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Huitième semaine de lutte du personnel précaire à l’université Paris 8

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Lien publiée le 9 mars 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

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Philippe Alcoy

La grève des salarié-e-s de l’administration de l’université de Paris 8 pour une augmentation des salaires et l’évolution des carrières continue et est rentrée dans la huitième semaine. Et cela malgré les pressions et menaces de la part de la direction de l’université. Avec une caisse de grève qui se rempli bien, une pétition signée par plus de 3.000 personnes de l’université notamment mais aussi d’ailleurs et une lettre de soutien signée par 118 enseignant-e-s adressée à la présidente de l’université, la grève montre qu’elle compte avec la sympathie et le soutien parmi les autres salariés de l’université et les étudiants.


L’université de Paris 8 est une « fac de gauche » avec une longue tradition de luttes étudiantes, de solidarité avec les luttes des travailleurs. Une fac ouverte aux travailleurs et travailleuses. Mais beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Aujourd’hui c’est sur le pont qui mène de la bibliothèque au bâtiment A que tous les matins on peut voir ce groupe de femmes discuter entre elles et avec les passants, servir du café ou du thé, quelque chose à manger. C’est la grève depuis huit semaines. Car c’est la précarité depuis des années.

L’implicite devient explicite. Le personnel invisible se rend visible dénonçant son exploitation, sa précarité à la base de l’organisation de l’université de classe. Huit semaines de grève déjà pour exiger une augmentation des salaires de 98 euros nets par mois et la reconnaissance sur le papier de l’évolution effective des tâches. Une autre revendication qui a gagné de la force parmi les grévistes c’est la demande de transparence dans la gestion des ressources de l’université. Le contrôle de la gestion du budget par les salariés de la fac, les étudiants et les enseignants est fondamental pour poser les bases de confiance pour la négociation des salaires et les ressources alloués aux différents départements et services par l’équipe de direction.

La présidence de « gauche » de Paris 8 répond comme n’importe quelle présidence de droite : par la pression individuelle, les représailles et les menaces. Un des acquis très importants pour les salariés de l’université au fil des années de luttes était la non retenue de salaires lors des mouvements de grève. C’est contre la grève de l’un des secteurs les plus précaires de l’université que cette équipe de direction de « gauche » a décidé de « rompre avec la tradition ».

Et la spécialiste des mouvements sociaux, la présidente « gauchiste » de Paris 8 Danielle Tartakowski, s’est non seulement montrée complètement intransigeante avec les grévistes et fermé toutes les voies de négociation, mais elle explique également dans un courrier adressé principalement aux enseignants solidaires de la grève du personnel qu’elle est « pleinement consciente [que la retenue de salaires est] une décision grave » mais qu’elle a la « responsabilité de veiller à l’équilibre du budget de notre université et à la bonne marche du service public ». Mais surtout il ne faut pas oublier que « la grève est elle aussi une chose grave ». En ce sens, le retrait sur salaire ne serait pas « punitif parce qu’il participe de ce droit qui est un droit protecteur ». De gauche à droite, une page d’une histoire sur un mensonge est tournée.

Solidarité

Ces mots incroyables pour quelqu’un qui se prétend de « gauche » et sensible aux mobilisations sociales viennent en réponse à une lettre de solidarité signée par 118 enseignants en soutien à la grève. Cette démonstration de solidarité représente un coup pour la présidence qui prétend que la grève et les revendications du personnel mettrait « en danger le service public ». Mais aussi cela a été un élan d’enthousiasme et de moral pour les grévistes.

En ce même sens, les démonstrations de solidarité de la part d’étudiants et des salariés des autres services se voient au quotidien dans le piquet de grève/petit-déjeuner de la grève. Beaucoup de personnes y passent pour discuter, s’informer sur la grève, pour exprimer leur solidarité, pour apporter à la caisse de grève.

D’ailleurs, grâce aux dons individuels et des organisations syndicales et politiques, la caisse de grève aujourd’hui compte près de sept mille euros, ce qui est fondamental pour faire face à la pression financière. A cet argent, il faut également rajouter autour de 4.000 euros pour la CGT Ferc-Sup et 3.000 pour le Sansub-FSU que ces organisations se sont engagées à verser dans la caisse de grève lors de la dernière assemblée générale de l’université. Tout cela montre que la grève compte avec une large sympathie parmi la « communauté universitaire ».

Un autre élément important qui exprime la solidarité c’est le fait que le journal de la grève écrit par le « Collectif des bas salaires » a été largement vendu dans les différents services et départements. A peine imprimé, en quelques heures une soixantaine de journaux était vendue.

Pourquoi pas tous ensemble ?

La situation de précarité dans laquelle se trouve une bonne partie du personnel de Paris 8 n’est pas un cas isolé dans les universités françaises. C’est la réalité quotidienne d’autres salariés administratifs mais aussi des étudiants, de doctorants, d’enseignants. Les mouvements en cours comme à Paris 11 Orsay, avec qui les grévistes de Paris 8 ont participé à une manifestation devant le ministère de l’enseignement supérieur jeudi 5 mars, en est une preuve. Cela montre l’importance de faire sortir de Paris 8 le conflit et de rencontrer les salariés, étudiants et enseignants d’autres universités, actuellement en lutte ou pas.

Au sein de Paris 8 elle-même la dégradation des conditions d’étude et de travail s’accentue depuis des années. Des suppressions de filières aux difficultés supplémentaires pour les étudiants salariés en passant par les changements dans les conditions de validation des cours, rendant l’université encore plus sélective, les raisons sont nombreuses pour se révolter.

Mais plus globalement, ces attaques et cette situation de plus en plus précaire pour les salariés et les étudiants font partie d’une politique globale menée par les différents gouvernements depuis quelques années, qu’ils soient PS ou UMP. Il s’agit de couper dans le budget pour l’enseignement supérieur et dans l’ensemble des services publics pour allouer ces fonds à l’aide pour les multinationales françaises, pour les guerres impérialistes, pour sauver les banques.

En ce sens, une victoire du personnel de Paris 8 serait un petit pas en avant pour l’ensemble des salariés et pour les étudiants. Mais aujourd’hui avec la solidarité passive ne suffit plus. Il faut que ce soutien se transforme de plus en plus en un soutien actif, par des actions, par la participation active d’étudiants et enseignants, avec leurs propres revendications, unissant les revendications, unissant le mouvement avec les autres universités en lutte. Les prochains jours seront fondamentaux pour le futur de la grève. Une nouvelle soirée de soutien pour alimenter la caisse de grève s’organise pour le jeudi 12 mars à 18h à l’université et d’autres initiatives auront lieu pour construire la solidarité et aussi la mobilisation qui sera nécessaire pour obtenir une victoire.

6/3/2015.