrit John M. Regan, «Le nouveau parti a achevé la consolidation de la droite irlandaise amorcée par Kevin O’Higgins une décennie auparavant».

Fine Gael représente toujours ces mêmes intérêts aujourd’huiI

Ils sont de loin le parti le plus riche avec leurs 50 députés ayant une richesse combinée de 80 millions d’euros. Confrontés à une crise du logement, ils protégeront les propriétaires fonciers et subventionneront les promoteurs. En période de crise économique, ils vont aider leur propre classe et infliger l’austérité aux familles monoparentales, aux travailleurs et aux plus vulnéra-bles. pendant les années 1930, ils étaient prêts à flirter avec le fascisme pour défendre leur classe. Aujourd’hui, ils adoptent le visage du libéralisme pour garder le pouvoir. La leçon de l’histoire ombragée du Fine Gael est simple; ne jamais leur faire confiance.

Leo Varadkar veut représenter Fine Gael comme le visage du libéralisme dans la politique irlandaise. Mais comme l’explique Barney Doherty, il préférerait que vous ne sachiez pas les origines de son parti à l’extrême droite du spectre politique.

Barney Doherty 25 juin 2018

http://www.rebelnews.ie/

Commentaire:

Leo Varadkar est le Taoiseach, premier ministre irlandais

La politique irlandaise ressemble assez à la France: le parti gaulliste de Gaulle avec son passé de libérateur serait représenté par le Fianna Fail de de Valera. Le PCF pas vraiment opposé sur bien des points à De Gaulle serait l’IRA. Et la droite « libérale » avec des tentations extrêmes vers le RN serait le Fine Gael.

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