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    A Athènes, une armée d'experts étrangers reconstruisent l'Etat grec

    Lien publiée le 19 mars 2012

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    (Les Echos) Beaucoup sont convaincus, en Grèce, que la pression du FMI et des experts européens n'a pas que des inconvénients : elle contraint la classe politique et l'administration aux réformes auxquelles elles résistent depuis trente ans.

    Les dirigeants allemands rêvaient d'une stricte « mise sous tutelle » de la Grèce et de ses comptes publics. Cette humiliation-là leur a été épargnée. La solution finalement retenue est plus élégante et probablement plus efficace : ses voisins européens, la Commission de Bruxelles, le FMI et la BCE ont mis à la disposition du gouvernement grec une armée de hauts fonctionnaires experts en collecte fiscale, politique budgétaire, réforme administrative, sécurité sociale, politique foncière. Objectif : l'aider à refonder entièrement un Etat devenu avec les années pléthorique, inefficace et corrompu ; accessoirement, les aider à ranger au rayon des antiquités une culture du conservatisme qui verrouille la machine économique.

    L'Allemand Horst Reichenbach, président de la « task force » qui coordonne cette assistance technique entre Athènes et Bruxelles, reconnaît que la tâche est immense. Présent dans la capitale grecque la semaine dernière, il s'est dit « bien accepté désormais » en dépit de sa nationalité... même si son garde du corps le suit de près. « Les Grecs ont bien compris que la présence régulière des experts européens dans les administrations est moins une ingérence étrangère que le moyen le plus sûr de faire bouger les fonctionnaires et le personnel politique », explique un journaliste financier. Ces derniers ont été les principaux obstacles au changement ces dernières années : « Notre classe politique est dominée par le clientélisme et elle a jugé trop coûteux de mettre en place les réformes nécessaires », explique Dimitris Daskalopoulos, le patron de la fédération des entreprises, la SEV, qui accable la classe politique de son pays : « Pourquoi aurait-elle été intéressée par notre sort ? L'Etat était là et distribuait de l'argent. » Si des réformes ont été engagées dès le printemps 2010 sous la pression de la troïka des créanciers de la Grèce, « la résistance de l'administration, la résistance du pays à l'impôt et une culture politique de l'affrontement ont freiné le processus », confirme un responsable local de la troïka. D'où le sentiment à Berlin et à Paris que les réformes n'allaient pas assez vite.

    Le FMI, de son côté, a pris conscience de la « spécificité » de la Grèce, « collection d'intérêts spéciaux » qui ne sont reliés par aucun « contrat social » : « Nous avons peu à peu compris que les problèmes de ce pays étaient très profonds et qu'il faudrait plus de temps pour les régler que ce que nous avions pensé au départ », explique ce responsable de la troïka. Le FMI a d'ailleurs adapté en conséquence son deuxième prêt (28 milliards d'euros) en allongeant sa durée. Aujourd'hui qu'elle a quitté l'oeil du cyclone grâce à la réduction de 100 milliards d'euros de sa dette, la Grèce est face à son destin. L'enjeu du bouleversement à venir est très clair : « Nous devons passer d'un modèle de consommation financé par la dette à un modèle de production financé par l'investissement », explique un économiste grec. Une révolution au pays de l'immobilisme.

    La tâche est digne des travaux d'Hercule, et, pour une fois, l'expression n'est pas qu'une image. Dans le désordre, le pays va devoir restaurer sa compétitivité en réduisant le train de vie de l'Etat et en privatisant ses participations dans les entreprises. Il va devoir aussi faire sauter les obstacles administratifs au bon fonctionnement de l'économie, réformer son système judiciaire, lent et corrompu. Il faut encore créer un nouveau système fiscal qui rééquilibre le fardeau sur l'ensemble des agents économiques. « Actuellement, trop de sacrifices sont demandés aux salariés et aux retraités. Ils sont les seuls à payer des impôts », explique Horst Reichenbach. Les autres, professions libérales, commerçants, n'en paient pas. Les politiciens de droite comme de gauche, qui ont mené le pays à la banqueroute, semblent découvrir le problème : « Dans un système où un riche contribuable peut corrompre le fonctionnaire du bureau local de l'administration, il ne suffit pas de relever le taux de l'impôt pour obtenir des recettes supplémentaires, il faut modifier l'ensemble du système fiscal et cela prend du temps », tente ainsi de se justifier l'ancien Premier ministre Georges Papandréou.

    Depuis près d'un an, le FMI aide les autorités à réformer l'administration fiscale. L'informatique, peu à peu généralisée, aide à croiser les informations et à chasser les fraudeurs. Le FMI s'assure aussi que la recapitalisation des banques, qui passe par leur nationalisation provisoire, « ne sera pas directement gérée par le gouvernement, qui pourrait être tenté d'y parachuter des politiques », explique un fonctionnaire européen. L'un de ces banquiers se montre cependant optimiste sur les chances du pays de se moderniser : « Les deux principaux partis politiques ont voté pour ces changements Ils ne reviendront pas en arrière. Et, s'ils le faisaient, la troïka est là pour les en dissuader ! »