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    Lire Mahmoud Darwich

    Lien publiée le 12 août 2021

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    Lire Mahmoud Darwich – ACTA

    Hier 9 août était la date anniversaire de la mort de Mahmoud Darwich. Toutes celles et ceux qui ont un jour considéré la lutte du peuple palestinien, ont forcément croisé sur leur chemin, un poème de lui, une citation, une revue, son visage.

    Figure de la lutte du peuple palestinien depuis l’exil, il le fut sans conteste. Chassé de son village avec sa famille à sept ans, Darwich fait partie de cette génération de Palestiniens qui ont à peine commencé à grandir sur leur terre avant d’en être expulsés. Il fera partie de ceux qui se regroupèrent au sein de l’Organisation de libération de la Palestine pour laver l’honneur des Palestiniens défaits, chassés mais surtout, rendus absents par un colonialisme de repeuplement. Et il oeuvra pour rendre présent la Palestine aux yeux du monde, inscrire ce nom dans le temps.

    Membre du bureau exécutif de l’OLP, rédacteur de certaines de ses revues politiques et littéraires, émissaire de la cause palestinienne à travers le monde, il fut surtout un poète capable de manier la tradition classique arabe qu’il ouvrait aux percées avant-gardistes de la poésie moderne. 

    Trop souvent réduit dans l’imaginaire militant au folklore de l’exil, sa poésie reflète une vision de l’identité du peuple palestinien jamais réductible à ce qui fut et auquel il s’agirait de retourner. Le retour à la terre spoliée ne se confond pas avec le retour au passé idéalisé, figé. Nostalgie et exil sont constamment évoqués mais comme méditation sur le temps et sur le territoire en devenir, afin de tracer les sentiers qui donnent à la Palestine le souffle d’une identité ouverte.

    Lisons Mahmoud Darwich, non parce qu’il est un symbole d’une cause avec ses textes attitrés, mais pour la profondeur d’une poésie arc-boutée entre les âges, une poésie de terre, de chair et de révolte, cette épopée troyenne jamais trouvée/écrite, dont il se disait le descendant.

    Lire Mahmoud Darwich

    Le puits

    Je choisis un jour nuageux pour passer par

    le vieux puits

    Il est peut-être plein de ciel

    Il a peut-être débordé le sens et la parabole

    du berger

    Je boirai une paume de son eau

    Et je dirai aux morts qui l’entourent

    Que la paix soit sur vous qui demeurez

    autour du puits dans l’eau du papillon

    Je dégage une pierre de l’aunaie

    Que la paix soit sur toi petite pierre

    Avons-nous été les deux ailes d’un oiseau qui

    encore nous tourmente ?

    Que la paix soit sur toi, lune gravitant autour

    de son image

    Et que jamais tu ne rencontreras

    Et je dis aux cyprès

    Méfiez-vous de ce que vous dira la poussière

    Avons-nous été ici les deux cordes d’un

    violon au banquet des gardiennes de l’azur ?

    Les deux bras d’un amant ?

    Je marchais tout contre moi-même

    Sois fort mon double et brandis le passé dans

    Tes mains

    Telles les cornes d’une chèvre

    Prends place auprès de ton puits

    Les cerfs de la vallée se retourneront

    Peut-être vers toi

    Et la voix, ta voix, apparaîtra

    Image de pierre du présent brisé

    Je n’ai pas encore accompli ma brève visite à

    L’oubli

    Je n’ai pas emporté tous les instruments de

    mon coeur

    Ma cloche sur le vent des pins

    Mon échelle adossée au ciel

    Mes astres autour des toits

    Et l’éraflure de ma voix brûlée par le sel

    Ancien

    Et j’ai dit au souvenir

    Que la paix soit sur vous, paroles spontanées

    de la grand-mère

    Qui nous transportent à nos jours blancs sous

    sa somnolence

    Mon nom résonne du timbre de la livre d’or

    ancienne à la porte du puits

    J’entends la solitude des aïeux entre le mîm

    et le waw abyssal

    Telle une vallée aride

    Et je cache ma tendre lassitude

    Je sais que dans quelques heures, je

    Reviendrai vivant du puits

    Au fond duquel je n’ai trouvé ni Joseph

    Ni la peur que l’écho inspire à ses frères

    Sois sur tes gardes !

    Ici ta mère t’a mis au monde, à la porte du puits

    Puis elle s’est lancée dans une incantation

    Fais de toi-même ce que bon te semble

    Seul, j’ai accompli ma volonté

    J’ai grandi de nuit dans le conte entre les

    Côtes du triangle

    L’Egypte, la Syrie, et Babylone. Ici-même

    Seul j’ai grandi, sans la grâce des déesses de

    l’agriculture

    Elles lavaient les gravats dans l’oliveraie

    Elles étaient mouillée de rosée

    Et j’ai vu que j’étais tombé du voyage des

    Caravanes sur moi-même, auprès d’un serpent

    Je n’ai trouvé personne à accomplir que mon

    fantôme

    La terre m’a projeté au-dehors de sa terre

    Et mon nom tinte sur mes pas, tel le sabot de

    la jument

    Viens près de moi, que je rentre de ce vide

    Toi Gilgamesh, éternel en ton nom

    Sois mon frère !

    Et accompagne-moi pour crier à l’unisson

    dans ce vieux puits

    Il est peut-être plein de ciel, telle une femelle

    Il a peut-être débordé le sens

    Et ce qui adviendra en attendant que je

    naisse de mon premier puits

    Nous boirons une paume de son eau

    Et nous diront aux morts qui l’entourent

    Que la paix soit sur vous

    Ô vivants dans l’eau du papillon

    Et la paix sur vous, Ô morts

    Trad Elias Sanbar