[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Newsletter

Ailleurs sur le Web [RSS]

Lire plus...

Twitter

En Algérie, la réforme de la Constitution adoptée

Algérie international

Lien publiée le 7 février 2016

Tweeter Facebook

Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Le Monde) Elle avait été annoncée en avril 2011, dans la foulée des « printemps arabes ». Après cinq années de tergiversations, la réforme de la Constitution algérienne a été votée le 7 février à une large majorité – 2 votes contre et 16 abstentions sur 499 parlementaires – par l’Assemblée nationale et le Sénat, réunis en Congrès à Alger. Un texte dénoncé par les opposants comme une nouvelle réforme purement formelle d’un régime à bout de souffle.

La révision constitutionnelle avait été promise par le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, comme un gage de démocratisation. « Ce n’était pas une promesse mais une réaction après ce qui s’était passé en Tunisie [la chute du président Ben Ali, le 14 janvier 2011] », tient à rectifier Abdelaziz Rahabi, ancien ministre et membre de l’Instance de coordination et de suivi de l’opposition (ICSO).

« Je mets quiconque au défi de memontrer que ce texte est une avancée démocratique », affirme Abdelaziz Rahabi, ancien ministre et membre de l’Instance de coordination et de suivi de l’opposition

A l’époque, plusieurs manifestations avaient eu lieu en Algérie. Pour calmer les esprits, le pouvoir avait largement distribué des aides financières et annoncé plusieurs mesures de libéralisation politique, dont l’ouverture de consultations en vue de réformer la Constitution. « Puis Bouteflika a tout arrêté, puisqu’il n’était plus sous pression de la rue », souligne M. Rahabi. Cinq ans plus tard, le projet a finalement été dévoilé, début janvier, par le directeur de cabinet du président, Ahmed Ouyahia.

Sur le papier, tout y est : référence à des élections libres, à la séparation des pouvoirs, à la lutte contre la corruption, à une économie nationale forte et diversifiée, au rôle de la jeunesse. Le texte se veut un modèle de démocratie. « L’Algérie, qui amorce un tournant historique, est au rendez-vous avec une ère nouvelle et un renouveau républicain fort », a expliqué le premier ministre, Abdelmalek Sellal, ajoutant : « La révision de la Constitution se propose d’élargir les droits et libertés du citoyen, ancrer la démocratie pluraliste, conforter les fondements de l’Etat de droit etconsolider l’indépendance de la justice dans notre pays. »

Loin de faire l’unanimité, le projet de réforme a suscité de nombreuses critiques. Les plus vives visent l’article 51, consacré aux conditions d’accès à la haute fonction publique, qui déclare que « la nationalité algérienne exclusive est requise pour l’accès aux hautes responsabilités de l’Etat et aux fonctions politiques ». Dans un pays qui compte une très importante diaspora – plusieurs millions de personnes, notamment en France –, la mesure a provoqué un tollé. Des tribunes, des pétitions demandant son retrait se sont multipliées depuis plusieurs semaines.

« Pas d’ouverture réelle »

Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, à Alger, en avril 2014.

Mais les oppositions au projet de réforme constitutionnelle vont plus loin que l’article 51. « Je mets quiconque au défi de me montrer que ce texte est une avancée démocratique », souligne M. Rahabi, pour qui le texte ne fait, par de nombreux aspects, que revenir à celui de 1996. La mesure la plus emblématique du projet actuel est la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels. Un garde-fou qui existait dans la précédente Constitution, mais que le pouvoir avait fait sauter en 2008, permettant à l’actuel chef de l’Etat de se représenter (et d’être élu) pour un troisième mandat en 2009, puis un quatrième en 2014. Interrogé sur le sujet, le chef de cabinet de M. Bouteflika avait expliqué que, en 2008, le président n’avait fait que répondre à un appel du peuple algérien.

Autre nouveauté mise en avant : la décision d’élever le tamazight, la langue berbère, au rang de langue officielle. Une revendication ancienne. « Elle était déjà langue nationale depuis 2002 », relativise Abdelaziz Rahabi, pour qui « cette réforme de la Constitution est une opération de marketing politique, tout comme l’a été celle du Département du renseignement et de la sécurité (DRS) ».

« On parle de “renouveau républicain”, le vernis y est, mais il n’y a pas d’ouverture réelle », selon Adlène Meddi, rédacteur en chef d’« El Watan week-end »

Il y a dix jours, la presse algérienne annonçait que le puissant service de renseignement avait été dissous, remplacé par trois directions distinctes (sécurité intérieure, sécurité extérieure et direction technique), placées sous l’autorité de la présidence de la République. Une « révolution » apparente dans un pays où le DRS était devenu, à la faveur de la lutte antiterroriste de la décennie 1990, un Etat dans l’Etat.

« Il y a eu un changement de noms, les tenues militaires ont été rendues, mais les structures restent très puissantes. Les services sont le noyau de l’armée. De plus, sans police politique, on ne peut pas tenir le pays », souligne Adlène Meddi, rédacteur en chef de l’hebdomadaire El Watan week-end. « Quant à la réforme de la Constitution, on peut, sur le papier, donner des garanties au Parlement et à l’opposition, mais si une police politique demeure, s’il n’est pas possible de manifester, si créer un parti reste un parcours du combattant, s’il n’y a pas de vie politique réelle, cela ne sert à rien. »

Surtout, poursuit le journaliste, à l’image de nombreux observateurs, « pourquoi Bouteflika n’a-t-il pas fait ces réformes avant ? Pourquoi attendre cette fin de règne ? Il est en train de mettre en place le système qu’il veut laisser à son départ. On parle de renouveau républicain, le vernis y est, mais il n’y a pas d’ouverture réelle ».