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L’hôpital peut il tenir ?

Covid santé

Lien publiée le 28 avril 2021

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://lanticapitaliste.org/actualite/sante/lhopital-peut-il-tenir

Depuis la sortie du premier confinement, la stratégie de Macron contre le Covid-19 n'a pas cherché à en finir avec l'épidémie, mais à « vivre avec le virus » en évitant seulement un débordement hors de contrôle du système hospitalier. Les mesures sanitaires et sociales étant défaillantes, les principaux leviers utilisés furent les « coups de freins » autoritaires sous forme de « couvre-feux » et de « confinements ». De moins en moins efficaces, ils sont de moins en moins acceptés. Avec le temps et la montée en puissance des nouveaux « variants », cette stratégie s'épuise.

Après un an, les conditions qui avaient permis à l'hôpital de ne pas s'effondrer au cours de la première vague se fragilisent. C'est à la fois la conséquence des contre-réformes passées, des choix politiques du pouvoir face à la pandémie et de sa volonté de poursuivre et même d'accélérer le démantèlement de l'hôpital public et du service public de santé.

La crise du Covid a déferlé sur un hôpital déjà en très forte tension, rendu vulnérable par l'austérité, les restructurations, les privatisations. L'année 2019 avait été marquée par une mobilisation de plusieurs mois des services d'urgences, puis de l'ensemble du monde hospitalier.

Un an après…

L'effort demandé aux équipes en mars-avril 2020 a été d'une intensité exceptionnelle, sans moyens humains suffisants et sans protection. Il fut néanmoins consenti, au prix de la vie de certainEs et de la santé de beaucoup d'autres. Ce fut aussi au prix, comme l'ont établi les rapports parlementaires eux-mêmes, d'une prise en charge dégradée d'une partie des patientEs, avec parfois des conséquences fatales.

Un an plus tard, les conditions qui avaient permis à l'hôpital de « tenir » malgré tout se délitent. L'effort demandé aux personnels hospitaliers, au printemps 2020, s'était accompagné de la mise entre parenthèses pendant quelques semaines du « management d’entreprise ». Les équipes avaient repris en main leur travail, son organisation, lui avaient redonné son sens. Les directions hospitalières avaient dû, pendant quelques semaines, se faire plus discrètes dans leurs injonctions. Quelques moyens supplémentaires avaient été accordés et des renforts étaient venu assurer une « relève » a minima pour les équipes épuisées. Ces renforts avaient pu être en partie trouvés dans d'autres services, les hôpitaux ayant été désertés par les patientEs « non covid » inquiets d'une possible contamination.

L'espoir existait que les sacrifices consentis par les hospitalierEs permettent de sortir durablement de la crise grâce à une maitrise de l'épidémie. Soutenue par l'élan populaire , l'exigence de moyens supplémentaires, en particulier les dizaines milliers de créations d'emplois indispensables à l'hôpital semblait à portée de main. Elle avait débouché sur de fortes mobilisation au moment du déconfinement.

Dégradation des conditions de soins

Un an plus tard, aucune de ces conditions n'existe encore. Le pouvoir a, par ses choix politiques, laissé filer l'épidémie. Il a fait perdre ainsi l'acquis des deux mois de lutte des équipes hospitalières. Prévisible, la deuxième vague est arrivée à l'automne 2020, et sans baisse significative la troisième est là aujourd'hui. Ce gâchis a nourri découragement et amertume dans les services.

Avec le « Ségur « de la santé, aucun moyen supplémentaire n'a été accordé à l'hôpital, le pouvoir espérant que d'insuffisantes augmentations de salaire feraient tolérer l'inacceptable. Pire, comme l'a confirmé la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, les restructurations, accompagnées de suppressions d’emplois, se poursuivent. Les conséquences sont là, d'autant plus que cette fois, les patients « non Covid » continuent d'affluer vers l'hôpital. Les 5000 lits de réanimation durables sont pleins, et ceux qui sont temporairement ouvert en supplément, le sont par des ponctions dans les autres services entrainant déprogrammation de soins, avec des conséquences graves.

Chargées de gérer la pénurie, les directions ont repris la main, et l'hôpital est à nouveau soumis aux exigences de rentabilité et de productivité de l'entreprise privée. Les départs, face à des conditions de travail inacceptables et une pression trop forte, s'accélèrent. Ils ne sont freinés que par le refus des directions de laisser partir les agentEs. Ils ne sont pas compensés par l'arrivée de renforts, ou des recrutements à qui l'on ne propose souvent que des CDD.

Les revalorisations salariales, bien insuffisantes (voir l'Anticapitaliste du 21 avril) ne permettent ni de retenir les unEs, ni de faire venir les autres, ni d'inciter des jeunes à entrer en formation.

Le cas de la psychiatrie

C'est qu'en arrière-plan, l'exécutif entend poursuivre ses projets de liquidation du service public, et même utiliser la crise pour y parvenir. Ses projets en psychiatrie en témoignent.

Alors que les effets psychiques de la crise que nous traversons nécessitent, en particulier dans la jeunesse, écoute et soins de la part de professionnelEs, Macron annonce le remboursement de 10 consultations prépayées chez un pédopsychiatre et la création de chèques psy, permettant à des étudiantEs de rencontrer unE psychologue. Il existe pourtant un dispositif gratuit de pédopsychiatrie publique, de proximité, dont les structures ferment les unes après les autres faute de moyens. Il en découle des délais d'attente pour consulter se comptant désormais en mois ou en années.

L'épidémie, et les demandes de soins psychiques qui en découlent, sont ainsi exploitées pour opérer le basculement vers le secteur privé libéral, en exploitant la pénurie délibérément organisée du service public.

Il est urgent, pour redonner à l'hôpital et au service public de santé les moyens dont il doit disposer pour faire face à l'épidémie et assurer à toutes et tous, sans discrimination, l'accès à des soins proches, gratuits et de qualité, de reprendre le fil des mobilisations rassemblant usagerEs et professionnelEs entamées en juin 2020.