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A propos de la scission du CCI/POI

Lien publiée le 1 août 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://blogs.mediapart.fr/blog/vincent-presumey/310715/propos-de-la-scission-du-ccipoi

La scission du CCI/POI est avérée. Formellement, la majorité de la DN (Direction Nationale) du CCI (Courant Communiste Internationaliste, qui dirige le POI, Parti Ouvrier Indépendant) a refusé à sa minorité, représentée notamment par Daniel Gluckstein, le droit de constituer une tendance tout de suite, prétendant qu’une tendance n’a le droit d’exister que dans les périodes de préparation des congrès et que ceci renvoyait donc l’exercice du dit droit à cet automne, le congrès ayant été opportunément reporté de quelques mois. Or, la minorité, jugeant non statutaire et non légitime cette décision, a quand même organisé sa tendance, recueillant environ 600 signatures. Elle a donc été « suspendue » pour cela, et pour que la suspension soit effective les serrures de certains locaux, dont le local central du POI à Paris, ancien local de l’OCI, ont été changées. A propos des résultats du référendum grec, deux communiqués du POI ont été publiés, l’un émanant d’un organisme ad hoc créé lors d’une réunion de son bureau national convoquée fin juin en l’absence de ses secrétaires nationaux, l’autre signée de ces derniers (Daniel Gluckstein, Gérard Schivardi, Jean Markun). A partir de début juillet la signature de Daniel Gluckstein, qui faisait jusque là les éditoriaux, disparaît dans Informations Ouvrières, organe du POI (fondé par Pierre Lambert dans les années 1950) bien que son nom apparaisse toujours comme directeur de publication. Il a été remplacé par des articles du principal animateur de la majorité de la DN, Marc Gauquelin, du rédacteur en chef Lucien Gauthier ou d’une membre du bureau national du POI, ancienne dirigeante du syndicat FO de l’enseignement secondaire, Marie-Edmonde Brunet. Le 18 juillet, apparaît un nouveau journal, La Tribune des Travailleurs, sous l’égide des trois secrétaires nationaux, disant s’inscrire dans la continuité du « POI des origines », journal dont le style et la présentation en font un clone d’Informations Ouvrières – nous parlerons plus loin de son contenu.


Trois circonstances font que cette scission de fait reste très discrète. Les protagonistes dirigeants se tiennent les uns les autres par la propriété des locaux et biens de leur parti. La minorité, fortement organisée, tente de se faire entendre dans le cadre des organisations internationales correspondant à la structure française CCI/POI, c’est-à-dire une « IV° Internationale », dont elle demande dans un texte du 6 juillet une réunion extraordinaire de son Conseil général, et « l’Entente internationale des Travailleurs et des Peuples » - pour autant que l’on puisse en juger, il semble que pour l’heure la direction de la section algérienne se rallie avec la majorité. Une réunion européenne de la dite « IV° Internationale » est prévue à Paris fin août. Mais surtout, les deux fractions en lutte respectent, pour l’instant, une consigne de discrétion mutuelle maxima.


Ce qui donne, notons-le au passage, des exercices de langue de bois assez remarquables dans Informations Ouvrières et dans la Tribune des Travailleurs. Pourquoi cette dernière paraît-elle ? Parce que, écrivent les trois secrétaires nationaux, il faut « Un journal qui fournit des informations ouvrières de manière à permettre aux salariés (…) de disposer d’outils qui leur permettent de comprendre la situation pour pouvoir agir. » Dans Informations Ouvrières du 23 juillet Marc Gauquelin défend son orientation par des phrases immenses telles que celle-ci :
« Toute la politique de rupture avec le capital financier et son instrument que représente l’Union européenne – une rupture qui est une question de vie ou de mort pour la classe ouvrière – ne se concentre-t-elle pas (si les leçons de Grèce peuvent nous servir) dans l’aide à la « fabrication » du maillon par lequel la classe ouvrière pourra saisir entre ses mains toute la chaîne des mesures qu’exigera le déploiement jusqu’à son terme du mouvement qui la porte à affronter le gouvernement et sa feuille de route européenne ? » (ouf ! )


Phrase alambiquée qui tente en fait, sans le dire, de répondre à ce passage sibyllin et presque aussi alambiqué, de la fin de l’édito de D. Gluckstein dans son journal :
« Les militants du POI n’ont jamais cédé aux pressions visant à reléguer à l’arrière-plan le combat pour la rupture avec l’Union Européenne. Car c’est là l’expression concentrée de la nécessité de rompre avec le système capitaliste et de préserver l’indépendance de classe des organisations ouvrières. Avec une détermination renforcée par les évènements en cours, ils agiront dans la lutte des classes pour aider à défaire le gouvernement Hollande-Valls étrangleur des travailleurs et des peuples, en France comme en Grèce. »


Marc Gauquelin épargnait Tsipras dans Informations Ouvrières du 16 juillet, signalant seulement que les créanciers l’avaient fait capituler « un pistolet sur la tempe ». La Tribune des Travailleurs, le surlendemain, titre : « Le cours pris par le gouvernement Tsipras ne peut se concilier avec la volonté du peuple grec. » et, après avoir dénoncé le soutien du PS français au plan de super austérité en Grèce, ajoute en ce qui concerne PCF et PG que « Comme Syriza en Grèce, les dirigeants du Front de Gauche, du Parti communiste français (PCF) ou du Parti de gauche (PG) ne sont pas pour la rupture avec l’Union européenne. »

Dans Informations Ouvrière du 30 juillet, l’édito annonce en un raccourci, pour ne pas être en reste, que la rénovation de la zone euro voulue par Tsipras s’est avérée « Impossible. Une leçon pour Pierre Laurent, Jean-Luc Mélenchon et autres « frondeurs »


Sur une page de la Tribune des Travailleurs, Jean-Jacques Marie, historien notable de l’organisation (et seul dans ce cas) dont il est membre depuis 55 ans, publie un article qui, incidemment, fait savoir au « monde entier » quel est son camp dans la scission. Cet article, à l’occasion de la réédition des Leçons d’Octobre de Léon Trotsky (aux Bons caractères, maison d’édition liée à Lutte Ouvrière, ce que l’article ne signale pas), dénonce dans son titre l’affirmation stalinienne (et zinoviéviste) contre l’Opposition de gauche en 1922-1923 : « Le parti ne veut pas de discussion », expliquant comment le refus de la liberté de discussion et la dénonciation des critiques ouvraient la voie au « socialisme dans un seul pays », c’est-à-dire au reniement total. L’auteur raconte que ses adversaires faisaient remonter les divergences aux temps antérieurs à la mort de Lénine, accusant Trotsky d’avoir toujours fourbi ses armes, et refusant ses tentatives d’apaisement.
On ne peut que sourire, voire rigoler franchement, à cette tentative, entre les lignes, de suggérer un parallèle entre Lénine et Lambert, Trotsky et Seldjouk-Gluckstein, et donc entre Staline, Boukharine, Zinoviev et Kamenev et Lacaze, Dan, Ulysse (et si on jouait à qui est Staline ? …) … Le vrai parallèle, si parallèle il doit y avoir absolument (mais il est vrai que l’histoire répète ses tragédies dans d’infinis bégaiements ! ), tous ceux qui ont construit cette organisation et en ont été chassés avant qu’elle soit mise en hibernation du début des années 1990 à aujourd’hui, seraient tentés de le faire, à la rigueur, entre Seldjouk … et Zinoviev, et pas au moment des Leçons d’Octobre mais un peu plus tard, quand il se rebiffe contre les conséquences du système auquel, en ayant poussé le plus de cris et en ayant été le plus menaçant, il avait jusque là prêté la main, obligeant Trotsky déjà en quasi exil intérieur à expliquer à ses partisans qu’il fallait mettre un mouchoir sur leur bien compréhensible rancune et tendre la main à Zinoviev et aux zinoviévistes. 
Ceci dit, ne mégotons pas : qu’en 2015 Jean-Jacques Marie, après avoir tout cautionné pendant des décennies, au point de pondre trois versions contradictoires, selon les besoins de la direction, mais toutes autant truffées d’erreurs, d’un digest de l’histoire du trotskysme, prenne ouvertement la défense de la liberté de discussion dans le parti communiste soviétique en 1924 dans les pages d’un journal issu sans le dire d’une scission de facto, c’est peut-être une hirondelle annonçant le printemps !


Tout est entre les lignes, rien ne doit filtrer, mais c’est impossible, et cela, c’est ce que nous dit « Monique ». « Monique » est une militante du POI de la Vienne dont les responsables des 3 comités se sont réunis, nous explique Informations Ouvrières du 30 juillet, pour « revivifier le POI ». Elle nous dit : « C’est par ce bout là qu’il faut prendre les choses. » Quel bout ? Si l’on lit les lignes précédentes, un autre intervenant explique qu’il faut « chercher à ce que des militants introduisent eux-mêmes les débats. » Excellente idée, comment se fait-il qu’on n’y ait pas pensé avant ? Alors Monique embraye :  « C’est comme ça qu’on réglera ces problèmes qui se trouvent posés avec force dans le CCI, et qui commencent maintenant à avoir des conséquences dans le POI. Je dois vous dire que je suis inquiète de voir sur le site de Mediapart que « l’explosion du POI est en cours » … La déclaration des trois secrétaires nationaux du POI sur la Grèce, quelle légitimité ? Outre des formules discutables [lesquelles ? on ne le saura pas], elle vient en concurrence directe avec le communiqué publié par le secrétariat permanent sur mandat du bureau national. Après le succès du 6 juin, qui montre que c’est par là qu’on peut relancer le POI, je ne m’explique pas cette attitude. Quant à l’absence des coordonnées du POI, c’est comme si on voulait que personne ne puisse contacter le siège du POI. C’est pour le moins curieux. »
Nous sommes bien obligés de nous attarder un peu aux côtés de « Monique » de la Vienne, car son intervention entre guillemets est, à ce jour et à cette heure, le seul indice qui ait jamais été publié explicitement dans Informations Ouvrières sur la crise en train de se produire. Personne n’explique à « Monique » que le local dont l’adresse n’est paraît-il pas publiée sur la déclaration est le local parisien dont les serrures ont été changées juste avant cette déclaration, interdisant à ses auteurs d’y pénétrer, mais « Christophe » lui demande de préciser les problèmes politiques auxquels elle fait allusion. 
« Monique » alors explique qu’elle récuse « … ce clivage absurde qui opposerait, d’un côté, les syndicalistes, qui sont bien sûr en première ligne dans la lutte des classes, en particulier dans le combat pour l’unité, et de l’autre, toutes les autres « couches » sociales : la « ménagère de plus de 50 ans », les retraités, les chômeurs, etc. » Nous avons là un écho déformé de la « discussion » en train d’avorter dans le CCI, la minorité ayant amorcé une critique de l’alignement de la majorité, non pas tant sur « les syndicalistes » que sur les appareils syndicaux. Car tous les « syndicalistes » ne sont pas en première ligne dans les luttes quotidiennes : beaucoup le sont, d’autres restent dans leurs permanences aux heures de bureaux, et quelques uns côtoient les hautes sphères. Quand on veut faire un « appareil politique de la lutte », ce sont là des différences auxquelles on doit logiquement se confronter, non ? « Monique » continue en expliquant qu’il faut en revenir à l’ancienne charte du PT, l’organisation ayant précédé le POI (proclamé en 2008 peu après la campagne Schivardi aux présidentielles et peu avant la mort de Pierre Lambert).


« Monique », c’est en somme la réponse à Jean-Jacques Marie, aussi étonnant que cela puisse sembler. « Monique » en effet c’est « la discussion » comme il faut, celle que l’on n’a pas besoin d’interdire : elle déplore que certains posent des questions qui fâchent, se prononce pour en finir avec eux et condamne les fuites dans le monde extérieur. Il faut faire parler les militants, c’est la démocratie, mais pour qu’ils disent la même chose. En tirant sur l’ancien quartier général (les 3 secrétaires nationaux), on montre qu’on est capable de crier, surtout quand c’est dans le sens voulu par la direction.


Nous devons, les gens sérieux doivent, les militants révolutionnaires doivent, se poser une question : à quoi rime cette volonté de discrétion ? Elle représente par elle-même un très grave problème politique. Les questions doivent être mises sur la table. Toute licence pour la libre discussion ! 
Le parti bolchevik avant 1920-1921 ne fonctionnait pas comme ça, et pas non plus l’ensemble des organisations fondatrices du mouvement ouvrier -social-démocratie allemande, vieille CGT, Association Internationale des Travailleurs … Lisez Un pas en avant, deux pas en arrière, de Lénine : c’est, au risque de l’indigestion, l’étalage public de divergences portant sur la forme autant ou plus que sur le contenu, et qui, en 1902, étaient moins évidentes à cerner que ce qui divise aujourd’hui les deux fractions du CCI/POI. Mais Lénine mettait tout sur la table, le principiel, le fondamental, comme le personnel et l’accessoire (il ne taisait que ce qui touchait à la sécurité des militants : dans la Russie des tsars cela ne l’empêchait pas de faire des listes changeantes de tendances, de fractions, de courants, réels ou supposés, et cela sans cesse ! ). Du coup, il y avait moins de rumeurs, ces rumeurs que les responsables invoquent pour dire aux militants de se taire …


Cela étant dit, et il fallait commencer par le dire car c’est essentiel, il est à présent tout à fait possible de cerner ce qui est en cause dans la crise du CCI/POI. Au risque de décevoir les amateurs de récits épicés sur « le lambertisme », il est important de comprendre que ce qui est à la racine de cette crise, ce sont les questions concrètes vitales pour le monde du travail. Ce n’est pas une tempête dans un landerneau qui ne regarderait que ses adeptes, et c’est aussi pour cela qu’il est erroné et coupable de leur part de tenter, vainement, de préserver le secret. Cette affaire intéresse la classe ouvrière.
On ne reviendra pas ici – il faudra le faire ou le refaire par ailleurs- sur l’histoire de ce courant, comment il en est arrivé là, quelle questions ceci pose. Notons simplement que les prodromes de sa crise actuelle remontent à 2007-2008 (campagne Schivardi, le « candidat des maires » qui ne combattait pas la V° République mais défendait « la France » contre le traité de Maastricht à abroger, décès de Pierre Lambert, transsubstantiation du PT en POI). En 2009 le POI paraissait percer, dans la classe ouvrière réelle, par une campagne sur l’interdiction des licenciements, mais celle-ci fut de fait interrompue : difficile en effet de faire campagne sur un tel thème en ne s’adressant qu’aux partis et pas aux confédérations syndicales, et en ne discutant pas de la nécessité d’affronter le pouvoir gouvernemental central en France, c’est-à-dire à cette date, Sarkozy. Il est probable que cet avortement fut imposé par l’exigence que les campagnes politiques du POI ne portent pas atteinte à la paix sociale permettant aux directions syndicales, celle de FO avant tout, de négocier ou faire semblant. En 2012 le POI ne présentait pas de candidat et condamnait le « caractère antidémocratique des institutions », contemplant en spectateur le mouvement réel qui parvenait enfin à chasser Sarkozy. Par la suite, Gérard Schivardi, qui n’est effectivement pas au CCI et pas pleinement « sous contrôle », faisait part de son regret de ne pas avoir été candidat, et de son souhait de l’être en 2017, pour faire savoir que les meilleures idées de Marine Le Pen sont celles qu’elle lui a piquées …


Les symptômes existaient, donc, qui montraient qu’une organisation gardant la révolution et la lutte pour en finir avec la V° République pour les dimanches et jours de fêtes, et faisant de la lutte contre l’Union européenne un alibi permanent, dans une situation où même un bureaucrate syndical qui entend rester « dans ses bottes » en ne s’intégrant pas à tout le dispositif de l’Etat ne peut pas tenir à terme, ne vivait que d’un équilibre précaire. De fait, le POI passait progressivement sous le boisseau, pour le plus grand dam de G. Schivardi et de D. Glucskstein, pas forcément pour les mêmes raisons.
Certes, la défense et illustration des acquis sociaux et démocratiques au jour le jour : droit du travail, CDI, sécurité sociale, retraites par répartition, services publics, école publique laïque, conventions collectives, libertés des communes, était la force de cette organisation, probablement ce qui soudait ses militants. Mais cette défense et illustration atteignait vite ses limites devant les contre-réformes continuelles, celles-là mêmes qui appellent une réaction sociale à la fois contre les pouvoirs nationaux en place et les institutions européennes qui n’en sont que l’émanation, réaction que jamais, jamais, les directions confédérales ne veulent voir se développer au point de se généraliser, de se centraliser et de poser la question du pouvoir, ouvrant la voie à la révolution. Autrement dit, la défense des acquis finit par ne plus rien défendre si elle ne va pas de l’avant.

C’est cette contradiction qui a atteint un point limite cette année 2015. 
Nous avons la réalité d’une vague de grèves et de luttes invisibles qui traverse tout le pays et qui, à travers quelques sphères plus émergentes comme la résistance des professeurs à la réforme du collège, va chercher le débouché dans l’affrontement central, un peu plus tôt ou un peu plus tard : la question politique clef, justement, est que cela se produise avant 2017. 
L’orientation du CCI/POI à ce jour n’envisage pas cette centralisation et cette généralisation, se contentant de poser la question : comment mettre un coup d’arrêt à la politique du gouvernement ? 
Nous avons ensuite la crise de la CGT, qui atteint un seuil qualitatif avec la chute de Lepaon, et, à la base, une sorte de révolte perlée, mais généralisée, des militants dans les boites, contre le « dialogue social », la loi Macron, le relèvement des seuils de représentativité qu’avait cautionné Lepaon, et aucune confiance dans la direction, de même nature, qui a pris sa succession. 
Or le CCI/POI a apporté un soutien appuyé à Martinez, après avoir beaucoup hésité sur la question Lepaon, considérant que les révélations du Canard Enchaîné, dont la source était confédérale, visaient à « affaiblir l’indépendance des organisations syndicales » et qu’on défendrait, en somme, cette « indépendance », en épargnant leurs dirigeants, alors que c’est tout le contraire qui est vrai. Cela au point, contrairement d’ailleurs aux bobards diffusés récemment par le même volatile, de combattre l’insurrection démocratique et militante qui a renversé la direction sortante au congrès fédéral Santé. Protéger systématiquement Mailly, c’était déjà beaucoup, mais s’y ajoutait Martinez. 
Nous avons eu, enfin, les évènements concernant la Grèce, qui amorcent un tournant général en Europe : l’éclatement public de la crise du CCI/POI leur correspond.

Les questions posées par la tendance « Pour le retour à la construction du parti » sont donc les suivantes :  - il faut avoir pour objectif de défaire, et pas seulement de stopper, le gouvernement ; - il faut donc « poser la question du pouvoir » dans les termes suivants : rupture avec la V° République et l’Union européenne, les deux, et les deux concrètement ; - et pour tout cela « poser la question du parti ». Ici, survient ce qui est pour l’heure le boulet de ce courant : c’est avec le POI, qui aurait été de fait mis sous le boisseau, qu’il faut poser cette question, comme s’il était l’instrument déjà construit. Ceci dit, l’instrumentalisation de la légitimité « POI » par les deux fractions adverses ne peut avoir qu’un temps. 
La fraction majoritaire de la direction du CCI/POI défend, et entend mettre en œuvre de manière définitive avant le prochain congrès du CCI, une orientation dite de « l’appareil politique de la lutte » consistant à préparer un « coup d’arrêt » à la politique du gouvernement sous la forme d’une répétition amplifiée de la grève CGT-FO-FSU-Solidaires du 9 avril dernier, et en respectant les directions syndicales, en tout cas celle de FO. Le problème est que le 9 avril n’a pas eu de suite et que la loi Macron, par exemple, a été votée, sans riposte des dites confédérations.
Ce problème est politique et il est abordé par le journal Tribune des Travailleurs, parfois à mots couverts comme lorsque Jean Markun y dénonce l’alignement des confédérations, FO explicitement comprise, sur la CES à propos du référendum en Grèce. 
En résumé, le courant minoritaire (en apparence, car il risque dans ces circonstances de vite s’avérer le plus militant) pose les questions du retour à une politique révolutionnaire, avec beaucoup de contradictions dont les principales sont son attachement au cadre fictif du POI, et au-delà la probable volonté d’incarner une histoire continue où l’on voudrait avoir eu toujours raison, le fil de Lambert ayant été repris. Or, cette histoire est mythique, et la continuité programmatique ne s’identifie pas aux mythes.


Soit ce courant va s’ancrer dans la lutte des classes réelles en contribuant à la préparation de l’affrontement social général, cet affrontement que son journal annonce en titrant par exemple, pour l’Education nationale, Rentrée scolaire : vers la confrontation. Auquel cas ils pourront faire en sorte, et il faudra les y aider, à ce que « le contenu réel de la secte » soit « transféré comme élément enrichissant dans le mouvement général » (Marx à von Schweitzer, 13 octobre 1868). Soit il tiendra à tout prix à expliquer au monde que l’héritier légitime de Lambert, qui n’avait jamais fauté, c’est lui, le défenseur d’une IV° Internationale inexistante, et il passera par pertes et profits. Rien n’est écrit par avance. Mais bien entendu, comme Zinoviev l’avait admis en 1925 ce qui ne l’empêcha d’ailleurs point de rechuter, pour s’inscrire dans l’histoire réelle, ou s’y réinscrire, on ne saurait échapper aux cruels bilans …


Ceci vaut aussi pour l’autre courant. Pour lui non plus la pure et simple continuité n’est pas possible. Ce n’est pas l’essence métaphysique éternelle du « lambertisme » qui se déchire, c’est la lutte des classes qui impose ses règles. Construire un appareil politique de la lutte qui ne touche pas aux grands chefs confédéraux et s’en tienne à vouloir stopper le gouvernement sans le défaire ? Impossible. Oui, il faut l’unité CGT-FO-FSU-Solidaires sur la base des revendications. Non, cette unité ne règlera aucun problème, elle aidera à les poser.

Le POI n’est et n’a jamais été ce qu’il prétend être. Il n’y a pas de parti ou d’embryon du parti, il y a des milliers de combattants et des courants dispersés. Il est temps de regrouper, sans exclusives, et sans sujets tabous ni sur le présent, ni sur le passé, pour préparer l’affrontement, avant 2017, afin de reconstituer une perspective politique, rompant avec le capital, avec la V° République, avec l’Union européenne, celle de la vraie démocratie : la révolution prolétarienne.
VP, le 30/07/15