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Grèce : « On a aussi crié un grand “non” aux médias ! »

Grèce international

Lien publiée le 7 juillet 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://rue89.nouvelobs.com/2015/07/06/grece-a-aussi-crie-grand-non-medias-260140

Dégoûtés des médias traditionnels, massivement pour le « oui », les partisans du « non » au référendum grec – et tout particulièrement les jeunes – ont cherché en ligne leurs infos sur « les coulisses du drame ».

(D’Athènes) Dans le quartier d’Exarchia à la population jeune et très à gauche, la télévision ne fait pas vraiment partie du décor. « Personne n’en a ici. Quel intérêt ? C’est de la pure propagande ! » témoigne Ariane, étudiante en architecture à l’université d’Athènes.

Les quelques émissions auxquelles elle a été confrontée chez ses parents la semaine dernière semblent l’avoir dégoûtée :

« Pas une fois ils n’ont donné la parole à un Grec qui soutenait le gouvernement. On se serait cru dans une dictature où les gens ne peuvent avoir qu’un avis. [Dimanche], on a aussi crié un grand “non” aux médias ! »

La jeune femme en profite pour nous montrer une interview très relayée sur Internet, mettant aux prises une journaliste star de la grande chaîne Skaï avec la présidente du Parlement, Zoe Konstantopoulou. Une vidéo d’une rare violence verbale, dans laquelle cette dernière accuse explicitement la journaliste d’être l’esclave de lobbies financiers...

Moins de caméras aux manifs du « non »

Et pour cause, les télévisions privées du pays, détenues par des oligarques hostiles à la gauche radicale, ont ouvertement manifesté leur soutien au camp du « oui », sans faire grand cas d’un quelconque traitement objectif de l’information.

Ainsi, lors des deux manifestations de la semaine dernière, ayant réuni dans la capitale une foule équivalente, Skaï TV a consacré 7,15 minutes au rassemblement du « oui » contre... zéro minute aux soutiens d’Alexis Tsipras.

Au total, sur les cinq principales chaînes privées, ce sont près de 40 minutes d’antenne dont ont bénéficié les tenants du « oui », contre à peine quatre minutes pour leurs opposants. Seule la ERT, le canal public rouvert par le gouvernement le 11 juin dernier, a offert à ses téléspectateurs une couverture neutre.

#GreekMediaPropaganda

Pour Ariane, « les prises de position des médias sont tellement caricaturales que ça en devient drôle ». Un point de vue partagé par bon nombre de jeunes qui se sont réfugiés sur le Net pour s’informer. Et discuter. Le mot d’ordre était clair : se moquer de la désinformation des « vieux médias ».

Le hashtag « GreekMediaPropaganda » sur Twitter et le Tumblr du même nomont connu un franc succès, recensant les « perles » des partisans du « oui ». En tête, les spots de pub catastrophistes des chaînes de TV, exposant le chaos dans lequel serait plongé le pays en cas de victoire du gouvernement.

Capture d’écran du Tumblr (GreekMediaPropaganda.tumblr.com)

Face à l’alarmisme assumé des médias, la Toile grecque a utilisé l’arme de l’humour, « pour relativiser » selon Ariane.

La procession du distributeur

On ne compte plus les photos virales ridiculisant la panique bancaire, à l’image de ces deux jeunes se coupant les cheveux devant un distributeur pour illustrer le « deposit haircut » (littéralement « saisie de l’épargne », mais « haircut » signifie aussi « coupe de cheveux ») que beaucoup de journaux brandissaient comme une menace imminente.

Ou encore ces Grecs venus retirer de l’argent avec des sacs poubelle, réplique ironique à certains éditorialistes accusant les citoyens de vider leurs comptes de manière irresponsable.

Sur Facebook également, à côté des annonces de rassemblement, se sont multipliés d’autres types d’événements, moins sérieux et destinés à tourner en dérision l’hystérie de la campagne du référendum. Comme cet « event » du 29 juin, suivi par plus de 12 000 personnes, invitant les Grecs à sauver les distributeurs en les remplissant avec des billets de Monopoly ou les étrennes données par les grands-parents. Ou encore, dans le même registre, cette procession du 15 août (très importante dans la religion orthodoxe) un peu particulière : la procession du distributeur...

Tsipras et Varoufakis aussi

Les jeunes Grecs ne sont pas les seuls à avoir utilisé le Web comme contre-pouvoir médiatique. Les dirigeants du pays eux-mêmes se sont saisis de l’outil numérique pour raconter en direct les négociations avec les créanciers.

Sur Twitter, c’est donc à un récit au cœur des événements, en anglais et en grec, que se sont livrés Alexis Tsipras et son ex-ministre des Finances Yanis Varoufakis (qui a plus de 500 000 abonnés) pour « apporter leurs visions des débats et une autre voix que celle des dirigeants européens ».

Dans cette vaste partie de poker que sont ces discussions sur le sort de la Grèce, pas question de perdre la bataille de l’information. Le camp Syriza a bien compris que l’électorat jeune est capital. Il fallait donc aller le chercher là où il se trouve, et c’est ce qu’a cherché à faire Yanis Varoufakis en alimentant abondamment son blog, très suivi en Grèce.

« Le seul remède à la propagande »...

C’est là qu’il a annoncé ce lundi 6 juillet sa démission du gouvernement, avant de faire face aux nuées de caméras de télévision qui l’attendaient devant son ministère. C’est là aussi qu’il a expliqué « en six points » pourquoi il fallait voter « non » au référendum. Ariane, l’étudiante en architecture le consultait régulièrement :

« On a accès à toutes les coulisses du drame, c’est passionnant et ça nous permet de comprendre ce qui se trame vraiment et comment nous sommes traités à Bruxelles. »

Capture d’écran du blog (YanisVaroufakis.eu)

La bête noire des créanciers y retranscrivait en effet toutes ses interventionslors des réunions européennes. Avec systématiquement le même préambule : 

« Le seul remède à la propagande est la transparence. »