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    Les Echos - Sept questions sur un "défaut" grec

    Lien publiée le 16 juin 2015

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    http://www.lesechos.fr/monde/europe/021137180167-dette-sept-questions-sur-un-defaut-grec-1128475.php

    La crainte d’un défaut de paiement grec se précise à mesure que le blocage entre Athènes et ses créanciers se radicalise. Revue de détail des interrogations sur un événement qui serait une « première » dans la zone euro.

    Où l’on reparle de défaut de paiement grec ... Au lendemain d’un week-end où les négociations entre la Grèce et ses créanciers (Union européenne et FMI) ont une fois de plus tourné court, le dialogue de sourds s'est installé, lundi. Athènes ne semble plus vouloir bouger : « Nous attendrons patiemment jusqu’à ce que les institutions se rallient au réalisme », a signifié, lundi dans une déclaration écrite au quotidien de gauche « Ephimerida ton Syndakton », le Premier ministre Alexis Tsipras, en accusant ses créanciers « d’opportunisme politique » après cinq années de « saccage » de l’économie du pays.

    Du côté des bailleurs de fond, les propositions grecques de réformes et de mesures budgétaires sont toujours jugées « incomplètes », car elle ne permettront pas au pays de financer ses besoins pour les prochaines années. Manquent toujours, de leur point de vue, une réforme des retraites et une hausse de la TVA. Selon un document publié par le quotidien grec « Kathimerini », la Grèce serait pourtant à présent d’accord sur les objectifs d’excédent budgétaire primaire (hors charge de la dette) souhaités par l’UE et le FMI pour cette année (1% du PIB) et l’an prochain (2%), ce qui était un gros point d’achoppement, les Grecs ne voulant pas, initialement, dépasser 0,6% et 1,5% respectivement.

    Aucun rendez-vous entre Athènes et ses créanciers n’est prévu avant la réunion régulière des ministres des Finances de la zone euro, jeudi, et l’échéance du 30 juin (date d’expiration du programme d’aide à la Grèce et échéance d’un remboursement de 1,6 milliard d’euros qu’Athènes doit effectuer au FMI), approche ainsi inexorablement. En cas de non-remboursement, la Grèce devrait affronter les conséquences d’un défaut de paiement, une « première » dans la zone euro.

    Revue des interrogations sur un événement qui serait « historique » :

    1- Pas de défaut de paiement pour la Grèce ?

    En repoussant au 30 juin le remboursement d’une échéance de 1,6 milliard d’euros au FMI, la Grèce a gagné du temps. Mais l’échéance approche à grand pas et avec elle la question d’un défaut de paiement. Mais ce défaut n’interviendra pas à la fin du mois. D’abord, parce que le non-paiement de cette dette entraînerait l’ouverture d’un délai de grâce d’un mois. Ensuite, parce que les agences de notation (Moody’s, Standard and Poor’s) ont déjà prévenu qu’elles ne placeraient pas la Grèce en défaut de paiement en cas de non règlement. Standard and Poor’s l’a encore rappelé ce lundi : elle ne dégradera pas la note de la Grèce en « défaut sélectif ». Explication : l’agence américaine, tout comme sa concurrente Moody’s, ne voient pas le FMI comme un créancier normal, mais comme un créancier public et en fonction de ce critère, l’Etat qui manque une échéance ne serait pas techniquement en défaut de paiement.

    Surtout, pour la même raison, Standard and Poor’s prévient que cette décision vaut aussi pour une banque centrale, autrement dit la BCE. Or, la Grèce va faire face à une échéance très importante le 20 juillet avec un remboursement de 3,5 milliards à la Banque centrale européenne. Pour les agences, la Grèce ne serait alors pas non plus techniquement en défaut. Ce qui n’enlève rien au fait qu’Athènes pourrait se voir priver, dans ce cas, de l’aide de la BCE pour maintenir ses banques, mais aussi ses finances à flot, alors que les caisses sont vides.

    Cela n’empêche pas d’ailleurs Standard And Poor’s de dresser un état des lieux critique des finances grecques. L’agence a récemment abaissé la note de la Grèce à « CCC » et menace encore de le faire, sans aller jusqu’au défaut de paiement.

    Enfin, un rappel qui a de l’importance, un éventuel défaut de paiement de la Grèce ne se traduirait pas mécaniquement par une sortie de la Grèce de la zone euro. Même si elle rendrait difficile à gérer la position de la Grèce vis-à-vis de ses partenaires.

    2- Quel risque de contagion ?

    En théorie, le risque de contagion est contenu. D’abord par la création du Mécanisme européen de stabilité financière (MESF) fort de 500 milliards d’euros de réserves. Ensuite parce que l’essentiel de la dette grecque est détenu par des Etats ou des organismes internationaux (BEI, BCE, MESF...), autrement dit, l’exposition des banques et assureurs européens est aujourd’hui plus limitée qu’il y a trois ans. Le risque financier des Etats, estimé autour de 300 milliards d’euros, paraît important en tant que tel, mais la dette grecque détenue par les Etats ne représente que 3 % du PIB de la zone. Le risque ne semble donc pas de nature systémique. Enfin le programme massif de rachats d’actifs (QE) de la BCE peut servir d’amortisseur

    Mais en pratique, la montée de la volatilité sur les marchés obligataires et la forte réactivité des marchés actions aux dissensions entre la Grèce et ses créanciers, depuis quelques semaines, montrent que les marchés financiers ne sont pas forcément à l’abri d’une correction d’ampleur, notamment dans les pays périphériques (Espagne, Portugal, Italie...) . Pour de nombreux investisseurs, ce serait en tout cas une plongée dans l’inconnu.

    3- Les banques sous assistance respiratoire

    « Les banques grecques feront certainement faillite dans les douze mois en l’absence d’accord entre le gouvernement grec et ses créanciers », a fait savoir, en fin de semaine dernière, l’agence Standard & Poor’s, dégradant de « CC+ » à « CCC- » la note de dette long terme des quatre principaux établissements du pays. A court terme, « les banques grecques ont encore près de 30 milliards d’euros d’actifs qu’elles peuvent apporter en collatéral en échange de financements d’urgence auprès de la Banque nationale grecque (BNG) », estime néanmoins Michel Martinez, économiste en chef de la Société générale. Pour gérer ce stock qui s’amenuise au fil des retraits massifs de dépôts, la Grèce pourrait imposer un contrôle des capitaux. Mais toute la question est de savoir si la BCE laissera fonctionner ce dispositif de financements d’urgence qu’elle renouvelle chaque semaine et dont le plafond atteint désormais 83 milliards d’euros. « A ce stade, les grandes banques grecques sont solvables et les collatéraux qu’elles apportent sont adéquats », a déclaré Mario Draghi, lundi à Bruxelles. Sans couper le robinet, la BCE pourrait toutefois durcir les conditions d’éligibilité des actifs apportés en collatéral. La situation des banques grecques n’est donc pas désespérée mais elle se complique jour après jour.

    4- Comment sortir de l’euro ?

    Cela fait déjà cinq ans que les Européens négocient pour tenter de maintenir la Grèce dans la zone euro. Mais si jamais l’issue contraire du « Grexit » s’imposait, il est possible que cela débouche là aussi sur des longs mois de discussions tortueuses. Car une sortie de l’euro est un territoire complètement inconnu : les traités européens ne prévoient absolument pas cette éventualité. Les tables de la loi de l’UE mentionnent au contraire à plusieurs reprises le caractère « irrévocable » du taux de change entre l’ancienne monnaie nationale et la monnaie unique, notamment dans l’article 140, alinéa 3.

    En 2011, Olli Rehn alors commissaire aux affaires économiques, en avait déduit que cet article prouvait bien le caractère irrévocable de l’appartenance à la zone euro. La seule porte de sortie qui soit réellement fléchée, c’est celle de l’Union européenne dans sa globalité. Il s’agit d’une nouveauté introduite par le Traité de Lisbonne en 2009, puisque auparavant, aucune clause explicitant les conditions de sortie de l’UE n’était mentionnée. L’article 50 a donc été ajouté, qui prévoit les conditions de négociations entre celui qui rend sa carte du club et les autres. L’accord de sortie doit être approuvé par une majorité qualifiée d’Etats, ainsi que par le Parlement européen. Les textes prévoient une durée maximale de deux ans pour de telles négociations.

    La plupart des commentateurs ont conclu de la lecture des traités européens que la Grèce devrait donc quitter l’UE pour sortir de la zone euro. Une étude de la BCE de 2009 – avant la crise – tirait la même conclusion. Ce qui priverait Athènes des aides européennes à un moment où elle en aurait dramatiquement besoin pour faire face à la situation d’extrême tension financière. Toutefois, il faut noter que le seul cas de figure prévu pour une sortie de l’UE est celui d’une sortie volontaire, et non pas d’une expulsion. Or le gouvernement d’Alexis Tsipras a toujours dit son attachement à l’appartenance à l’euro et à l’Union européenne, excluant toute sortie. Botter la Grèce hors de la zone euro promet donc d’être un casse tête juridique.

    5- La tentation de la nouvelle monnaie

    Faute d’accord avec ses créanciers, le gouvernement risque rapidement d’être à court d’euros, surtout si la BCE interrompt l’aide d’urgence. « Les autorités peuvent alors être tentées, par exemple, de revenir à une nouvelle monnaie pour honorer leurs échéances internes », indique Danielle Schweisguth, économiste à la Société Générale. Pour régler les salaires, les retraites ou encore les fournisseurs, Athènes pourrait procéder par « IOU » (I owe you). Plutôt que de régler par virement bancaire ou en billets, le gouvernement grec remettrait alors aux bénéficiaires des reconnaissances de dettes et s’engagerait à échanger ces « papiers » contre de vrais euros, ultérieurement. Ces « IOU » qui fonctionneraient comme des obligations garanties par le gouvernement, risquent d’être très impopulaires, les bénéficiaires préférant bien entendu recevoir des euros. Créer une monnaie, en dehors des délais techniques liés à sa création, risque de générer des pressions inflationnistes selon un schéma classique. La dévaluation favorise les exportations, mais renchérit les achats à l’étranger. A défaut d’un coup de pouce sur les salaires, le choc sur le pouvoir d’achat des ménages est net. Quant à la banque centrale, elle est tentée d’augmenter les taux d’intérêt pour éviter les sorties massives de capitaux. En outre, les dettes, publiques et privées, sont libellées en euros, leur conversion en monnaie locale risque d’en alourdir sensiblement le fardeau.

    6- Quelles conséquences politiques pour la Grèce ?

    Si la Grèce devait faire défaut à la fin du mois, ce serait avant tout un échec politique pour Alexis Tsipras qui n’aura pas su convaincre ses partenaires européens de l’exception grecque. Elu sur un programme anti-austérité, il avait promis à ses électeurs qu’il parviendrait à imposer une nouvelle ligne économique sans sortir de la zone euro. Il comptait sur la France et l’Italie pour mettre en place une politique moins « orthodoxe» que celle revendiquée par l’Allemagne d’Angela Merkel . Mais il n’a pas obtenu ces soutiens et a persisté dans une stratégie jusqu’au-boutiste à la recherche d’un accord politique avec l’Allemagne sans céder sur le concret des exigences de ses créanciers.

    AlexisTsipras n’a pas été en mesure non plus de proposer une alternative économique viable. Les mesures de lutte contre l’évasion fiscale, notamment, se font attendre. Une rupture des discussions avec l’ex-troïka et le défaut qui s’en suivrait auraient pour conséquence une nouvelle crise politique gravissime en Grèce avec à la clé de probables élections législatives ou un référendum pour trouver auprès du peuple grec les solutions que l’équipe au pouvoir n’aura pas sur trouver. Avec un risque, réel, de retrouver cette fois au pouvoir l’extrême droite et les nationalistes d’ « Aube dorée ».

    7- L’insoutenable dette grecque en question

    Un chiffre : la dette grecque représente 175  % du PIB national, soit 322 milliards d’euros. Cela fait de la patrie de Socrate l’un des pays les plus endettés du monde. Si ce taux doit être ramené autour de 157 % en 2016, ce niveau paraît insoutenable pour un pays dont la timide reprise est en passe d’être cassée (- 0,2 % de croissance au premier trimestre après +0,8  % en 2014). Surtout, Athènes va devoir rembourser 8,3 milliards d’euros au FMI et à la BCE entre le 30 juin et le 20 août. Or, la signature éventuelle d'un accord avec ses créanciers ne lui permettrait au final de ne déboucler qu'une nouvelle aide de 7,2 milliards d’euros de la part de la Troïka. La question de la dette grecque ne serait donc en rien réglée.

    La zone euro pourra-t-elle dans ces conditions faire l’économie d’une nouvelle renégociation ? Sans doute pas à moyen terme. Mais à court terme, la question d’un rééchelonnement, voir d’un effacement d’une partie de cette dette semble difficile à envisager. Le contexte politique ne s’y prête pas à quelques mois d’importantes élections générale en Espagne. Difficile aussi de faire aveu de faiblesse alors que se profilent d’importantes négociations avec la Grande Bretagne, qui brandit aussi la menace d’un Brexit.