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À propos des événements de Poitiers

Par Kolya Fizmatov (15 novembre 2009)
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Le samedi 10 octobre, à l’occasion du transfert des prisonniers de la maison d’arrêt de Poitiers vers la nouvelle prison de Vivonne, se tenait dans le chef-lieu du Poitou-Charentes une journée de débats, concerts et manifestation, appelée par un collectif anti-carcéral local. Tout a déjà été dit sur la présence d’environ 200 personnes issues de la mouvance dite « autonome », sur les vitrines de banques brisées, et les condamnations sont venues de toutes parts. Ici, notre devoir de révolutionnaires est double : soutien total et inconditionnel à nos camarades de lutte face à la répression et critique marxiste de leurs méthodes.

On a raison de se révolter !

Casser la devanture d’une banque est un acte politique. C’est refuser ce système, ses rouages, sa logique implacable. C’est se révolter contre la véritable violence, celle des patrons et des banquiers qui exploitent à n’en plus pouvoir et s’engraissent sur la misère des travailleurs. C’est affirmer son refus d’un système où une poignée de parasites vivent du labeur du plus grand nombre. Les événements de Poitiers ne sont pas « un coup de tonnerre dans un ciel serein », l’irruption d’une brutalité absurde dans une ville calme. C’est une violence qui répond à une autre, celle de la bourgeoisie, de ses flics, de ses juges, de ses prisons. Les banques, qui endettent et ruinent tant de familles, comptent parmi les piliers du capitalisme moderne. Faudrait-il donc les défendre ?

Il est bien plus commode pour nos ennemis d’ignorer cet aspect politique et de considérer ces actes comme du vandalisme. La même accusation est portée contre toute violence des ouvriers ou des jeunes des quartiers populaires qui se révoltent. Les ouvriers de Continental saccageant une sous-préfecture expriment leur haine d’un État qui se place ouvertement du côté des patrons. D’une manière tout aussi légitime, les jeunes des quartiers populaires qui se sont révoltés en 2005 ou à Villiers-le-Bel en 2007 affichent leur rage devant ce système qui ne leur offre que misère et mépris. Dans tous les cas, c’est notre classe et c’est notre combat !

Face aux violences de Poitiers, quelle est la réaction de notre parti ? D’abord un communiqué scandaleux du NPA 86 qui condamne « sans réserves » ces actions, reprochant même aux « autonomes » d’avoir « tagué des slogans anti-système ». Ses auteurs reconnaissent : « La portée politique nous échappe » et demandent « que la justice n’utilise pas ces faits pour condamner au hasard des jeunes militants qui ne partagent pas ces méthodes injustifiables ». Ce qui revient implicitement à demander à ce que les « autonomes » soient condamnés.

Dans un communiqué suivant, le NPA 86 critique certes le pouvoir en place, mais c’est pour dénoncer… « l’absence inexplicable d’anticipation de la police le samedi 10 octobre » ! Et s’il soutient les personnes condamnées, ce qui est la moindre des choses, ce n’est pas au nom d’un quelconque combat contre la justice bourgeoise. Non, c’est simplement que les vrais coupables, les « autonomes », ceux qu’il faudrait condamner, n’ont pas été arrêtés.

Enfin Maryse Desbourdes, militante NPA et élue au conseil municipal de Poitiers sur la liste Pour une Alternative à Gauche, a signé une « déclaration solennelle » des élus de gauche de la commune qui, tout en dénonçant les pressions du ministère de l’intérieur sur la justice, déclare : « Les casseurs qui ont dégradé Poitiers doivent être arrêtés et jugés. Leurs actes sont injustifiables et inexcusables. »

Le communiqué national du NPA est moins scandaleux, mais il condamne également « ces violences qui ont détourné la manifestation de son objectif ». À qui la faute? Devant la faillite des directions du mouvement ouvrier qui ne proposent que des manifs sans perspectives de combat et des journées d’actions sans lendemain, il n’est pas surprenant de voir qu’une partie de la jeunesse radicalisée cherche ses propres moyens d’action. Lorsqu’on ne lui laisse que le choix entre défiler sagement et lancer des pavés, il est normal et légitime qu’elle choisisse la seconde option. Ces jeunes ont choisi l’affrontement direct, c’est un choix tactique qui se discute, pas un repoussoir duquel les révolutionnaires doivent se détourner avec des cris effarouchés. C’est notre tâche de présenter une perspective réellement révolutionnaire, qui permette à cette jeunesse radicalisée de dépasser les limites de son activisme actuel.

Slogan à Poitiers
Slogan taggé à Poitiers le 10 octobre

Une action spectaculaire…
pour quels résultats ?

Discutons donc de la méthode ici employée : s’immiscer dans une manifestation pour la faire « dégénérer ». Cela pose déjà la question de savoir si on peut emmener vers l’affrontement des personnes qui n’y sont pas préparées et qui payent alors inévitablement les pots cassés. Alors que les habitués arrivent plus facilement à éviter les charges policières et à s’enfuir, les autres les prennent en pleine figure. Les pros du lancer de pavé se font rarement attraper par la police, ce sont quasiment toujours des manifestants lambda qui passent en comparution immédiate pour ce genre de faits.

Vient ensuite la question de l’efficacité. Selon le site Rue89 (1), seulement 18 vitrines ont été brisées, plus quelques panneaux. Si cela ridiculise l’hystérie sécuritaire du pouvoir devant ces « émeutes », cela pose aussi la question de ce que peuvent faire 200 militants résolus à en découdre. En effet, leur mode d’action (et de pensée) ne permet pas de bénéficier du soutien ou du moins de la compréhension de la plupart des autres manifestants.

De plus, quelle est la lisibilité politique de tels événements ? Évidemment, il ne faut pas en attendre une présentation positive ou même neutre de la part des médias bourgeois, appareils idéologiques au service du capitalisme qui ont beau jeu de dénoncer une violence sans raisons et sans but. Mais leur tâche est singulièrement facilitée par l’absence de tout discours, de tout programme mis en avant. Les « autonomes » ne cherchent pas à rallier le prolétariat à la cause révolutionnaire. Quelles que soient leurs intentions, leur refus d’aider la classe ouvrière à s’organiser et à lutter comme telle les condamne à l’isolement et à l’impuissance. La déclaration envoyée au journal Le Monde et signé « quelques casseurs » (2), pour sympathique et pleine d’esprit qu’elle soit, ne cherche visiblement ni à convaincre ni même à être claire.

L’illusion que l’on puisse se passer de la classe ouvrière pour renverser le capitalisme conduit les autonomes à une stratégie substitutiste selon laquelle des « actions » spectaculaires (y compris d’ailleurs en termes de « coups » médiatiques) pourraient affaiblir le système en y créant des failles. La crise de la conscience de classe, les impasses politiques de l’extrême gauche, la propagande incessante des idées de la classe dominante, facilitée par les médias audiovisuels de masse, rendent certes plus difficile l’appropriation d’une perspective révolutionnaire par les travailleurs. Il est alors tentant de s’engouffrer dans des actions qui, si elles n’offrent en fait aucune perspective, donnent au moins l’impression d’avancer. Mais, concrètement, quel est le résultat ? A-t-on permis la moindre évolution dans la situation politique et sociale, à part une aggravation de la répression qui, loin de l’affaiblir, renforce l’État en lui donnant des prétextes pour tenter de la légitimer et de l’étendre à tous ceux qui luttent ? A-t-on fait progresser un tant soi peu la conscience de classe ? Toute cette énergie militante ne serait-elle pas plus utile sur des piquets de grève, des occupations d’usines et des initiatives pratiques pour la coordination des luttes ?

Lancer des pavés n’est pas une recette magique, un raccourci qui permettrait de changer la donne. Il faut placer les moyens de lutte en général dans le cadre d’une stratégie déterminée par l’analyse des possibilités réelles de la situation, pour aider la classe ouvrière et la jeunesse révoltée à lutter contre le capitalisme. Tous les fantasmes de guérilla urbaine qui animent la mouvance « autonome » lui font oublier que la révolution communiste, mais aussi la lutte de classe immédiate ne peuvent être conduites que par la masse des travailleurs eux-mêmes.

De ce point de vue, il y a une différence majeure entre le saccage de la préfecture de Compiègne par les ouvriers de Continental et les violences de Poitiers. Dans le premier cas, il s’agit d’une action de classe dans le cadre de la construction d’un rapport de force ; elle s’est certes soldée par de la répression, mais, combinée à une grève longue, auto-organisée et déterminée, elle a clairement contribué à faire peur au patronat et au gouvernement, avec une semi-victoire revendicative à la clé (quelles que soient ses limites) et un effet d’entraînement pour des milliers de travailleurs luttant contre les licenciements (effet certes limité par le refus d’un relais organisé de la part des directions syndicales). Dans le second cas, en revanche, on a assisté à un geste essentiellement conspiratif, à un « coup » sans perspective qui a certes surpris le gouvernement, mais sans lui faire réellement peur, car il sait que les travailleurs ne l’ont pas compris et ne l’imiteront pas de sitôt.

Cette critique est fraternelle. Elle s’adresse à des camarades dont nous partageons l’objectif d’en finir avec le système capitaliste qui exerce son emprise sur nos vies. C’est pour cela que nous les défendons inconditionnellement contre la bourgeoisie et que nous exigeons du NPA qu’il les défende au lieu de participer à l’hallali contre eux. Mais c’est pour cela aussi que notre critique fraternelle est sans concessions : nous combattons frontalement la théorie et la stratégie « autonomes », qui ne peuvent aider la classe ouvrière à préparer la révolution. Il s’agit pour nous d’aider les travailleurs à s’auto-organiser et à construire un parti anticapitaliste révolutionnaire, aussi bien pour leurs luttes immédiates que pour préparer la conquête du pouvoir et réaliser la révolution. Les progrès actuels des « autonomes » expriment une élévation du besoin de radicalité chez une partie significative des jeunes et des travailleurs : ils confirment combien il est urgent d’ouvrir la discussion programmatique et stratégique au sein du NPA, de lutter pour que triomphent les idées du marxisme révolutionnaire.


1) http://www.rue89.com/2009/10/27/violences-a-poitiers-beaucoup-de-bruit-pour-18-vitrines-123611

2) http://mai68.org/spip/spip.php?article514

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