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Le Hirak face à la nouvelle donne politique : L’enjeu de la résistance
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Elle a résisté aux épreuves les plus dures et a surmonté les multiples obstacles qui se dressaient sur son chemin. La révolution démocratique en cours dans le pays s’est enracinée profondément dans le corps politique et social national. Vendredi après vendredi, elle a creusé, dans l’adversité, son sillon et a placé au centre des préoccupations l’incontournable changement démocratique.
Au terme de grandes batailles politiques gagnées, d’échéances laborieusement négociées durant 11 mois de mobilisation populaire inédite, l’insurrection citoyenne arrive à une phase cruciale de son histoire.
Un tournant majeur dans sa trajectoire. Elle est face à l’enjeu de la résistance.
Le fait d’imposer l’élection présidentielle qui a porté au pouvoir Abdelmadjid Tebboune pose la question du devenir d’une insurrection citoyenne. Le sujet fait débat dans les carrés des manifestants, au sein du mouvement de manière générale, et particulièrement chez ses animateurs les plus en vue. Ils sont soumis à rude épreuve.
Comment faire pour s’adapter à la nouvelle donne politique ? Comment insuffler du sang neuf dans les rangs du peuple du vendredi pour garder la mobilisation forte ? Comment aborder la suite des événements et tenter de reprendre l’initiative politique ?
Le mouvement a-t-il atteint son point d’inflexion avec le risque de s’exposer à un essoufflement ? Autant d’interrogations qui agitent l’esprit des citoyens qui marchent depuis des mois sans interruption. Mais également des doutes et des questionnements qui depuis le début des événements ont rythmé la vie de mobilisation, tant cette expérience est originale.
Son caractère inédit a fait en sorte que les réponses à apporter aux aspirations citoyennes sont à inventer, tout comme les instruments avec lesquels il faut procéder. Les observateurs n’ont pas manqué de relever que le mouvement porte dans son ADN les gènes de sa propre régénérescence. Il s’adapte rapidement, réinvente son logiciel politique et puise sa force dans cette capacité inépuisable de sa jeunesse. C’est une nouvelle mécanique sociale qui est à l’œuvre depuis le 22 Février. Il est dans une dynamique inépuisable.
Le dernier vendredi a montré que l’ouragan populaire qui a fait irruption le 22 Février ne s’est pas essoufflé. Il redéploie ses forces pour mieux repousser sa fin. Il suffit d’écouter les échanges vifs lors des marches pour saisir la puissante détermination des manifestants. Le désir de poursuivre le combat est intact.
Et si les adversaires du mouvement populaire estiment que l’élection du président de la République constitue le début de réponse aux aspirations démocratiques et prédisent la «fin de l’histoire», le noyau central de la contestation juge nécessaire de poursuivre la longue marche, car l’amorce d’un changement du système n’est pas encore visible. Les raisons de la colère n’ont pas disparu avec le retour à la légalité constitutionnelle et l’élection d’un chef de l’Etat.
D’évidence, il est difficile de prévoir l’évolution de ce phénomène politique et social. Il n’est pas aisé de dessiner la suite de cette histoire qui finalement s’écrit au jour le jour. Tout reste imprévisible. Qui aurait parié qu’un mouvement citoyen d’une telle ampleur durerait 11 mois ! Et ce n’est pas encore fini. Les Algériens ont conscience qu’ils sont en face d’une opportunité historique à ne pas rater.
C’est maintenant ou jamais. Arracher un maximum d’espace de démocratie et surtout rendre impossible le retour à l’Algérie d’avant 22 Février. C’est tout l’enjeu de la bataille politique livrée depuis le soulèvement contre le 5e mandat de Abdelaziz Bouteflika.
Au fil des mois, le mouvement fait évoluer des revendications conjoncturellement tout en restant intransigeant sur la question centrale qui est celle de l’instauration d’un nouvel ordre démocratique. Le système politique qui dure depuis des décennies est historiquement fini. Sa mission – désastreuse – est terminée le jour où les Algériens ont arraché les portraits de Bouteflika des places publiques.
Il est vrai que la nature de la confrontation entre les millions d’Algériens mobilisés et le pouvoir incarné durant des mois par le haut commandement militaire a rendu impossible le compromis historique souhaité devant présider à la naissance de la nouvelle Algérie. Les résistances au changement ont été puissantes. La possibilité d’une solution négociée a vite été battue en brèche par les rescapés du régime de Bouteflika.
La logique de la force l’a emporté sur la raison politique. Irréconciliables sur le fond comme sur la forme, les belligérants ont été jusqu’au bout du conflit sans pouvoir déboucher sur une solution acceptée par tous. Ni vainqueur ni vaincu. Ce qui signifie que la partie n’est pas terminée. Le jeu devient encore plus important.
La nouvelle conjoncture politique pousserait-elle vers la construction des convergences entre le régime incarné désormais par Abdelmadjid Tebboune et le mouvement populaire et autres acteurs politiques ? Pour l’heure, aucune indication ne vient éclairer les grands choix politiques du pouvoir. Le mouvement populaire demeure vigilant mais surtout combatif.