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Vers la transformation radicale de l’INSEE : Le management de la « qualité totale » ou comment contraindre les agents à fournir un travail maximal
L’avenir « industriel » de la statistique publique : rendement maximal et logique de marché
L’Ambition 2015 de la direction : faire de l’INSEE une véritable entreprise...
Le cœur du projet de Moyen Terme de la direction de l’INSEE – « INSEE Ambition 2015 » – est la recherche du rendement maximum et le moyen pour l’atteindre est le management de la qualité totale. C’est l’objet de la mission Renforcer la démarche qualité à l’INSEE. Aidé par le cabinet privé Bernard Julhiet (évidemment grassement payé pour prodiguer ses conseils), la direction annonce clairement la couleur : son ambition est de « consolider la performance “industrielle’’ et économique de l’INSEE » par la mise en place progressive d’« une discipline collective de processus. Cette dernière est en effet nécessaire à l’industrialisation, donc aux gains en fiabilité et efficience ». Cette « discipline collective de processus » est connue dans le monde de l’industrie sous le terme de « mana-gement par le stress » ou encore « management de la qualité totale ».
… au service des intérêts des plus gros « Clients »
Dans ce même document, il est préconisé de « centrer plus étroitement le système de décision et de planification sur ‘‘la voix de l’utilisateur’’ ». Pour ce faire, l’INSEE doit tout d’abord se lancer dans l’« identification des utilisateurs-clés (clients au sens qualité) ». Et histoire d’être bien sûr de servir le plus efficacement possible les intérêts de ses gros « clients/utilisateurs », l’Institut devra « prioriser l’offre » vers les « segments-clés » (gros clients), offre qu’il faudra adapter en fonction des désirs de ces derniers via la « [mise] en place [d’]une mesure barométrique de satisfaction propre à chaque segment-clé ».
Pour que le basculement vers la logique de l’économie de marché soit complet, le rapport recommande de s’engager dans le « développement du recours à des financements externes »... et les coupes budgétaires de la RGPP arrivent à point nommé pour faire passer une telle décision pour une nécessité !
Une Révolution culturelle...
Le choix des termes « offre », « clients », « segments-clés » et « industrielle » n’a rien d’anodin : si l’usager devient « client » (et a fortiori « segment-clé ») c’est alors lui qui définit ce qui doit être produit et l’Institut devient donc un « fournisseur » au service des intérêts particuliers du client. C’est d’ailleurs ce que vise explicitement le rapport : « [S]ous l’angle du chantier utilisateurs, l’un des attraits serait de faire entrer un client ‘‘réel’’ au cœur du dispositif de définition de l’offre. »
La direction de l’INSEE cherche ainsi délibérément à faire basculer l’institut d’une logique de service public rendu à des usagers vers une logique de service marchand rendu à des clients rentables. C’est là le fameux « changement culturel au sein de l’Institut » que la directeur de l’INSEE, M. Cotis, appelait de ses vœux dans un communiqué de février 2009.
… et un grand bond en avant
Le rapport explique qu’il faut forcer l’INSEE (c’est-à-dire, concrète-ment, les agents qui produisent des statistiques et les commentent) à la « nécessité d’agir en permanence pour faire face aux nouvelles contraintes » et à l’« impératif d’adaptation continue de l’organisation ». Les agents devront s’adapter « en continu » aux « contraintes » dictées par les gros « clients » à qui ils devront fournir des « produits » d’une « qualité totale » : c’est la définition même de la démarche de qualité totale. Ce nouveau type d’organisation militaire du travail des agents permettra ainsi à la direction de l’INSEE d’atteindre ses objectifs « industriels et économiques », à savoir : « gains de productivité de l’ordre de 2 % par an en termes réels, taux de non-conformités (« irrégularité ») en production passant de 19,3 % à 7,1 % sur 5 ans ».
L’orientation client : un « levier fondamental » pour la mise en place de la qualité totale
Le rapport de la direction sur la qualité totale le rappelle et y insiste lourdement : le basculement vers une logique « Clients » constitue le « levier le plus fondamental d’une démarche qualité structurée ». C’est là en effet un moyen très pratique pour mettre une pression accrue sur l’ensemble des agents de l’INSEE, tout en dédouanant la direction de l’INSEE qui ne serait que le porte parole des intérêts des « clients ». Si l’« orientation clients » est si « fonda-mentale » c’est précisément parce qu’une fois largement acceptée, cela va conduire à faire basculer l’INSEE vers une gestion d’« une rigueur de type industriel » et ainsi permettre à la direction de s’engager dans l’« indus-trialisation et [le] pilotage des outils méthodologiques et des processus-clé de production et de management ».
Soumettre les agents à la pression extérieure du marché...
Pour soumettre les agents de l’INSEE à la pression extérieure du marché afin de les obliger à intensifier leur travail, le rapport préconise :
- la « mise en place progressive d’une gestion par processus orienté clients sur l’ensemble des activités de production » ;
- le « développement du recours à des financements externes » ;
- la « mise en place des interfaces de service avec les clients payants » ;
- et de « centrer plus étroitement le système de décision et de plani-fication sur ‘‘la voix de l’utilisateur’’ ».
S’appuyer sur l’utilisateur, ou plutôt le « client », pour contraindre les agents à travailler plus, voilà un procédé classique et malin pour mieux faire passer l’intensification du travail. Refuser de travailler toujours plus, ce serait non pas s’opposer à sa hiérarchie (et à ses intérêts), mais mépriser le client, notre semblable ...
… et à la pression d’un « marché » interne
Cette logique « client » doit également s’appliquer en interne : « Chaque projet de production pourrait s’insérer dans une contrac-tualisation interne entre les unités concernées, prenant en compte les moyens nécessaires et les délais ». Des unités « fournisseurs » auront donc pour tâche de « livrer » un « produit » à des « unités » « client » qui pourront exiger par contrat des « délais » les plus courts possibles et une « qualité » la plus totale possible. Il s’agit bien évidemment d’instituer une pression à l’intérieur de tous les services (ou « unité de production » en novlangue) pour forcer les services « fournis-seurs » (c’est-à-dire concrètement les agents qui y travaillent) à augmenter sans cesse leur productivité en inten-sifiant le travail : c’est le but même du management par la qualité totale.
Le dressage des agents par le management de la qualité totale : renforcer les pouvoirs de la hiérarchie, pour mieux soumettre les agents
Pour atteindre ses objectifs de rendement maximum, la direction de l’INSEE est déterminée à mettre en place le management de la qualité totale. Ce management est ainsi caractérisé par un effort permanent de réduction des temps et des coûts. Cette chasse aux temps morts dans l’exécution du travail par les agents vise à éliminer tout ce qui n’est pas strictement nécessaire à la production, tous les « à côté » du travail qui permettent de le rendre supportable. Une telle démarche constitue un redoutable outil de dressage des travailleurs pour les contraindre à intensifier toujours plus leur travail, avec des exigences de « qualité » toujours plus grandes et des moyens toujours plus restreints (aussi bien en terme d’effectifs que de temps). On touche là du doigt le « cœur de métier » des patrons de l’INSEE : maximiser le surtravail des agents pour remplir les objectifs de la classe dominante (en supprimant au passage le travail « inutile » car pas immédiatement rentable).
Nous allons maintenant passer en revue la Sainte Trinité de la qualité totale, à savoir :
- doter la direction d’instances décisionnelles renforcées (chargées de piloter le management de la qualité totale) ;
- renforcer le pouvoir de la hiérarchie inférieure et intermédiaire (chargée d’appliquer le management de la qualité totale) ;
- pour in fine discipliner au maximum les agents (soumis à la pression du management de la qualité totale)
Renforcement des instances directionnelles et dépossession des agents
La qualité totale : ses comités de pilotage et son gardien suprême
La direction de l’INSEE indique que « la ‘‘comitologie’’, adaptation au monde statistique du ‘‘teamworking’’ célèbre dans les démarches qualité, serait systématisée ». Le principe du « teamworking » dans l’industrie est le suivant : les managers y examinent la façon de faire progresser le rendement du travail des agents, d’accroître la quantité de leur production et d’en augmenter l’exigence d’une qualité toujours meilleure (qualité totale). La direction veut ainsi multiplier les comités – « comité des programmes », « comité des processus », « comité des ressources humaines » —, avec au sommet une « unité qualité centrale », composée de « quelques experts de haut niveau », et chargée notamment de « faciliter l’orientation clients et demande ». Elle veillera pour cela à « garantir la dynamique du changement par le management de la qualité ».
Créer une direction méthodologie toute puissante et aux ordres
Pour les patrons de l’INSEE, la création d’une direction de la méthodologie est cruciale car « une organisation centralisée de la méthodologie émerge... comme un puissant levier d’amélioration continue de la production et dans la mise en œuvre de nouvelles méthodes et de nouveaux produits. (…) [C]ette fonction concentre en effet ses efforts sur la maîtrise des productions et des délais ». La direction de l’INSEE décrit l’actuelle « tendance lourde à l’autonomie ou à la dispersion des méthodes et des pratiques propres à l’activité statistique » comme une « situation dommageable », un véritable frein à l’implémentation de la qualité totale. Au nom du postulat selon lequel les méthodes sont neutres et qu’il est plus rentable d’avoir des super experts chargés de mettre en place des méthodes que les agents n’ont plus qu’à utiliser, on appauvrirait considérablement le travail des agents et on uniformiserait les travaux de l’INSEE. L’INSEE fournirait des travaux standards, qui se ressembleraient tous. Les agents ne pourraient plus prendre le temps de « sortir des clous » : il faudrait fournir un maximum de « résultats » (publi-cations, etc.) utilisant les méthodes labellisées par les super experts.
C’est pourquoi le rapport préconise « la concentration des ressources méthodologiques [qui] contribuerait à apporter une partie de réponse à ces problèmes » et précise : « [C]e regroupement contri-buera à l’optimisation des méthodes de production et la mise en place d’une gestion analytique des temps et des coûts »… bref un outil au service du management de la qualité totale.
Renforcement des pouvoirs de l’encadrement
Formations au management de la qualité totale
La direction a déjà annoncé son intention de renforcer et de professionnaliser le nouveau type de management ; pour y parvenir, le rapport sur la qualité préconise le « renforcement des programmes de formation au leadership » qui devront faire appel à des pros du management par la qualité (le tout pour un « montant externalisé d’environ 500 000 euros, à répartir sur 3 à 5 ans », précise le rapport).
Renforcement des outils de management
Le renforcement du pouvoir de la hiérarchie passe également par le rôle de plus en plus central de l’entretien individuel d’évaluation. Celui-ci doit devenir un véritable outil de management de la qualité totale : fixation d’objectifs avec obligation de résultats, optimisation du rendement de chaque agent, individualisation des « mérites » avec en ligne de mire la généralisation du salaire au mérite, l’obligation de formation pour augmenter la productivité (et la diminution du temps des formations dont l’effet sur la productivité sur le poste ne serait pas évident). Ce pouvoir de l’encadrement, sommé d’appliquer le management de la qualité totale, permettra de discipliner les agents au maximum pour en tirer le meilleur rendement.
Discipliner les agents pour en tirer le maximum
La direction, comme tout patron, a pour rôle de forcer les agents à mobiliser l’ensemble de leurs ressources (physiques et intellectuelles) pour augmenter perpétuellement leur productivité. Pour faciliter l’accomplissement de cette tâche « moderne’ » par des agents trop souvent enclins à travailler pour vivre plutôt qu’à vivre pour travailler (feignasses!), le moyen terme Ambition 2015 se propose de leur cheviller au corps l’amour du travail sans temps mort.
Concrètement, la direction leur offre généreusement :
- remise en cause permanente de leurs compé-tences ;
- individualisation accrue (travail, carrière, rémuné-ration) ;
- flexibilisation maxi-male ;
- et gestion à flux tendu de leurs tâches (par la réduction des effectifs et le contrôle systématique de leur travail).
Remise en cause permanente des compétences pour obliger les agents à entretenir leur « capital humain »
Le document de synthèse du moyen terme Ambition 2015 prône la mise en place d’un système de « gestion active des compétences », en réaction aux « enquêtes de satisfaction » menées auprès des clients. Ou comment utiliser les usagers pour mettre la pression sur les agents, la formation devenant une obligation pour rester compétitif. L’« amélioration continue des compétences » devient un impératif catégorique. Si la qualité n’est pas « totale », la faute en incombe à l’agent qui doit mettre à jour ses compétences. C’est l’objet du volet « Ressources Humaines » du moyen terme : les agents se verront sommés de faire des formations pour se remettre dans le droit chemin des exigences tracées par la démarche de qualité totale (formations pour optimiser son travail, gérer son stress, prévenir les conflits entre collègues, être plus « participatif »…bref être un véritable acteur de l’amélioration continue de la productivité).
Individualisation des agents : diviser pour mieux pressurer
La direction dispose déjà d’un outil privilégié qu’elle se propose maintenant d’utiliser au maximum pour engager un processus de dressage des agents (et ainsi les rendre les plus corvéables possibles) : l’entretien individuel d’évalu-ation. Cet outil est directement inspiré des pratiques de qualité totale issue de l’industrie automobile et dont le modèle de référence est Toyota (1). Trois avantages à cela :
Tout d’abord, la direction peut « évaluer la valeur professionnelle et humaine » des agents pour les obliger à devenir plus rentables en les contraignant à ajuster régulièrement leurs compétences aux besoins productifs de la direction.
D’autre part, l’entretien individuel permet de forcer les agents à augmenter régulièrement leur charge de travail et leur rendement. C’est en effet à l’occasion de ce moment d’isolement privilégié que le manager (dit « de proximité ») impose à chaque agent ses objectifs individuels de performance, conformément aux objectifs généraux qui lui auront été fixés par la hiérarchie supérieure.
Enfin, par ce biais, la direction dispose d’un moyen pour « la mise en place d’une certaine part variable dans les rémunérations ». Il suffira de fusionner l’entretien individuel d’éva-luation (qui sanctionne les résultats des objectifs fixés pour l’année écoulée) avec la notation (qui est sen-sée « valoriser » le travail fourni par l’agent) ; puis instaurer (au nom d’une reconnaissance plus « juste » du tra-vail fourni par l’agent) un système de rémunération dont une partie sera liée à l’atteinte ou non desdits objectifs...
Ceci permettrait à la direction de l’INSEE de se doter du même privilège que les autres patrons : celle de déterminer une partie significative de la rémunération de ses salariés en fonction de leur soumission.
« Réexaminer progressivement toutes les procédures de gestion du DRH, en utilisant notamment une démarche de qualité totale »
L’outil « entretien individuel d’évaluation » ne sert pas seulement à intensifier le travail. Il est également un outil précieux à la disposition de la direction pour mettre en place une gestion optimale de ses « ressources » humaines . D’un point de vue « qualité totale », cet outil possède en effet l’énorme avantage de collecter toutes les données essentielles se rapportant à un agent vu comme simple « ressource » humaine (comportement, postes occupés, objectifs atteints, compétences mobilisables, ambitions, motivation, etc). Une fois centralisée, classée et ordonnée par critères, notamment via « un outil de gestion qui garde la mémoire des parcours effectués » (comme l’écrit la direction de l’INSEE), cette manne peut permettre à la direction de rendre des profils comparables et de décider (par exemple, parmi les agents qui demandent un poste donné) des candidats les plus utiles à la direction sur tel ou tel poste. C’est une résurgence du bon vieux livret ouvrier mis en place par Napoléon… ou comment le nouveau management remet au goût du jour le pire du capitalisme du 19e siècle. La direction pourra ainsi disposer d’un outil « rationnel » pour gérer ses « ressour-ces » (humaines) avec un rendement maximum. C’est ce que la direction appelle : « Réexaminer progressive-ment toutes les procédures de gestion du DRH, en utilisant notamment une démarche de qualité totale. »
Gérer à flux tendu : réduction drastique des effectifs et contrôle systématique des temps
La direction de l’INSEE se propose de contribuer de manière décisive à la mise en place concrète de la démarche de qualité totale : par la réduction drastique des effectifs et par le flicage du temps passé par chaque agent pour effectuer son travail. Dans son plan d’action 2010-2015, elle se donne en effet pour tâche de « définir pour chaque unité des cibles d’effectifs (A, B, C) à moyen terme (3 à 5 ans). Une enveloppe initiale d’effectifs sera définie pour chaque unité, ainsi qu’une cible à atteindre (...). Cela passe par une contractualisation d’objectifs des directeurs sur leurs activités et leurs ressources pour les 3 ans à venir, en fonction de l’évolution de la demande prévisible qui s’adresse à eux (...). » Évidemment l’objectif sera de com-presser le plus possible les effectifs pour obtenir un rendement maxi-mum (logique de la RGPP) et d’ajuster régulièrement les « ressources » en fonction des « exigences » du marché (logique de la qualité totale).
La direction de l’INSEE note cependant qu’une contrainte aussi draconienne sur les effectifs (qui oblige tous les services à travailler à flux tendu) empêcherait tout service donné d’avoir ses propres moyens pour faire face aux imprévus. Consciente de ce risque, elle nous donne l’antidote : « Pour gérer les imprévus (tant de la demande externe que des personnes), il faut envisager un système assurantiel, constitué par exemple d’une ressource mobilisable facilement (secrétaires, ingénieur-projet…) » ! Le cynisme de la direction est sans limite : après avoir dégradé les conditions de travail des agents d’une manière telle qu’ils seront en incapacité de gérer les imprévus (intensification massive du travail), la direction en profite pour flexibiliser et intensifier encore plus le travail des agents non-statisticiens comme les secrétaires (réquisitionnables à tout moment pour prendre en charge la gestion des imprévus).
Encore mieux : la direction envisage ici de s’engager dans la logique du recours au travail temporaire (qui constitue le « cœur de métier » des agences d’intérim dont la « raison » d’être est exactement de fournir aux entreprises un tel « système assurantiel »).
Dans ce même plan d’action, la direction de l’INSEE insiste sur le second moyen d’augmenter la productivité : la mesure précise des temps pour contraindre chaque agent à intensifier le travail. Depuis quelques années la direction a déjà testé puis mis en place, dans certains services régionaux, un logiciel (SOFT) de suivi des temps. Elle se propose mainte-nant de généraliser et de renforcer l’utilisation de ce logiciel : tous les agents de l’INSEE seront désormais sommés de déclarer le temps qu’ils ont passé pour effectuer telles ou telles tâches (via l’application SOFT).
Allons-nous accepter la réduction drastique des effectifs et la mise en place du management de la qualité totale ?
Dans un contexte européen où la priorité des gouvernement est de faire payer la crise aux travailleurs…
Le rapport Renforcer la démarche qualité à l’INSEE a été écrit avant l’aggravation spectaculaire de la crise des dettes publiques dans la zone euro. Depuis, les différents gouvernements ont mis à l’ordre du jour des plans d’austérité d’une violence inégalée depuis l’après guerre. En Grèce, le gouvernement a supprimé deux mois de salaire aux fonctionnaires. En Espagne, Zapatero a décidé dans l’urgence de baisser de 5% les salaires des fonctionnaires dès le mois de juin. Partout, des réformes attaquant nos retraites se préparent. En France, Fillon a annoncé la baisse de 10 % des dépenses de fonction-nement et d’intervention en trois ans. Mais ce n’est rien comparé à ce qui se prépare pour les mois et les années à venir... Dans un tel contexte, nous pouvons être certains que les attaques vont être d’une brutalité sans précé-dent pour imposer un grand bond en arrière, pour sauver leur système, leurs banques, et leurs profits.
Fondamentalement, pour baisser les dépenses publiques, le gouver-nement dispose de deux leviers :
- baisser drastiquement les effectifs ;
- imposer de nouvelles conditions de travail, visant à faire travailler le plus possible les fonctionnaires.
… nous avons les moyens, à l’INSEE, de contribuer à la résistance contre ces plans
Accepter le triste sort que la classe dominante nous réserve sans réagir collectivement, comme si cela était une « catastrophe naturelle », c’est renoncer à vivre pour tenter de survivre chacun dans son coin. Les travailleurs grecs nous montrent la voie : ils résistent. Nous avons la force d’empêcher la mise en œuvre de ces plans de rigueur. À condition de nous en donner les moyens. En tant qu’agents travaillant à l’INSEE, contri-buer concrètement à la résistance contre ces attaques passe par une lutte sur notre lieu de travail contre la déclinaison qui en est faite à l’INSEE par notre direction. C’est-à-dire :
- I) revendiquer clairement
:
- le refus de la mise en place du management de la qualité totale dans le SSP : non à la mise au pas !
- le remplacement de tous les départs à la retraite : 1 départ = 1 embauche !
- II) et
agir concrètement
pour satisfaire ces revendications :
- le refus de la qualité totale passe par l’organisation du boycott collectif de l’entretien individuel d’évaluation ;
- exiger le remplacement de tous les départs à la retraite passe par l’organisation du refus collectif de reprendre le boulot des personnes non remplacées ;
- le passage en force de la direction doit se traduire par le sabotage systématique des réunions de direction.
1) Il est intéressant de noter que la Direction Générale de la Modernisation de l'État (DGME) fait directement référence aux méthodes de management de Toyota (méthodes dites LEAN) qu'elle compte appliquer à l'administration : « Dans le cadre de la RGPP, nous voulons donc changer de vitesse, diffuser les méthodes LEAN à grande échelle » (M. Migeon, directeur général de la DGME, cf. http://www.modernisation.gouv.fr)