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Sur le nouveau collectif des Juives et Juifs Révolutionnaires

Par Julien Varlin (10 novembre 2015)
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Une nouvelle organisation, juive et révolutionnaire

Un nouveau collectif, les Juives et Juifs révolutionnaires (JJR), qui existait depuis quelques mois sous la forme d’une page Facebook, a récemment décidé de se structurer davantage pour  intervenir sur le terrain militant. Nous étions le 2 novembre à une réunion au cours de laquelle ils et elles ont présenté leur raison d’être et leur ligne politique. Un temps important a pu être consacré au débat après la présentation[1], et ce débat nous a semblé intéressant.

Le premier élément à noter que dès l’annonce de la réunion, les organisateur-trice-s ont reçu des menaces de la part de la « Ligue de Défense Juive », organisation sioniste d’extrême droite. La LDJ a effectivement rôdé autour du local, mais grâce à la solidarité militante du milieu antifasciste, le service d’ordre était suffisamment dissuasif.

Les JJR revendiquent de militer au sein de l’extrême gauche et au sein de la minorité juive, faisant entendre une voix radicalement opposée à la LDJ mais aussi à des organisations comme le CRIF. Pour elles et eux, il y a tout un héritage révolutionnaire juif à se réapproprier (le Bund n’en est que l’exemple le plus connu).

Certain-e-s se demandent s’il est utile de s’organiser sur la base de la judéité, le combat commun dans une organisation du mouvement ouvrier pouvant être suffisant (quitte à promouvoir l’antiracisme à l’intérieur) et restant nécessaire (puisque la révolution nécessite une organisation unitaire des travailleur-se-s).

A cela, les camarades des JJR ont répondu que l’auto-organisation des opprimé-e-s était un principe fondamental pour faire progresser leur cause, en particulier parce que celles et ceux qui vivent l’antisémitisme au quotidien sont bien plus à même de lutter efficacement contre. Ils et elles ont rappelé que le mouvement féministe avait joué un grand rôle pour bousculer les organisations du mouvement ouvrier et les pousser à prendre en compte la question du patriarcat. Par ailleurs, il a bien été précisé que l’appartenance aux JJR n’était absolument pas contradictoire avec l’appartenance à d’autres organisations révolutionnaires (des camarades appartiennent notamment à la Fédération anarchiste), et que les JJR étaient partie prenante du mouvement révolutionnaire d’ensemble. Ce positionnement nous semble juste.

Un antisémitisme bien réel mais en débat

Un des mots d’ordre du mouvement est l’autodéfense. Les JJR ont expliqué que cela signifiait aussi bien l’organisation défensive immédiate (dans les rassemblements et manifestations…) qu’un travail de lutte idéologique contre l’antisémitisme.

Les JJR contestent l’idée que l’antisémitisme aurait quasiment disparu. Selon elles/eux, l’Etat ne stigmatise plus ouvertement les Juif-ve-s, mais l’Etat n’est pas le seul organe de la bourgeoisie, et des franges de la classe dominante continuent de véhiculer l’antisémitisme. Et celui-ci se retrouve dans l’ensemble de la société, y compris dans l’extrême gauche, sous la forme d’un antisémitisme populaire (souvent sous la forme d’un « socialisme des imbéciles » qui croit s’en prendre aux puissants à travers les Juifs).

Il y aurait donc un antisémitisme structurel, même sans antisémitisme d’Etat. Un parallèle a été fait avec la lutte féministe : l’Etat s’est doté d’un « ministère du droit des femmes », mais le patriarcat reste structurel.

Beaucoup de discussions se sont concentrées sur ce point, notamment avec des camarades d’autres organisations juives présentes comme l’Union juive française pour la paix (UJFP). Les JJR reprochent à l’UJFP de minimiser l’antisémitisme populaire, en lui trouvant des explications dans le rejet du sionisme ou du « philosémitisme d’Etat ». Ils/elles répètent que « les responsables du racisme sont les racistes ».

Il a été très clairement dit que les JJR étaient opposé-e-s au sionisme au nom de l’anticolonialisme. Mais ils/elles considèrent que l’injonction faite aux Juif-ve-s de France de se définir par rapport à Israël (dans certains milieux militants) est une forme d’antisémitisme.

Nous pensons qu’il est indéniable qu’il existe un antisémitisme non négligeable en France. L’une de ses sources est l’extrême droite traditionnelle, qui tend à être marginalisée dans la bourgeoisie et en perte de vitesse ces dernières décennies. L’autre source, Soral-Dieudonné, s’appuie sur un pseudo discours anti-système et complotiste qui malheureusement est de plus en plus populaire.

Alors que les organisations bourgeoises dominantes (par alliance d’intérêts avec Israël) discréditent toute critique antisioniste comme antisémite, il peut y avoir une réaction inverse dans l’extrême gauche, celle de se méfier de toute critique de l’antisémitisme comme faisant le jeu d’Israël. Il nous semble clair qu’il faut garder notre boussole en toutes circonstances.

Néanmoins certaines critiques adressées à l’UJFP ou à d’autres organisations d’extrême gauche nous semblent exagérées. Par exemple, analyser les causes de la montée du racisme populaire n’est pas automatiquement être complaisant avec ces idées, mais nous semble nécessaire pour mieux lutter contre elles. Par exemple, dire que la montée du FN dans les classes populaires est favorisée par les politiques antisociales menées par les gouvernements de droite et de gauche depuis des décennies ne signifie pas que nous minimisons le danger de ces idées.

Le lancement des JJR permet donc d’approfondir la nécessaire discussion sur l’antisémitisme et ses renouveaux actuels, en lien avec la lutte contre tous les racismes.

https://juivesetjuifsrevolutionnaires.wordpress.com/


[1] Le contenu de la présentation peut globalement être retrouvé dans ce texte : http://www.socialisme-libertaire.fr/2015/05/antisemitisme-structurel-a-gauche.html

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