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    "Nos intelligences collectives"

    Lien publiée le 8 octobre 2015

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    Tribune parue dans le journal L'Humanité du 7 octobre

    Nos intelligences collectives

    Il est « vendeur », pour les intellectuels à la mode, de ressasser leur obsession de l’identité, leurs peurs de l’étranger, leurs fabriques nostalgiques - et mythologiques - du passé. Tous taisent en réalité le quotidien de nos existences : les chantages à la concurrence, l’islamophobie et le racisme rampants, la loi sacrée du marché dont la norme envahit nos vies.

    Mais déplorer le « silence des intellectuels de gauche » suppose trop souvent  d’adhérer aux visions traditionnelles de « l’intellectuel » : la figure de « l’intellectuel phare », « avant-garde » ou « savant pur » offrant, par grâce, sa science aux ignorants. A la représentation de l’intellectuel auto-proclamé (ou proclamé par les médias), de loin nous préférons celle que suggère Jacques Rancière : « quiconque, en un point quelconque de la société, sort de son rôle habituel d’exécutant du système social pour affirmer qu’il a en plus quelque chose à dire sur la machine qu’il fait fonctionner, sur la machine sociale en général et sur la capacité de n’importe qui à en parler » est un intellectuel. Et ces intellectuels ne se taisent pas. Leurs paroles ne cessent d’être actives, vives, résistantes ; elles arment les associations, courent les quartiers, les ateliers, les bureaux, les écoles ; elles fabriquent les engagements, inventent, font du bruit. Elles tissent ces projets innombrables qui refusent la passivité et le fait accompli. Ces paroles, cette intellectualité, ces intelligences collectives, sont loin d’être invisibles, si on y est attentif au lieu de se focaliser sur qui parle fort et porte beau. Mais elles sont dispersées.

    L’association Savoirs en action part de ce constat. Chercheur-e-s et enseignant-e-s, avec la solidité de leurs métiers, produisent des enquêtes historiques, sociologiques, économiques, des recherches scientifiques, de la philosophie, des romans. Leurs travaux sont essentiels mais mal connus. Les verser aux discussions collectives est essentiel ; mais pas comme des leçons. Car chacune, chacun, peut apprendre aux chercheur-e-s en même temps qu’il ou elle apprend de leur travail. Chacune, chacun, possède des savoir-faire, des connaissances nées de son histoire, de ses luttes, de ses expériences. Personne n’a le monopole de la connaissance, de la distance critique, de formes de lucidité, ou d’une certaine compréhension des phénomènes sociaux. Chacune, chacun, d’ores et déjà, en sait beaucoup sur les rapports de force, les difficultés, les souffrances, les solidarités, les bonheurs, les colères, les galères qui font le monde social. Nous voulons donc mutualiser ces connaissances d’espèces différentes, pour les faire ressources et forces.

    La forme choisie, les ateliers nomades, entend casser la distribution fixe des places. Ici, pas de monopole de la parole : elle circule sans chaire ni tribune, sans brevet de légitimité. Cette perspective critique est évidemment politique. Il est tellement urgent de lutter contre l’isolement et le désarroi qui paralysent. Partout, l’évaluation, les concurrences, la rentabilité, font des dégâts. Discuter des conditions de travail et de non-travail (au sens rémunéré du terme) pour celles et ceux qui en sont privés, aide à résister. Savoirs en action sera présente dans les luttes, en proposant des discussions, des pratiques artistiques, ou en informant sur les mobilisations. Car les grèves et les mouvements sociaux sont des moments de subversion, de prise de risque, de joie, de créativité.

    Peu importe s’il s’agit pour certain-e-s de gros mots, nous revendiquons joyeusement la « radicalité », le rejet des fausses neutralités, la critique du capitalisme, le refus de la politesse envers ce qui nous agresse. La rencontre entre recherches, enseignements et engagements militants, nous paraît décisive - et même explosive.

    Ludivine Bantigny (historienne), Déborah Cohen (historienne), Laurence De Cock (historienne), Cécile Gintrac (géographe), Willy Pelletier (sociologue), Irène Pereira (sociologue) animent la coordination de Savoirs en action.

    Pour tout contact : savoirsenaction@gmail.com

    Prochain atelier : mercredi 28 octobre à 18H30, Bourse du travail République, Salle Varlin, Paris