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Les Noirs américains sont les principales victimes de la hausse du chômage

Lien publiée le 12 septembre 2011

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Article du Monde

A moins d'un kilomètre de la Maison Blanche, dans le sous-sol d'une église presbytérienne, Miriam's Kitchen accueille des sans-abri leur offrant repas et soutien administratif. On y rencontre les personnes les plus démunies de la société américaine. La grande majorité de ces hommes et de ces femmes sont des Afro-Américains.

" La situation était déjà bien mauvaise avant la crise, mais le marché de l'emploi n'a fait que se détériorer. Aujourd'hui, il y a tellement de gens qui cherchent du travail que, pour un job, on a l'impression qu'il y a cent candidats " , raconte Tariq Asbury. Ce cuisinier de 34 ans est confronté à la précarité de l'emploi depuis qu'il a quitté la marine il y a une dizaine d'années. Depuis six mois, il travaille vingt heures par semaine dans un restaurant où il gagne 800 dollars par mois, ce qui ne lui " permet pas de vivre décemment " . Il continue à chercher un emploi à temps plein et vient lire les offres affichées sur les murs de Miriam's Kitchen. Il espère un jour pouvoir vivre sans colocataire et offrir davantage à ses deux, et bientôt trois enfants, tous nés de mères différentes.

Des emplois peu qualifiés, peu rémunérés et précaires avec des horaires insensés sont la réalité de beaucoup d'Afro-Américains. " Même avec deux boulots, il m'était difficile de vivre " , explique Willard Twaing, 49 ans, qui a été vendeur de chaussures, mannequin et agent de sécurité au Black Cat, la célèbre salle de concert de la 14e Rue à Washington. Aujourd'hui, il passe la plupart de ses journées à Miriam's Kitchen où il vient peindre et sculpter. Son ami Paul Lee Taylor reconnaît avoir " toujours fait les boulots dont personne ne voulait " . Jusqu'à ce qu'il se soit blessé à l'épaule il y a trois ans, il s'occupait de l'entretien des appareils d'air conditionné à l'aéroport de Washington-Dulles. Depuis, il est sans emploi et sans abri.

Discrimination à l'embauche

Le taux de chômage des Noirs aux Etats-Unis a atteint 16,7 % en août, alors qu'il est de 9,1 % pour l'ensemble de la population. Pauvreté, drogue, explosion du noyau familial, faible niveau d'éducation : les raisons de l'accès difficile des Afro-Américains à l'emploi ne datent pas d'hier. " La discrimination est la principale explication du taux de chômage si élevé chez les Noirs " , souligne Algernon Austin, le directeur du programme Race, ethnie et économie, de l'Economic Policy Institute de Washington. De nombreuses études démontrent que la discrimination à l'embauche vis-à-vis des Afro-Américains perdure. Devah Pager, de l'université de Princeton, a été jusqu'à établir qu'un candidat blanc doté d'un passé criminel à plus de chances de se faire embaucher qu'un Noir sans antécédents judiciaires.

La crise a introduit un nouvel élément : les suppressions d'emploi dans le service public. Depuis septembre 2008, les collectivités locales ont supprimé près de 550 000 emplois, et le phénomène va s'accroître. Avec 21,2 % des salariés noirs qui travaillent dans la fonction publique, le secteur public est la première source d'emploi des Afro-Américains, comme le pointe une étude de Steven Pitts, de l'université de Berkeley. " Les suppressions d'emplois dans le secteur public vont constituer un problème majeur pour la classe moyenne et éduquée de la communauté noire " , alerte Algernon Austin.

De nombreuses figures de la communauté noire, qui reprochent à Barack Obama de négliger le problème, ont profité de l'été pour essayer de se faire entendre.

Le Black Caucus, rassemblement d'élus noirs du Congrès, traditionnellement démocrate, a organisé en août des foires à l'emploi qui ont rassemblé des dizaines de milliers de chômeurs (20 000 à Los Angeles, 5 000 à Detroit, 5 500 à Miami). Le présentateur vedette de la chaîne de télévision PBS, Tavis Smiley, et Cornel West, professeur d'études afro-américaines à l'université de Princeton, ont, eux, organisé cet été, le Poverty Tour. Ils se sont arrêtés avec leur bus dans les quartiers les plus démunis de seize villes des Etats-Unis. " Martin Luther King Jr. pleure dans sa tombe " , face à l'inaction du président a même écrit M. West dans le New York Times quelques jours avant l'inauguration du mémorial en l'honneur du pasteur militant. Le révérend Jesse Jackson, à la tête de la coalition Rainbow Push, en a lui aussi appelé à la Maison Blanche.

Barack Obama ne semble cependant pas prêt à mettre en place des programmes soutenant spécifiquement l'emploi des Noirs. Il défend l'idée que les programmes gouvernementaux en faveur des plus démunis doivent reposer sur la classe économique et non sur la race ou sur le genre.

Malgré l'ampleur du chômage qui affecte la communauté noire, celle-ci continue à le soutenir largement. Selon une étude publiée fin août par le Pew Research Center for the People & the Press, 82 % des Afro-Américains approuvent l'action du président en matière d'emploi. Le cuisinier à temps partiel Tariq Asbury le dit lui-même : " Bien évidemment, je vais voter de nouveau pour Obama. Il y avait tellement de bazar à nettoyer à son arrivée à la Maison Blanche qu'il ne pouvait pas régler tous les problèmes en quatre ans. "

Delphine Halgand