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Contribution de 62 militants pour une Tendance révolutionnaire du NPA à l’occasion de la réunion nationale de la position B du 23 mai
Un an après la fondation du NPA, nous avons besoin d’un programme et d’une stratégie ouvertement révolutionnaires

Par Les 62 (17 mai 2010)
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Seize mois après sa fondation, le NPA est dans une situation de crise. Celle-ci était latente depuis le début des négociations électorales avec les réformistes du PCF et du PG, mais elle a éclaté après l’échec des régionales, qui a mis en évidence le net recul de la sympathie dont notre parti bénéficiait au début parmi les travailleurs et les jeunes. Cette crise se manifeste d’abord par le départ ou le découragement de nombreux militants, mais aussi par une grande difficulté à mettre le parti en ordre de bataille pour intervenir dans la lutte des classes avec une orientation stratégique claire. Il ne s’agit pas de hurler à la catastrophe, mais de constater lucidement la réalité de cette crise pour en comprendre les causes et trouver les moyens de relancer le NPA comme parti anti-capitaliste cohérent et conséquent, c’est-à-dire révolutionnaire.

Il faut donc ouvrir le débat programmatique et stratégique bien au-delà de la question électorale, en remontant à la racine, c’est-à-dire aux ambiguïtés constitutives du NPA. C’est ce que font d’ailleurs les courants droitiers assumés (courant Convergence et alternative et autres sensibilités de l’ex-position C) aussi bien que les différentes composantes de la majorité (ex-position A). Les partisans d’un NPA révolutionnaire ne sauraient sous-estimer l’importance d’un bilan critique en revenant sans concession sur les fautes et faiblesses qui caractérisent l’orientation de notre parti depuis le début et en soumettant à partir de là des propositions radicalement alter-natives pour le congrès de novembre.

C’est à cet objectif que la présente contribution entend contribuer, à l’initiative de camarades dont le parcours a été jusqu’à présent différent, mais qui ont défendu l’ex-position B et sont partisans d’une Tendance révolutionnaire immédiate dans le NPA.

Manifestation du 24 juin à Creil. Photothèque rouge/GP. Cf. http://orta.dynalias.org/fotorougeafficher-photo?id=12972

Les conditions objectives et subjectives sont favorables à la construction d’un parti anticapitaliste révolutionnaire

La crise du NPA peut sembler paradoxale si on la rapporte à l’analyse de la situation. Celle-ci, en effet, est favorable à la construction d’une parti anticapitaliste cohérent et conséquent, que l’on considère la crise capitaliste mondiale ou la vitalité de la lutte de classe en France.

  1. Le lancement du processus NPA a coïncidé avec les premiers effets de la crise capitaliste mondiale. Depuis le début de l’année 2010, la nouvelle vague de la crise en Europe, qui frappe au premier chef la Grèce, le Portugal et l’Espagne, mais ébranle plus fondamentalement toute l’Union européenne, montre qu’on n’est nullement sorti de cette crise profonde du système capitaliste, contrairement à ce que prétendaient les gouvernement et les « experts » à la fin de l’année dernière. D’une part, la croissance capitaliste ne repart pas dans les pays européens, les investissements stagnent et la consommation régresse ; le chômage continue en conséquence de croître, les plans de licenciements s’ajoutent les uns aux autres et les patrons bloquent les salaires encore plus qu’avant la crise. D’autre part, si les États capitalistes ont réussi à mobiliser des centaines de milliards pour sauver le système financier mondial et les grands groupes industriels les plus menacés au départ (notamment ceux de l’automobile), cela n’a pu se faire qu’au prix d’un endettement public gigantesque, faisant voler en éclats notamment le pacte de stabilité européen : il s’agit maintenant de faire payer la facture aux travailleurs. Enfin, avant même le début de la crise, la pression de la concurrence internationale et des tensions inter-impérialistes rendait de toute façon inévitable l’accélération des réformes structurelles visant à achever le démantèlement des conquêtes sociales de l’après-Seconde Guerre mondiale ; c’est vrai tout particulièrement dans un pays comme la France où la résistance partielle des travailleurs depuis 1995 a retardé la baisse du coût du travail, principale variable d’ajustement pour faire repartir la compétitivité des entreprises.

    Dans un autre ordre d’idées, la crise climatique et les dégâts environnementaux considérables provoqués par le capitalisme angoissent une frange croissante du prolétariat. Les luttes écologiques ne sont désormais plus circonscrites aux seuls militants altermondialistes traditionnels. Le souci écologique est désormais un formidable vecteur de l’anticapitalisme et un nombre croissant de travailleurs, parmi les plus mobilisés, tentent de faire la synthèse entre leur résistance à l’exploitation et leur souci de préservation de la planète.

  2. Les conditions subjectives, c’est-à-dire l’état d’esprit d’un nombre croissant de travailleurs, sont elles aussi favorables. On est déjà loin, en effet, de la période ouverte au tournant des années 1980, dite « néo-libérale », où l’offensive de la bourgeoisie au niveau international s’était accompagnée d’une revanche idéologique visant à présenter le capitalisme comme l’horizon indépassable de l’humanité. Aujourd’hui, même les gouvernements tentent d’expliquer aux travailleurs, pour justifier de nouveaux sacrifices, qu’il s’agit de réguler, de reverdir ou d’humaniser le capitalisme, de limiter le pouvoir de la finance, etc. Mais les travailleurs se font de moins en moins d’illusions sur les partis de droite comme de gauche qui se succèdent au pouvoir depuis des années, comme le montrent notamment les records d’abstentions aux élections.

    C’est d’autant plus vrai en France que, contrairement à ce qui s’est passé dans la plupart des pays comparables, les travailleurs ont commencé à résister aux contre-réformes dès 1995. Cette résistance a ensuite été constante, quoique partielle. C’est ce que montrent tout particulièrement les grandes mobilisations du printemps 2003, la lutte des lycéens et la révolte des jeunes des quartiers populaires (malgré ses importantes limites politiques) en 2005, la mobilisation partiellement victorieuse de 2006 contre le CPE, celle des cheminots à l’automne 2007... Dans ces luttes, ce sont les travailleurs du public (cheminots, enseignants...) et les jeunes qui ont joué le rôle majeur, alors que le poids du chômage et la crise du mouvement ouvrier laissaient au second plan les travailleurs du privé.

    Or l’éclatement de la crise capitaliste mondiale a vu le prolétariat industriel revenir sur le devant de la scène en 2009 à travers des luttes contre les licenciements et des méthodes radicales qu’on n’avait plus vues depuis les années 1970, comme les occupations d’usines avec piquets, les séquestrations de patrons, les attaques de préfectures et même, de manière éphémère et embryonnaire, une expérience de contrôle ouvrier chez Philips à Dreux. C’est ainsi que le premier semestre 2009 a été marqué par une situation potentiellement explosive où, dynamisée par la grève générale antillaise, se sont cumulées les mobi-lisations « classiques » des secteurs du public et la réémergence des luttes du privé, avec des jonctions éphémè-res lors des journées d’action massi-ves des 29 janvier, 19 mars et 1er mai.

    Les défaites sur lesquelles ont finalement débouché la plupart de ces mobilisations ont certes fait baisser ensuite la tension sociale, mais cette première réponse globale des travailleurs de France à la crise a montré qu’ils n’étaient pas prêts à la payer sans se battre. De fait, les luttes sont restées nombreuses depuis un an, quoique dispersées et moins visibles, notamment dans le privé. Globalement, sous l’effet de la crise qui les touche de plein fouet, de nombreux travailleurs sont poussés au combat contre les patrons et le gouvernement et prêts dès lors à entendre un parti qui développerait une orientation anticapitaliste révolutionnaire concrète.

    La fondation et la première année d’existence du NPA ont donc eu lieu dans un contexte favorable qui aurait dû lui permettre de se construire sérieusement. S’il a au contraire perdu de nombreux militants et sympathisants, c’est manifestement que son orientation ne correspondait pas aux attentes du moment. Certains considèrent que notre échec prend sa source après les élections européennes, au moment des déclarations pré-électorales commu-nes de notre parti avec les réformistes du PG et du PC. À notre sens, cela constitue une erreur d’analyse qui méconnaît deux aspects essentiels :

    • le flou de nos axes program-matiques découlant directement de l’ambiguïté de nos textes fondateurs ;
    • la faiblesse de notre intervention concrète dans la lutte des classes et dans l’ensemble des mobilisations.

    Il est d’autant plus urgent d’avancer sur ces deux questions indissociables que les nouveaux développements de la crise du capitalisme en Europe vont sans doute provoquer une intensification de la lutte des classes. L’exemple de la Grèce, l’un des maillons faibles de l’Union européenne, n’est à cet égard qu’une première manifestation de ce qui attend tous les travailleurs européens, avec d’un côté des attaques extrêmement brutales du gouvernement, de l’UE et du FMI contre les acquis et de l’autre une radicalisation de la résistance ouvrière et populaire, dont témoi-gnent la journée de grève, les manifestations massives et les affron-tements avec la police du 5 mai. Nous devons donc nous préparer à participer à des affrontements de classe beaucoup plus aigus, rendant nécessaire un parti révolutionnaire.

Réforme ou révolution ?

Retour sur les ambiguïtés des « principes fondateurs »

À notre avis, les « Principes fondateurs » tels qu’actuellement rédigés constituent un texte qui contient certes, formellement, un certain nombre de points en eux-mêmes très justes, mais où les considérations fondamentales sont mélangées avec celles de moindre importance et où un certain nombre de questions décisives ne sont pas tranchées, de sorte que tout le monde puisse y trouver son compte...

Par exemple, le texte affirme à juste titre qu’« une domination de classe ne peut pas être éliminée par voie de réformes », qu’« il faudra une révolution sociale pour abattre le capitalisme » et notamment « renverser l’État et les institutions », qui sont « une machine rodée à la défense des intérêts de la bourgeoisie ». Mais nulle part n’apparaissent clairement les corollaires logiques de ces postulats : la perspective finale du communisme (société sans classes et sans État) et les voies pour y parvenir (rien n’est dit de concret sur la conquête du pouvoir par les travailleurs, ni sur le pouvoir des travailleurs, à part qu’il sera « démocratique »). Or la nature a horreur du vide : si nous n’avons pas de projet révolutionnaire clair, nous ne pouvons aller jusqu’au bout du combat contre le capitalisme et l’État bourgeois. Cela conduit donc inévitablement à garder dans un tiroir les axes les plus radicaux des principes fondateurs au lieu de les défendre ouvertement dans la presse, dans nos tracts et dans les réunions du parti pour en convaincre les travailleurs. De fait, depuis seize mois, on n’a plus beaucoup entendu les dirigeants de notre parti parler de ces objectifs. Or de deux choses l’une : soit on ne croit pas à ces objectifs, et alors il faut les enlever de nos principes fondateurs, soit ils sont indispensables pour construire le parti et dans ce cas il faut les défendre centralement et lier systématique-ment le combat pour les revendications immédiates avec cette perspective.

En effet, il nous semble qu’une des tâches centrales du NPA doit être de porter cette perspective, non pas que nous attendions le « grand soir » pour demain matin, mais parce que, s’il est vrai qu’on ne peut décréter le réveil de la conscience révolution-naire du prolétariat, l’horizon du socialisme peut accompagner ce réveil en aidant à en préciser les idées et à en cerner les buts.

Sur l’orientation actuelle du NPA

Négliger de défendre clairement la perspective de la révolution, c’est nécessairement dériver vers l’électo-ralisme, puis vers le réformisme. C’est ce qu’a montré cette année la politique d’alliances électorales avec les réformistes en abandonnant le plus souvent le programme du NPA, pour se rallier à celui du PG, voire du PCF — incluant même dans certains cas, rappelons-le, les subventions aux entreprises privées. Mais la position assumée de nos camarades de la position C est loin d’être la seule à combattre si nous voulons construire un NPA révolutionnaire. Les tenants de cette position ont d’ailleurs au moins le mérite de revendiquer leur politique de façon conséquente, en se battant pour une orientation électoraliste et un front systématique avec les réformistes.

Bien moins claire est l’orientation défendue par la majorité de l’ex-position A, qui ne nous convient pas davantage. Prenons pour illustration le texte présenté au dernier CPN, et intitulé « Un second souffle pour le NPA » (1). Celui-ci affirme de façon assez péremptoire que le NPA a été fondé parce que les « modèles révolutionnaires du XIXe et du XXe siècles (...) aujourd’hui ne sont plus opératoires » et que, en particulier, « un processus de transformation révolutionnaire d’une société capitaliste comme la société française ne ressemblera pas à la révolution russe mais sans doute pas non plus à un mai 68 qui irait "jusqu’au bout" ». Faut-il en conclure que la « transformation révolutionnaire de la société » ne se fera ni par une insurrection armée s’appuyant sur l’auto-organisation des masses (soviets), ni par une grève générale permettant de renverser le gouvernement et de mettre en place un gouvernement des travailleurs ?

Mais alors, où veut nous conduire la majorité de la direction ? Il s’agit, nous dit-on, de « défendre la perspective d’un gouvernement en faveur de la population s’appuyant sur la mobilisation populaire » — en d’autres termes d’un gouvernement qui ne serait pas incompatible avec les institutions actuelles (le texte ne les met pas en cause) et qui n’aurait aucune délimitation de classe : le texte ne parle pas de gouvernement des travailleurs, évoque la « population » en général et remplace même la notion de lutte des classes par celle, bien plus vague, de « mobilisation populaire » (pourquoi pas des référendums, par exemple ?).

Si nous comprenons qu’il faut s’adresser aux travailleurs avec des termes actuels, qui leur « parlent » et ne revêtent pas un caractère désuet, il ne faudrait pas que la légitime recherche de ce vocabulaire accessible masque un recul dans la conception de l’idéal que nous poursuivons. Cette crainte est malheureusement corroborée par la suite du texte qui, pour ce qui concerne les moyens de parvenir à un tel gouvernement, affirme : « Contrairement à ce que défendent un certain nombre de camarades dans la dernière période, les élections ne sont pas pour nous qu’une tribune. Il y a un rapport dialectique entre luttes et élections, c’est un des terrains de la lutte des classes, qui matérialise les rapports de force ». Autrement dit, le « gouvernement au service de la population » que la direction du parti propose au NPA naîtrait de façon combinée des luttes et des élections. Qu’est-ce que cela peut signifier concrètement ?

Toute l’expérience du XXe siècle montre qu’il n’y pas d’intermédiaire entre le soutien à des gouvernements bourgeois et le combat pour un gouvernement des travailleurs eux-mêmes. Les gouvernements de « fronts populaires », comme en 1936 en France ou en 1970 au Chili, arrivés au pouvoir par les urnes sur fond de mobilisations ouvrières, ont en fait servi à canaliser celles-ci dans le cadre de l’ordre capitaliste au moyen de concessions significatives, mais en dupant et en désarmant les masses, ce qui a conduit fatalement la contre-offensive réactionnaire et fasciste. Nous devons aussi nous rappeler que, plus récemment, l’orientation confuse sur la question centrale du gouvernement a conduit des organisations du « Secrétariat unifié de la Quatrième Internationale » (dont l’ex-LCR était la section française) à soutenir des gouvernements bourgeois, comme au Brésil (participation active au gouvernement Lula) et en Italie (soutien au gouvernement Prodi).

Il est clair en tous cas que la voie d’« un gouvernement en faveur de la population s’appuyant sur la mobilisation populaire » est contraire à celle du combat pour la « révolution sociale pour abattre le capitalisme », pour « renverser l’État bourgeois », et que son adoption par le congrès de novembre signifierait que le NPA, au lieu d’être un parti au programme et à la stratégie confus comme aujourd’hui, dériverait encore plus vers le réformisme. Nous sommes donc d’accord sur un point avec les auteurs de ce texte : le choix de l’orientation programmatique et stratégique du NPA est bien l’« enjeu majeur du congrès » de novembre prochain, car « on ne peut construire un parti sans perspective même hypothétique de pouvoir, d’alliance, de program-me ». Si la politique du NPA était au moins rouge et s’il se battait sérieusement pour la grève générale, nous pourrions même être d’accord avec la majorité de la direction pour dire qu’« un parti n’est pas un syndicat rouge » et que « les luttes, la grève générale, ne sont pas des perspectives politiques en elle mêmes : elles ne disent pas comment les travailleurs, la population prennent le pouvoir ». De fait, c’est cette question qui n’a pas été tranchée en 68 en France, le PCF, la SFIO et les directions syndicales ayant préféré s’en remettre aux élections organisées par De Gaulle — avec le résultat qu’on sait — plutôt que d’aider les travailleurs à prendre le pouvoir pourtant vacant à l’apogée de la grève générale.

Mais à partir de là notre désaccord avec la majorité de la direction actuelle du NPA (a fortiori avec les tenants de l’ex-position C) apparaît dans toute sa netteté et oppose les deux seules orientations sérieuses, mais irréconciliables, entre lesquelles il n’y a de place que pour la confusion : pour ces camarades, il s’agit de mettre en place un « gouvernement au service de la population » en combinant les luttes et les élections ; c’est une position réformiste du type de celle défendue par le PG et ce n’est pas parce qu’on parle de « nouvelle période, nouveau programme » qu’on la rend moins éculée. Pour nous, au contraire, s’il est clair qu’il n’y a pas de « modèles » dans le sens d’abstractions sectaires qu’il s’agirait de reproduire, il y a des principes de classe solides qui se nourrissent des révolutions réelles du passé comme de la réflexion sur leurs limites, notamment la Commune de Paris et la révolution d’Octobre 1917 : il s’agit d’aider les travailleurs, avec un parti révolutionnaire solide, expérimenté et audacieux, à se préparer pour détruire le capitalisme et l’État bourgeois, pour construire leur propre pouvoir par et pour eux-mêmes, sur la base de l’expropriation des capitalistes, de l’auto-organisation des masses (soviets), de leur armement pour empêcher la contre-révolution et du pluripartisme révolutionnaire pour garantir la démocratie ouvrière. De ce point de vue, une grève générale serait sans doute l’une des meilleures occasions pour que se pose concrètement la question du pouvoir en paralysant la société et en fragilisant le pouvoir bourgeois, à condition que l’auto-organisation démocratique des masses crée une situation de double pouvoir et que les propositions offensives d’un parti révolutionnaire solide et expérimenté permettent aux travailleurs d’aller jusqu’au bout.

Ce sont ces propositions offensives que nous souhaitons voir défendues ouvertement par notre parti, d’autant que les conditions objectives et subjectives décrites plus haut les rendent désormais audibles par le plus grand nombre.

Face à la droite assumée du NPA et à l’orientation pro-réformiste de la direction, il faut rassembler les partisans d’un NPA révolutionnaire sur la base d’un programme alternatif

Il nous semble évident que, pour contrer l’orientation des droitiers assumés du parti et de la direction, on ne saurait se contenter d’un retour aux textes du congrès fondateur, comme le proposent certains de nos camarades de l’ex-position B. Ce serait en effet revenir à une étape complètement dépassée par la réalité et ne pas se hisser à la hauteur des enjeux posés par la direction, dont la politique a conduit à la crise du NPA

Nous devons donc absolument refonder et clarifier nos axes stratégiques et nos orientations, faute de quoi la crise va s’accentuer et nous conduire à une impasse dans laquelle d’autres se sont déjà fourvoyés. En effet, cette crise du NPA n’est pas un cas isolé. C’est l’expression française des limites inhérentes à tout « parti anticapitaliste » construit sans délimitation de classe et sans programme révolutionnaire clair. C’est ce que confirme la crise, à chaque fois après une période d’euphorie plus ou moins brève, de tous les autres partis de ce type qui ont vu le jour et qui ont comme traits communs une orientation électoraliste et opportuniste. C’est le cas de la coalition électorale Respect structurée autour du SWP anglais, qui a rapidement explosé, pour ne pas parler du Parti de la refondation communiste en Italie, qui a fini dans le gouvernement Prodi avant de sombrer en perdant tous ses députés. C’est ce que montre aussi la crise actuelle du PSOL brésilien, qui est en train de se déchirer autour de la désignation de son candidat à la présidentielle, avec des accusations réciproques de fraudes et des violences diverses ; or la racine de cette crise, ce sont les forces concurrentes de l’appareil, chacune organisée autour d’un noyau d’élus qui veulent garder leur poste et entendent profiter chacun à sa façon d’un parti qui leur a toujours donné la priorité pour se construire, au détriment de l’intervention dans la lutte des classes.

Enfin, il serait d’autant plus illusoire de vouloir revenir au NPA du congrès fondateur au lieu d’avancer dans la clarification programmatique que la dynamique du processus constituant, portée par le succès de la candidature Besancenot en 2007, ne peut évidemment pas être récréée de la même façon. D’autant moins qu’entre-temps ont émergé la figure de Mélenchon et le Parti de Gauche, qui ont remis en selle le PCF par la création du Front de gauche. De ce point de vue, seule une orientation révolutionnaire peut relancer le NPA comme parti réellement alternatif au réformisme et l’orientation réformiste proposée par la direction transformerait la crise cardiaque actuelle du parti en mort clinique pure et simple. En effet, la place du réformisme est déjà prise, qu’on le veuille ou non, par ceux dont l’histoire pluri-décennale et les moyens matériels assurent qu’ils resteront les plus sérieux à cet égard, c’est-à-dire le PCF, le PG et les directions syndicales. La seule place qui resterait alors pour le NPA serait celle d’un (petit) groupe de pression sur le Front de gauche.

Il faut au contraire que la crise actuelle soit le coup de semonce permettant un sursaut de tous les militants révolutionnaires du NPA et que nous menions désormais tous ensemble le combat pour un NPA véritablement révolutionnaire. De ce point de vue, il ne nous semble pas qu’il suffise de doter le parti d’un « programme d’urgence » — comme le propose l’appel pour la réunion du 23 mai —, sans définir d’abord l’orientation stratégique qui définira l’axe révolutionnaire concret d’un tel programme. Autrement, le risque est, comme le dit à juste titre la majorité de la direction, que nous nous contentions de défendre une orientation para-syndicaliste, certes tournée vers les luttes, mais qui se limiterait à des revendications immédiates en évitant de poser les questions centrales, comme l’expropriation des capitalistes et la conquête du pouvoir politique par les travailleurs auto-organisés.

C’est pourquoi le tendance que nous voulons construire doit se battre pour un NPA qui définisse un projet apte à recréer la conscience de classe et à favoriser l’intervention politique dans toutes les luttes.

Aider le prolétariat à se constituer comme classe révolutionnaire

La disparition de tout projet révolutionnaire a créé une crise de la conscience de classe qui est un obstacle fondamental pour le développement et la politisation des luttes. Aujourd’hui, les travailleurs qui luttent le font toujours de manière partielle, défensive, sans se considérer comme porteurs d’une alternative sociale et politique radicale. Dès lors, ils subissent le plus souvent des défaites et n’ont réussi jusqu’à présent qu’à ralentir le ryth-me des attaques de la bourgeoisie.

Les responsabilités de l’extrême gauche

Certes, le poids des conditions objectives a été déterminant : l’offensive mondiale de la bourgeoisie depuis les crises capitalistes des années 1970, sur fond d’un chômage de masse, a réussi à diviser, fragmenter et précariser la classe ouvrière, tout en bouleversant les conditions concrètes de travail pour augmenter le taux d’exploitation. De plus, l’aide des réformistes et des staliniens à cette offensive a été décisive partout dans le monde, car ils ont choisi généralement d’aller jusqu’au bout de leur intégration à l’État ; ils ont provoqué ainsi une crise profonde du mouvement ouvrier lui-même : même si leur politique de collaboration de classe avait déjà nourri cette crise dans la période précédente, c’est plus fondamentalement l’existence même de la classe ouvrière et sa capacité à agir comme sujet indépendant qui ont été remises en cause à une échelle de masse. Enfin, d’un point de vue idéologique, l’offensive néo-libérale s’est nourrie aisément de cette crise du mouvement ouvrier et notamment du discrédit du stalinisme, puis elle a cru triompher lorsque le Mur de Berlin et l’URSS se sont effondrés. Globalement, la majorité de la classe ouvrière a perdu confiance dans ses propres forces et a intériorisé l’idée qu’il ne serait plus possible de changer le monde.

Cependant, il faudra faire aussi le bilan des organisations d’extrême gauche, dont la résistance politique et idéologique n’a été que très partielle. Tout d’abord, et sous prétexte qu’une nouvelle génération de militants est apparue, avec une vraie révolte mais sans fondement idéologique, l’extrême gauche, et tout particulièrement le NPA, a progressivement abandonné les fondements du marxisme alors qu’il aurait fallu aider les différentes expériences à s’en nourrir. C’est donc fort logiquement que d’un point de vue pratique, depuis 1995, l’extrême gauche français n’a pas su s’appuyer sur la combativité d’un certain nombre de secteurs pour aider la classe à reprendre confiance dans ses forces et pour relancer un projet stratégique capable d’armer les travailleurs et les jeunes qui se tournaient vers elle. Pire encore, elle a parfois privilégié la conquête de responsabilités dans les appareils syndicaux, sans que cela exprime toujours le triomphe d’une orientation radicale ratifiée par la base, et elle a été souvent suiviste des orientations proposées par les directions syndicales, qui ont joué un rôle central pour contenir les potentialités explosives des luttes. Enfin, l’extrême gauche s’est souvent contentée de capitaliser électora-lement la colère d’une fraction des travailleurs et des jeunes écœurés par le PS et le PCF, avec les bons scores d’Arlette Laguiller en 1995 et 2002, des listes LO-LCR en 1999 et 2004 et d’Olivier Besancenot en 2002 et 2007 ; mais le succès électoral n’est que l’indice d’une sympathie plus ou moins diffuse, il ne saurait justifier ou définir une politique.

La politique proposée par la tendance que nous voulons construire est celle d’une extrême gauche indépendante, qui cherche à construire la rapport de force par la base, en fédérant les travailleurs et les militants les plus révoltés, sans suivisme vis-à-vis des organisations réformistes et en revendiquant le caractère prolétarien de notre parti. Cela ne signifie en aucun cas le refus de tout front unique, comme nous en accuse une partie de nos camarades, mais nous devons refuser toute compromission et tout accord politique avec les réformistes qui nous conduise à un recul idéologique. Mais il s’agit d’affirmer une politique révolutionnaire vis-à-vis des travailleurs car, par delà la crise de la conscience de classe, ils n’ont jamais eu plus de poids social qu’aujour-d’hui, occupant massivement une place centrale dans la société. Or les travailleurs ne sont pas de simples victimes souffrantes du système, ni même des sujets de luttes purement revendicatives, mais une classe potentiellement hégémonique, capable de s’émanciper elle-même et de libérer l’ensemble de la société.

Pour une intervention politique active dans les luttes ouvrières

Nous n’en sommes qu’au début du regain des luttes ouvrières. Leur existence même et la radicalité de leurs méthodes ont d’emblée inquiété la bourgeoisie : celle-ci est obligée de faire preuve d’une certaine prudence pourtant contradictoire avec la pression qu’elle subit au moment où la compétitivité de la France est en recul, notamment par rapport à l’Allemagne, tandis que le déficit public explose. Cependant, ces luttes restent isolées les unes des autres et se soldent encore le plus souvent par des défaites. En fait, les luttes ouvrières partent souvent vaincues en se limitant au combat pour de meilleures indemnités, les travailleurs ne se sentant pas capables d’imposer la défense des emplois et estimant plus réaliste de faire payer le patron le plus possible. Or les indemnités ne permettent évidemment pas d’assurer la subsistance des travailleurs sur le long terme, au moment où sévit un chômage de masse, et la fermeture des usines affaiblit le prolétariat. Pourtant, rien n’est fait par les organisations pour aider les travailleurs confrontés aux plans de licenciements à se fédérer et à s’approprier collectivement un programme de lutte à la fois plus avancé et plus efficace. Les directions syndicales et réformistes refusent de soutenir sérieusement les luttes ouvrières et de les coordonner pour éviter une situation qui leur échapperait. Mais l’extrême gauche elle-même, si elle soutient les luttes, n’y intervient pas toujours avec un programme et des propositions dignes des révolutionnaires.

C’est le cas de LO, pourtant présente dans de nombreuses entreprises grâce à sa volonté parfaitement juste de se construire en priorité dans la classe ouvrière, qui écrit dans l’un des textes de son dernier congrès (décembre 2009) : « Une véritable lutte contre les fermetures d’entreprises demande-rait un haut niveau de conscience et de combativité, car comment empêcher des patrons qui veulent vraiment fermer leurs entreprises de le faire… autrement qu’en se battant pour l’expropriation de ces entre-prises et leur gestion sous contrôle ouvrier ? Mais qui oserait prétendre que, dans les circonstances actuelles, c’est à l’ordre du jour ? » Mais alors, comment accuser les directions syndicales de ne rien faire pour qu’une réponse d’ensemble soit donnée par la classe si l’on n’est pas même prêt à essayer de faire avancer le rapport de force et à vérifier jusqu’où il serait possible d’aller dans une lutte contre une fermeture d’entreprise ? L’argument des circonstances a bon dos : il revient à renoncer à les changer par l’intervention politique, au profit de la passivité économiste, de la routine parasyndicale.

Ce qui a manqué et qui manque cruellement, c’est le combat politique de l’extrême gauche pour la coordination des luttes autour des plus exemplaires et des plus radicales, pour une lutte d’ensemble contre les licenciements qui aurait permis de poser à un niveau global le combat contre le patronat et le refus de payer la crise capitaliste. C’est d’autant plus grave qu’il y a des travailleurs en lutte qui refusent de négocier des indemnités et se battent pour le maintien des emplois, prouvant que ce programme politique correspond à l’état d’esprit d’une partie de l’avant-garde ouvrière actuelle et pourrait donc être étendu à bien d’autres travailleurs. .

Mais la direction du NPA n’a pas pris elle non plus d’initiative politique pour faire avancer et converger les luttes ouvrières et n’a même pas su faire connaître ou montrer en exemple comme il l’aurait fallu des luttes particulièrement importantes et porteuses d’espoir. C’est ainsi qu’au printemps dernier les 120 travailleurs de la fonderie Rencast dans l’Indre (fabricant de pièces pour PSA et Renault) ont fait une grève avec occupation et piquets pendant 18 jours, suivie à 98%, sous la direction d’un syndicat CGT lutte de classe. Or ils ont emporté une victoire totale, imposant l’annulation de la fermeture, zéro licenciement et même le paiement intégral des jours de grève ! Pourtant, si des militants du NPA local, partisans d’une orientation révolutionnaire, ont soutenu activement cette lutte, la direction nationale du NPA n’a rien fait pour la montrer en exemple, même après sa victoire pourtant très rare (au-delà de la publication d’un article factuel dans Tout est à nous !, rédigé par un camarade de l’Indre).

De leur côté, les travailleurs de Goodyear Amiens Nord se battent depuis trois ans contre la fermeture de leur usine et les 817 licenciements prévus, refusant d’envisager une quelconque négociation des indem-nités. Dirigés par un syndicat CGT lutte de classe, ils combinent les recours judiciaires et les mobilisa-tions (manifestations à Amiens, notamment avec les Conti, jonction avec les travailleurs en lutte de la région, montées à Paris, etc.). Pourtant, la direction nationale du NPA ne semble pas s’intéresser à cette lutte exemplaire, elle n’en parle jamais, elle ne va pas les soutenir à Amiens et n’est même pas présente quand ils montent au siège de Goodyear à Rueil ou au tribunal de Nanterre !

La direction de notre parti a même gardé un silence presque complet durant la lutte très avancée des Philips Dreux, où pourtant un militant du NPA, Manuel Georget (par ailleurs tête de liste départementale aux régionales), jouait un rôle dirigeant à travers un syndicat CGT lutte de classe caractérisé par son refus d’accepter la fermeture de l’usine et de négocier les licenciements. De plus, les travailleurs de cette usine avaient mis en place en janvier, de façon éphémère à cause de la répression patronale, mais exemplaire, un contrôle ouvrier sur la production, expérience sans précédent depuis des années en France et précieuse pour toute la classe ouvrière. La victoire judiciaire contre le lock-out aurait pu relancer la lutte pour le maintien de l’emploi si les dirigeants du syndicat majoritaire FO ne l’avaient trahie en acceptant de négocier des indemnités de licenciements alors même que le plan de fermeture était reconnu comme illégal par le tribunal. Mais il est évident aussi que, si le NPA comme parti avait mis toutes ses forces dans la bataille, en en faisant une affaire nationale — comme l’ont fait les patrons de Philips, la grande presse et le ministre Estrosi lui-même, qui est intervenu directement —, l’issue aurait pu être différente.

Même lorsque des militants du NPA prennent l’initiative exemplaire de coordonner les luttes ouvrières contre les licenciements, comme l’ont fait les camarades de la Meuse avec le Comité de Résistance Ouvrière au printemps dernier, qui a connu un succès significatif, la direction du parti ne s’appuie pas sur cet exemple pour appeler à le reproduire partout en mettant toutes les forces de l’organisation dans la bataille.

Malheureusement, on pourrait multiplier les exemples. Mention-nons simplement pour finir le silence dans lequel, l’année dernière, la direction avait laissé la grève de 60 jours des postiers du 92 contre la restructuration des services (« facteur d’avenir »), pourtant dirigée par des militants du NPA... avec la participation d’Olivier Besancenot lui-même ! 

En revanche, combien de temps nos directions départementales et surtout nationale ont-elles passé à des réunions entières sur la question électorale entre juin 2009 et mars 2010 ? Ce n’est pas le fruit d’une simple erreur, mais le symptôme d’un profond scepticisme quant à la possibilité d’agir dans la lutte de classe pour changer réellement les choses. Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas seulement d’un soutien général et en fait dispersé aux luttes, mais d’une intervention pratique qui sache renouer avec les meilleures traditions du mouvement ouvrier. Cela devrait permettre d’aborder toute lutte importante comme une bataille qui fasse progresser l’expé-rience et la conscience de la classe, tant dans les victoires que dans les défaites « dignes » qui permettent aux travailleurs les plus combatifs de tirer des leçons et d’avancer.

Propositions pour un programme transitoire que pourrait porter un NPA révolutionnaire en vue du renversement du système capitaliste

Pour lutter avec le maximum de conscience, de courage et d’efficacité, les travailleurs ont besoin d’une perspective qui n’hésite pas à mettre en cause ouvertement le système capitaliste, une perspective qui ne soit pas masquée et ne figure pas qu’en filigrane de nos propositions, une perspective qui donne un débouché à notre programme de transition. Ce programme, quant à lui, ne saurait être un livre de recettes dogmatiques, mais il doit être suffisamment concret pour que travailleurs s’en saisissent comme d’un instrument efficace pour leurs luttes immédiates. Il doit donc consister en un système de revendications transitoires dont le sens est de s’attaquer toujours plus résolument et ouvertement à la propriété privée des moyens de production et à l’État bourgeois. Car si le capitalisme n’est pas capable de satisfaire les revendications liées aux maux qu’il engendre lui-même, alors il devient clair qu’il faut le renverser. Les revendications transitoires doivent constituer un lien entre la défense des intérêts immédiats fondamentaux des travailleurs et la nécessité, pour les garantir, de détruire l’État bourgeois. Il s’agit en effet de construire une société communiste, sans classes et sans État, égalitaire et libertaire, condition pour l’émancipation de tous les êtres humains.

Ce programme doit viser avant tout à unifier l’ensemble de la classe ouvrière, les hommes et les femmes, les travailleurs en CDI comme ceux en CDD, précaires ou intérimaires, les travailleurs ayant un emploi comme ceux qui en sont privés — notamment les jeunes issus des quartiers populaires —, les travail-leurs français et étrangers, qu’ils aient ou non des papiers. Contre toute tentation corporatiste, il est néces-saire de se battre pour l’extension des revendications des secteurs en lutte aux salariés les plus exploités et précarisés qui souvent travaillent aux côtés des secteurs mobilisés.

La criminalisation et la surexploitation des travailleurs sans-papiers doivent être combattues par tous les travailleurs en France. La régularisation immédiate de tous les sans-papiers, l’égalité des droits politiques, sociaux et démocratiques, à commencer par le droit de vote et d’éligibilité à toutes les élections, voilà des revendications qui devraient être centrales pour le mouvement ouvrier. Il faut combattre de ce point de vue l’orientation de la direction CGT qui refuse d’exiger la régularisation de tous les sans-papiers, conduit dans l’impasse la grève des travailleurs sans-papiers en acceptant la logique des « critères de régularisation » et en refusant son extension et avait même fait évacuer par la force l’occupation légitime de la Bourse du travail par des sans-papiers qui lui demandaient de se battre pour la régularisation de tous. Il ne faut pas oublier non plus d’exiger l’égalité salariale de branche pour les travailleurs sans-papiers auprès des patrons « gentils » qui appuient les demandes de régularisation de leurs exploités. Cela implique aussi de lutter pour des conditions de vie dignes pour les travailleurs immigrés, avec ou sans-papiers, qui sont souvent victimes des marchands de sommeil, alliés des patrons les plus négriers.

La surexploitation des femmes doit aussi être un axe d’intervention principal dans notre combat. Si d’un côté les femmes sont entrées massivement sur le marché du travail, la division sexuelle des métiers reste très marquée et les femmes — notamment les immigrées avec ou sans papiers — sont majoritaires dans les emplois sous-qualifiés, précaires et à temps partiel imposé. Le patronat joue sur cette division qui lui permet d’avoir une main-d’œuvre particulièrement précaire et corvéable. Les femmes subissent aussi une situation d’inégalité sur le plan des tâches domestiques : en moyenne, pour un couple où les deux partenaires travaillent à temps complet, elles fournissent près de quatre heures de travail contre deux heures et quart pour les hommes. La lutte pour l’éga-lité homme-femme dans le travail, pour la mise en place de structures telles que des restaurants collectifs, l’ouverture massive de crèches, permettra d’inclure davantage de travailleuses dans notre combat.

Le non-renouvellement des CDD est un instrument de licenciement. Le patronat s’en sert pour ajuster ses coûts de production aux dépens de la vie même des travailleurs. Tous les travailleurs savent que c’est à eux de former les CDD ou les intérimaires quand ils arrivent, et ce sans aucune contrepartie, mais que c’est aussi à eux de couvrir les postes laissés vacants lorsqu’ils repartent. C’est en ce sens que la lutte contre les licenciements des précaires et des intérimaires et la transformation de leurs contrats en CDI est primordiale pour l’ensemble des travailleurs. Cela implique également d’organiser les précaires et les intérimaires au sein du syndicat de l’entreprise où ils travaillent. Le moyen le plus efficace pour organiser l’unité de classe entre travailleurs en CDI, en CDD, précaires et intérimaires, est de mener les luttes ensemble par l’auto-organisation (AG, comités de grève et de lutte...).

Le patronat utilise la menace du chômage pour faire pression sur les travailleurs. Mieux vaut avoir un emploi, même dans les pires conditions, que ne pas en avoir du tout, surtout lorsque les attaques contre les droits des travailleurs au chômage se multiplient et que la crise économique continue à faire des ravages. Afin d’en finir avec ce mécanisme pervers, nous devons lutter pour imposer le partage des heures de travail avec réduction de la semaine de travail sans réduction de salaire ni flexibilité, et ce jusqu’à la résorption complète du chômage. Par ailleurs, il faut combattre pour que toutes les organisations syndi-cales du mouvement ouvrier organi-sent les travailleurs privés d’emploi au côté des travailleurs actifs.

Face à l’augmentation du nombre de fermetures d’entreprises, nous devons nous battre non pour de meilleures indemnités de licen-ciements, mais pour le droit au travail : zéro licenciement, car ce n’est pas aux travailleurs de payer la crise ! Si les patrons disent ne pas pouvoir maintenir l’emploi dans les boites, revendiquons leur expropriation et leur nationalisation sous gestion ouvrière. Loin d’être une utopie dans le contexte actuel ou d’un retour aux nationalisations bourgeoises comme en a connu le pays dans le passé, il s’agit de la seule réponse concrète à la crise, l’unique solution pour maintenir les postes de travail, le salaire, et en finir avec le despotisme patronal dans les entreprises. En Argentine les ouvriers céramistes de l’usine Zanon dans le Sud du pays ont démontré qu’il était possible d’occuper, de produire sans patron ni chefs et de lutter pour l’expropriation de l’ex-patron par l’État.

Face à la crise financière et à la dette publique, qui n’est pas celle des travailleurs mais s’explique par tous les cadeaux faits aux banques, aux patrons et aux riches, nous nous battons pour la répudiation de la « dette », pour l’expropriation des banques sans indemnités ni rachat et pour la constitution d’une banque nationale unique permettant un système de crédit à bon marché pour celles et ceux qui vivent de leur travail.

Contre la hausse du coût de la vie, nous devons réclamer une augmen-tation immédiate de 300 euros pour tous, y compris les travailleurs privés d’emploi, et un SMIC d’au moins 1600 euros nets. Il n’est pas tolérable que le nombre des travailleurs pauvres continue à augmenter et que des millions aient du mal à arriver à la fin de mois. On ne peut pas non plus permettre que les gouvernement et le patronat continuent à avancer dans la dégradations de nos retraites et pensions qui constituent une part de salaire socialisé.

Où faudrait-il prendre l’argent pour garantir le droit au travail et à une existence digne pour tous et toutes ? Dans les profits capitalistes. Si les patrons veulent nous faire croire que les caisses sont vides, alors il faut qu’ils le démontrent en ouvrant les livres de compte des entreprises. Même s’ils arrivaient d’ailleurs à prouver qu’ils ne font aucun bénéfice actuellement, ce qui est loin d’être le cas dans la majorité des grosses entreprises, nous serions en mesure de démontrer qu’ils ont amassé des millions voire des milliards au cours des dernières années grâce à notre travail et qu’ils ont souvent organisé leur déficit.

Face à la contre-réforme majeure qu’est en train de concocter le gouvernement et qui constitue le dossier central de l’actualité sociale, nous devons exiger le maintien des acquis et la reconquête de ceux qui nous ont été arrachés : aucun recul de l’âge de départ à la retraite ! Non à la hausse du nombre d’annuités ! Abrogation des décrets Balladur de 1993 et des lois Fillon de 2003 et 2007, pour la retraite après 37,5 annuités de cotisations pour tous, intégrant les années d’études et de chômage, calculée sur la base de 75% du salaire des 6 meilleurs mois pour tous. Nous devons donc dénoncer et combattre systématiquement et frontalement (et non ponctuellement et timidement, comme le fait la direction du NPA) la collaboration des directions syndicales qui négocient avec Sarkozy, temporisent et refusent d’engager un mouvement d’ensemble avec l’objectif de la grève générale comme seul moyen de gagner — qui ne se décrète certes pas, mais se prépare. Nous devons également critiquer ouvertement l’appel ATTAC/Copernic face auquel la direction du NPA se montre suiviste alors que, au-delà de sa dénonciation du projet de Sarkozy, ne contient aucune revendication et ne propose aucune perspective de lutte, risquant de limiter les collectifs unitaires à des coquilles vides. La seule façon de réaliser l’unité des travailleurs et des organisations sur la base des revendications et dans une perspective de lutte, c’est d’aider les travailleurs à s’auto-organiser par des collectifs dont ils définissent eux-mêmes souverainement le cadre et les objectifs et où nous devons tout faire pour aller le plus loin possible, en luttant politiquement conte les réformistes dans le cadre du nécessaire front unique.

Enfin, les révolutionnaires sont au premier rang pour défendre les libertés démocratiques. C’est le cas notamment dans le combat contre les lois sécuritaires et liberticides, contre la politique de stigmatisation des immigrés et des jeunes des quartiers populaires, contre la criminalisation des actions militantes. Nous défendons aussi la laïcité, conquête démocratique de la bourgeoisie française dans sa phase progressiste dont les acquits ont été défendus par la classe ouvrière, les enseignants et la jeunesse, contre cette même bourgeoisie dans sa phase impéria-liste. La bourgeoisie et son gouver-nement ne font référence à la laïcité, qu’ils piétinent quotidiennement, que pour monter des campagnes de stigmatisation raciste vis-à-vis des immigrés. En même temps, ils continuent de financer les écoles privées majoritairement confession-nelles, maintiennent le statut d’Alsace Moselle, proclament la supériorité du curé sur l’instituteur, tolèrent les aumôneries dans les collèges et les lycées, les chapelles dans les hôpitaux publics. Les révolutionnaires doivent s’opposer aux lois racistes et, en même temps, combattre pour le respect des acquis progressistes de la laïcité.

Contre « notre » propre État impérialiste, pour l’interna-tionalisme prolétarien et le soutien à la résistance des peuples opprimés

Être internationaliste aujour-d’hui dans l’Hexagone veut avant tout dire se poser en rupture par rapport à l’impérialisme français et à sa République, entendue comme fiction, qui prône la Liberté, l’Égalité, la Fraternité et la Laïcité pour mieux continuer à garantir, sur le territoire national et dans l’arrière cour semi-coloniale, les affaires de la bourgeoisie et l’asservissement des peuples.

La lutte contre l’impérialisme est une tâche prioritaire des révolutionnaires, en particulier contre notre propre impérialisme. Nous devons soutenir partout la mobilisation des masses contre l’impérialisme, y compris leur résistance armée. Tous les coups qu’elles portent à l’impérialisme sont des actes légitimes du point de vue du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et, en entravant ou affaiblissant les puissances néo-coloniales, ils permettent en outre de favoriser la lutte des classes dans les pays impérialistes eux-mêmes. Ce soutien à la résistance des masses ne veut pas dire que les révolutionnaires apportent un quelconque soutien au programme et à la stratégie des organisations nationalistes bour-geoises et petites-bourgeoises. On ne peut qualifier de « résistance » tout ce qui porte un fusil et, en particulier, des organisations comme Al Qaïda qui a été propulsée par l’impérialisme américain (Opération Cyclone de Jimmy Carter en 1979). Dans la lutte anti-impérialiste, il ne faut pas perdre la boussole de classe comme l’ont fait tous ceux qui se sont couchés devant les directions nationalistes, par exemple le parti stalinien Toudeh devant Khomeiny en Iran, avec à la clé la liquidation de milliers de militants du mouvement ouvrier. C’est ainsi que :

  • Nous soutenons le peuple vénézuélien contre toute attaque directe ou indirecte de l’impérialisme, nous combattons tout putsch contre Chavez fomenté par l’impérialisme, mais nous n’apportons aucun soutien à la politique bourgeoise de Chavez, qui fait obstacle au combat révolutionnaires des masses et tente de se subordonner le mouvement ouvrier.
  • Nous soutenons la lutte du peuple palestinien contre l’État raciste d’Israël, pour ses droits nationaux, pour le droit au retour et pour un seul État démocratique et socialiste sur l’ensemble du territoire de la Palestine historique. Dans ce cadre, nous prenons clairement position contre l’assassinat d’élus du Hamas, leur enlèvement et leur emprisonnement par Israël. Mais nous n’apportons aucun soutien au Hamas en tant que parti réaction-naire qui maintient la propriété privée, opprime les masses palestiniennes en s’appuyant sur la charria, interdit les enseignants masculins dans les écoles de filles, oblige les femmes à se baigner habillées et organise des mariages forcés.
  • Nous soutenons la résistance du peuple irakien, y compris militaire, contre l’impérialisme qui occupe son territoire et qui l’opprime, mais nous combattons ceux qui, au nom de l’islam radical et de la charria, s’attaquent aux syndicats et aux partis ouvriers, tentent de briser les grèves les armes à la main, assassinent les étudiants et terrorisent les femmes. Ce sont les ennemis jurés de la classe ouvrière et de son émancipation.
  • De manière générale, nous soutenons la résistance des masses contre les armées et les représentants de l’impérialisme et du sionisme en Palestine, en Irak, en Afghanistan, au Liban, etc., même lorsque, en l’absence de directions progressistes, elles utilisent les moyens militaires d’organisations bourgeoises ou petites-bourgeoises, laïques ou religieuses. Mais nous nous opposons à la stratégie des attentats aveugles contre les populations civiles, qui conduisent à solidariser celles-ci avec leur gouvernement au lieu de les faire rompre avec lui et dont l’impérialisme se sert pour justifier sa présence.

Enfin, au moment où le gouvernement nationaliste-bourgeois de Hugo Chávez au Venezuela lance son projet d’une prétendue Ve Internationale aux contours politiques flous et au contenu interclassiste, il nous faut défendre au contraire la nécessité de l’Internationale ouvrière révolution-naire qui fait cruellement défaut aujourd’hui et qui chercherait à se lier à l’avant-garde du prolétariat en lutte contre les effets de la crise mondiale. Qu’on imagine à quel point la situation actuelle serait différente si les travailleurs disposaient d’une Internationale capable d’appeler tous les travailleurs d’Europe et du monde à la lutte commune et simultanée contre les plans de destruction de tous les acquis sociaux, pour un programme de transition révolutionnaire ! Il faudra donc ouvrir la discussion, au sein de la Tendance révolutionnaire du NPA, sur la délimitation, les références et le programme de cette Internationale que nous voulons. Dans ce cadre, nous discuterons en particulier du programme historique de la Quatrième Internationale et du bilan des organisations qui en sont issues.

Conclusion

La présente contribution pour la réunion nationale de la position B du 23 mai est soumise au débat parmi d’autres. Ses signataires espèrent qu’elle pourra contribuer à l’élaboration d’une plate-forme commune des partisans d’un NPA révolutionnaire pour le congrès, porteuse d’une alternative programmatique et stratégique radicale à l’orientation défendue par les dirigeants des ex-positions A et C. Nous pensons que cette plate-forme commune doit être portée immédiatement par une véritable Tendance révolutionnaire, qui soit clairement délimitée afin de peser efficacement sur les orientations du NPA. Nous avons en effet besoin d’une force organisée pour convaincre et rassembler un maximum de camarades du parti, pour que nos propres discussions puissent désormais avoir lieu régulièrement et s’approfondir et enfin pour proposer à nos comités, partout où c’est possible, de prendre des initiatives pratiques dans la lutte de classe immédiate, prouvant que nos propositions ne sont pas seulement justes en théorie, mais aussi réalistes et efficaces.

Texte signé par 62 camarades du NPA, dont ceux de la Tendance CLAIRE


1) Texte présenté au CPN des 27-28 mars par F. Borras, M. Duboz, C. Faivre, P.-F. Grond, I. Hayes, A. Leclerc, G. Liegard, M. Martin et C. Wawrzyniak, membres du CE. C’est le texte le plus élaboré au sein de la direction. Un second texte de partisans de l’ex-position A, « Le NPA dans les régionales : un message brouillé, une campagne compliquée », critique la façon dont ont été menées les discussions avec le PC et le PG et insiste sur la construction du parti à la base, mais il ne propose pas d’orientation réellement différente. Par ailleurs, la sensibilité du bulletin Débat révolutionnaire, partie intégrante de la direction et de l’ex-position A, font quelques propositions sur la « gauche », parfois contradictoires avec le noyau de l’orientation majoritaire, mais sans remettre en cause celui-ci.

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